Dans un futur lointain, après que les feux nucléaires ont ravagé le monde – le Grand Boum –, ce qui reste des hommes est revenu à l’âge de fer, leur survie sans cesse mise en péril par des chiens mangeurs d’homme et des clans rivaux. La gnorance, la preuh et les superstitions ont pris le pouvoir. La langue n’est désormais plus qu’un patois menaçant et vif dans lequel subsistent par fragments les connaissances du passé. C’est là qu’Enig Marcheur, douze ans, va prendre la décision inédite de coucher par écrit ses aventures hors normes à la poursuite de la Vrérité en revenant sur les pas des hommes à l’origine du Sale Temps.
Sur le site de l'éditeur
il y a aussi des critiques, parfois assez fournies.
Enig Marcheur c'est un texte dont j'ai entendu parler peu à peu. Dans la librairie où je travaillais à ce moment-là, il y avait quelques libraires-lecteurs passionnés qui parfois allaient se recueillir devant notre petite pile, placée sur une table du rayon Imaginaire. Et qui en parlaient, mais c'était un brouhaha pour moi, je n'y faisais pas trop attention, je les voyais parfois à plusieurs dans ce coin de la librairie et je me disais "ah, c'est pour ce livre qu'ils sont tous là-bas, ce livre, là, dont ils parlent".
Je crois que j'avais même pas capté que c'était une parution de Monsieur Toussaint Louverture, qui commençait à faire parler de lui (au-delà du microcosme libraire) depuis la parution de son premier Steve Tesich,
Karoo.
Donc pendant assez longtemps ce livre est passé sous mon radar. Je ne sais plus quand il a fini par se retrouver en ma possession, je ne sais plus quand j'ai fini par l'ouvrir.
Par contre je me souviens des premières pages.
Ça c'est normal.
Les premières pages on s'en souvient, peut-être on ne l'ouvrira plus jamais après elles mais quoi qu'on en juge, elles laisseront rarement indifférent.
Je me souviens l’avoir ouvert dans le métro entre République et Châtelet, et dans ma tête ça suffoquait de plaisir au cours des premières pages. À Arts-et-Métiers, trois lycéennes bourrées s’étaient installées près de moi, l’une a fini par me proposer de sa bouteille de rosé pendant qu’une autre lorgnait sur ma page. Je me suis dit que le lendemain elle ne s'en souviendrait plus, où mettrait la désintégration de l’orthographe sur le compte de l’alcool

C'est une de mes plus fortes expériences de lecture. C'est une immersion stylistique assez folle. Enig raconte en parlénigm, pour résumer grossièrement c'est notre langue + l'apocalypse nucléaire + 2000 ans sans écoles.
J'ai du mal, forcément, à déterminer dans le livre que j'ai lu ce qu'il y a de Russell Hoban (l'auteur) et ce qu'il y a de Nicolas Richard (le traducteur). L'esprit est de Russell Hoban, c'est sûr.
Ce qui m'a marqué surtout, c'est l'incroyable tendresse que ça suscite assez vite pour le narrateur. Ce filtre à travers lequel nous est exprimée sa vision du monde, cette distorsion ne rend que plus évidente les points communs qui continuent de nous lier, lui et nous, comme s'il était encore un peu nous, plongé(s) au sein d'une époque cauchemardesque.
C'est vraiment devenu un de mes livres préférés, et chaque fois que j'y reviens Enig me bouleverse pareil ou un peu plus. Peut-être j'oserais dire que ce serait lui mon livre sur une ile déserte.
Un aperçu parmi d'autres, surement pas le mieux choisi :
Jai fait entrer Lecouteur et l’ai couvert avec son sac à pionce en suite je l’ai peu lotoné au mi lieu de tous les chiens mouillés. Au chauff et tout confor en plus la schlingue c’été quelq chose qui pouvé te des foncé même pas bsoin de fhumer. Au bout d’un tant eum suis dit quil y avé peu dêtre aussi une aurt odeur là dedans mais j’ai papu dire ce que cété. J’ai comptine hué à radariser tentif un long long tant en suite eum suis dit que j’allé moi aussi me prendre un peu de somnol.
Côté pratique, il faudra aller en bibliothèque ou dans une librairie d'occasion, parce qu'il est épuisé. Monsieur Toussaint Louverture a lancé une collection semi-poche, peut-être qu'ils comptent le rééditer dans ce format, je sais pas. Ce serait bien qu'ils ne laissent pas le texte inaccessible trop longtemps, quand même... Ça fait déjà un certain temps qu'il est épuisé.
Sinon, je pense pas qu'il soit épuisé en anglais. C'est audacieux de tenter la lecture en anglais mais aussi hyper enthousiasmant, vous vous en doutez. Un jour je serai quelque part peut-être entouré de mes livres à nouveau, et parfois j'ouvrirai la version anglaise et j'en lirai une page à voix haute... En attendant, si vous vous y collez... surtout venez en parler ici même après quelques pages ! et en attendant
enjoy the trip through the "sarvering gallack seas and flaming nebyul eye" *_*
mise en scène pour vous permettre, virtuellement, d'apprécier la triple jaquette de l'édition de MTL
(photo Éric Darsan - d'ailleurs ses critiques sont de sacrées expériences de lecture à elles seules)