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18 avril 2024 à 03:07:53
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Le Monde de L'Écriture » Coin écriture » Poésie (Modérateur: Claudius) » Puisque j’ai ordre de partir point n’est besoin de me retenir (1 et 2)

Auteur Sujet: Puisque j’ai ordre de partir point n’est besoin de me retenir (1 et 2)  (Lu 913 fois)

Hors ligne Guy Lafosse

  • Aède
  • Messages: 213
Puisque j’ai ordre de partir
point n’est besoin de me retenir

(1 à 8)

Me refusant clairement de faire œuvre de géomètre,
J’échappe à l’ennui qui est le comptage des mètres.

Pourquoi élirais-je le vouloir Virgilien et les mœurs d’antan,
En sachant que je serai le plus médiocre de ses représentants.

Pour que, calculés ne soient pas mes écrits sur papier,
Il ne me reste plus qu’à me retirer sur la pointe des pieds.

A peine ai-je terminé de déblatérer et de gloussoté,
Que quelque chose d’inhabituelle me fis sursauter.

Disons qu’un étrange bruit mettant mes sens en éveille,
M’engagea à ne pas me montrer dans un simple appareil.

Évaluant que le tumulte entendu était distant d’un bon kilomètre,
Ce n’est qu’après avoir fermé mes portes mais aussi mes fenêtres,

Qu’une seconde clameur me fit penser à tout, sauf à la bagatelle,
Entendu que la nuit ne sait même pas ce qu’est un porte-jarretelle.

Puis, imaginant qu’un pauvret s’est noyé dans du jus de groseille,
Je pense qu’indécent serait de blâmer l’esprit de la dive bouteille.

Dans la foulée, assuré que personne n’était entré dans mon humble logis,
Je remis à plus tard l’idée d’attenter un procès au fléau de l’alcoologie.

Cela étant dit, reste qu’avant qu’à la peur panique je ne cède,
J’estimais possible qu’un usagé blessé attendait que je l’aide.

Peu après, m’entendant appeler par mon nom au pied de mon porche,
Pour voir qui me demandait je me munis de ma vielle lampe torche.

C’est à cet instant précis qu’une étrange clameur déchira la nuit,
Et qu’une femme élégante me dit être responsable de ces bruits.

Aveu fait, je saluais l’inconnue visiblement sur la défensive,
Qui, d’une main hésitante, me tendit une inquiétante missive.

Redoutant plus que tout être victime d’une infâme imposture,
N’observant aucune blessure, j’exclus l’accident de voiture.

Naturellement curieux de savoir ce que disait cette lettre,
J’appris qu’elle révélait le lot des méfaits que l’on me prête :

- Monsieur Lafosse, entonna l’estafette, je me nomme Ulmine,
Je suis mandatée pour vous chercher sans pour cela resté anonyme.

Faites-moi la grâce de croire que si dans votre vie, je fais irruption,
C’est parce qu’en haut, le Comité des peines est friand de questions.

Si je vous engage à vite faire d’émouvants adieux à votre vie inféconde,
C’est parce qu’avant l’heure, rare est celui qui peut voir l’autre monde.

- Madame, laissez-moi vous dire que vous ne manquez pas de toupet !
Me pensez-vous vraiment heureux de faire seul mon ultime souper ?

- Enfin Monsieur, me faut-il vous rappelez la chance que vous avez,
Ne suis-je pas une preuve vivante ! Ai-je l’air d’une femme dépravée ?

Libérée de la vie, sans même fêter mes vingt deux années,
Cela fait 2623 ans qu’à ne plus paraître j’ai été condamnée.

Épouse d’un scieur de long qui faisait aussi le tailleur de pierre,                             
Je suis celle qui aura l’honneur de vous fermer les paupières…

Guy, c’est parce que je vous trouve extrêmement sympathique,
Que je vous dis que vous serez bien servi puisque je tiens la boutique.

Alors, révélant que cette façon de faire n’est pas inédite,
Pourquoi ne le ferais-pas, puisque la messe est dite !

Moi, en m’installant à dix-sept bouts de nez du canal du Midi,
Je n’aurais jamais pensé que ma flamme s’éteindrait un lundi.

Rendant grâce à mes rêves, pour le bonheur et les plaisirs donnés,
Les ayants tant aimés, voilà-t’y pas que mon heure vient de sonner…

Cela avoué, ayant acquis la certitude d’être dans une impasse,
En quelle langue dois-je dire que ce qui m’arrive me dépasse.

