[Jon Ho]

Il était une fois, par une nuit sans lune...

Posée bien au centre de mon pupitre d'écriture, la feuille blanche me narguait de son insupportable virginité. Mon stylo préféré ne semblait pas décidé à cracher des mots, à me libérer de cette constipation littéraire qui commençait à sérieusement me courir sur le haricot. L'embouteillage dans ma tête ressemblait au retour de vacances d'une famille de classe moyenne, dégoûtée d'avoir à se taper une demi journée de bouchons pour retrouver le train train quotidien. J'ai décapuchonné mon bic pour l'affranchir de ses chaînes, tourné la feuille dans le sens de la largeur pour espérer un sens figuré plus indulgent. J'ai tenté plusieurs choses absolument inutiles pour décoincer le mécanisme enroué, en vain.
Après avoir avalé mon sixième café, j'ai commencé à parcourir la pièce minuscule dans sa longueur, ses deux diagonales, puis sa hauteur en prenant appui sur les meubles et les étagères. J’espérais que l'altitude m’apporterait l'oxygène nécessaire à un envol d'idées, un lâché d'oiseaux rares et merveilleux. De la haut, un épais brouillard londonien enveloppait mon pupitre qui disparaissait sous une vilaine grimace. Même sans cordes vocales, je l'entendais se foutre de ma gueule. Je suis redescendu et j'ai attrapé mon stylo pour tenter quelque chose, où plutôt n'importe quoi.

Laissez-moi vous raconter cette histoire...
Ce que je tiens tant à vous faire lire dépasse très certainement le domaine du concevable...

Tout ce qui me venait était un genre de prémâché plein de clichés, de stéréotypes avec des personnages aussi grossiers qu'inintéressants. Les villes avaient des noms absurdes et leur description n'aurait pas inspiré le lecteur le plus courageux sur plus de 2 pages. J'ai allumé une clope comme on allume un bûcher, mon lit m'attendait. Des draps allaient s'ouvrir un brasier pour que je puisse disparaître entre les flammes. J'ai griffonné un bonhomme sans tête sur un des coins de la feuille, moche et j'ai essayé une dernière fois.

La fille avait deux énormes grains de beauté à la place des yeux. Sous ce voile esthétique, elle ne percevait ni la violence du monde ni sa haine assassine.

Au moment où les syllabes se mêlaient les unes aux autres, je me rendais compte que rien de palpitant ne pointait le bout de son encre. Une auto-critique instantanée et fulgurante. Je n'ai pas insisté plus longtemps, j'ai rempli la gamelle du chien et suis parti me coucher. Dix minutes après m'être confortablement abandonné au molleton du matelas, une idée foudroyante m'a éclaté la partie droite du cerveau. Je me suis levé en sursaut et, à moitié à poil, j'ai couru jusqu'à mon pupitre. Mon sourire s'est dissipé juste après que l'idée se soit envolée. J'air regardé en l'air pour voir s'il m'était possible de la choper du bout des bras. A part des volutes de fumée froide, je n'ai brassé que de l'air sale.

Je suis retourné me coucher et le même cirque s'est répété une bonne dizaine de fois avant que ma logique implacable ne me suggère d'écrire directement de mon lit.
j'ai courbé l'encre de l'échine de mon stylo jusque tard dans la nuit.

Le lendemain, dans mon jardin, j'ai fais un joli feu avec mon pupitre.

Il était une fois un gars qui aime tellement tapoter sur les touches de son clavier qu'il se rend même plus compte que ce qu'il écrit n'est absolument pas intéressant...














Voilà, vous vouliez de la merde, je crois que là on y est 

 

[Sixte]

Salut !

J'ai décapuchonné mon bic pour l'affranchir de ses chaînes, tourné la feuille dans le sens de la largeur pour espérer un sens figuré plus indulgent. J'ai tenté plusieurs choses absolument inutiles pour décoincer le mécanisme enroué, en vain.

Je saurais pas dire pourquoi, mais le passé-composé m'a surprise. Bizarre, je sais, mais je m'attendais à un autre temps.
Sinon, j'aime bien l'idée de tourner la feuille.
Moins le "plusieurs choses". Précise les choses, je veux savoir ! (Montre leeees moiiii ces étrangers qui seraient fait comme moiiiii !)

2 pages.

deux pages  J'ai le vague souvenir d'avoir déjà débattu de ça avec toi, mais là, c'est pas un code de carte bancaire, donc ça compte pas.

J'air regardé en l'air pour voir s'il m'était possible de la choper du bout des bras. A part des volutes de fumée froide, je n'ai brassé que de l'air sale

"J'aiR regardé"
x2 air
Et j'aurais mis "à bout de bras", ou "à mains nues", parce que (je sais, c'est un scoop  ) au bout des bras, boum, tu tombes sur les mains.
Sinon, je kiffe cette phrase 

fois avant que ma logique implacable ne me suggère d'écrire directement de mon lit.

Plein d'initiative, dis-moi 

j'ai courbé l'encre de l'échine de mon stylo jusque tard dans la nuit.

Manque la majuscule.
Et j'aime aussi.

