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04 mai 2024 à 07:41:36
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Le Monde de L'Écriture » Salon littéraire » Salle de débats et réflexions sur l'écriture » Il n’est pas de grand homme pour son valet de chambre

Auteur Sujet: Il n’est pas de grand homme pour son valet de chambre  (Lu 2597 fois)

Hors ligne Grégor

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Re : Il n’est pas de grand homme pour son valet de chambre
« Réponse #30 le: 23 avril 2024 à 22:14:05 »
Oui, à présent je ne cite presque plus d'auteurs dans mes textes (dans mes commentaires comme tu peux le voir, j'en cite encore), parce que je trouve que cela fait prétentieux et un peu parvenu.
Surtout quand on récite des lieux communs (un peu comme je l'ai fait sur Kant dans mon message à Claudius).
Ce genre de références effraie les néophytes et agace les connaisseurs... Bref, c'est assez peu utile.
Je n'étais pas en philo mais en science de l'antiquité, lettres classiques.
J'ai mis du temps à revenir sur terre.

Certaines philosophies nous éloignent des situations concrètes que nous vivons. Cette propension à nous guider hors des sentiers de notre vie, alimente l’un des moteurs les plus puissants de notre existence : le déni.
En effet, la vérité n’est pas toujours inconnue et mystérieuse, comme justement, certains philosophes se plaisent à la dépeindre. Certaines vérités sont si bien connues, que leur protagoniste fera tout son possible afin qu’elles puissent demeurer enfouies et voilées, dans les limbes de sa conscience. Et quoi de mieux, afin de n’y surtout pas penser, que d’ergoter sans fin, dans une langue savante, sur des problèmes qui n’exerceront jamais aucune influence sur notre vie ?

Certains problèmes philosophiques peuvent être l’occasion de discussions. Même si souvent, les discussions servent surtout les égos et les malentendus. Chacun développe pour soi sa propre conception des choses, sans prendre véritablement en compte ce que voit et pense les autres. C’est ainsi que la prodigieuse force du déni peut parfaitement s’accommoder de ces discussions. Car qu’est-ce que le déni ? Nous avons déjà dit qu’il consistait à voiler la vérité. Une force psychique qui nous conforte dans nos illusions égocentriques et nous voile une partie de la réalité, sans doute trop douloureuse à affronter.
Ces illusions égocentriques sont la manière dont on rêve de se voir, le désir que l’on a d’être son idéal.

On s’imagine toujours que notre idéal nous rendrait parfaitement heureux. Or, cette idée est fausse. C’est justement parce que nous ne nous connaissons pas et entretenons, à force de déni, les illusions que nous avons sur nous-mêmes, que nous échouons à satisfaire nos véritables désirs.

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Re : Il n’est pas de grand homme pour son valet de chambre
« Réponse #31 le: 23 avril 2024 à 22:22:28 »
Ah ça le déni... Autre sujet sensible, presque par essence fondamentale d'ailleurs... Pareil, vaut mieux nous l'entretolérer, ça possède son utilité en psychanalyse !
Antiquités ? Miam ça a l'air good, j'suis ravi de te lire être revenu sur terre, les sciences humaines certains croient à tort avoir décollé d'autres au contraire n'en reviennent pas. J'suis curieux, convaincu de tout ce que tu pourrais nous apporter notamment en étymologie !
Aplusss j'espère
:)
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Re : Il n’est pas de grand homme pour son valet de chambre
« Réponse #32 le: 23 avril 2024 à 23:03:24 »
Bonsoir Gregor,  :)

J'ai aimé votre emphase (dans votre texte) et aussi un peu, j'avoue, votre provocation.
Pour ce soir, car je suis fatiguée, je voudrais m'attarder quelques lignes sur un passsage, en espérant aller plus loin dans un avenir incertain :