Ruminant ce qui fut dit, conscient que demain je ne verrais pas le jour,
Perdu pour perdu, je me demande si je ne devrais pas lui parler d’amour.

Seulement, n’appréciant aucunement les manières de cette dernière,
Je décidais de lui parler de la plus incivile et cavalière des manières :

- Madame, si je ne tenais pas à passer pour un paltoquet malicieux, 
Je vous dirais qu’indignant est votre venue dans ce paisible lieu.

Car, en m’obligeant d’aller dans votre sinistre et infâme coin,
Pouvez-vous comprendre que je n’en éprouve point le besoin ?

Fin du 1 à 8.

 





Puisque j’ai ordre de partir
point n’est besoin de me retenir


(1 à 2)

Ce disant, pour ne pas obliger dame Ulmine à trop bavarder,
Je pense qu’avantageux serait d’éviter de lui trop demander.

Sachant qu’il existe des souvenirs qui ont besoin d’être ravivés
Je me dis qu’utile serais de la prier de vouloir bien les réactiver. 

- Madame, si le poids du passé est une plaie indélébile et privée,
Ne mot dire de vos hivers n’est-ce pas taire ce qui vous est arrivé ?

- Monsieur, quand bien même nourrirais-je quelques rancœurs,
Je ne suis pas venue pour vous parler de mes peines de cœur…

- Certes, mais dites-moi au moins la vraie raison de votre venue !
Car, en ce lieu et à cette heure je ne reçois que des têtes connues.

- Comprenant bien qu’à vos yeux, je suis tout sauf la bienvenue,
Je serais plus loquace si à me bien recevoir vous aviez convenu.

Guy, si vous n’aviez pas commis autant de délits avec substitution,
Le Comité des peines ne requerrait pas votre immédiate comparution.

Il va de soi qu’à aller où vous savez, je n’aurais pas à vous conduire,
Si, en haut lieu, je n’avais pas reçu l’ordre de vous empêcher de nuire…

En d’autres mots, puisque sur terre, vous ne devez plus sévir,
Si je m’appelais Lafosse je ferai profil bas en quittant le navire.

Comprenez-vous que si vous n’étiez pas l’un de ces voleurs sans souche,
Évident que vous ne seriez pas obligé de tirer vos dernières cartouches…

J’espère que vous avez une honorable façon de voir les choses,
Puisque je ne réponds qu’aux seules questions que je ne me pose.

Ajoutant que mes modestes avoirs étaient tous sous séquestre
Et que, finalement son rôle n’était que celui d’un vaguemestre.

Ce cinglant avertit, tout prévenant qu’il soit, était sans équivoque,
Aussi, ce n’est pas la faute du hasard si le Comité me convoque…

Sans solution, après une courte réflexion, je me dis qu’à tout prendre,
Là, ou l’on doit m’attendre je n’avais d’autres choix que de m’y rendre.

Reste que, sans lutte et sans médire, ne voulant rien détruire,
Quitte à mal finir, je dis à Ulmine mon désir de ne la pas fuir.

Mais, songeant à tous les iceux qui s’effaçaient pour me laisser passer,
Je lui expliquais qu’à être toujours le premier j’en avais plus qu’assez.

Puis, revenant sur leur fol désir de me prendre ce qui me reste de vie,
Je dis qu’inique est de priver un jeunet de ce qui, en lui, n’a jamais servi.

Par contre, je n’ignore pas que lorsqu’à mes oreilles le glas sonnera,
Et que la grande aiguille qui mesure le temps sur mon nom s’arrêtera,

Cela étant dit, puisque le plus funeste de mes jours est finalement arrivé,
Si, je n’en parle pas, cela veut dire qu'à en reparler je ne suis pas motivé.
             
Accusé pour rien par la justice qui m’accuse de tenter de lui échapper,
J’apprends qu’auteur d’un curieux délit elle se flatte de m’avoir attrapé.

Assuré qu’aux justes sentences de dame nature nous devons tous obéir,
Lorsqu’elle nous ordonne de partir, inutile de crier ou de faire le martyr.

