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Auteur Sujet: [Erakis] Elfes et parias  (Lu 4395 fois)

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[Erakis] Elfes et parias
« le: 21 août 2020 à 10:45:20 »
Hello there ! Voici ma troisième contribution pour l'Univers Collectif d'Erakis. Ce texte est purement et simplement la suite de Rekkulf et retard (de Zamy), en espérant qu'elle est cohérente. J'espère aussi que vous l'apprécierai, autant que les autres, et qu'il s'inclue bien dans l'univers. Bonne lecture !

Voici les liens utiles sur l'univers :



Elfes et parias

Toujours sur une petite île de Soknör, le Rekkulf et ses élèves, ainsi que les deux Ulfsnars, longeaient le bord d'une grande rivière depuis plus d’une heure. Le bord du cours d’eau était fait de petits cristaux de glace, tels des gros grains de sables translucides. Miol regardait droit devant lui alors que les jeunes elfkingrs préféraient s’amuser à remuer les cristaux voire en jeter dans la rivière en essayant de les faire ricocher. Les loups des glaces se contentaient de souffler par moments, dévoilant leurs dents comme s’ils voulaient intimider des observateurs cachés derrière la végétation blanche.

— Bien joué Koïl ! exclama Laya.
— Oh merci merci. C’est ma spécialité, se vanta le jeune elfkingr âgé de vingt huit ans.

Les Elfes Vikings vivaient en moyenne deux fois plus longtemps que les humains. Par conséquent, les membres de ce peuple entretenaient rarement des relations sincères et profondes avec les Hommes, ceux-ci ne vivant que la moitié d’une vie elfique. A l’inverse, les relations entre deux elfes étaient généralement durables. La loyauté et le respect étaient deux valeurs importantes aux yeux des clans elfkingrs.

Koïl était l’élève le plus âgé, venaient ensuite Tyra et Leif qui étaient faux jumeaux puis Laya et enfin Aren qui n’avait que vingt deux ans. Pour Miol, il n’y avait pas d’âge pour devenir Rekkulf bien que, selon lui, plus on démarrait jeune, plus on tissait un lien fort avec son Ulfsnar. L’un des deux qui lui appartenaient, était né lorsque Miol avait presque fini son apprentissage. Le second était le père du premier, mais aujourd’hui ils se ressemblaient comme deux gouttes d’eau. Le fils loup respectait Miol comme s’il était son deuxième père.

Le Rekkulf regarda ses élèves s’amuser pendant un instant avant de décider qu’il ne fallait pas traîner.

— Je vais vous demander d’arrêter cela.
— Pourquoi monsieur ? interrogea Leif.
— On raconte toutes sortes d’histoire à propos des fleuves et rivières.
— Des contes ? demanda Taya.
— Tout ce que je sais, c’est que je ne voudrais pas que l’Etrangleur vous attaque et qu’on soit obligés de se battre.
— Un étrangleur ?! exclama Koïl. Ça ressemble à quoi ?

Miol passa la main dans ses cheveux et se tourna vers les Ulfsnars qui commençaient à tourner en rond, dévoilant leur impatience.

— Aller sortez de là, reprit Miol. On doit trouver un abri avant la tombée de la nuit.

Aren puis tous les autres élèves s’éloignèrent de l’eau. Ils se remirent en route derrière Miol qui regardait le ciel de temps en temps, s’assurant qu’aucune tempête n’approchait.

— Rekkulf ?
— Oui ? dit Miol en se tournant vers Aren.
— Si on se faisait attaqués, les Ulfsnars nous protégeraient ?

Miol se contenta de hocher la tête. Au fond de lui il ne savait pas. Il n’avait jamais vu un Ulfsnar se battre réellement. Le Rekkulf avait juste eu part d’histoires pendant son enfance, mais la force des canidés était peut-être amplifiée pour les rendre plus majestueux. Il craignait d’être encerclés par une meute de hyènes du Rothren ou bien qu’une averse s’abatte sur eux, ce qui mettrait en danger ses élèves ou ralentirait le voyage vers Natyis.

Miol caressa un des Ulfsnars, s’assurant qu’ils allaient bien. Eux non plus n’avaient pas vu d’autres contrées depuis des mois. Ces bêtes apprivoisées pouvaient ressentir un stress lorsqu’elles étaient dans un environnement trop différent de leurs chez-soi. Pour cette raison, les meutes d’Ulfsnars étaient assez sédentaires en s’appropriant de vastes territoires excédant parfois la taille d’une ville elfique.