"Mais plus je dépeindrai la hauteur de votre injustice et plus vous en serez fiers, car vous croyez qu’ainsi vous signifierez la grandeur de votre douleur."
Le verbe "dépeindre", au départ m'est apparu anodin, puis je me suis dit qu'il cherchait à me dire le contraire de peindre...sinon, pourquoi ne pas employer "peindre" ? Ce fut un indice précieux, à mon goût, de votre implicite.
"En réalité, vous êtes des comédiens."
Ces "vous" et "nous", comme le soulignait gentiment quelqu'un sont assez efficaces pour la dénonciation,  encore faut-il bien savoir se situer. Car oui, qui est dépeindu finalement, à force de tous ces miroirs ? Et n'est-ce pas une parfois jolie valeur que celle de posséder un peu de fierté ? (Nous ai-je perdus ? ;))
Chacun est peut-être bien le comédien d'un autre, et comme disait Céline : D'un château l'autre...

"Ce que vous voulez, c’est occuper l’espace public. Voilà pourquoi vous êtes dangereux, êtres d’ambition." Ce me serait semblé approprié d'user d'exclamation là-dedans, mais soit, vous faites parfois votre timide...

Quant à Homère, un bien bel argument que celui de la preuve (pour quelqu'un qui dénonce sans jamais ne citer aucun chiffre ni aucun nom de son méchant adjuvant ;))...

Enfin, j'adhère au fait que l'œuvre peut être un chef même lorsque son auteur est inconnu, car la reconnaissance se fait par la Critique et la réception.
Pour ce qui est de la récompense, c'est une autre histoire.... :oxo:
Bref, ce petit mot d'encouragement !
SOo

« Modifié: 23 avril 2024 à 23:08:44 par SablOrOr »
"Aimer quelqu'un c'est le lire". Christian Bobin.

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Re : Il n’est pas de grand homme pour son valet de chambre
« Réponse #33 le: 23 avril 2024 à 23:16:32 »
 :miaw:
Citer
mais déjà, arrêter de référer aux auteurs, c'est inutile et ça fait encore pluss fuir ! mais surtout, surtout, ne pas envenimer les choses, le sarcasme en philo ça marche paaaas du tout au contraire ! tout ce que tu peux affirmer comme étant solide philosophiquement, ce n'est valable qu'entre déjà-convaincus ! et c'est contre-philosophique d'asséner ce qui doit aller se chercher et se trouver par soi !
d'accord avec ça

Citer
ça me rend vraiment triste de voir cette escalade tout à fait improductive et au contraire qui renforce chacun dans ses convictions initiales, ce qui est exactement à l'inverse de toute idéologie philosophique qui se respecte
avec ça aussi

Citer
Si j'ai adopté cette position énonciative, un peu arrogante et suffisante, c'est justement parce que je n'arrivais pas à dire les choses autrement, c'était sans doute une souffrance de mon ego. Je me sentais peut-être incompris, je fantasmais un peu sur les grands hommes et j'avais l'espoir de faire de grandes oeuvres moi aussi.
je comprends ça

Citer
car on ne pourrait pas vraiment transférer des mots de kant ou tout autre écrivain un peu compliqué dans le même niveau de langage à destination des échanges démocratiques
C'est vrai pour Kant, pour Sartre et les autres...
Je suis pas hyper calé en philo, mais si t'as pas tous les concepts derrière les termes, c'est pas simple de discuter philo.
Par exemple, discuter de "l'être", de l"'essence", de l'existence" : soit tu dis (voir Sartre), soit tu réexpliques tout le bordel et y en a pour des plombes.

Donc citer les philosophes, c'est pas inutile, le faire sans avoir l'air de se la péter, c'est pas simple...

