[Gros Lo]

Titre provisoire, proposez ! après tout ce texte ne m'appartient pas vraiment...

Voilà, c'est parti de pas grand-chose, et je pensais faire 300 mots... finalement, c'est de la taille d'un texte court normal. Soit !

une recommandation quand même : lisez-le "comme ça" il ne saurait avoir d'autre but

ah et aussi : si on n'est pas hobbsédé on peut pas comprendre je pense





La masure



La foule se pressait devant la masure. Le jour déclinait et les champs sombraient dans l’obscurité ; il venait de plus en plus de monde. Toutes se massaient devant les étroites fenêtres, guettant au carreau un mouvement dans la bâtisse. Elles semblaient avoir perdu espoir depuis longtemps.

La nuit écrasait la campagne. Des mégères commencèrent à grommeler ; on ne leur donnait aucun signe de vie, depuis trop longtemps. Beaucoup observaient sans comprendre le fin ruban de fumée qui s’échappait de la cheminée. « Eh quoi, pourquoi ne nous ouvre-t-elle pas ? marmonna la plus jeune.

— C’est qu’elle n’en a pas encor fini en vérité, murmura la doyenne avec un soupir résigné. Depuis trop de lunes nous attendons là quelque signe de sa part.

— Il faudrait envoyer une émissaire, reprit la première. Forçons-la à nous écouter, elle ne peut plus nous ignorer ainsi !

— Elle ne l’a que trop fait par le passé ! Toujours à promettre, toujours à feindre et à s’aveugler : c’en est fini de nous, la roue de la fortune ne s’est pas arrêtée. Il n’y a qu’à repartir !

— Et repartir où ? Nous a-t-elle bâti un hospice où couler des jours paisibles ? s’emporta une troisième. Rien, elle nous a formées là puis nous a laissé vagabonder dans le noir ! »

Une mégère sèche comme un cotret et plus remontée que les autres déchira le silence précaire. « Place, faites place ! brailla-t-elle en s’acheminant, bon gré mal gré, vers la porte de la masure. Je vais lui montrer, moi, de quel bois se chauffe Omy ! Elle a élu cette bougre de Far’ et rechigne devant nous autres ? Pour qui se prend-elle, crénom de nom, maugréait-elle en tambourinant à la porte. C’est mon tour ! »

*

Assise à ma table de travail, je m’acharne à continuer. Coûte que coûte. J’ai si mal… les mots dansent devant mes yeux et taper sur le clavier demande un effort extrême. Chaque lettre qui apparaît sur l’écran s’accompagne d’un coup bourdonnant quelque part sous mes tempes. La fatigue. Et cette deadline emploie une énergie injustifiée à courir à ma rencontre… Courage, plus qu’une page ou deux.

*

« Beugler de la sorte ne t’avancera à rien, ma fille. Elle ne t’entend probablement même pas. »

Comme pour réfuter les paroles apaisantes de la doyenne, le ruban de fumée qui s’élevait vers les étoiles s’atténua jusqu’à devenir aussi mince que du fil de fer puis s’étiola dans la brise.

« C’est mon tour ! C’est mon tour ! continuait de brailler la mégère. Ma valeur est bien plus grande que celle dont tu t’occupes à présent ! Laisse-moi entrer, tu n’as pas le droit de m’interdire ainsi l’accès ! Tu vas oublier pourquoi je suis née si tu tardes ainsi, tu n’as pas le droit de faire ça ! Je veux l’Italie !

— Quelle histoire… railla l’une des aïeules. Apprends les formules d’usage, veux-tu ? ce n’est pas “Italie’’ mais… »
Personne ne l’écoutait cependant. La doyenne prit la parole :

« Nous le savons toutes : il faut attendre que la nuit soit d’encre. Alors nous aurons notre chance à nouveau. Il suffit de quitter le plateau et de trouver l’accès vers la grotte. Ce n’est pas une fable pour conserver de l’espoir : souvenez-vous de So. Elle est descendue jusqu’à la rivière souterraine et s’est laissé porter jusqu’à ses rêves.

— C’était un rêve de chamane et de forêt, c’était de So dont elle avait alors rêvé ! se souvint l’une d’elles. Suivons l’exemple de So ! Trouvons la rivière et exprimons-nous par son biais ! »

Il y eut un mouvement de foule et les vociférations de la mégère entêtée se perdirent dans la vague d’espérance qui enflait. Il fallait trouver la rivière et pousser jusqu’aux songes : c’était le seul moyen de sortir de cette condition d’âmes en peine. Toutes partaient à travers champs rejoindre la vallée toute proche. La grotte, la rivière souterraine qui courait sous la masure. Les songes suintants.