Laya s’arrêta pour cueillir une petite fleur. Il s’agit d’une primevère aux pétales violets. La jeune fille la garda en main et lâcha un grand sourire, joyeuse d’avoir trouvé une telle fleur. Dans la zone où elle s’entraînait avec ses camarades sous la tutelle de Miol, il n’y avait pas beaucoup de plantes autres que des grands arbres. Et ce n’était pas Miol qui allait installer des pots de fleurs pour ornementer le bâtiment. En matière de décoration le Rekkulf préférait largement exposer des ossements de gros gibiers, des parures en métal précieux voire même des objets issus de sa culture.

— Sommes-nous encore loin ? questionna Koïl.
— Encore une heure et nous accéderons aux traverseurs. Si vous avez faim, mangez les baies que vous avez dans vos sacs.
— D’accord.

Le jeune elfe sortit de son paquetage plusieurs baies rondes, semblables à des pommes mais de couleur bleue. Miol préférait attendre d’être arrivé aux traverseurs pour manger et boire. Ces derniers étaient des bateaux permettant de naviguer sur la mer d’Haff. Ceux qui traversaient l’étendue d’eau par d’autres moyens étaient considérés comme des fugitifs ou des parias. Miol n’avait pas traversé la mer depuis un long moment puisqu’il n’avait pas rejoint les clans depuis longtemps.

Chaque clan avait son propre îlot : les plus au Nord ressemblaient à des banquises et les plus au Sud étaient juste recouvert d’une fine couche de neige. Natyis était au centre, couvert par endroits de gros blocs de glace. Cette communauté était entourée par Barnei et Fellorin, toutes trois proches du Hadvast. Ces villes-clans étaient donc les plus proches de la frontière du Rothren et par conséquent les premières étapes du commerce entre les Elfkingrs et les Hommes.

Le groupe avait progressé calmement jusqu’à maintenant, mais chacun remarqua petit à petit des ombres sur le sol. Celles-ci furent celles d’oiseaux qui volaient au-dessus des elfes vikings. Miol leva la tête au ciel tout en posant une main sur son épée. Il y avait six orfraies du Rothren, des rapaces aux plumes foncées donnant un air menaçant lorsqu’ils étaient en groupe dans le ciel. Cet effet était renforcé par leur envergure excédant les deux mètres.

— Restez calmes, chuchota Miol à la fois à ses élèves et à ses deux Ulfsnars.

Les élèves se mirent en cercle, peu de temps avant qu’un des oiseaux ne fonça sur Tyra. Leif s’interposa et prit un coup de bec en plein dans le thorax avant de chuter. Miol dégaina alors son épée pour éviter qu’un autre élève ne se fasse attaquer. Leif cria de douleur.

— Qu’allons-nous faire ? s’inquiéta Tyra.
— On va les repousser dès qu’ils seront à portée.

Une seconde orfraie fonça mais cette fois un des Ulfsnars la saisit et la déchiqueta avec ses dents. Laya et Koïl félicitèrent le loup mais leur joie redescendit lorsque deux orfraies saisirent par le col l’élève le plus âgé.

— Non ! Non ! Aidez-moi !

Koïl n’avait plus les pieds sur le sol. Les autres élèves s’affolèrent. Après avoir abattu un autre rapace, Miol se retourna et découvrit Koïl emporté par deux oiseaux. Sans réfléchir le Rekkulf jeta son épée en direction des ennemies qui lâchèrent donc leur prise. Koïl tomba de plus de cinq mètres à plat ventre et perdit connaissance.

— Koïl, ça va ? demanda Laya.
— Il est assommé, dit Aren.
— Écartez-vous ! Je vais le prendre dans mes bras. On ne peut pas rester ici, lança Miol.

Les orfraies avaient fui, mais le groupe n’était pas encore au bout des surprises. Miol prit son élève dans ses bras et fit signe aux autres de se remettre en route. Le Rekkulf inspecta brièvement Koïl pour déceler la moindre trace de blessure, mais rien ne lui sembla anormal. Cependant, ses élèves et les deux loups des glaces s’arrêtèrent subitement au pied d’une butte au milieu des arbres. En contre-jour, on distinguait à peine une silhouette sur le relief. Miol s’arrêta à son tour et se mit devant ses élèves. Il tenta de mieux distinguer qui était cet observateur.