Après, dans ton texte, Grego, tu dis :
Citer
Vouloir imposer le joug de la vertu à l’art ou à la science est une erreur grossière, qui ne peut être commise que par des gens vulgaires, qui ne connaissent pas l’histoire de l’art ni de la science.
Et là, tu donnes un avis en disant que ceux qui n'ont pas le même sont des gens vulgaires, sans culture... et là, ben je me sens agressé.
Personnellement, je ne vais plus voir d'expo Picasso et j'ai viré les Picasso de ma bibliothèque. Parce que l'homme me répugne, je n'ai pas envie de m'intéresser à son oeuvre. Si tu me dis que je ne connais pas l'histoire de l'art, j'ai envie qu'on en discute parce que c'est absolument faux.

Citer
Brûlons Homère qui concevait qu’il puisse exister des esclaves !
là, selon moi, c'est un non sens ; culturellement le monde de la Grèce antique était un monde où l'esclavage était une "norme". (alors que le viol n'était pas une norme en France au XXe siècle... je parle de Picasso bien sûr).

Citer
Ils ne supportent pas l’idée qu’un criminel puisse avoir du talent et ait le droit de le partager à travers ses œuvres. Leur haine voudrait anéantir totalement le criminel.
Pour rester sur l'exemple de Picasso, je ne veux pas l'anéantir, juste je ne peux plus regarder une de ses oeuvres, car je pense au Minotaure qui est derrière. Idem, je n'écoute plus Noir Désir que j'ai adoré pendant des années.

Citer
Tous ceux qui aiment une œuvre n’ont que faire de la vie de l’auteur qui l’a créée.
hé ben pas moi

Citer
Quand vous attaquez à travers une œuvre son auteur, vous insultez ceux qui aiment cette œuvre.
Faux, si quelqu'un me dit "j'dore Picasso" et que je lui dis que c'était un violeur et qu'on me réponds "oui, je sais mais j'aime l'oeuvre quand même", je dis juste "je ne suis pas d'acord", je n'insulte personne.

Citer
Nous jugeons de la folie de certains grands hommes d’esprit, mais est-ce que le jugement que l’on porte sur eux, nous garantit, que nous ne serons pas ridicules, avec nos jugements, si l’on se mesure vraiment à la démesure de leurs œuvres ?
je pense que l'on "juge" un crime commis par un fou autrement qu'un crime commis par quelqu'un reconnu maître de ses actes, non ?

Citer
Je voudrais donner l’envie et les moyens, au commun des mortels, de se hisser à la hauteur des plus grands.
le genre de phrase qui peut faire grincer les dents, non ?
Fais-tu partie du "commun des mortels" ?

Bref, j'ai essayé de commenter ton texte, mais au final, je ne fais pas un commentaire littéraire. Je donne quelques contre-arguments, mais la section "textes courts" ne me semble pas la section adéquates pour un débat philo. Voir les sections discussion par exemple.

A+
Rémi

(et oui, essayons de ne pas nous foutre sur la tronche ^^)
Le paysage de mes jours semble se composer, comme les régions de montagne, de matériaux divers entassés pêle-mêle. J'y rencontre ma nature, déjà composite, formée en parties égales d'instinct et de culture. Çà et là, affleurent les granits de l'inévitable ; partout les éboulements du hasard. M.Your.

