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29 mars 2024 à 06:34:03
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Le Monde de L'Écriture » Coin écriture » Textes mi-longs » Les disparus du Cap d'Arme - Terminé

Auteur Sujet: Les disparus du Cap d'Arme - Terminé  (Lu 2932 fois)

Hors ligne John Lucas

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Les disparus du Cap d'Arme - Terminé
« le: 28 juillet 2020 à 10:19:01 »
C'est l'été, c'est les vacances.
Un groupe de jeunes décide d'organiser une soirée pour fêter ça.
Ils ont bien l'intention de veiller toute la nuit.
Celle-ci sera effectivement très longue, mais pas tout à fait comme ils l'imaginaient...

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À l'origine, il s'agit d'un scénario de film que j'ai écrit il y a une quinzaine d'années et que j'avais complètement oublié. Je l'ai retrouvé dans mon google drive un peu par hasard. Le projet ayant été abandonné depuis maintenant bien longtemps, je décide de le sortir sous forme d'une nouvelle. Bien entendu, il y a un besoin de réécriture et cela va prendre un peu de temps, mais toutes les idées sont déjà là. Il y a même un découpage qui représentait les différentes scènes du film et qui seront donc mes chapitres :)

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Journal
Mauvaise influence
Faisons la fête
Fin de soirée
Promenons-nous dans les bois
À la maison
Retrouvailles
La quête du phare
La descente aux enfers
Chaque chose à sa place
« Modifié: 12 septembre 2020 à 17:26:12 par John Lucas »

Hors ligne John Lucas

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Re : Les disparus du Cap d'Arme
« Réponse #1 le: 28 juillet 2020 à 10:20:49 »
Journal

Extrait du journal "Le petit provençal" du 2 juillet 2001

Une bande d'adolescents introuvable depuis un an

Cela fait maintenant un an, que l'île de Porquerolles a vécu un traumatisme.
Dans la nuit du 2 au 3 juillet 2000, un groupe de six jeunes, cinq garçons et une fille, âgés de 16 à 19 ans, partait pour le week-end, camper au Cap d'Arme.
Le lendemain, certains parents s'interrogeaient car leurs enfants ne répondaient pas à leurs appels. Les autres, peut-être plus habitués aux comportement rebelles de leur progéniture, ne semblaient pas plus inquiets que cela. Les plus angoissés décidaient tout de même de se rendre sur place afin de se rassurer.
Arrivés sur place, ils découvrirent les tentes. Elles étaient toutes vides et maculées de sang, à l'exception d'une, dans laquelle se trouvait un petit garçon d'une huitaine d'années.
Ils prévinrent immédiatement la police et les recherches commencèrent très rapidement. Toute l'île fut ratissée au peigne fin sans qu'un seul indice ne fût trouvé. On eût dit que la bande s'était comme volatilisée.
Les semaines, les mois passèrent. Les affiches, avec les portraits des jeunes, placardées dans tout Porquerolles disparurent petit à petit. La population semblait se faire une raison : on ne les retrouvera jamais.
Aujourd'hui, le chérubin n'a toujours pas été identifié et les adolescents sont toujours mystérieusement portés disparus. Ont-ils été tués ? kidnappés ? Se sont-ils enfuis ? Nous ne le sauront probablement jamais.

Hors ligne John Lucas

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Re : Les disparus du Cap d'Arme
« Réponse #2 le: 28 juillet 2020 à 10:22:03 »
Mauvaise influence

    Derrière son caddie, Enzo, adolescent chétif de 18 ans, semble un peu perdu au milieu des rayons. C'est la première fois qu'il fait les courses tout seul. Ce soir, il fête son bac, avec des amis, dans la maison familiale, que ses parents lui ont laissée pour le week-end. Après avoir déambulé de rayon en rayon, le chariot est plein : alcool, sodas, biscuits apéritifs, gobelets et préservatifs pour la soirée, pizzas et raviolis pour les repas, et du lave-glace. La vieille Polo est encore à sec. Il ne reste plus qu'à passer à la caisse.

    Sur le parking, son téléphone sonne.

