Bonjour beaux amis !
Je vous glisse un petit texte dont je n'arrive pas à percevoir s'il a un sens, si on en comprend le sens, ou si il n'a que très peu d'intérêt. Il sent l'été, c'est toujours ça.
Bises !
Tu remontes du fond du jardin. Dans l'obscurité, tu suis l'allée de graviers clairs qui sinue entre les flaques sombres des pelouses. Tu sais qu'il y a là, de part et d'autre, les massifs de rosiers, tu en perçois les parfums dans l'air encore tiède. Plus loin, tu le sais aussi, frémissent les gauras, vaporeux, se balancent les agapanthes un peu raides. Les capucines en bordure t'escortent dans le noir. Au détour du bosquet d'ifs la maison apparaît, éclairée dans la nuit, glissant comme un vaisseau.
La lumière sereine qui en émane encadre chaque ouverture d'une frange de feuillages dorés, délicatement ouvragés. Ennoblis, le jasmin blanc, le chèvrefeuille et l'ampélopsis qui ourlent les croisées. Tu ne t'approches pas vraiment. Tu préfères d'abord faire le tour, de loin, accompagné par le frôlement des chauves-souris. Toutes les fenêtres sont éclairées. Tu laisses la magie opérer. Alchimie simple et insaisissable que l'on cherche à reproduire avec ces maisonnettes de faïence habitées par une flamme mouvante et qui t'enchantaient déjà enfant. Et c'est le même bien-être, la même liqueur blonde qui t'emplit. Les fenêtres éclairées diffusent toujours leur mystère accueillant et généreux.
Baignant dans l'odeur des buis, puis des tilleuls qui bordent la terrasse, tu restes à distance, gravitant lentement autour de la maison comme le pèlerin autour du reliquaire. Comme lui, tu projettes un fantasme à travers la vitre de cristal biseauté, tu bénis l'édifice travaillé, brodé de métaux précieux, ajouré, niellé, émaillé. Comme lui, tu pressens, tu espères une révélation. Là scintillent le lustre du salon, ses bobèches, ses pampilles. Tu sais que les girandoles posées sur le marbre de la cheminée complètent l'éclairage précieux. Tu te déplaces. Par l'imposte de la porte d'entrée et son châssis en queue de paon, tu distingues les rayons projetés au plafond par la veilleuse du hall. Puis c'est la cuisine, ses deux suspensions d'opaline, leur lumière laiteuse et douce qui laisse les solives dans l'ombre.
La magie réside toujours dans l'idée que l'on essaie de se faire de ce qu'il y a à l'intérieur du havre ambré, lorsque l'on est dehors dans l'obscurité.
Tu joues donc, toi qui sais.
Tu t'éloignes. Tu recules, encore, jusqu'à t'adosser au tronc de l'un des tilleuls.
Son parfum te baigne comme une vapeur, chaude et réconfortante.
L'oreille attentive, tu attends. Un rire ? Une musique ? Des courses sur les parquets ? Rien ne te parvient.
La maison éclairée dans la nuit te présente son mirage. Tu la rêves accueillante, bienveillante, rayonnant des secrets qu'elle recèle, de promesses de bonheur. De moments si chauds et puissants. Du bonheur...
Tu resteras dehors, assis sur le banc de pierre, te berçant de songes. Ton envie est aussi vaine que celle de ces deux bombyx ventrus qui heurtent de leurs ailes poudreuses les vitres éclairées, dans le même désir de passer à travers.
Puis quand tu auras froid tu rentreras, te frottant les paumes machinalement.
Et tu éteindras les lampes.