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Re : Il n’est pas de grand homme pour son valet de chambre
« Réponse #34 le: 24 avril 2024 à 00:04:17 »
Merci Rémi pour ton commentaire et ton intervention,
Personnellement je comprends que tu puisses ne plus apprécier Picasso à cause de sa vie (j'ignorais qu'il était un violeur).
Et c'est vrai que mon ton était un peu méprisant pour ceux qui pourraient penser différemment.
Je comprends que tu puisses te sentir agressé par mes propos.
Si je devais les réécrire j'en prendrais note et je serais moins péremptoire.
Après personnellement j'adore toujours écouter Noir Désir.
J'ai même aimé lire des trucs un peu cinglés dans le genre de Lautréamont.
Dans l'antiquité c'était aussi assez tordu et j'avoue que j'ai aimé lire dans la langue d'Ovide par exemple des histoires très dérangeantes.
Après, je préfère préciser que je ne suis pas moi-même détraqué.
Pour moi c'est une expérience littéraire (comme d'autres regardent des films d'horreur, je déteste les films d'horreur).
Bien sûr il est normal de condamner les agissements des criminels et je ne cherche pas à protéger les artistes des poursuites judiciaires.
Mais certains artistes ont peut-être été des crapules ou ont cherché à l'être (je m'encrapule le plus possible).
François Villon n'était peut-être pas un saint, Céline non plus et Heidegger était nazi.
Pour moi l'oeuvre est indépendante de la vie de son auteur.
Mais ce n'est pas forcément vous que je visais dans mon texte.
Si vous lisez bien je pointe du doigt les personnes qui essaient d'exister sur le dos de ces faits divers.
Il y a toute une bande d'imposteurs anti-Heidegger par exemple.
Lio la chanteuse de karaoké qui s'en prend à Bertrand Cantat.
Les héroïnes anti-Polanski.
Toutes ces pseudo-vedettes qui veulent les projecteurs et qui brillent par leur absence de talent et leur manière de récupérer l'attention.
Je dis bien dans mon texte que ma seule hésitation c'est que ce genre de manifestations peut amener un changement sociétal.
Mais quand on juge des oeuvres, selon moi, il ne faut pas y mêler les faits divers, sauf si cela apporte un éclairage esthétique sur l'oeuvre.
L'oeuvre n'est pas le fruit d'un individu mais d'une époque, de quantité de sources et d'interprétations.
Après chacun fait comme il veut ou peut.
Merci pour votre retour qui a le mérite d'être argumenté, preuve que même si l'on pense différemment, on peut toujours communiquer et échanger.

« Modifié: 24 avril 2024 à 00:07:18 par Grégor »

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Re : Il n’est pas de grand homme pour son valet de chambre
« Réponse #35 le: 24 avril 2024 à 09:59:59 »
y'a ptetr aussi un délire d'incomplétude au ralliement ? c'pas parce qu'une idée nous parait bonne qu'on est d'accord avec le paradigme en entier de celui qui l'énonce... d'un point de vue purement pragmatique et non esthétique, on ne peut ôter à picasso son apport intellectuel à l'art, la théorie du cubisme est une révolution qui a apporté bcp, et cela n'a aucun lien de causalité avec le fait qu'il soit un violeur... on peut donc boycotter le violeur, mais est-ce que le peintre mérite le même sort ? perso j'ai du mal avec le culte de la personnalité, d'encenser un peu trop hâtivement la personne plutôt que ce qui nous à plu chez elle, en oubliant que sur d'autres points on ne la suivrait pas, ou au contraire rejeter à cause d'un truc qui nous va pas sans prendre en compte ce qui fait ses qualités irréfutables... bon, après j'suis ptetr biaisé par mes espoirs de trouver ralliement, ça me fait souvent très mal de constater qu'après avoir été d'accord avec qqun sur un sujet précis, on diverge sur d'autres points, mais ça c'est mon retard psycho-social personnel un peu trop naïf qui me rend susceptible et fragile, alors que c't'une réalité qui peut vite être prise sereinement

en tous cas j'suis d'accord avec ta dernière phrase grégor, c'cool quand on peut réfléchir ensemble dans la diplomatie lexicalisée, force qui arrive quand on relativise nos pulsions outragées
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Hors ligne Alan Tréard

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Re : Il n’est pas de grand homme pour son valet de chambre
« Réponse #36 le: 24 avril 2024 à 11:12:55 »
Bonjour Grégor,


Si tu souhaites provoquer des contre-arguments, il y a la section Débat et réflexion sur l'écriture qui me semble mieux adaptée à ce genre de démarche.

Tu demandes quelque part dans tes interventions à ce que l'on parle du style dans la philosophie (je n'ai plus la citation exacte). Eh bien, j'ai l'impression que tu as un style assez spontané, pour ne pas dire impulsif, comme mu par les émotions, qui ne me paraît guère correspondre à un idéal philosophique. C'est l'impression qui me reste après lecture du texte et des interventions autour du texte.

