Le Monde de L'Écriture – Forum d'entraide littéraire

12 décembre 2024 à 05:27:05
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Auteur Sujet: Comment mieux écrire  (Lu 390 fois)

Hors ligne Arsinor

  • Aède
  • Messages: 226
Comment mieux écrire
« le: 17 novembre 2024 à 10:15:19 »
Comment devenir un meilleur écrivain ? Sans chercher forcément le succès et un lectorat de taille satisfaisante, comment, après 150 textes terminés, 50 esquissés, écrire mieux au sens le plus large du terme ?
Qu'est-ce qu'écrire mieux ? Plus différencié ? Plus approfondi, dans son propre style ?
Travailler davantage, en durée horaire par jour ?
Lire davantage ? mieux ? Faire des fiches de lecture comme un étudiant pour mieux comprendre les classiques ?
Reprendre toutes les critiques qui nous ont été adressées ?
Se replier sur soi au contraire et chercher à faire "plus de Arsinor" (en l'occurrence) ?
Vivre ? Faire un séjour de 10 ans en Inde ? Faire quelque chose de spécial ?
Ecrire plus ? 100 pages par mois au lieu de 10 ? Réécrire ce qui a déjà été fait ?

Hors ligne Cendres

  • Comète Versifiante
  • Messages: 4 330
Re : Comment mieux écrire
« Réponse #1 le: 17 novembre 2024 à 11:08:22 »
Comment mieux écrire, tu veux dire comment faire de plus belle phrase ou d'avoir plus (+) de lecteurs interréssé par ton récit ?
Pour ma petite expérience, lire me permet de voir des autres façons d'écrire et d'enrichir mes capacités à l'écriture.

Par exemple pour le dernier Mammouth, j'ai trouvé amusant de devoir créer un texte selon un thème donné. Ça permet de faire travailler sa tête et d'imaginer des choses.
Je pense que s'essayer à diverses formes d'écriture enrichie ta façon d'écrire, tout comme lire des auteurs différents.

Je ne pense pas que se replier sur soi est une solution. Je pense qu'il faut savoir évoluer, se remettre en question et rester humble.

S'obliger à écrire dans un mois 100 pages, qui seront médiocres, je pense que c'est moins profitables que 10 pages, ou moins, recherchés et travaillé. Écrire doit être un plaisir, pas une contrainte et une obligation.
C'est comme tout, si tu te forces, ça sera moins bien fait que si tu le fais avec plaisir, ou pour faire plaisir ;)

Hors ligne OConnorMcPogues

  • Buvard
  • Messages: 4
Re : Comment mieux écrire
« Réponse #2 le: 02 décembre 2024 à 13:30:35 »
Bonjour à tous,

C'est un vaste sujet, comme beaucoup de gens de ce forum, j'aime y réfléchir et ta question me permet de mettre à plat et d'en discuter avec vous, merci d'avoir posé la question. Autant commencer par quelques lieux communs:
- Un cap est important, les grands auteurs et autrices peuvent fondre un motif, une obsession, un pattern qu'il ou elle observe. Par exemple, hors littérature, Robert Bresson aura passé toute sa carrière cinématographique a essayé de répondre à une question: "Dieu existe t-il?" et ce par la mise en scène d'évènements aussi divers que la vie d'un pickpocket ou bien d'un résistant s'évadant de prison. Rares sont les bateaux à partir sans cap du port.
- Comme tu l'as précisé, la recherche d'un lectorat cible s'apparente plus à du marketing qu'à de la littérature, ça n'est pas le propos.
- N'aies pas peur de te comparer aux grandes personnes du monde littéraire, la confiance en soi est cruciale, ce sont des êtres humains comme nous tous, dignes d'être comparés, critiquées et égalées.

C'est une théorie, rien de très sûr, mais je pense que, concernant la méthode, il vaut mieux se référer à des écrivains contemporains. Le rapport à l'art était très différent avant l'instauration de la République (les artistes étaient souvent de cour, ne se souciant pas ou peu des contraintes matérielles, bénéficiant d'éducations particulièrement pointues). Les artistes post-1870 ressemblent plus à nous, soumis aux besoins à pourvoir et à la dure réalité. Ainsi, je puise mes références chez eux et elles.

