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Auteur Sujet: [Poésie, auteur] William Blake  (Lu 5719 fois)

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[Poésie, auteur] William Blake
« le: 20 décembre 2009 à 17:58:46 »



Je dirais bien que William Blake, c'est une poésie caparaçonnée de fureur et de mythe, mais tout cela serait bien gongoriforme n'est-ce pas :mrgreen:


William Blake est un poète anglais de la fin du XVIIIe, il est graveur aussi, c'est lui qui a édité ses bouquins, les enluminures et illustrations sont de lui.

Il a écrit principalement :
- The French Revolution (La Révolution française)
- The First Book of Urizen (Le Premier Livre d'Urizen)
- America : a Prophecy (L'Amérique)
- Europa : a Prophecy (L'Europe)
- A Vision of the Last Judgement (Une Vision du Jugement Dernier)
The Marriage of Heaven and Hell (Le Mariage du Ciel et de l'Enfer)


ce sont des récits prophétiques, souvent liés aux mythes bibliques, la plupart du temps en vers libres, et je trouve ça méga classe.

Voilà un extrait.



Sudden as the bullet wrapp'd in his fire, when brazen cannons rage in the field,
Fayette sprung from his seat saying 'Ready!' Then bowing like clouds, man toward man, the Assembly
Like a Council of Ardours seated in clouds, bending over the cities of men,
And over the armies of strife, where their children are marshall'd together to battle,
They murmuring divide; while the wind sleeps beneath, and the numbers are counted in silence,
While they vote the removal of War, and the pestilence weighs his red wings in the sky.

So Fayette stood silent among the Assembly, and the votes were given, and the numbers numb'red;
And the vote was that Fayette should order the army to remove ten miles from Paris.
The aged Sun rises appall'd from dark mountains, and gleams a dusky beam
On Fayette; but on the whole army a shadow, for a cloud on the eastern hills
Hover'd, and stretch'd across the city, and across the army, and across the Louvre.
Like a flame of fire he stood before dark ranks, and before expecting captains:
On pestilent vapours around him flow frequent spectres of religious men, weeping
In winds; driven out of the abbeys, their naked souls shiver in keen open air;
Driven out by the fiery cloud of Voltaire, and thund'rous rocks of Rousseau,
They dash like foam against the ridges of the army, uttering a faint feeble cry.

Gleams of fire streak the heavens, and of sulphur the earth, from Fayette as he lifted his hand;
But silent he stood, till all the officers rush round him like waves
Round the shore of France, in day of the British flag, when heavy cannons
Affright the coasts, and the peasant looks over the sea and wipes a tear:
Over his head the soul of Voltaire shone fiery; and over the army Rousseau his white cloud
Unfolded, on souls of war, living terrors, silent list'ning toward Fayette.
His voice loud inspir'd by liberty, and by spirits of the dead, thus thunder'd: --

'The Nation's Assembly command that the Army remove ten miles from Paris;
Nor a soldier be seen in road or in field, till the Nation command return.'
Rushing along iron ranks glittering, the officers each to his station
Depart, and the stern captain strokes his proud steed, and in front of his solid ranks
Waits the sound of trumpet; captains of foot stand each by his cloudy drum:
Then the drum beats, and the steely ranks move, and trumpets rejoice in the sky.
Dark cavalry, like clouds fraught with thunder, ascend on the hills, and bright infantry, rank
Behind rank, to the soul-shaking drum and shrill fife, along the roads glitter like fire.
The noise of trampling, the wind of trumpets, smote the Palace walls with a blast.
Pale and cold sat the King in midst of his Peers, and his noble heart sunk, and his pulses
Suspended their motion; a darkness crept over his eyelids, and chill cold sweat
Sat round his brows faded in faint death; his Peers pale like mountains of the dead,
Cover'd with dews of night, groaning, shaking forests and floods. The cold newt,
And snake, and damp toad on the kingly foot crawl, or croak on the awful knee,
Shedding their slime; in folds of the robe the crown'd adder builds and hisses
From stony brows: shaken the forests of France, sick the kings of the nations,
And the bottoms of the world were open'd, and the graves of archangels unseal'd:
The enormous dead lift up their pale fires and look over the rocky cliffs.

A faint heat from their fires reviv'd the cold Louvre; the frozen blood reflow'd.
Awful uprose the King; him the Peers follow'd; they saw the courts of the Palace
Forsaken, and Paris without a soldier, silent. For the noise was gone up
And follow'd the army; and the Senate in peace sat beneath morning's beam.



*


Soudain comme le boulet enrobé de son feu quand les canons de bronze font rage sur le terrain,
La Fayette bondit de son siège en disant "Je suis prêt !" Alors, ses membres s'inclinant l'un vers l'autre comme des nuages, l'Assemblée
Tel un conseil d'ardeurs qui siègerait dans les nuages, se penchant sur les villes
Des hommes et les armées en lutte, où leurs enfants sont rangés en ordre de bataille,
Murmure et se divise ; tandis qu'au-dessous le vent dort et qu'en silence est fait le compte des nombres,
Tandis qu'ils votent l'éloignement de la Guerre et que la peste au ciel suspend ses ailes rouges.