En envisageant que cette impression se confirme, je te conseillerais d'essayer de revenir à une certaine forme de raisonnement logique (qui me paraît difficile à atteindre individuellement parlant mais possible pour tout un chacun) qui remette au cœur du texte la raison, le pourquoi.

Pourquoi distingue-t-on l’œuvre de l'auteur ? Un exemple qui ne dise pas si c'est bien ou si c'est mal de le faire, mais qui cherche seulement à comprendre pour quelle raison de façon ouverte sans réponse préétablie. Pourquoi ne fait-on pas cette distinction ? Un autre exemple de pourquoi qui ne cherche pas à interdire mais à parler de cela.


Et voici pour mon humble contribution, en espérant que ce soit propice à éviter toute future conflictualité.

À bientôt.
Mon carnet de bord avec un projet de fantasy.

Hors ligne Grégor

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Re : Il n’est pas de grand homme pour son valet de chambre
« Réponse #37 le: 24 avril 2024 à 19:21:56 »
Dot Quote, je suis complètement d'accord avec vous, on peut prélever chez les auteurs où les gens ce qui nous intéresse et ce qu'ils ont de meilleur sans disqualifier ce meilleur au nom du pire.

Alan, oui je vois qu'il y a des sections plus appropriées mais argumenter et donner ses raisons me semble nécessaire quelle que soit la section. Sinon c'est du j'aime ou j'aime pas et je ne vois pas trop l'intérêt.
L'étymologie d'émotion c'est justement de mettre en mouvement, de faire bouger celui qui est sous le coup d'une émotion. Mes émotions peuvent me servir d'inspiration comme dans ce texte qui est un pamphlet. Mais je ne sais pas si vous m'avez lu ailleurs, car je n'écris pas que des pamphlets. Ce texte a suscité des émotions auxquelles j'ai répondu. Je ne suis pas philosophiquement particulièrement partisan de l'absence d'émotion. Au contraire j'aime mêler poésie et philosophie et je défends philosophiquement la place de la poésie vis-à-vis des domaines objetcifs.
Après si vous lisez mon texte et mes commentaires vous verrez que j'explique le pourquoi. Il est plus facile de juger  moralement la vie d'une personne que d'étudier l'esthétique d'une oeuvre.

Hors ligne Alan Tréard

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Re : Il n’est pas de grand homme pour son valet de chambre
« Réponse #38 le: 24 avril 2024 à 20:41:54 »
Bonjour Grégor,


Il y a un usage régulier de la section des Textes courts qui est de privilégier la discussion sur la forme plutôt que sur le fond. On évite le débat par ici.

Un usage qui n'exclut pas quelques cas particuliers, évidemment, mais un usage qui tend malgré tout à s'imposer, un peu comme une règle ou une norme.

Ce n'est pas le cas de la section des débats où il est bien plus facile d'aborder ces questions de fond sur les arts et la littérature.

Je vais donc tenter de faire une critique de ta façon de voir les choses, en rebondissant sur le pourquoi du texte, mais en ne m'engageant pas dans un réel débat.

Citation de: Grégor link=topic=40047.msg671037#msg671037
Après si vous lisez mon texte et mes commentaires vous verrez que j'explique le pourquoi. Il est plus facile de juger  moralement la vie d'une personne que d'étudier l'esthétique d'une oeuvre.

Pour un philosophe, je trouve que les questions de morale et d'éthique peuvent être bien plus difficile à aborder qu'il n'y paraît.

Que des gens aient une préférence pour la morale et pour les jugements plutôt que pour l'esthétique et les arts me semble être une conclusion un peu hâtive lorsqu'on constate que la vie de l'auteur ou de l'artiste peut influencer la perception artistique de son œuvre. Le contexte a tendance à faire évoluer la perception que l'on a d'une œuvre. Ce contexte fait partie de la perception : je vois le cadre autour du tableau. Et ce cadre influence mes émotions, comme l’œuvre d'art elle-même.

