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Le Monde de L'Écriture » Coin écriture » Poésie (Modérateur: Claudius) » EVANESCENCE ( Temps quatre)

Auteur Sujet: EVANESCENCE ( Temps quatre)  (Lu 2880 fois)

Hors ligne Guy Lafosse

  • Aède
  • Messages: 213
EVANESCENCE ( Temps quatre)
« le: 06 décembre 2022 à 10:27:38 »
                                    EVANESCENCE
                                             
                                    TEMPS QUATRE

DONATIEN  APOGENE AUGENIA  EGIDE ANAEDE

     
                                       DONATIEN 
Parlerions-nous encore de Gybère concernant notre survie,
S’il ne voulait pas s’imposer l’acte fatal qui libère de la vie ?
Cela étant dit, l’accuser d’inculture et du combat que l’on livre,
C’est oublié qu’il a dévoré deux fois l’ensemble de nos livres.

                                        APOGÈNE 
Il n’empêche que si cet entêté lettré veut aller de l’avant,
Il devra exercer ses talents autrement qu’en dormant…

                                         EUGÉNIA
Puisque ce puits de science sait tout et rien n’explique,
Pourquoi lui demande-t-on de nous donner la réplique ?
Confus, imaginons qu’il refuse les actions qui vont suivre,
                               
                                          ÉGIDE
Ce  n’est pas de notre faute si celui-ci ne veut plus vivre

                                        ANAÈDE
Est-ce alogique qu’une vieille souche désavoue,
Une jeune souche qui a sa seule cause se voue ?                     
N’acceptant nullement ce que je ne puis admettre
Me faudra-t-il consulter le devin de mes ancêtres
Ou un autre charlatan médicastre de haut rang
Pour m’expliquer ce qui est totalement aberrant ?
Égide, sans patrimoine, sans titre de noblesse
Sans abuser une souveraine en état de faiblesse
Comment seriez-vous au sein du cercle royal ?

                                     ÉGIDE
Madame, tout arrive pour qui le dessein est loyal…
Cela dit, je rebondirais sur ce que vous me dites là
Le jour où je pourrais croire en ce qui n’existe pas…

                                   ANAÈDE
 À la cour, vos mains n’ont-elles point servi d’appât
En faisant ce qui n’existe pas lors d’un épique repas ?

                                     ÉGIDE
Anaède, doutez-vous vraiment que je regrette,
D’avoir ce que la belle souveraine me prête ?
Si ce duc prétendument venu des plaines d’Ukraine
Avait condamné la forfaiture du fuyard de Varennes,
Puis admis que le ridicule ne tue pas qui a bon estomac,
Dirait-on que grivois est l’appétit des poudrés à frimas ?
                         
                                      ANAÈDE
N’avez-vous pas admis  sans faire d’esclandre
Des vues d’esprit réputées impossible à défendre ?
                                 
                                        ÉGIDE
Madame, pourquoi me faites-vous un si funeste procès,
Sans avoir pris le temps d’évaluer la largeur du fossé ?
Sachant que la reine Ganopée chasse la mauvaise graine,
Pourquoi aurai-je refusé les bontés de l’illustre souveraine.
N’ayant jamais imaginé qu’auprès de moi la reine ne s’affiche,
Contredit, saugrenu, eut été de lui dire que d’elle je m’en fiche ;
Je ne pouvais pas rêver que de mes cinq doigts la reine s’enjoue,
Et que de tout ce qui est incompréhensible, elle en avait le goût.
Je n’ai pas satisfait sa folie pour que je m’enhardisse,
Ni demandé qu’au plus haut, cette même ne me hisse.

                                   ANAÈDE
Revenant à ce plaidoyer monarchique au parfum d’animal
Qui drapé de vêtures qui font honte dépasse son optimale.
Je sais ce que furent les visées de ce boyard haut perché,
Et où il serait si à vous tuer sur le pré, il n’avait pas cherché…
 
                                    ÉGIDE
En rêvant de m’occire via le coup de la botte de Nevers,
N’a-t-il pas vendu son âme dissolue au sortir de l’hiver ?

                                   ANAÈDE
Égide, à choisir entre qui tue et celui que l’on accuse d’abus
Reste que les deux se démènent pour atteindre leur but…
Pourquoi avoir pardonné à celui qui tenta de vous embrocher ?

                                      ÉGIDE
Amie, vous ai-je déjà dit qu'à la vie, je voulais m'accrocher !
Si la loi permettait que, sur pré, ce foldingue ne m’entraîne.
 Je ne pourrais dire ce que je pense et dois à la souveraine.

                                     ANAÈDE
Dois-je taire que la reine croit toujours au savoir de vos mains ?

                                      ÉGIDE
Est-ce de mon fait si aujourd’hui est la veille de demain,
Et si, sans fin, le hasard s'est mis au travers de mon chemin.
Me suis-je déjà glorifié de posséder des pouvoirs surhumains ?
N’était-ce pas à Sa Majesté de pousser plus avant l’examen ?

                                    ANAÈDE
Si vous n’aviez pas affirmé que soigner est un noble dessein,
La reine aurait-elle fait de vous le premier de ses médecins ?
N'est-il pas qu'allégeance faite, vous devîntes hôte de marque
De quatre pitoyables tyrans et de trois pendables monarques ?
Vous considérant comme le plus honnête des hommes,
Convaincue que vous ne pouvez aider ce type bonhomme,
Cher ami, si vous êtes épris de la beauté de la reine Ganopée,
Et si, à n’en plus dormir, doit durer cette fantastique épopée,
Je dis que fou est celui qui patauge dans la souille de ces âmes infâmes
Pour vaincre et y respirer l’odeur jasminée de la plus belle des femmes.