Et dans la nuit qui fraîchissait, il n’y eut bientôt plus qu’elle, l’entêtée, pour gémir à la lune et regarder chanceler le ruban gris sortant de la cheminée. « Tu as pris Far’ il y a si longtemps ! continuait-elle tout bas. Et Liv’, tu l’as acceptée depuis tant d’années ! Ma grande sœur Liv’… s’il te plaît… » Elle ne braillait plus à présent, sanglotait doucement, agenouillée contre la porte close. « Je t’en prie, recueille-moi, j’ai peur d’errer toute seule à jamais… que ferai-je quand… » Elle eut un hoquet et son chuchotement se tarit ; il n’y eut bientôt plus que des pleurs silencieux pour caresser la nuit noire.

*

La migraine s’est presque dissipée. J’ai toujours un peu peur de les laisser vivre leur vie… ils sont si irresponsables. Mais je crois qu’ils ont compris certaines choses, maintenant. Laissons-les aller, me convaincs-je en posant le point final. Je reste là un moment, immobile devant l’écran grouillant de mots. La relecture sera l’affaire d’un autre jour… Je vais pour me lever ; tout est calme, la maison est endormie. Mais quelque chose me retient ; j’ouvre un nouveau document et commence à taper. H. O. M, E ; C…

*

La porte s’était entrebâillée et, l’espace d’un instant, la mégère éplorée n’osa pas relever la tête. Une douce chaleur provenait de l’intérieur et il semblait y régner une bienveillance attendrie, quelque sentiment attentionné qui fit battre son cœur. Elle n’eut pas besoin de pousser la porte davantage, elle si menue par rapport à Liv’ et aux autres histoires. Dans la masure, d’épaisses fragrances de sous-bois régnaient encore. Omy fit quelques pas et manqua trébucher. Çà et là, des livres étaient posés à terre. Comme ils semblaient sereins… Elle examina celui sur lequel elle avait buté. De hautes frondaisons creusaient la couverture et une odeur de fruits, de poudre et d’écorce emplit ses narines. So venait de faire le dernier voyage, pensa-t-elle en contemplant apaisée les centaines de feuilles de papier reliées. Ce ne fut qu’après avoir reposé le livre qu’elle perçut le douloureux silence qui saturait la maison.

« Je, je… m’appelle Omy… je suis la petite sœur de Liv’, bredouilla-t-elle enfin. Homecoming, la petite sœur de Liveship, et j’aimerais devenir comme elle, aller en Ita… en italique. J’aimerais… j’ai eu si peur, dit-elle d’une toute petite voix, j’ai eu si peur que tu ne m’écrives jamais… j’ai cru que tout sens allait m’abandonner… Je m’appelle Homecoming. » Elle avait cessé de trembler et n’avait plus d’accent vulgaire ou éraillé, comme si, à l’intérieur de la bâtisse, elle gagnait en élégance. Elle songea à ses consœurs et se surprit à penser qu’elles s’assimileraient peut-être à elle, si la rivière aux songes s’en mêlait. Elle se détendit un peu et prit ses aises dans la masure déserte. C’était son tour, semblait-il.





______

C'est parti de ça : "Robin : There’s a big queue of stories inside my head, and when I stop writing, they all pound on the walls and start shouting, “Is it my turn yet? I’m much better than the story you’re trying to write right now. If you don’t write me soon, I won’t make sense anymore!” "
et de ça...

[Verasoie]

Bizarre, bizarre (vous avez dit bizarre?)

Mais intéressant et amusant malgré tout c'est déroutant en fait. J'adore les allusions XD Far', Liv' etc. Que la nuit soit d'encre^^. Par contre j'ai pas compris la signification du ruban de fumée. Et je suis pas sûre que j'aurais compris la fin sans la citation. Bel hommage x)

[Gros Lo]

Heu ah non le ruban de fumée ne veut rien dire mdr, si ce n'est que si, enfin un peu, ça veut dire "rédaction en cours".

En fait je comptais vraiment faire une saynète avec des mégères braillardes qui tambourinaient à la porte et, quand ça s'ouvrait, s'engouffraient en glapissant : "j'suis Dragon Keeper et j'me pèle de froid dans les campagnes de non-inspiration, c'est pas trop tôt ! bon, on commence oui ou..."
mais finalement la mégère s'est attendrie, je crois.

[Kei]

Lol! J'ai toujours pas terminé le croquis promis, tu es décidement bien plus efficace que moi!
Hum, j'aurais juste imaginé certaines idées plus... agressives, mais sinon le concept est très bien rendu, et le tout très bien écrit

[Zacharielle]

J'ai pas toutes les clés pour saisir toutes les allusions, néanmoins c'est un texte assez amusant, et bien écrit 

[Kailiana]

Lol xD Véritable hobbsédé, vas 

J'me suis douté assez tôt d'un truc du genre (dès l'intervention de "je", en fait). Ou plus exactement je m'imaginais que les mégères étaient des personnages et non des histoires. Mais c'est mieux comme ça.