Je reconnais qu'il y a bien souvent une dimension morale dans l'émotion qui concerne le contexte de l’œuvre, mais je ne pense pas que cette dimension soit le seul facteur d'influence.

Quand le fond et la forme sont trop contrastés, ça peut provoquer une forme de frustration ou de dégoût. L'apparente naïveté de Picasso contraste avec le fond de qui il est vraiment, or ce n'est pas qu'une question de morale, c'est aussi une question de perception artistique.

Lorsqu'on sait qui est quelqu'un, on peut être surpris par ce qu'il donne à voir de lui-même.

Et ça reste une question artistique, m'est avis, quand bien même cela ne résout pas toutes les questions que l'on se pose à propos des œuvres ou du contexte des œuvres (je considère la vie de l'auteur comme un contexte à l’œuvre).


Sur ce, je m'arrête ici car le lieu n'est pas idéal pour mener un débat.

J'espère que tu comprendras que l'usage veut qu'on évite de mener un débat dans la section des textes afin de faciliter la dimension « atelier d'écriture » qui est au cœur du forum.
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Hors ligne Rémi

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Re : Il n’est pas de grand homme pour son valet de chambre
« Réponse #39 le: 24 avril 2024 à 23:10:03 »
Citer
rejeter à cause d'un truc qui nous va pas sans prendre en compte ce qui fait ses qualités irréfutables...
Qu'on soit clairs, je n'enlève rien au génie de la peinture de Picasso ! Esthétiquement, il a fait un nombre d'oeuvres formidables, je le sais bien et j'ai adoré les regarder, les étudier pendant des années. Mais maintenant, quand je vois un de ses tableaux, j'ai du mal à ne pas penser au monstre (potentiel ? réel ?) qui tient le pinceau et ça rend impossible pour moi l'appréciation esthétique de l'oeuvre.



On peut regarder cette toile en sachant que Picasso a vraisemblablement violenté la femme qui pose sur ce tableau ?

à lire :
https://www.slate.fr/story/244661/peut-on-aimer-oeuvre-picasso-comportement-violent-viols-femmes-feminisme

« Modifié: 24 avril 2024 à 23:20:08 par Rémi »
Le paysage de mes jours semble se composer, comme les régions de montagne, de matériaux divers entassés pêle-mêle. J'y rencontre ma nature, déjà composite, formée en parties égales d'instinct et de culture. Çà et là, affleurent les granits de l'inévitable ; partout les éboulements du hasard. M.Your.