Flannery O'Connor est l'autrice que je dépouille théoriquement (j'ai pris son nom dans mon pseudo), son essai "L'Art de la Nouvelle" est parmi les plus édifiants sur le sujet, dénonçant le cynisme dont certains font preuve pour vendre des formations sur le sujet. Elle résume son art à une phrase:
"Montrer ce que certains seront capables de faire, et feront en dépit de tout".

MONTRER: et pas dire, la nouvelle et la littérature sont créatrices d'images. Beaucoup s'épanchent dans l'étalement de sentiments, sans jamais montrer quoi que ce soit, ce qui empêche toute identification, si l'on ne voit pas, on oublie.

CERTAINS: Personnages du commun/hors-du-commun.

CAPABLES: Nous n'avons pas tous les mêmes capacités, c'est ce qui créé de la personnalité aux gens: ce vers quoi l'on tend, les chemins empruntés.

FAIRE/FERONT: et pas dire, toujours. Les actions sont un puit sans fond d'originalité, de trouvailles, l'absurdité se cache partout autour de nous, ce qui est logique pour nous ne l'est pas pour les autres. La rencontre de toutes ces individualités, c'est le terreau le plus fertile pour l'écrivain.

DEPIT: Péripéties, hasards ou divin... Ce qui se met en travers, prétexte à toujours plus de situation. Tu confrontes ton personnage à son environnement et interprètes ses actions/réactions.

TOUT: L'imagination, le monde connu et ton jeu avec.

En résumé, voir, regarder, observer autour de toi, le repli sur toi-même est nécessaire mais pas une fin en soi. C'est un peu méchant dis comme ça, mais je ne pense pas qu'il y ait assez en chacun de nous pour remplir un roman. Je pense qu'il faut mettre de soi-même avec parcimonie dans une œuvre: L'autre est tellement plus intéressant. Après, la contemplation de soi a créée beaucoup de genres littéraires fascinants, c'est pourquoi cet avis n'est vraiment, mais alors vraiment pas, parole d'évangile.

L'Inde n'est pas nécessaire non plus, surtout que la Creuse suffirait déjà assez à remplir une bibliothèque, pour un coût écologique bien moindre.

Je suis en total accord avec Cendres également, sur l'intérêt à se plier à des exercices qui stimulent la créativité, sur la modestie nécessaire et le plaisir d'écrire qui ne doit jamais disparaître au profit de quoi que ce soit.
Les fiches de lecture, c'est intéressant, mais ça ne doit pas te contraindre.
Au final, la méthode de l'écrivain est similaire à celle de n'importe quel artisan: du menuisier, de la cordonnière, du ferrailleur ou de la couturière. C'est une répétition telle, une application telle, qu'elle requiert des heures et des heures de pratique, se fignolant au fil du temps comme la roche s'érode au contact de la mer. Tu n'écriras pas mieux demain mais dans 10 ans, tu sauras que tu as progressé.
La discussion autour de ces sujets nourrit également.
Quelle est ta méthode?

J'espère ne pas avoir été trop long et vous souhaite à tous une bonne journée.


Hors ligne Safrande

  • Troubadour
  • Messages: 388
Re : Comment mieux écrire
« Réponse #3 le: 02 décembre 2024 à 16:41:46 »
Trop stylé tout ce que tu dis Oconnor, j'te rejoins sur pleins de sujets, notamment le "pattern", l'obsession, ou sur cette nécessité de se faire confiance, de désacraliser ce qu'on appelle les "grands" écrivains, d'éviter de se référer, pour le travail, sous peine de ne pas comprendre pourquoi on arrive pas à faire autant ou aussi bien, systématiquement à des écrivains bourgeois dont les contraintes matérielles n'existent pas ou peu (comprendre que la quantité et la qualité de ce qu'on produit est aussi une question de condition matérielle d'existence : est-ce que j'ai du temps à consacrer à la littérature, est-ce que mon quotidien favorise ou du moins permet de faire de la littérature un sujet de préoccupation ; mais bien sûr c'est aussi une question de capacité : est-ce que mes nerfs sont suffisamment solides pour tenir un roman de 800 pages, est-ce que je suis capable de rester concentré, de travailler - et bien sûr une certaine éducation favorise ce genre de capacité, surtout dans ce domaine (la littérature, l'art en général) auquel une éducation de prolo, par exemple, n'habitue pas forcément, ne donne pas les codes et ne fais pas forcément prendre au sérieux). Bref j'arrête de faire mon sociologue de pacotille (jamais lu un bouquin de socio) ; trop d'accord aussi avec ta comparaison avec l'artisan : il est nécessaire à mon avis de s'ôter l'image fantasmé de l'écrivain ou de l'artiste romantique, plein d'inspiration, d'effusions, d'élans, de tourments ; en vrai c'est aussi peu sensationnel, mais pas moins passionnant, que le travail d'une couturière, un travail lent, tatillon, méthodique (parfois), mécanique, répétitif ; c'est une espèce de besogne, mais une besogne mentale, avec des mots, des façons de voir et de s'exprimer.