                                       ÉGIDE
Belle amie, puisque vous aimez parler de ce que vous ne savez pas,
Éclairez donc la reine sur l’heure et le choix de ses prochains repas.
Tout cela pour dire que si son Altesse m’avait qualifié d’âne bâté
Je n’ose penser ce qu’il lui serait arrivé si je ne l’avais point épaté.
Enfin, en lui prédisant gloire longue vit sans autre discours,
Je ne pouvais deviner que la souveraine me voudrait à la cour !...
Anaède, si je n’étais pas devenu une sorte d’avaloir référant
Qui aurait enrayé le monarchisme de cette bande de tyrans ?

                                    ANAÈDE
 Peut-être, mais, n’a-t-il pas suffi que vous vous montrassiez amical,
Pour que vous ne devinssiez aussi le ponte des maladies tropicales.
Niez-vous que depuis que la souveraine a fait de vous son atout,
Moins nombreux sont les fidèles qui à sa noble cause se voue ?
 
                                      ÉGIDE
Diable, que pèse la défection d’une poignée de courtisans
Comparée à l’affection profonde de millions de partisans ?
                                 
                                     ANAÈDE
Ce qui est vrai, explique-t-il, que sans même un bonjour,
Un bambocheur aviné se permit de vous parler sans détour.

                                      ÉGIDE
Convenez que si, avec ce pochard, j’avais refusé de deviser
Je n’aurais  peut-être jamais su la teneur de ses funestes visées.
Sans cela, me serais-je souvenu de ce pathétique fêtard,
Quelque vingt-cinq ans plus tôt m’avait traité de bâtard.
Oubliant qu’il avait outragé dame Pipelet d’une vile manière,
Ce valet d’armée s’osa dire, peiné de ne plus voir cette dernière.
À cette énième outrance, ce malfaisant m’obligea à répondre
Que veuve offensée dans la foule jetée n’aime guère se fondre.
Peu après, vivement affecté par le dévia de ce pisse-froid
Je baffais ce matois qui à aucune femme, n’accorde de droit.
Seulement, en analysant les injurie de cet exécrable bouffon,
J’admis que blâmer la forme ne donne pas raison sur le fond…
 
                                   ANAÈDE
Cela étant dit, avait-on besoin de faire un pareil foin
Quand il suffisait de prendre la logique pour témoin ?
Aussi longtemps que femme sera libre de ses choix,
Quoi qu'elle fasse, je dis que honnie soit qui mal y voit…
Enfin, peut-on croire commères qui souvent exagèrent ?
Supposant que l’ancienne couturière eût la cuisse légère,
Que vous-même fûtes fruit d'une pratique adultère,
L’important étant de s’aimer, la manière indiffère…
Au nom de quoi une sainte femme brûlante de désir,
Devrait-elle éteindre sa flamme et bouder son plaisir ?
Qui prétend que passion ravageuse s’évapore un jour,
Ignore que d’amour fou dame Pipelet en rêve toujours.
D’autant que, perdant récemment son indolent conjoint,
Évident fut que, de câlins, la veuve en avait grand besoin…
Cela fait, j’imagine que vous n’êtes pas resté inactif,
Entendu qu’en cas d’excès bon est de punir les fautifs.

                                      ÉGIDE
Afin de veiller à ce que ma protégée de par trop ne boissonne
Il fallait que je l’allasse voir à son mas et qu’à sa porte sonne.
À suivre… 
Traverser  le temps en oubliant ses futiles besoins,
C’est vivre beaucoup mieux avec beaucoup moins.

Hors ligne LOF

  • Prophète
  • Messages: 800
  • Frappé par le vent
Re : EVANESCENCE ( Temps quatre)
« Réponse #1 le: 07 décembre 2022 à 18:08:11 »
 Quel régal ! Entre Racine et Molière.
 Et des trouvailles contemporaines dans le lexique.
 C'est une habileté poétique. (et rhétorique)
 Quant au fond, il brasse les grands thèmes, mais les alexandrins les renouvellent.
Lof

Hors ligne Guy Lafosse

  • Aède
  • Messages: 213
Re : EVANESCENCE ( Temps quatre)
« Réponse #2 le: 08 décembre 2022 à 15:31:48 »
Lof,
Grâce à toi et un peu à mon papa,
J’ai appris ce que je ne savais pas
Que l’on peut être un ripailleur de petite valeur,
Et aussi un minot qui aime qu’on lui jette des fleurs.
Bien à toi.
G.L
Traverser  le temps en oubliant ses futiles besoins,
C’est vivre beaucoup mieux avec beaucoup moins.

Hors ligne Robert-Henri D

  • Calame Supersonique
  • Messages: 1 840
  • ... Et Pelleteur de Nuages
Re : EVANESCENCE ( Temps quatre)
« Réponse #3 le: 08 décembre 2022 à 18:22:13 »
 ;)  Bonsoir Guy Lafosse,

Et bravo pour ce bel exemple de poésie hétérométrique.
Dans chaque vieux, il y a un jeune qui se demande ce qui s'est passé.

(Terry Pratchett)

Hors ligne Guy Lafosse

  • Aède
  • Messages: 213
Re : EVANESCENCE ( Temps quatre)
« Réponse #4 le: 08 décembre 2022 à 20:18:38 »
Robert-Henri D
Merci de m’avoir lu,
Bonne soirée.
Traverser  le temps en oubliant ses futiles besoins,
C’est vivre beaucoup mieux avec beaucoup moins.

 


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