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Re : Il n’est pas de grand homme pour son valet de chambre
« Réponse #40 le: 25 avril 2024 à 08:21:13 »
Avoir l'esprit clair sur la mentalité des artistes c'est une chose que l'on doit avoir en tête. On peut lutter contre les abus de pouvoirs de toutes sortes, veiller à installer des rapports équitables entre nous, balayer devant notre porte... ensuite l'acte artistique est souvent débordant, déviant... c'est ce qui crée le plus souvent le génie, assez logique que les êtres qui produisent un tel chamboulement des lignes tracées soit eux-mêmes débordant, déviant... delà à glisser vers la pathologie ou la malveillance...
Quand on regarde une œuvre on peut y voir maintes choses, si on enlève les œuvres des déviants des musées ou des bibliothèques, j'ai peur qu'on fasse beaucoup de place.
Après je pense que bien entendu lorsque je regarde un film d Hitchcock ou une peinture de Picasso, je sais que les hommes qui l'ont produit étaient des saloperies, mais l'œuvre ne leur appartient plus, elle les a dépassés, elle appartient à l'humanité comme les crimes au Rwanda ne sont pas que des crimes d'anonymes mais les nôtres aussi, parce que notre histoire est rempli de merveilles et d'horreurs, qu'il n'y a pas de progrès sans en avoir conscience peut-être, que c'est avec cette conscience là que nous pourrions avancer ( bon j'ai peur que se soit mal barré).
Ensuite, je crois que ceux que l'on cite sont ceux qui ont franchi le fameux mur de verre, l'ont fait explosé même. Pour s'imposer dans le cinéma ou dans les arts plastiques ( j'ai bien dit s'imposer, pas seulement en vivre ou en survivre) il faut avoir un égo démesuré, une psy particulière... j'ai peur que dans le monde où nous vivons ( et peut être même de plus en plus), le talent ne suffise pas ( et peut-être de moins en moins, au moins Picasso était génial, pas certain que Jeff Koons soit génial, hormis en com et en utilisation d'un système). J'ai bien peu que le système favorise l'élévation de personnes profondément narcissiques donc potentiellement violente, dominatrice... est ce que les récentes remises en question pourront faire avancer les choses ? Est ce que ça n'a pas aussi à voir avec la sélection des projets, l'accumulation des questions de financement, la violence intrinsèque d'un système, celui du cinéma par exe. Course aux subvention, course au appel d'offre artistique, course aux concours, courses aux bourses, courses aux résidence... des tas de courses qui mettent en place des liens de subordination, de soumission ( tient, quand on poste un manuscrit, on le soumet non ?)

B

PS : quand je regarde le tableau, je vois la mythologie. L'auteur a disparu. Le thème est préexistant comme 10 000 œuvres d'art donnant à voir des scènes mythologiques fascinantes illustratrice de la psyché humaine, de sa complexité, de sa violence...Quand au minotaure lui même que dire de son père ? Poséidon, un dieu qui abuse par taureau interposé. Ensuite, je peux m'intéresser à la fascination de Picasso pour le minotaure bien entendu, mais ce n'est plus une sensation plastique, artistique, c'est une interrogation sur la psy, la philo etc
Est ce que Tolkien était un sale raciste ? Le résultat de son éducation dans un pays colonialiste, impérialiste ? Le résultat de sa fascination pour les cultures européennes ? Un vulgarisateur qui s'est appuyé sur la dualité, l'opposition bien/mal et toutes sa symbolique et toute sa simplification. ( Bien que Bilbot par ex, soit un personnage complexe)

Bon, c'est une discussion sans fin, non ?


« Modifié: 25 avril 2024 à 09:01:30 par Basic »
Tout a déjà été raconté, alors recommençons.

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blog d'écriture : https://terredegorve.blogspot.com/

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Re : Il n’est pas de grand homme pour son valet de chambre
« Réponse #41 le: 25 avril 2024 à 08:45:10 »


Oups, rectification, fil déplacé dans débats et reflexions sur l'écriture...
Usage de la fenêtre : inviter la beauté à entrer et laisser l'inspiration sortir. Sylvain Tesson

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Hors ligne Grégor

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Re : Il n’est pas de grand homme pour son valet de chambre
« Réponse #42 le: 25 avril 2024 à 09:31:17 »
Rémi, je trouve ce tableau magnifique.
Et pour être sincère, le fait de savoir que Picasso était un monstre, un violeur et un bourreau n'enlève rien pour moi à la beauté du tableau.
Je trouve même qu'elle éclaire en partie le regard du Minotaure. Peut-être que j'extrapole mais j'ai l'impression d'y voir le regard de Picasso sur l'horreur et l'irrésistibilité de son désir.
Il est normal que l'on accuse les criminels et que l'on défende les victimes dans une société.
Dans notre vie quotidienne aussi.
Mais il me semble qu'en art et en pensée (en science même), on peut s'intéresser à d'autres points de vue, notamment celui des criminels et des bourreaux.
Parce qu'une telle situation d'horreur impacte tous les acteurs et que même si je ne souhaiterais pas vivre de tels drames personnellement, cela m'intéresse en tant qu'homme de comprendre les différents points de vue.
Bien sûr la priorité est bien morale, à savoir, éviter de telles horreurs.
Mais peut-être qu'en s'interrogeant sur les causes de telles violences et en recherchant auprès de ceux qui les commettent la racine du mal, on pourra mieux prévenir et arrêter ces crimes.
Si ce tableau dépeint un viol, je crois qu'il peut être bon de le voir et d'essayer de le comprendre, plutôt que de fermer les yeux et de faire comme si cela n'existait pas et ne pouvait pas arriver.
On prévient mieux les crimes quand on en est averti.
Je vois dans le regard du Minotaure un remords quant à ce qu'il est en train de faire et en même temps son attitude semble décidée et rien ne semble pouvoir l'arrêter (son corps est déterminé à violer et ses bras puissants enserrent la victime).
Peut-être que je me trompe complètement sur l'interprétation du tableau, je dis seulement ce que je crois voir.