— Je prenais en chasse les orfraies avant qu’elle ne vous attaque ! déclara l’individu à voix haute depuis la butte.
— Pourquoi ne pas nous avoir aidé alors ? répondit Miol sur le même ton.

L’observateur s’avança pour laisser apparaître son visage plus distinctement. En réalité cela ne changeait pas beaucoup, il avait la peau très sombre, presque noir pur avec une capuche en forme de V masquant front. Il n’était pas seul, une petite créature, pas plus grande qu’un mètre, l’accompagnait.

— Qui êtes-vous ? demanda Miol.
— On m’appelle Grand-duc. Et vous ?
— Je me nomme Miol, et ces jeunes elfes sont mes élèves.

Le fameux Grand-duc descendit de la butte avec la petite créature qui s’avérait être un Elfe de maison. Mais en se retrouvant dans l’ombre, une autre silhouette prit sa place en contre-jour : un Ulfsnar. Les deux canidés de Miol, affolés par la présence d’un éventuel rival, montrèrent leurs dents et dressèrent leurs queues et poiles tranchants. Miol garda son épée en main.

— Vous êtes donc tous des Elfkingrs c’est bien ça ?
— Oui. Je ne vous renvoie pas la remarque.
— Je suis un Elfe Obscur contrairement à vous.
— Et lui ? demanda Aren en indiquant l’Elfe de maison. C’est un brownie ?
— Je m’appelle Nink messires, dit la créature concernée en s’avançant.
— Reste à ta place, lança Grand-duc.

L’Elfe Obscur, voyant que les Ulfsnars de Miol restaient sur leurs gardes, se tourna vers sa monture encore en haut de la colline.

— Tu peux descendre ! Ce ne sont que des égarés !
— Des égarés ? répéta Miol. Nous savons où nous allons.
— Ah bon ? J’ai un instant cru que vous étiez perdus, et que c’était la raison de notre rencontre.

Miol ne répondit pas et suivit du regard l’Ulfsnar de Grand-duc. Celui-ci avait une fourrure bleutée contrairement aux siens qui en avaient une blanche. Ce canidé avait d’ailleurs des marques de peinture rouge sur la tête. Miol n’avait aucune idée de quoi il pouvait s’agir.

— Vous êtes donc vous aussi Rekkulf, déclara Miol.
— Rek... quoi ? Tout ce que je sais c’est que nous sommes des parias, révéla Grand-duc.
— Pourquoi avez-vous dit "nous" ?
— Grand-duc, moi-même et un ami sommes tous trois des parias, expliqua Nink.
— Tout à fait, confirma l’Elfe Obscur.
— Ah bah ça alors ! exclama Leif.

Miol fut soudainement plus méfiant à l’égard des deux personnes que le groupe avait croisées. S’ils étaient effectivement des parias, cela signifiait qu’ils ne répondaient pas aux règles et coutumes d’un clan et donc qu’ils pourraient les attaquer sans scrupules.

L’Ulfsnar bleu s’allongea sous les regards attentifs de ses deux congénères blancs. Les élèves, quant à eux, étaient émerveillés de découvrir non seulement un troisième Ulfsnar, mais aussi un brownie comme les Elfkingrs les appelaient, et un Elfe Obscur.

— Ah justement ! Notre ami doit nous attendre, lança Grand-duc.
— J’aimerai bien le rencontrer, dit Miol curieux de découvrir un nouvel étranger.
— Ne restons pas plantés ici.

Grand-duc tourna le dos et commença à avancer en direction des arbres. Nink fit un grand bond et atterrit sur le dos de la monture des parias qui se releva alors pour suivre son maître. L’Elfe de maison semblait à l’aise sur le dos du canidé. Sa petite taille lui permettait de rester assis sans basculer à cause des pas de l’animal.

Miol laissa passer ses élèves et ses Ulfsnars devant et ferma la marche. Tous ensemble ils passèrent au milieu de grands sapins qui ne laissaient passer que très peu la lumière du soleil. Le Rekkulf se demanda si c’était dû à l’espèce de Grand-duc. Il avait d’ailleurs remarqué, depuis le début, qu’il possédait une grande épée à lame courbe attachée à sa ceinture. Ses vêtements s’accordaient avec sa couleur de peau : ils étaient longs et sombres. Nink, lui, possédait une vulgaire chemise grisâtre qui devait probablement être blanche à une certaine époque. Il avait l’air d’un âge moyen bien qu’un peu ridé au visage. Miol avait déjà entendu parler de brownies durant son enfance mais jamais d’Elfes Obscurs. Ceux-ci devaient vivre loin du Rothren.