Dam, ne serait-il pas une invite gratuite à nous mieux conduire,
Car, comment expliquer leur désir affiché de me tanner le cuir…

Est-ce besoin d’ajouter qu’un humain qui, l’ailleurs rejoint,
N’apprécie nullement que l’on lui impose de l’aller plus loin…

Appelé à me vite préparer pour l’y faire mon ultime voyage,
Je n’hésite pas à dire qu’il me coûte de partir à mon âge.

Ne picorant que des plaisirs sains avant que ce drame ne m’arrive,
Comment oublier les bienfaits que j’ai droit et que l’on me prive !

Avant de partir, bercer par l’extasiant craquètements d’un trio de cigales,
En ne rêvassant que ce qui est agréable, je dégustais un bonheur sans égal.

Dépité, ne sachant pas si condamnable est ce que l’on me reproche,
J’avoue ne pas savoir sur quelle branche il faut que je m’accroche.

Confronté à pareille injustice n’est-ce pas réconfortant de penser,
Qu’en ces temps avancés, une autre vie va peut-être commencée…

Dans l’avenir et pour ce qui retourne de notre belle et menacée planète,
Pour agir vraiment, je souhaite que les jeunes s’emparent des manettes

Car, si l’on baisse la garde, les vendeurs de sulfate, vecteurs de pleurs,
Bientôt nous dirons que c’est dans le glyphosate que poussent les fleurs.

Fin du 1 à 2.
Traverser  le temps en oubliant ses futiles besoins,
C’est vivre beaucoup mieux avec beaucoup moins.

Hors ligne ortoolski

  • Aède
  • Messages: 241
Re : Puisque j’ai ordre de partir point n’est besoin de me retenir (1 et 2)
« Réponse #1 le: 07 septembre 2019 à 10:43:19 »
Slt Guy Lafosse!

On peux dire que tu n'es pas avare en mot!

Je me suis bien marré pendant la lecture de ton poème!

"Car, si l’on baisse la garde, les vendeurs de sulfate, vecteurs de pleurs,
Bientôt nous dirons que c’est dans le glyphosate que poussent les fleurs."

Très joli celui-ci!

Hors ligne Guy Lafosse

  • Aède
  • Messages: 213
Re : Puisque j’ai ordre de partir point n’est besoin de me retenir (1 et 2)
« Réponse #2 le: 07 septembre 2019 à 14:42:48 »
Bien à Ortoolski,
Venant de ta part, ce que tu viens d’écrire me va droit au cœur.                                               
Ai-je besoin de te dire pourquoi je garde ton poème ?                                                   
Ta fougue ton humour et ta manière d’écrire force le respect.                                                                             

« Le soleil s'est levé derrière le toit qui fume                                                                 
Les oiseaux ont chanté, les nuages ont blanchi.                                                               
 J'ai enfoncé mes yeux dans l'oreiller de plume                                                                       
Et mes poings ont battu l'édredon avachi."                                                                         
Vos gueules!", ai-je crié aux bruyants volatiles,                                                               
Et "Eteins la lumière!" à l'astre du matin "                                                                   
Je veux dormir encore, ramassis d'imbéciles,                                                                   
Et toi, sacré flambeur, cesse d'être importun!"                                                           
Non mais, ça va pas bien, tas d'oiseaux de malheur?                                                       
Cessez immédiatement tous ces cris incongrus                                                           
 Car faire autant de bruit et ce, d'aussi bonne heure,                                                   
 Est passible de mort, ou pire, c'est bien connu!                                                                   
Et quant à toi, Phoebus, vraiment tu exagères!                                                             
 Tu agaces mon œil, Ô vieil enquiquineur.                                                                         
Je ne supporte plus tes mauvaises manières.                                                                 
Je te le dis tout net: Va te faire voir ailleurs!                                                                   
Le soleil s'est caché: il m'avait entendu.                                                                             
De la même manière, ayant fermé leur bec,                                                                     
Sans doute un peu vexés, les oiseaux se sont tus.                                                                   
 Le calme est revenu et le sommeil avec.                                                                       
 Cette histoire n'a pour but que de vous démontrer                                                     
Qu'il est possible de dormir jusqu'à onze heures                                                         
 A la condition bien sûr de s'adresser                                                                                 
Avec fermeté à tous les emmerdeurs. »                                                                                                                 
Ortoolski
Traverser  le temps en oubliant ses futiles besoins,
C’est vivre beaucoup mieux avec beaucoup moins.

 


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