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30 Septembre 2025 à 05:28:53
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Le Monde de L'Écriture » Salon littéraire » L'Atelier » Ateliers d’ecriture (Modérateur: Rémi) » Edmonde I, Edmonde II [Atelier d'écriture et commentaire - Phrases non verbales]

Auteur Sujet: Edmonde I, Edmonde II [Atelier d'écriture et commentaire - Phrases non verbales]  (Lu 2230 fois)

Hors ligne Rémi

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À la demande de Cendres, je propose deux petits textes avec 2 persos, un chat et des phrases non verbales.

Deux salles, deux ambiances  :mrgreen:

Merci de préciser en quoi les phrases non verbales fonctionnent, apportent quelque chose ou ne fonctionne pas (et pourquoi dans ce cas).

Bonne lecture !




Edmonde I

Edmonde ouvre le placard. Sort un biscuit, avale le biscuit. Dans sa petite cuisine, elle trace des huit en tournant autour de la table puis autour du tabouret. Le poste de radio crachote une vieille chanson. Quel connard ce type ! Sa voix pue la transpiration !
Edmonde passe à nouveau devant le placard. Un biscuit de plus au fond du gosier. Ses babines se retroussent. Miettes sur ses dents. Contente, la Edmonde : le vieux tocard a fini de brailler. Les infos commencent. La voix veloutée de la speakerine (oui, Edmonde utilise ce vieux mot, speakerine, et n’allez pas lui faire la remarque si vous ne voulez pas recevoir un coup bas), la voix de la speakerine, donc, résonne sur les carreaux de faïence de la cuisine. Des petits oiseaux, un chat, des paniers de fruits, des fleurs. Voilà ce que Robert avait choisi au siècle dernier. Quel goût de chiotte ! Mais Edmonde n’a jamais voulu retaper la cuisine. Pour quoi faire ? Pour plaire à qui ? Mieux vaut garder ses sous pour autre chose.
Elle croque un nouveau biscuit. La jolie voix raconte les morts de la semaine : en Afrique, à Gaza, en Birmanie. Quelle belle voix. Edmonde imagine une femme voluptueuse, brune, avec des épaules rondes, des hanches rondes, des mollets, des seins… Elle claque ses dents sur un nouveau biscuit, la salive à la bouche. Ses doigts osseux fouillent au fond du paquet. Plus rien. Va falloir retourner à l’épicerie. La guigne. La voix chaleureuse annonce les chiffres de l’inflation. Une mauvaise nouvelle sortant d’une bouche charnue… Edmonde se sent toute chose.



Edmonde II

Dix-neuf heures dix-neuf. Pluie battante. Un chat se glisse sous le platane, contourne la fontaine et disparaît. Je regarde le gris au-dessus de ma tête. Des gouttes dans les yeux, des larmes sans sel, sans angoisse. Un merle s’envole, un rouge-gorge me regarde en souriant, sautille dans une flaque. Petite boule terre de sienne qui traverse les feuilles dégoulinantes.
Lorsque je sors du village, le son lugubre de la cloche résonne, loin derrière. Un son englué dans l’eau. Un pastis trop tassé. Un alcool sans joie. Mes lèvres s’étirent, l’orage gronde, l’horizon rougeoie. Madeleine doit à présent remettre une bûche dans le feu, tisonner la braise et la cheminée crache des étincelles dans le ciel, des feux follets dansants parfumés à la résine de sous-bois.
Les frênes assoiffés ne laissent rien passer, sous leur frondaison la mousse encore sèche attend patiemment. Les chênes épais me saluent de leurs branches tortueuses. Brassées de feuilles ondulantes. La clairière s’ouvre, une biche me lance un long regard curieux puis inquiet. Dès qu’elle se met en mouvement, la harde détale. Longues pattes agiles. Bondissements de danseuses.
Derniers lacets du chemin, dernières mottes de boue accrochées à mes godillots, voici la cabane. La porte s’ouvre, les chiens s’élancent vers moi, toutes babines au vent. Ma dulcinée tient dans ses bras un petit paquet blanc de coton. Je m’approche. Gazouillis, sourires. Il a encore grandi. Edmonde embrasse ma barbe mouillée.
« Modifié: 28 Mai 2025 à 21:26:29 par Rémi »
Le paysage de mes jours semble se composer, comme les régions de montagne, de matériaux divers entassés pêle-mêle. J'y rencontre ma nature, déjà composite, formée en parties égales d'instinct et de culture. Çà et là, affleurent les granits de l'inévitable ; partout les éboulements du hasard. M.Your.

Hors ligne Robert-Henri D

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Bonsoir Rémi,

Et merci pour ce moment de détente.