Grand-duc coupa certaines branches pour permettre à ceux qui le suivaient de passer plus aisément, surtout les Ulfsnars. Nink, toujours assis, changea de position pour observer les élèves de Miol un par un. Leif et Tyra étaient fascinés de découvrir enfin un brownie pour de vrai. Il était à peu près comme ils l’imaginaient.

— Nous y voilà ! déclara Grand-duc après dix bonnes minutes de marche.

Ne voyant rien de particulier, hormis les arbres, Miol se sentit obligé de répondre au guide.

— Nous y voilà où ?
— En sécurité, voyons.

Le Rekkulf et ses élèves découvrirent enfin un feu de camp au pied d’un nouveau relief constitué de grandes roches, pouvant abriter de la pluie notamment. Le soleil commençait à se coucher, et les rayons étaient en partie bloqués par les pierres. Ils découvrirent aussi un individu avec une crinière noire, des poils sur tout le corps, assis à côté des flammes.

— Quelle est cette chose ? demanda Aren.

Miol s’était fait la même réflexion.

— Cette chose, comme tu dis, a un nom et elle comprend tout ce que tu dis, dit Grand-duc.
— Je m’appelle Mumishi, dit l’individu en se relevant.

Ce dernier pointa son arbalète sur les élèves juste avant que Nink vienne à ses côtés.

— Alors, ce sont des prisonniers ? interrogea-t-il.
— Non, ne t’en fais pas. Ce sont des Elfkingrs.
— Mais qu’est-ce que vous êtes ? demanda cette fois Miol.
— C’est un liontári, révéla l’Elfe Obscur.
— Ah bon. Ça ressemble donc à ça ? Je pensais que c’était plus... grand.
— Ouais on ressemble à ça, soupira le concerné. D’autres questions ?

Miol fit non de la tête. Grand-duc et ses deux compères se rassirent près du feu. L’Elfe de maison sortit un morceau de viande qu’il accrocha à une branche avant de le tendre au-dessus des flammes. Les élèves s’assirent à leur tour en observant la viande griller lentement. Miol alla vers ses Ulfsnars. Il leur chuchota de rester prêts à partir, au cas où cela tournerait mal.

— Au fait pourquoi étiez-vous par là ? demanda Grand-duc.
— On se rendait à Natyis.
— Dans quel but ? Apprendre à nager ? Vous êtes professeur de nage elfique, et voilà pourquoi vous avez des élèves.
— Non, coupa Leif. Nous sommes des élèves Rekkulf.
— Ah bah ça alors ! lâcha Mumishi. Des Rekkulfs ? Je n’en ai jamais vu de ma vie, mais on m’a déjà raconté que ce sont de sacrés guerriers.

Grand-duc se tourna vers Mumishi. Il ne l’avait jamais entendu parler de ça, et Nink non plus. Miol se rapprocha, il était intéressé de connaître ce que le liontári savait à propos de sa profession.

— Vous savez quoi d’autre ?
— Oh... euh... je crois qu’il y a fort longtemps les Elfkingrs avaient une légion de Rekkulfs. Mais cela remonte à au moins cent vies de Liontáris.
— Pourriez-vous nous faire une démonstration ? demanda Nink.
— Tu sais bien comment ils sont Nink, dit Grand-duc. On a un Ulfsnar nous aussi.

L’animal concerné alla s’allonger derrière ses maîtres et dévora un gros morceau de viande. L’entendant manger, Grand-duc tendit un bras en arrière pour caresser la bête. Mumishi se leva.

— Alors les jeunes. Vous voulez manger ?
— Ne vous en faites pas, on a ce qu’il nous faut, répondit Miol avant qu’un élève ne puisse prendre la parole.
— Vous avez tort, lança Nink. Nos hyènes sont un délice. Mais tant pis pour vous.
— Vous tuez des hyènes ?
— On chasse ce qu’on peut et ce qu’on veut, rétorqua Grand-duc. On n’a pas le confort de certains, aller au marché, choisir son morceau de viande ou ses pommes. Il n’y a pas de pièces ici, juste des coups d’épée et des carreaux. Et les griffes.