    « Oui m'man ?

    — Alors, ça se prépare cette soirée ?

    — Oui oui. Je sors tout juste du supermarché.

    — J'ai oublié de te dire, n'oublie surtout pas d'enlever le cadre avec la photo de Gabi.

    — Pas de problème, répond-il dissipé. Le téléphone bloqué entre l'épaule et l'oreille, il décharge les commissions dans le coffre.

    — Bien. Je t'appelais juste pour ça. Allez, à dimanche soir. Bisous.

    — Bisous m'man.

    — Bisous m'man, reprend une voix moqueuse derrière lui. »

    C'est Adam, un grand gaillard de 20 ans, le caïd du lycée. Il est accompagné de ses deux complices : Léo, fils à papa prétentieux, occupé à siffler une fille au loin, et Nathan, rondouillard, la main plongé dans un paquet de chips qu'il a piqué dans le caddie d'Enzo.

    « Qu'est ce que c'est tout ça ? demande le chef de la bande.

    — Euh, rien. Euh, mes parents veulent faire un petit repas de famille pour célébrer mon diplôme. »

    Le colosse donne un coup de poing dans la frêle épaule du nouveau bachelier, qui en lâche le bidon de lave-glace qu'il avait dans les mains. Celui-ci roule sous la voiture garée sur l'emplacement voisin.

    « Avec de la despé et des capotes ? Pas à moi, mec. En plus, on est passé devant chez toi et la voiture de tes vieux n'est pas dans l'allée. Tu organises une soirée et tu ne veux pas nous inviter, c'est ça ?

    — Non, non. Ce n'est pas ça. C'est juste que, euh, il n'y aura que des mecs comme moi. Je me suis dit que vous risquiez de vous faire chier avec uniquement des geeks.

    — T'inquiètes, tant qu'il y a de l'alcool et des filles, c'est le principal. Allez les gars, venez chez moi, on va se préparer. On a une soirée de folie qui nous attend. »

    Les trois compères s'éloignent, sans laisser la chance à Enzo de leur faire part de son désaccord. Ce qu'il avait craint va arriver : les délinquants du bahut vont débarquer chez lui ce soir. C'est donc contrarié qu'il termine rapidement de vider le chariot dans la voiture et qu'il repart chez lui.



    L'orage gronde en ce début de soirée. Adam, allongé sur son lit, s'amuse à faire des figures avec son couteau papillon. Nathan est occupé à regarder un porno. Comme à son habitude, il mange un paquet de chips et en met un peu partout, ce qui agace le propriétaire de la chambre.

    « Putain, gros lard, t'en fous partout ! C'est pas comme ça que tu vas trouver une meuf. Tiens d'ailleurs, ce soir, tu vas encore te la coller et rester à les regarder sans rien faire ?

    — Bah ouai comme d'hab ! intervient Léo. Il est devant la glace. Il se coiffe et met du parfum. En tout cas, moi, ce soir, j'emballe, c'est certain.

    — J'espère qu'il y aura sa cousine. Vous savez, Emma. Elle est pour moi. Compris les gusses ?

    — Ouai, c'est ça. Tu vas encore te manger un gros râteau.

    — Ah ah, très drôle, Di Carpaccio. Bon allez, on y va. J'ai envie d'y être en premier, pour m'en jeter quelques uns avant l'arrivée de la belle. »

 

    La bande arrive rapidement chez Enzo. Il habite à quelques pâtés de maison. Adam frappe, sans douceur, à la porte. L'hôte, surpris, ouvre la porte.

    « Euh, mais... La soirée n'est que dans une heure.

    — Ouai ouai, t'inquiètes. On va se poser dans le canap' avec une bonne bouteille en attendant les autres. »

    Le fluet, inquiet de laisser les énergumènes seuls dans le salon, finit les préparatifs à vitesse grand V dans l'espoir de n'avoir rien oublier.