Épisode I

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Quel connard ce type ! Ça voix pue la transpiration !

Joli ! (Petite coquille [Sa])

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Edmonde passe à nouveau devant le placard. Un biscuit de plus au fond du gosier. Ses babines se retroussent. Miettes sur ses dents. Contente, la Edmonde : le vieux tocard a fini de brailler.

Ah ben là tu m'as bien eu : j'ai cru un instant qu'Edmonde avait quatre pattes et des oreilles de cocker

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Voilà ce que Robert avait choisi au siècle dernier.

Ah non ! si je date bien du siècle dernier, en revanche, concernant ce décor, j'ai rien choisi du tout !

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Quel goût de chiotte !

Non mais didon !?

Épisode II

J'ai tant apprécié ta prose poétique que j'en ai repris deux fois !
« Les heures glissent comme des plumes légères, caressant mes souvenirs, là où chaque souffle devient un murmure d’éternité. »

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Hors ligne Rémi

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Merci Robert. Coquille corrigée.

@tous
Pas de commentaire sur les phrases non verbales ? C'est un peu le but de l'atelier ;)
Le paysage de mes jours semble se composer, comme les régions de montagne, de matériaux divers entassés pêle-mêle. J'y rencontre ma nature, déjà composite, formée en parties égales d'instinct et de culture. Çà et là, affleurent les granits de l'inévitable ; partout les éboulements du hasard. M.Your.

Hors ligne Robert-Henri D

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Ah ben, pour ce qui est de l'insertion de phrases non verbales, c'est plutôt réussi. Rien que dans dans le premier alinéa de l'épisode II, j'en ai décelé quatre !
« Les heures glissent comme des plumes légères, caressant mes souvenirs, là où chaque souffle devient un murmure d’éternité. »

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Hors ligne Aponiwa

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Hello Rémi,

L'exercice m'intrigue !

Edmonde I :

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Edmonde ouvre le placard. Sort un biscuit, avale le biscuit.
Je sais pas pourquoi j'ai du mal avec ce début.

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Quel connard ce type ! Sa voix pue la transpiration !
Faut faire le lien avec la chanson mais on passe à "Quel connard!", il manque pas un truc, ou c'est pure suggestion ?

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Un biscuit de plus au fond du gosier.
Là, ça marche, on voit bien le truc.

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Miettes sur ses dents.
Je saurai pas dire pourquoi mais ici, la phrase me gêne.

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Des petits oiseaux, un chat, des paniers de fruits, des fleurs.
OK ça décrit ce qu'elle voit. Mais comme le "Quel connard!", le lien est pas évident.

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Quel goût de chiotte !
Ce qu'elle pense.

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Pour quoi faire ? Pour plaire à qui ?
Les questions qu'elle se pose.

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Quelle belle voix.
On mettrait pas un point d'exclamation ici ?

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Plus rien. Va falloir retourner à l’épicerie. La guigne.
Là ça fonctionne mais je trouve ça un peu too much niveau rythme.

Edmonde II :

Je trouve les phrases non verbales beaucoup mieux intégrées dans ce deuxième texte. Ça rend un style télégraphique qui nous entraîne dans les pensées et les sentiments de l'auteur. Rudement bien utilisées les phrases non verbales, chapeau !
« Noone will know my name until it's on a stone » Eels, Lucky day in hell

Hors ligne Rémi

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Salut Apo !

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Je sais pas pourquoi j'ai du mal avec ce début.
Le début est effectivement très zarb.

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Faut faire le lien avec la chanson mais on passe à "Quel connard!", il manque pas un truc, ou c'est pure suggestion ?
oui, pure suggestion

La narration esteffectivement assez mécanique, bizarre et on a du mal à cerner le personnage (qui tourne en rond en faisant des 8 ! ).

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Miettes sur ses dents.
Je saurai pas dire pourquoi mais ici, la phrase me gêne.
Je crois que c'est parce que ce n'est ni un sentiment d'Edmonde, ni ce qu'elle ressent, ni ce qu'elle voit ou pense. Bref, ça fait une irruption bizarre du narrateur.

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On mettrait pas un point d'exclamation ici ?
ouaip

Je suis d'accord avec toi, dans Edmonde I, le style est très (trop ?) présent, ça fait pas très naturel et l'écrivain est très présent.

Edmonde II est plus fluide, plus naturel.

Merci pour la lecture et surtout le commentaire.

Tu as donc relevé que les phrases non verbales correspondent à ce qu'elle pense, ce qu'elle voit et donnent du rythme (parfois trop !). Je prendrai en compte pour la synthèse de l'atelier.