La discussion cessa un instant, le temps pour chaque élève de manger des baies. Miol s’abstint de manger pour nourrir ses Ulfsnars avec des lapins qu’il avait emportés depuis chez lui. Les canidés dévorèrent leur viande en un rien de temps, ne laissant pas même un os. La nuit était tombée et le ciel s’était rempli d’étoiles. Depuis tout petit, le jeune Rekkulf s’était découvert une passion pour les astres bien que c’était des éléments qui dépassaient de loin l’univers qu’il connaissait.

— Vous allez donc à Natyis, dit Grand-duc en rejoignant Miol.

Le Rekkulf eut un léger sursaut. Il n’avait pas vu l’Elfe Obscur venir vers lui.

— Oui c’est exact. On a des problèmes de livraisons avec Nargarone.
— Nargarone vous dites ?
— Oui. Pourquoi ?
— J’ai entendu dire que des dieux se battaient là-bas. Cela dit je ne sais pas si tout cela est vrai.
— C’est pour ça que nous voyageons. On va à la pêche aux informations.

Grand-duc posa une main sur son menton en fixant les étoiles à son tour alors que Miol avait rabaissé son regard sur son interlocuteur.

— Vous devriez éviter Natyis.
— Pour quelle raison ?
— Des révoltes ont eu lieu il y a peu. Ce n’est pas un lieu sûr avec des Ulfsnars en plus. Vous risqueriez de perdre un œil ou un doigt en allant là-bas.
— C’est vrai ?
— Oui. Après tout, vous faites ce que vous voulez.
— Peut-être qu’on devrait directement aller au Hadvast sans faire de pause à Natyis alors, songea Miol.
— Oula ! Je ne m’y risquerai pas non plus, surtout avec des enfants.
— Encore un problème ?
— J’ai déjà entendu dire qu’à Haragost, la capitale, les enfants sont capturés et mis sur les toits pour des festivités. Franchement si vous y allez, vous allez perdre un ou deux élèves une fois là-bas.
— Mais, comment vous savez tout ça ?
— Quand on est paria, on écoute les voyageurs qui passent dans le coin. C’est une manière de découvrir le monde à notre façon, sans partir de chez soi.

Miol était assez surpris par cette révélation mais d’une autre part, il comprenait Grand-duc. Depuis qu’il avait commencé à enseigner le métier de Rekkulf, il vivait aussi à l’écart de son clan. Parfois, l’isolement n’était pas simple, alors l’idée que l’Elfe Obscur soit un solitaire depuis plusieurs années lui fit respecter Grand-duc.

— Alors que me conseiller vous ?

Grand-duc fit un pas en arrière en regardant le sol, le temps de trouver une réponse.

— Passez par Pelior, dit-il enfin en se rapprochant.
— Cela ferait un grand détour, non ?
— Oui. Mais c’est le prix pour éviter les révoltes et les festivités malsaines. La ville d'Erdvyr est plutôt sûre.

Miol s’éloigna pour rejoindre ses élèves et réfléchir à la proposition de Grand-duc. Il profita aussi pour croquer dans une baie. Leur goût sucré le détacha un instant de ce qui l’entourait. Il aurait préféré que Nargarone ait livré comme prévu le cuir dont il avait besoin et qu’il n’ait pas besoin de voyager avec ses élèves pour trouver une solution.

Laya remarqua qu’elle avait perdu sa primevère. Son visage se crispa petit à petit.

— Qu’est-ce qu’il y a fillette ? demanda Nink en se penchant vers elle.
— J’ai perdu ma cueillette, dit Laya en reniflant.

Nink eut envie de réconforter la jeune fille. Il se tourna vers les sapins et sauta pour atterrir sur une branche. Il fit un nouveau bond pour atteindre le sommet de l’arbre. Les brownies avaient la capacité de sauter très haut. Il arracha le cône-couronne du sapin puis redescendit avant de donner l’objet à la jeune elfe.

— C’est pour moi ?
— Oui. Je ne veux pas voir quelqu’un triste.
— Merci, dit Laya en enlaçant l’Elfe de maison.