Hors ligne John Lucas

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Re : Les disparus du Cap d'Arme
« Réponse #3 le: 31 juillet 2020 à 15:30:01 »
Faisons la fête

 La fête bat son plein dans la grande maison. Alors que certains discutent, en toute tranquillité dans le salon, d'autres sont déjà occupés à des jeux à boire dans la cuisine. Enzo, lui, se démène pour discuter avec chaque groupe. Il garde, tout de même, un œil sur les trois caïds, en permanence. Il est persuadé qu'au moins l'un d'eux va perturber la soirée, d'autant plus que Nathan semble déjà bien éméché.

 Voilà justement un grand brun ténébreux, au style un peu gothique, qui s'invite dans leur trio.

 « Bonsoir messieurs ! Laissez-moi vous conter la légende urbaine des disparus du Cap d'Arme.

 — Eh mec, tout le monde s'en fout de ton histoire, l'apostrophe Emma, au loin.

 — Ne faites pas attention à cette petite écervelée. Elle réclame juste de l'attention.

 — Fais gaffe à ce que tu dis, enfoiré, s'énerve déjà Adam, agrippant son vis-à-vis par le col. Elle a raison, tes conneries, Tout le monde s'en branle. »

 Enzo bondit de sa chaise. Il essaie tant bien que mal de les séparer. Son frêle gabarit ne l'aide en rien.

 « Steuplé Adam, pas de bagarre. En plus, tu sais que ma cousine déteste ça. »

 Il a visé juste. Le colosse relâche son étreinte.

 « Tu as de la chance. Je n'ai pas envie de gâcher mes chances pour un connard dans ton genre. Maintenant, dégage !

 — Avec plaisir, puisque tout le monde semble ignorer que des jeunes sont mystérieusement disparus dans la région il y a tout juste vingt ans. »

 À ces mots, un frisson parcourt le corps du propriétaire des lieux.

 L'étrange garçon s’apprête à sortir. Juste avant de franchir la porte, il ajoute, le regard noir, pointé vers le groupe :

 « J'espère que vous subirez le même sort que ces malheureux, bande de mécréants. »

 C'en est trop. Le grand gaillard est prêt à en découdre. Ses amis sont obligés de seconder Enzo pour le retenir.

 « Laisse tomber. Va plutôt parler à Emma. Elle te verra peut-être comme le prince charmant, qui a volé au secours de la belle, le provoque Léo.

 — T'as raison, mec. Nathan, regarde un peu comment on emballe une meuf. »

 Il s'éloigne et accoste la jeune fille de manière un peu gauche. Le rondouillard, pas très intéressé par les techniques de drague de son pote, se retourne vers la table pour reprendre la bière qu'il avait avant l'échauffourée. Cela constitue son échappatoire face à son problème de timidité avec le sexe opposé.

 « Merde ma bière. C'est bizarre, je suis certain de l'avoir laissée là. Au fait, c'était qui se type chelou ? Je savais que tu traînais avec des mecs bizarres, mais là, il atteint des sommets, lui.

 — Bah en fait, je ne le connais pas. Au début, je pensais que c'était vous qui l'aviez invité. J'ai bien compris que ce n'est pas le cas. L'essentiel, c'est qu'il soit parti. Allez, suis-moi dans la cuisine, je vais te refiler une binouze puisque la tienne a mystérieusement disparu. C'est peut-être l'autre type qui l'a fait disparaître. Ou alors tu es juste trop saoul pour te rappeler que tu l'avais déjà terminée et balancée à la poubelle.

 — Vas-y, c'est bon. Je suis peut-être un peu bourré mais je ne suis pas encore débile. Et l'autre type était assez flippant comme ça, pas besoin d'en rajouter une couche. »

 Nathan suit Enzo dans le hall qui mène à la cuisine. Son regard se pose sur une photo, posée sur la commande, dans l'entrée. Il s'en saisit et demande :

 « Je ne savais pas que tu avais un frère.

 — Normal. Il est porté disparu depuis 10 ans. Personne, ou presque, n'est au courant. Nous sommes arrivés à Porquerolles il y a 8 ans et mes parents, qui ont déménagé pour faire leur deuil, n'en parlent jamais. D'ailleurs, si tu peux garder le secret ça m’arrangerait.

