Et puis un matin
sur la place le dimanche
ça lui vient soudain à l'esprit
qu'elle ne sait pas
où et quand
déjà dans les langes
le mur éblouissant
de soleil prend fin
et que ça fait longtemps
qu'a commencé la seconde
de bonheur à venir
sur la place le matin
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Est-ce moi cela ? Sans faim sans masque sans habits sans nudité sous les ailes
d'un cygne noir qui ne forme qu'un
avec toi
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Et puis soudain tu revêts ton autre visage
Trois hommes âgés te reconnaissent
Ceux pour qui croire c'est voir
La jolie fille pleine de joie que tu n'as pas été
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À Vladimíra T.
Oh qui pose encore des questions
sur sa vertu et sur le nombre
de lits où elle tua le désir
sur la forme de ses yeux
et sur sa honte
quand un matin au lit elle enjamba
son corps et rampa
de nouveau vers le jour
sans enfant qui puisse
être meilleur ou
plus mauvais
peintre
que lui
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Comme le corps de sa jeune chienne
est beau et comme sa forêt noire
repose avec grâce les collines
plus obscures et les ombres de l'aine
Mais c'est en vain
qu'elle connaît son secret
Un jour elle désirera sans rien assouvir
puis l'amour lui préparera
l'apparence d'une douce
vie de chienne
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À présent
Tu ne te blottis encore
Que dans le sommeil
Un chat le jour
Des rêves la nuit
Te révèlent
Ce que tu piétines
Ce que tu ignores
Ce que tu désires
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Seigneur tu m'as donné mon destin
Je ne comprends pas
ce que je n'ai pas le courage de comprendre
Je suis seulement cela qu'en moi
j'ai lié aveuglément à toi
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Le niveau de la rivière a baissé,
les fonds terrifiants ont affleuré
à la hauteur du mucus
qui recouvre les roches ternies
sous le soleil couchant
par milliers de noirs insectes
pénètrent ses yeux
Et c'est à peine si
dans sa boue luisante
le lit peu profond retient
l'ombre des saules pleureurs
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À Josef
Où et comment
pourrait-elle passer ses vieux jours
durant les longs après-midis d'été
Flânera-t-elle
sous les chênes majestueux
avec une mémoire d'or
qui s'afface
ou dans les cafés qui l'ont vue grandir
à grignoter ce qui est pour elle
et ne l'est pas
ou alors
sur le banc de la grande place
d'un village étranger
ses minces racines plongées
dans la poussière et l'argile
avec l'ancienne sonnerie
et l'odeur âcre
des étables et des écuries
Viola Fischerová