Les sapins de l’île sur laquelle était le groupe comportaient tous un grand cône, ou pomme de pin, à son sommet comme s’il s’agissait d’une couronne. Miol regarda Nink et Laya. Il vit le brownie comme un être bien faisant, mais il avait toujours des doutes concernant le liontári et l’Elfe Obscur. Ces derniers discutaient d’ailleurs ensemble en chuchotant. Miol ne put deviner quels étaient les sujets de leur conversation.

Après quelques minutes, Grand-duc et Mumishi revinrent enfin. Le premier resta debout vers l’Ulfsnar bleu qui s’était endormi, probablement à cause de la digestion. Le second s’était rassis pour remettre un rondin dans le feu. Il semblait fatigué. Dormir à la belle étoile tout le temps devait être fatigant en plus du fait de vivre uniquement de la chasse et de ne pouvoir compter sur personne. Grand-duc fouilla dans une malle et en sortit un gros sachet.

— Tenez, partageons ça en signe de notre rencontre, déclara l’Elfe Obscur.
— Qu’est-ce dont ? demanda Miol.
— Une vieille dame que j’ai sauvée de la noyade m'a donné ceci en cadeau. C’est une saucisse de Thalassi.
— Cela fait combien de temps que vous l’avez ?
— Oh. Plusieurs semaines ou mois.
— Vous ne pensez pas qu’elle est moisie désormais ?
— Bien sûr que non. J’ai entendu dire que c’est une des saucisses de la meilleure qualité qu’il soit.

Sur ces mots, Grand-duc commença à couper la grosse saucisse en rondelles à l’aide de son épée. La manipulation ne semblait pas aisée, mais le paria parvint à faire des tranches à peu près égales qu’il donna ensuite aux élèves et au Rekkulf avant de laisser Nink et Mumishi se servir.

— Ce n’est pas mauvais, dit Miol, rassuré.
— Vous voyez.

Koïl se réveilla. Ses camarades et Miol le rejoignirent pour voir comment il allait. Il déclara n’avoir juste des douleurs au ventre. Miol lui donna quelques baies pour qu’il reprenne des forces. Les Ulfsnars de Miol s’étaient à leur tour endormis, l’un contre l’autre.

— Alors, vous êtes partants pour passer par Pelior ? dit Grand-duc pour relancer Miol.
— Je pense que oui.
— On a deux grandes barques, on pourrait vous y conduire.
— Non merci. On va utiliser des traverseurs.
— Et vos Ulfsnars ?
— Ils nageront.
— Vous les surestimer un peu. Ils ne pourront pas tenir sur plusieurs kilomètres. Nos barques sont assez robustes pour accueillir les loups.
— Je sais pas. Je dois réfléchir.
— Et comme ça, moi et mes amis on pourra un peu voyager. C’est donnant donnant. Si vous avez un problème vous ne serez pas seul.
— Ok. Je suis partant. Mais n’attendez rien en échange.
— Entendu.

Grand-duc et Miol échangèrent une poignée de main.

— Vous n’avez pas d’autre nom ? demanda le Rekkulf.
— Les parias comme moi n’ont que des surnoms. Le mien provient d’un animal, mais je ne sais plus lequel. Cela fait trop longtemps que je porte ce nom pour m’en rappeler.

Les deux elfes avaient donc finalement réussi à s’entendre. Dès l’aube, Miol et ses élèves suivront les trois parias pour aller jusqu’aux barques afin de traverser la mer d’Haff. En attendant, une bonne nuit de repos ne fut pas de refus. Le voyage pour résoudre le problème de livraison était encore loin d’être fini. Miol se demandait si les enseignements qu’il a donnés à ses élèves allaient enfin servir, et si l’Elfe Obscur avaient des capacités particulières dues à son origine. Seul le temps lui apportera des réponses.


Brèves annexes et anecdotes :
/!\ Le texte a été modifié, les héros décident de passer par Pelior désormais, une des régions de l'Ancien Empire pour garder le voyage cohérent.
Désolé, vous n'êtes pas autorisé à afficher le contenu du spoiler.