La Fayette, donc, se tint en silence au milieu de l'Assemblée, et les votes furent émis et les voix dénombrées ;
Et le vote décida que La Fayette ordonnerait à l'armée de s'éloigner à dix milles de Paris.
Le vieux soleil se lève dans l'effroi d'entre les sombres montagnes et jette un obscur rayon
Sur La Fayette ; mais sur toute l'armée planait une ombre, car sur les collines de l'Orient un nuage
Flottait et s'éployait par-dessus la cité et par-dessus l'armée et par-dessus le Louvre.
Tel un feu flamboyant, La Fayette se dressa devant les sombres rangs et les capitaines en attente :
Autour de lui, sur des vapeurs pestilentielles, flottaient en grand nombre les spectres de religieux, pleurant
Dans la rafale ; chassées des abbayes, leurs âmes nues grelottaient dans l'air vif ;
Chassées par la nuée ardente de Voltaire et les rochers orageux de Rousseau,
elles se jettent comme de l'écume contre les files martiales, poussant un faible cri chétif.

Des traits de feu strièrent les cieux, et des traits de soufre la terre, jaillis de La Fayette lorsqu'il leva la main ;
Mails il resta là en silence, jusqu'à ce que les officiers se fussent tous rués autour de lui comme les vagues
Autour du rivage de la France, au jour du pavillon anglais, lorsque des canons lourds
Epouvantent les côtes et que le paysan, après avoir scruté la mer, essuie un pleur :
Au-dessus de sa tête, l'âme de Voltaire brillait ardente ; et Rousseau déployait au-dessus de l'armée
Son blanc nuage sur les âmes guerrières, terreurs vivantes qui muettes écoutaient, tournées vers La Fayette.
Sa voix punissante qu'inspiraient la liberté et les esprits des morts, ainsi tonna :

"L'Assemblée de la Nation ordonne que l'Armée s'éloigne à dix milles de Paris ;
Qu'on ne voie pas un seul soldat aux champs ni sur les routes avant que la Nation n'ordonne leur retour."
En hâte, le long des rangs d'acier étincelants, les officiers regagnent
Leurs postes, et le sévère capitaine caresse son fier coursier et devant ses troupes massives
Attend le son de la trompette : les capitaines d'infanterie attendent chacun auprès de son nuageux tambour :
Puis les tambours battent, les rangs d'acier s'ébranlent et les trompettent mènent joie dans le ciel.
La sombre cavalerie, telles de lourdes nuées d'orage, gravit les collines, et l'infanterie éclatante, rang
Après rang, au son bouleversant pour l'âme du tambour et du fifre aigu, étincelle comme du feu le long des routes.
Le bruit du sol piétiné, le vent des trompettes, frappèrent en rafale les murs du Palais.
Froid et blême, le Roi siégeait au milieu de ses pairs, son noble cœur défaillait, son pouls cessait
De battre ; les ténèbres gagnaient ses paupières et une sueur glaciale
Enveloppait son front que fanait une faiblesse mortelle ; ses pairs étaient pâles comme les montagnes des morts
Couvertes de rosées nocturnes, gémissantes, secouant leurs forêts et leurs eaux. Le froid lézard
Et le serpent et l'humide crapaud rampent sur le pied royal ou coassent sur l'auguste genou,
Crachant leur bave ; dans les plis de sa robe, la vipère couronnée bâtit, et elle siffle
Sur ses tempes de marbre. Tremblantes les forêts de France, malades les rois des nations.
Et les fondements du monde se sont ouverts, et les tombes des archanges se sont descellées :
Les morts énormes élèvent leurs feux pâles et regardent par-dessus les falaises rocheuses.

Un semblant de chaleur qui venait de leurs feux ranima le froid Louvre ; le sang gelé se remit à couler.
redoutable, le Roi se leva ; les pairs le suivirent ; les cours du Palais leur apparurent
Désertes, et Paris sans un soldat, silencieux ; car le bruit s'en était allé,
Suivant l'armée ; et le Sénat siégeait en paix sous les rayons de l'aube.


[trad. Pierre Leyris, ed. Aubier-Flammarion]


(si vous trouvez des fautes de frappe dans le texte français dites-le, j'suis allé vite donc y en a probablement...)
« Modifié: 08 septembre 2015 à 21:02:25 par Rain »
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Hors ligne Ambrena

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Re : William Blake
« Réponse #1 le: 21 décembre 2009 à 00:45:52 »
Ah, Blake! L'un de mes grands amours littéraires en poésie, sans compter Nerval et Victor Hugo, deux autres prophètes eux aussi sublimateurs de mythe, de fureur et de bruit - tu vois, Loredan, le gongorisme n'est pas ton apanage particulier!

Tu as raison, son écriture est magnifique. C'est un pré-romantique qui a inspiré Hugo que je citais supra, ainsi que, beaucoup plus tard, Philip Pullman. Si j'ai bonne mémoire, Blake a aussi illustré le Paradis Perdu de Milton, autre chef-d'oeuvre, et la Divine Comédie de Dante. Il faudrait que je vérifie.

[edit] Oui, je ne me trompais pas. Entre autres, les deux oeuvres infra sont de lui.


Illustration de la Divine Comédie de Dante, "Dante and Virgil at the Gates of Hell".


Illustration de John Milton, Paradise Lost, "The Expulsion", 1807.
« Modifié: 21 décembre 2009 à 01:00:49 par Ambrena »
"J’ai soudain la sensation limpide d’avoir gaspillé ma jeunesse… L’avoir vue s’échapper de mes mains comme l’anguille effrayée et m’appeler à présent sur le lierre du tombeau, où patiente depuis toujours le chant des enfants, les raisins volés…"

Roi Loth, Kaamelott, Livre V

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Re : William Blake
« Réponse #2 le: 10 juin 2010 à 13:59:20 »
J'ai récemment lu le Mariage du Ciel et de l'Enfer, un texte de prose poétique, et j'aime ce ton prophétique, biblique, sans être trop lourdingue. Dommage que je ne sois pas assez doué en anglais pour apprécier une VO, parce que lire de la poésie traduite, c'est quand même assez frustrant.

 


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