Alan, je ne parlais pas d'éthique au sens philosophique.
Je parle de la morale au sens nietzschéen, à savoir, la morale du ressentiment.
Il est facile de dire que violer c'est mal, de condamner cet acte et de faire la une des magasines.
Je pense que tout le monde sait que ces magasines intéressent l'opinion vulgaire qui aime au fond ce genre d'histoires sordides tout en faisant celle qui est choquée (un mécanisme pour masquer sa propre honte devant son appétit de détails juteux et violents). En condamnant le criminel, il y a aussi une manière pour l'opinion publique de se purger de son propre désir de violence qui est le fondement de son voyeurisme.
Mais il y a aussi un profond ressentiment, car tous ceux qui ont l'impression de rater leur vie ont parfois l'occasion de se venger de ceux qui ont réussi la leur (ou qui donnent cette impression en étant fameux er reconnus), je pense aux artistes (Cantat, Polanski), aux philosophes (Heidegger) ou aux écrivains (Céline) par exemple.
L'occasion leur est donnée à peu de frais de se venger de leur ressentiment envers la vie et d'écraser celui qu'hier ils admiraient.
C'est le même mécanisme qui pousse à admirer, à être fan (finalement à se dire que quelqu'un vaut mieux que nous) et qui se renverse dès que l'occasion est trouvée de piétiner une idole.
Si on était conscient du travail qu'il faut accomplir pour réussir une oeuvre, plutôt que de croire au génie ou aux hommes supérieurs, alors on travaillerait pour être admirables à nos propres yeux et ne plus être dans le ressentiment/admiration envers les stars ou les artistes.


mercurielle

  • Invité
Re : Il n’est pas de grand homme pour son valet de chambre
« Réponse #43 le: 25 avril 2024 à 09:51:11 »
En tant que femme, je me sens insultée par cette "œuvre d'art". Notez bien que le modèle ne semble pas se défendre beaucoup... Peut-être apprécie-t-elle ? 

En revanche, "L'Origine du monde" ne me perturbe pas autant. Il  glorifie le femme. 

PS : impossible de trouver une bonne image de cette œuvre sur le net.

Hors ligne Grégor

  • Calligraphe
  • Messages: 120
Re : Il n’est pas de grand homme pour son valet de chambre
« Réponse #44 le: 25 avril 2024 à 10:16:57 »
Mercurielle, oui vous avez raison, elle ne se défend pas beaucoup et semble résignée (enfin c'est mon interprétation). La position de son corps est intéressante, elle est comme tordue et je trouve d'un point de vue esthétique que cette torsion est magnifique. Le dessin en général est très beau : à la torsion du buste correspond celle de ma main, ce qui me donne l'impression que cette femme est renversée et écrasée.
Après je ne comprends pas trop votre "en tant que femme". Cela sous-entend qu'en tant qu'homme on serait moins susceptible de comprendre la détresse d'une femme violée.
« Modifié: 25 avril 2024 à 10:32:11 par Grégor »

 


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