Voilà désormais je pense me mettre un peu en retrait de l'univers. J'y reviendrai plus tard, le temps de bien avancer mon projet perso.  :)
« Modifié: 11 octobre 2020 à 13:17:45 par Bapt90 »
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Re : [Erakis] Elfes et parias
« Réponse #1 le: 21 août 2020 à 21:19:15 »
Merci Bapt d’avoir pu reprendre l’œuvre de Zamy pour s’intéresser de nouveau à nos elfes préférés !
Comme les autres textes que tu présentes, il y a de grosses nouveautés, des explications (pas trop lourdes cette fois), des dialogues un peu mielleux et des compléments qui peuvent totalement partir (donc, très, la précision que si les elfes ont deux fois la vie des Hommes alors les Hommes ont la moitié de la vie des elfes, le fait qu’il y ait encore des jumeaux [tes autres textes en ont aussi]…)
Tu bâtis bien petit à petit la géographie de notre continent, maintenant que tu poses les elfes comme étant sur une mer de glace, proche de l’Hadvast. Bizarrement la Marche de Tringel semble être accessible d’une manière ou d’une autre, même si c’est un détour. Il faudrait peut-être, avant de s’engager plus loin, se mettre d’accord sur où est quoi. 
L’établissement d’un clan-Pariah d’elfes est une très belle idée – encore que… Comment cet Elfe Obscur, ce Liontári et cet Elfe de Maison (que tu appelles brownie, c’est ça ?) en sont-ils arrivés là ?
Je ne trouve pas très convainquant la relation entre Miol et Grand-Duc. L’Elfe Obscur est présenté d’emblée comme étant dangereux, suspect, mais plus tard il dicte où vont les gens et comment – et Miol semble le prendre à son mot. Peut-être Miol ne veut-il pas risquer confrontation ? peut-être a-t-il réalisé qu’il était digne de confiance dans le sous-texte ?
(et ces orfraies sont…. orfrayantes)

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Re : [Erakis] Elfes et parias
« Réponse #2 le: 22 août 2020 à 20:45:19 »
Voilà enfin le dernier comm'
Citer
le fait qu’il y ait encore des jumeaux [tes autres textes en ont aussi]
En réalité ce n'tait pas du tout intentionnel :huhu: je ne m'en suis pas du tout rendu compte en écrivant ce texte (et en sois je n'ai pas crée les personnages de Tyra et Leif, j'ai juste fait en sorte qu'ils soient jumeaux)
Citer
maintenant que tu poses les elfes comme étant sur une mer de glace
Alors pour cette idée, elle vient plutôt de Zamy  ^^ je lui ai demandé en Mp ce qu'elle imaginait pour le Rothren, et l'idée me plaisait bien aussi et ça différenciait des autre territoires donc je l'ai gardée  :-¬?
Citer
Comment cet Elfe Obscur, ce Liontári et cet Elfe de Maison (que tu appelles brownie, c’est ça ?) en sont-ils arrivés là ?
Alors justement. C'est ouvert. Quelqu'un peut très bien écrire un "prologue" qui serait la rencontre entre les 3 parias quelques années auparavant. J'avoue ne pas y avoir beaucoup réfléchis mais en se posant on peut trouver des idées assez originales sur leur rencontre : ex: un passé commun comme l'esclavage, la prison ... ?

En tout cas merci pour tes lectures et avis  :)
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Re : [Erakis] Elfes et parias
« Réponse #3 le: 03 octobre 2020 à 19:55:11 »
Bonjour/bonsoir  :)

J'ai décidé après plusieurs semaines de flottements d'apporter des modifications à ce texte, sur la géographie notamment, et donc plus ou moins l'histoire. Ces changements seront faits dans les semaines à venir mais probablement pas avant le 10 novembre, question d'organisations.
Cela aura pour objectif de garder la cohérence narrative et géographique des événements : la Marche de Tringel étant très éloignée du Rothren, ce dernier n'étant pas séparé du Hadvast par la mer selon la carte etc...

Du coup, l'action serait probablement localisée en Soknör et/ou Skeldor (régions du Rothren) et les héros iraient de plus en plus vers l'Est. La proposition de Grand-duc serait désormais de passer par Pelior, région de l'Ancien Empire et voisine d'Eraven  ;)

Cela pourrait conduire ensuite à un/des textes où les héros se rendent effectivement en Pelior puis descendent au sud pour finalement rencontrer Denstann et Murdyn dans l'Ancien Empire ... ou pas  ^^


EDIT 08/10/2020 : Modifications faites comme convenues.
« Modifié: 08 octobre 2020 à 10:23:34 par Bapt90 »
Mon roman de Fantasy : Les Douze Élus.

 


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