 — Ouai t'inquiètes, je ne suis pas comme les deux autres. Je traîne juste avec eux car on se connait depuis tout petit. Je comprends pourquoi tu semblais contrarié quand monsieur légende urbaine a dit des trucs étranges, tout à l'heure. D'ailleurs, tu ne trouves pas qu'il ressemblait un peu, à ton... »

 Furieux, Adam déboule du salon et bouscule le jeune corpulent, qui en laisse tomber le cadre. L'adolescent chétif ne peut que constater les dégâts. Le verre est brisé en mille morceaux. Il entre alors dans une rage folle. Il demande alors à tout le monde de foutre le camp. La soirée est terminée. Tout le monde s’exécute, y compris les trois gaillards. Ils ne l'avaient jamais vu comme ça, même au temps il faisait encore le dur et traînait avec eux.
« Modifié: 01 août 2020 à 10:54:43 par John Lucas »

Hors ligne John Lucas

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Re : Les disparus du Cap d'Arme
« Réponse #4 le: 08 août 2020 à 13:05:58 »
Fin de soirée

 Une drôle d'ambiance règne devant la maison d'Enzo. L'orage grondant en début de soirée s'est apaisé de manière proportionnelle à la montée en tension du jeune homme. Les invités regagnent leurs voitures et échangent à propos de ce qui vient de se passer. Tout le monde est d'accord sur un point : tout est la faute de ces trois délinquants, qui s'éloignent du groupe, l'air renfrogné.

 « Pourquoi les a-t-il invités ? demande un grand mince aux mêmes lunettes rondes que Harry Potter.

 — Ce sont les premiers potes qu'il s'est fait en arrivant à Porquerolles, répondit Emma. Vous savez, avant d'être le geek que vous connaissez, il jouait plutôt les racailles, quand il était au collège. Adam était, à ce moment, comme un frère de remplacement pour lui. Puis, au lycée, il a mûri et s'est calmé, alors que les autres sont devenus de plus en plus voyous.

 — Quoi, un frère de remplacement ? Et ça ne nous dit toujours pas pourquoi il les a conviés à sa soirée. »

 Emma, embarrassée par sa petit bourde, referme la portière du jeune homme de façon hâtive et reprend par la vitre ouverte :

 « Connaissant Adam, il a dû s'inviter de lui-même, avec ses deux acolytes, sachant très bien que mon cousin n'oserait pas refuser. Bon, les gars, allez-y avant qu'Enzo ne ressorte encore plus énervé. »

 De son côté, la jeune fille, qui n'habite qu'à deux rues, décide de repartir à pieds. Elle a fait cette route tellement souvent...

***

 « Putain, mais qu'est-ce qu'il lui est arrivé au gringalet ? demande Léo.

 — Ta gueule ! Tu ne sais pas ce que représente ce cadre pour lui, répond Adam d'un ton sec. Et toi gros lard, pourquoi tu l'as lâché ?

 — Euh, c'est toi qui m'as bousculé, je te signale.

 — Si t'avais pas été bourré, tu ne l'aurais pas fait tomber, abruti.

 — Calme toi Adam, ne t'en prends pas à Nathan comme ça. Ce n'est pas sa faute si Enzo est taré.

 — Ne parle pas de lui comme ça ! Même s'il ne traîne plus avec nous, il reste mon meilleur pote, loin devant vous.

 — Laisse Léo. Adam n'a pas totalement tort, reprend le rondouillard. Je suis bourré et au vu de ce qu'Enzo m'a raconté à propos de cette photo, il a toutes les raisons du monde de péter un plomb.

 — Fous-moi la paix ! hurle une voix féminine. »

 Au coin de la rue, le gothique aux légendes urbaines entoure le cou d'Emma de son bras tatoué. Celle-ci essaie de le repousser mais le garçon parvient à l’entraîner avec lui dans une ruelle en cul de sac.

 « Putain ! Cette fois, je me le fais cet enfoiré. Allez, venez vite les gars ! »

 Adam se met à courir, suivi de près par Léo. Nathan, gêné par sa corpulence, a plus de mal à suivre. Il voit ses deux camarades obliquer vers la petite impasse qui, à leur grand étonnement, est déserte.