A+
Rémi
Le paysage de mes jours semble se composer, comme les régions de montagne, de matériaux divers entassés pêle-mêle. J'y rencontre ma nature, déjà composite, formée en parties égales d'instinct et de culture. Çà et là, affleurent les granits de l'inévitable ; partout les éboulements du hasard. M.Your.

Hors ligne Robert-Henri D

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Edmonde II est plus fluide, plus naturel.


Ah je veux ! Il est même bien ! du moins pour moi qui n'ai rien trouvé à jeter ! ( faut dire aussi que c'est pas vraiment mon truc puisque, par habitude, dans mes textes, je favorise plutôt l'inverse ! )
« Les heures glissent comme des plumes légères, caressant mes souvenirs, là où chaque souffle devient un murmure d’éternité. »

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Hors ligne Luna Psylle

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Salut !

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Quel connard ce type !
Sympa comme première approche d'une phrase nominale : l'insulte, expression de frustration ultime :mrgreen: !

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Des petits oiseaux, un chat, des paniers de fruits, des fleurs.
Elle me paraît un peu étrange, posée là, entre ses deux comparses à qui elle se raccrocherait pourtant bien.

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Quel goût de chiotte !
Eh beh !

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Pour quoi faire ? Pour plaire à qui ?
La question posée ainsi marche comme nominale ? ;)

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Quelle belle voix.
Deux paragraphes, deux ambiances :mrgreen:
Et sinon, la première après les insultes (et peut-être les questions) qui trouve grâce à ma lecture :-[ j'aurais peut-être joué avec la ponctuation, mettre de l'émotion, mais pas sûre que Edmonde ait besoin de plus de démonstration.

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Plus rien.
Ici, j'aime bien aussi. Les deux points auraient fonctionné, mais peut-être moins bien rythmé la surprise de la découverte. Je m'attends à une insulte... ne me déçois pas Edmonde :mrgreen: !

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Va falloir retourner à l’épicerie. La guigne.
Déçue :-¬?
Vu l'expressivité du personnage, je me serais attendu à plus d'explosion dans les nominales, qui dépeignent vraiment son caractère, je trouve.



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Dix-neuf heures dix-neuf. Pluie battante.
Pourquoi j'ai l'impression de lire une note en début d'une scène de film ?
La phrase nominale : note d'indication, comme au début d'une scène d'un film :-[

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Des gouttes dans les yeux, des larmes sans sel, sans angoisse.
Oh :coeur: là, au contraire du précédent texte, la phrase nominale doit rester séparée de ses deux voisines pour garder toute sa mélancolie.

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Un son englué dans l’eau. Un pastis trop tassé. Un alcool sans joie.
Un peu de mal avec le rythme de cette suite... mais comme j'arrive pas à l'expliquer autrement, je ne sais quoi en dire.

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Les frênes assoiffés ne laissent rien passer, sous leur frondaison la mousse encore sèche attend patiemment. Les chênes épais me saluent de leurs branches tortueuses. Brassées de feuilles ondulantes. La clairière s’ouvre, une biche me lance un long regard curieux puis inquiet. Dès qu’elle se met en mouvement, la harde détale. Longues pattes agiles. Bondissements de danseuses.
Ici, la première seule m'a fait hésiter, mais avec les deux de la fin, ça rythme le paragraphe.

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Derniers lacets du chemin, dernières mottes de boue accrochées à mes godillots, voici la cabane.
Je ne dirai rien :P

Et la toute dernière se fond bien dans la suite de phrases.

Une bonne soirée !

Hors ligne Rémi

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Mais !!! J'ai pas répondu par ici ?

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Sympa comme première approche d'une phrase nominale : l'insulte, expression de frustration ultime :mrgreen: !
ouais, hein  :mrgreen:

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La question posée ainsi marche comme nominale ? ;)
je n'en sais fichtrement rien !

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plus d'explosion dans les nominales, qui dépeignent vraiment son caractère, je trouve.
oui, les phrases non verbales donnent la façon de penser du perso, son ton aussi

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La phrase nominale : note d'indication, comme au début d'une scène d'un film :-[
mais oui, carrément !

Merci pour ton retour, je note que la ponctuation a un rôle important pour encadrer le non verbal.

Bon, je relis un peu toutes les participations et commentaires et j'essaye une synthèse ^^
Le paysage de mes jours semble se composer, comme les régions de montagne, de matériaux divers entassés pêle-mêle. J'y rencontre ma nature, déjà composite, formée en parties égales d'instinct et de culture. Çà et là, affleurent les granits de l'inévitable ; partout les éboulements du hasard. M.Your.

 


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