Bref, c'est marrant 

Par contre j'ai pas compris le coup de l'italique 

[Gros Lo]

Oh, en fait c'était pour dire que Homecoming n'est qu'un projet d'histoire qui ne sera peut-être jamais réalisé, alors que l'italique lui donne un titre de noblesse en quelque sorte, ça veut dire qu'elle va être écrite et que ce ne sera plus un nom mais un titre.

merci

[ernya]

J'avais pas commenté ???



le "encor", mouais, t'utilises pas ensuite cette écriture vieillote, alors, je sais pas si ça apporte grand chose ici, à la limite parce que c'est une doyenne, mais bon....


et sinon la dernière phrase...
mouis... ce qui me dérange c'est que ça fait un peu visite chez le médecin ou passage en caisse
 

donc j'ai relu et j'ai bien aimé même si je crois que j'ai pas tout saisi ( ce qui se rapporte à Hobb)
par contre j'avais cru que c'était des personnages et non des histoires, mais c'est plus original comme ça, tout compte fait
ah! et au début j'ai cru que c'étaient des personnages déjà créés (enfin, qui avaient déjà été intégrés dans une  histoire) mais en fait non, donc ça aussi, c'est une bonne idée

par contre, le fil de fumée, c'est quoi ? j'aurais pensé à l'inspiration, mais ça n'a pas l'air d'être ça


sinon, je trouve qu'on peut comprendre sans la citation, mais bon, c'est super subjectif, c'est plus parce que c'est toi, que je comprends que ça parle de ça, bref.


donc pour résumé, j'ai eu des "horizons d'attente" complètement faux, mais c'est pas grave, l'idée est là, je l'aime beaucoup, j'aime bien l'écriture aussi et puis bon, ben il me reste plus qu'à combler les lacunes

[Gros Lo]

[Heu ah non le ruban de fumée ne veut rien dire  mdr, si ce n'est que si, enfin un peu, ça veut dire "rédaction en cours".]


oui donc l'inspiration aussi, d'une certaine manière.

merci d'avoir relu du coup

et merci aux autres, j'avais pas vu les commentaires... pour "encor" oui c'est juste pour le fun, comme tout le texte en fait xD
voilà voilà...

[Leia Tortoise]

Pris dans le contexte, j'aime beaucoup! Une chouette idée bie développée... Et ce n'est pas plus mal que ça soit plutôt court: c'est juste la longueur qu'il faut!

[soraSKT]

Bon alors, autant j'ai trouvé ça sympa et "weird" à souhait, autant pour moi qui suis jeune padawan fraichement débarqué sur le forum, niveau références, je suis complètement largué.

Enfin bon, ca n'empêche pas d'apprécier, mème si j'avoue avoir préférer que ce soit plus long, c'était un petit Teasing là 

[Matt]

J'ai pas du comprendre le texte car je n'ai pas du tout souri une seconde.

Sinon les mégères, au départ je me suis dit que tu allais nous parler des trois moires, brrrr... perdu.

Un texte bien écrit mais hélas je n'ai rien compris.

[Rain]

En fait, je me demande depuis que j'ai lu : un quelconque rapport entre ta So et celle des Rivages ? 

Pourquoi Liveship plutôt qu'un autre ? Question d'esthétique ? Parce que ç'aurait pu être Farseer (ah mais non, il y est), ou Soldier, ou Tawny, ou Dragon... A moins que tu ne sois en train de le relire ? Bref.

Homecoming, ça me dit rien. C'est aussi un projet de Robin, ou c'est de toi, ça ?

[Ambrena]

Homecoming, c'est Retour au Pays, Rain  Et So, ça doit être SC, non?

Je ommente rarement, et je m'en excuse d'avance, mais ce texte-ci me plaît vraiment beaucoup, donc je vais faire un effort. C'est sans doute dû au fait que je connaisse toutes les références citées -et même les références qui t'ont données l'idée de ce texte, avant même que tu les aies citées, c'est dire!

C'est très hobbien, bien sûr, mais aussi très poétique. J'apprécie la métaphore filée et la manière dont tu campes les histoires-personnages. Et puis j'ai l'impression qu'on retrouve aussi quelque chose de Robin elle-même, de sa douceur humble, de son courage, de son talent dans cette nouvelle.

[sahiqa]

Pour du texte de hobbien c'est du texte de hobbien !
J'ai trouvé ça drôle, et puis attendrissant.
Je suis d'accord avec Ambrena sur le fait que l'on retrouve quelque chose de Robin.
J'avoue que je n'ai compris que lorsque Homecoming donne son nom en entier, mais du coup ça donne très envie de relire, de trouver tout les noms pour voir l'histoire qui correspond. 
Au niveau forme je ne vois pas ce que je pourrais te reprocher, en tout cas il n'y a rien qui entrave réellement la lecture.  Pour le titre, en fait j'aime bien celui ci. Sinon tu aurais pu titrer "Nuit d'encre", mais c'est peut être trop révélateur.