En général j'suis plutôt d'accord avec le discours "show don't tell", mais bon y'a des contre exemples quand même qui montrent que, comme dans tout ce qui touche à l'art, il n'y a pas de règles universelles, et qu'on peut passer par tous les chemins pour obtenir une force expressive et une qualité esthétique - Proust, ou même Rousseau, ne sont pas des montreurs, pourtant ce qu'ils atteignent dans leurs œuvre c'est puissant. Après je crois que tu parlais surtout d'images donc peut-être que je fais un contre sens, qu'il faut à tout prix montrer de l'image, et ne pas se focaliser sur ce qu'il se passe en interne - mais dans ce cas là c'est pareil, des auteurs comme Pessoa, Artaud, ou même Laclos, dont les correspondances dans les Liaisons dangereuses ne sont, en grande partie, que des échanges de sentiments, montrent qu'on peut faire quelque chose de puissant avec "l'étalement" de sentiments.

Par contre pas vraiment d'accord avec le fait que "l'autre" est bien plus intéressant que nous même, et qu'il faille mettre très peu de nous même dans une œuvre - je pense que c'est très peu probable de mettre peu de nous même dans une œuvre, et quand bien même nous voudrions être des turbos humanistes, ce que l'on dit de quelqu'un est toujours un peu ce que nous voyons de lui et mettons en lui, projetons en lui, est toujours un peu de nous même ; vouloir parler des autres sans jamais que ça parle avant tout de nous même est une illusion. Et puis parler de nous même, avoir le courage de se sonder (comme l'a fait Pessoa par exemple, jusqu'à l'extrême), est une façon comme une autre de parler des autres, de comprendre les autres par la propre compréhension de soi-même, et ça permet qu'ils se comprennent en nous - c'est aussi un échange, une communication. Et puis, on ne connait rien de mieux que nous-même, et au fond, peu importe à quel point nous sommes humaniste, au quotidien notre sujet principal c'est nous même - on pourrait même aller plus loin en disant que c'est toujours un peu pour nous même que nous allons vers les autres : ça comble toujours quelque chose en nous dont nous avions besoin, même lorsqu'on donne, même lorsqu'on aide, même lorsqu'on écoute, et c'est oké, c'est un bénéfice pour tout le monde. Bref j'arrête de faire mon psychologue de pacotille (jamais lu un bouquin de psycho), tout ça pour dire que je vois pas où est le problème de faire reposer tout une œuvre sur soi-même, beaucoup l'on fait, et beaucoup ont réussi. Mais bien sûr c'est important de s'inspirer des autres - de toute manière un bouquin n'est jamais l'œuvre d'une seule personne, mais le résultat de toute une histoire et de plein de rencontre, d'une somme d'influences (d'artistes ou non), d'éventuel correcteurs et éditeurs.