Voilà, vous vouliez de la merde, je crois que là on y est 

Bon, ben, non, pas d'accord. 
J'aime bien ce texte, j'aime bien les phrases barrées, j'aime bien le personnage de l'auteur qui se tape la tête contre les murs à force de manque d'inspiration. Je préfère quand tes personnages se battent avec des idées  (a fortiori avec les leurs) qu'avec des gens. Amy-Lee est cool aussi, c'est vrai, mais parfois trop sûre d'elle à mon goût dans sa critique sociale, alors que je trouve ce texte plus marrant.
Voilà, donc non, en ce qui me concerne, on n'y est pas encore.  "Doit persévérer dans ses efforts."

Bye !

EDIT : ah, oui, j'oubliais : le titre est aaarchi bien !

[Penruet]

Ah, ah, ah...
Un peu moins percutant que tes autres textes, si les images du début son assez justes, elles manquent de force comparé à ce à quoi tu habitues tes lecteurs
Mais dans l'ensemble, le problème de l'écrivain face à sa feuille blanche et à son inspiration aussi coopérative qu'un [insérez ici un modèle de résistance à l'interrogation qui vous tient à coeur] est bien traité...
Je dirais pas que c'est de la merde, mais chacun  a son échelle de référence...

[Jon Ho]

Je me rappelle ce débat sur l'écriture des chiffres.
Là je pense que t'as raison.
Je corrige les fautes. Merci.

Penruet : c'est de la merde relative

Merci pour votre passage.

[Kerena]

En parlant d'écrivains en manque d'inspi et de textes de merde.

Le point commun entre un écrivain et une personne constipée ?

Désolé, vous n'êtes pas autorisé à afficher le contenu du spoiler.

 


[/flood]

[Jon Ho]

Mdrrr Kéréna.

[Sixte]

Là je pense que t'as raison.

Ah. J'aime cette phrase. 

[El_ChiCo]

Hello Jon,


Quelques remarques en vrac, mais dans l'ensemble, je n'ai pas accordé une très grande attention à la forme.

pour retrouver le train train quotidien.

D'après mon dictionnaire, c'est train-train ou traintrain.

J'ai griffonné un bonhomme sans tête sur un des coins de la feuille, moche et j'ai essayé une dernière fois.

J'aurais mis une virgule après moche

J'air regardé en l'air

J'ai



C'est marrant de voir comme il est difficile de faire un texte qui parle de la page blanche…
Puisque toi même tu le présente comme une merde…


À une prochaine lecture

[Baptiste]

Salut
D'accord avec Sixte, le titre est aaarchi bien. J'étais déjà passé le lire une fois, je savais pas trop quoi en penser, je reviens, je relis et je me dis que quand même c'est très chouette. Je pense que tu peux virer la dernière phrase barré, je sais pas si ça apporte grand chose. L'image du mec qui brûle son pupitre ça me suffit, t'es pas obligé d'en rajouter.
Voilà, juste un petit commentaire pour dire que j'ai bien aimé
Au plaisir

[natoufranc]

Léger mais si bon. J'ai ris en me voyant vivre ce texte de mes tripes et ce plusieurs fois au cours de l'année. Mais je crois que je n'aurais su aussi bien le décrire. Vraiment génial. Le seul truc que j'aurais retiré est celui-ci: Je n'ai pas insisté plus longtemps, j'ai rempli la gamelle du chien et suis parti me coucher. J'aurais seulement écris : Je n'ai pas insisté plus longtemps et suis parti me coucher. Sans plu

[Jon Ho]

La gamelle du chien c'était pour l'anecdote.
Merci pour ta lecture.

[LaetitiaG]

Salut!

En ce qui concerne le terme de constipation, je ne l'aime pas spécialement. Personnellement j'aurai choisi autre chose.
Le passé composé à moi aussi m'a surprise! je ne suis pas très à l'aise avec ce temps quand je lie un texte mais c'est ton choix!
" des draps allaient s'ouvrir un brasier " : elle est bizarre cette phrase, " ouvrir " plutôt? ou alors je suis inculte

Honnêtement, je trouve que c'est vraiment pas mal écrit! les premières lignes, j'ai eu du mal à accrocher mais ensuite sa m'a plutôt intéressé et je l'ai lu d'un trait ( texte court normal ). Il y a t-il une suite? je suppose que non... pas mal l'écrivain pensant faire de la merde! moi qui suit débutante en la matière, si j'arrive à écrire comme toi je serai déjà très contente 

[natoufranc]

Tu vois moi le mot constipation m'a tellement plu c'est plus que représentatif jadore!

[Jon Ho]

Non, il n'y a pas de suite.
Ça s'inscrit dans un ensemble de textes sur la difficulté parfois à sortir les mots qui nous bousculent le cerveau.
Merci pour votre passage.

[ernya]

C'est "après que + indicatif" 

Pas convaincue par celui-là, en même temps, le sujet de l'écrivain amateur qui parle d'écriture... voilà quoi.
Je pensais que t'aurais quand même un peu plus dynamité le sujet. 


Pour le recueil, vaut mieux du vrai Jon Ho