Sur l'intérêt des exercices j'suis pas convaincu non plus. Il y a le pastiche, mais qui je crois est surtout un moyen naturel d'apprendre à écrire, comme on imite ses parents pour apprendre à marcher. Pour le reste, quand on a un "cap" comme tu dis, quand on sent qu'on a quelque chose à dire, déjà apprendre à le dire, dompter en quelque sorte ce besoin, le comprendre, l'étudier, le ressasser, prend tellement de temps, cette aventure fait déjà tellement grandir et progresser, elle est déjà si longue et fastidieuse, que je me dis qu'on peut pas toujours se permettre de faire des à-côtés, de faire des exercices dont l'efficacité n'est pas garantit (d'après ma propre expérience : j'ai passé mes deux premières années d'écriture à faire des exercices mais rien ne bougeait, par contre c'est quand j'ai commencé à lire Beckett, et à le pasticher inconsciemment, que j'ai senti que j'avais fait un bond, autant dans la qualité de ce que j'écrivais que dans le plaisir que j'y prenais, parce que j'avais fait une vraie rencontre, j'avais enfin trouvé un esprit, une approche de l'écriture qui me parlait et qui libérait la mienne, la révélait), la vie c'est tellement court - puis à quoi ça servirait d'apprendre à écrire sans la lettre e, de se contraindre à utiliser tel ou tel mot, si ce n'est pas une contrainte qu'on s'impose dans notre écriture ? Par exemple mon écriture en elle même, avec toutes ses contraintes, ses lois, est déjà un exercice en soi, toujours différent et toujours un peu le même, c'est déjà pas quelque chose qui s'obtient facilement ; et au fond, ça m'est égal de ne pas savoir écrire autrement que de la façon dont j'écris mes textes, parce que je n'ai besoin que de cette façon là pour dire ce que j'ai à dire, ma façon de dire est indétachable de mon sujet : écrire ne me sert qu'à ça, ce n'est ni plus ni moins qu'un outil pour faire passer ce que j'ai à dire, et je serais bien incapable de faire quoi que ce soit d'autre avec.

Pareil ce dictât du plaisir d'écrire à tout prix (comme celui de la nécessaire souffrance pour aboutir à quelque chose) me parait injustifié - comme disait un camarade qui nous a quitté... (sur le forum juste ^ ^) : "La tarte à la crème de l'écriture-plaisir, l'impératif hédoniste de jouir en écrivant sinon pas la peine, sinon ça signifie que t'es pas toi-même, laisse ton écriture s'épanouir comme un soleil, il faut que tu sois spontané [...] j'y crois vraiment moyen et ça me paraît un cliché de développement personnel qui ne prend pas en compte toute la complexité et toute l'intimité de l'écriture, qui méconnaît l'infinie pluralité des rapports à l'écriture ; on peut avoir un rapport à l'écriture qui est celui d'une profonde souffrance aussi - et je valorise pas la chose dans une sorte de délire ascétique ou christique hein, c'est juste pour dire..."
Par contre ouais je pense qu'à la base il faut un certain enthousiasme, une certaine croyance dans ce que l'on fait, une implication qu'un truc auquel on ne croit pas ne permet pas je pense, indépendamment du fait qu'on y prenne du plaisir ou non.
« Modifié: 03 décembre 2024 à 01:07:26 par Safrande »
Il regardait le verre non à sa portée d'une façon de reproche.

Hors ligne OConnorMcPogues

  • Buvard
  • Messages: 4
Re : Comment mieux écrire
« Réponse #4 le: 09 décembre 2024 à 16:09:25 »
Bonjour à tous,

Pour te répondre, Safrande, je n'avais pas non plus une vision humaniste en parlant de l'Autre. Je me suis peut-être mal exprimé, mais on trouve en l'Autre cet espèce de "vision du monde" qui diffère souvent de la nôtre, sortir de son point-de-vue permet d'étoffer son catalogue d'émotions à représenter. C'est une vision évidemment très personnelle, je sais que l'exploration du soi a nourri énormément d'oeuvres magnifiques mais je trouve que l'ouverture à autrui force à se confronter aux choses vers lesquelles on n'irait pas en restant cloîtré sur soi. La confrontation aux Autres se mêle à la méditation et c'est la nuance qui donne des belles choses. Je trouve qu'aujourd'hui, l'écriture est devenue un art un peu peureux, frileux de sortir de chez lui et très bourgeois dans le confort qu'il se permet.
Je te rejoins sur l'écriture-plaisir, je ne voyais pas le plaisir d'écrire comme synonyme de frivolité mais simplement comme un sentiment, celui qui nous rend plus apaisé lorsque l'on clôt une page remplie, et qui est indispensable pour n'importe qui prétendant à l'écriture, aussi sérieux soit-il ou elle.

 


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