 « Et merde, ils sont où ? demande Léo.

 — Il l'a certainement emmenée dans le bois. C'est la seule échappatoire possible. Aide Nathan à passer par-dessus la barrière et rejoignez-moi. Tu entendras les cris de douleur de l'autre cinglé. »

 Nathan arrive enfin, s'appuie sur la barrière et vomit.

 « Eh, c'est pas le moment, mec ! Vite, passe au-dessus. Si Adam tombe sur le type sans nous, il va en faire de la charpie. »

 Le plus sobre fait la courte échelle à l'autre et escalade à son tour. Les voilà dans le bois à la recherche de leur pote.

***

 Dans la maison, Enzo ne décolère pas lorsque quelqu'un frappe timidement à la porte. C'est Tom. C'est vrai, il devait dormir sur place.

 « Excuse-moi. dit celui-ci tout penaud. Mais est-ce que je peux quand même rester ici ? Je file direct dans la chambre. Ça sera comme si je n'étais pas là.

 — Ouais, ok, vas-y. Tu n'y peux rien, toi. Et, je ne vais pas te laisser passer la nuit dehors.

 — Merci. »

 L'invité monte les escaliers quatre à quatre avant que son hôte ne change d'avis. Le jeune garçon, occupé à chercher du regard les fauteurs de troubles, ne voit pas la lumière de la chambre d'ami s'éteindre seule, et la porte se reclaquer sur son camarade, le teint blafard et les bras croisés devant son visage, comme pour se protéger.

 Enzo rejoint l'étage à son tour et fait un rapide passage par la salle de bain, sans prendre le soin d'allumer la lumière. Si bien qu'il ne distingue pas le mot, écrit en lettre de sang, sur le miroir : GABRIEL.

Hors ligne Xeraphia

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Re : Les disparus du Cap d'Arme
« Réponse #5 le: 08 août 2020 à 17:09:15 »
Salut John Lucas !

Ton accroche est efficace. Le petit article au début hameçonne, ça marche. Et le fond continue de couler sans anicroche, tu gardes tes promesses. J’ai spécialement aimé la petite surprise d’avoir l’histoire qui se déroule en fait 20 ans après la disparition, ça intrigue encore plus. C’est le genre d’histoire où tu te cales avec un popcorn et tu te dis « OK, voyons voir comment il va bidouiller son truc. »

Sur la forme, par contre, tu dis que tu as commencé avec un scénario et que tu es en train de le transformer en nouvelle. Pour moi, tu es encore dans le scénario, là. Ça va trop vite, ça manque trop de description, de narratif, d’émotions, de temps passé avec tes personnages, pour qualifier ça de nouvelle (ou de roman, soyons fous !). C’est encore à l’état de snapshots de dialogues et de lieux, c’est encore un squelette, il y a bien quelques tendons par-ci et quelques ligaments par-là, mais ça manque de chair.
En soi, ça ne (me) dérange pas plus que ça. Pas aujourd'hui, en tout cas. Parfois, ça fait du bien de lire un scénario, justement pour l’histoire. Ça a un côté léger, superficiel qui est reposant.
Par contre, je ne peux pas m’empêcher de voir le potentiel loupé… et ça, c’est dommage. Parce que si ton fond garde ses promesses, ce serait dommage de ne pas avoir la forme qui suit.

Au plaisir de connaitre la suite :)

Hors ligne John Lucas

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Re : Les disparus du Cap d'Arme
« Réponse #6 le: 09 août 2020 à 10:38:57 »
Merci beaucoup pour ton retour qui fait vraiment plaisir. Je le trouve positif et en même temps assez critique pour me faire évoluer :)

Je prend bien note de tes conseils. Tu n'es d'ailleurs pas la première personne à me faire remarquer que ça manque un peu de matière (on me l'a dit aussi sur scribay).
Je pense que je vais dans un premier temps terminer la nouvelle dans la même veine en essayant d'être tout de même un peu moins expéditif.
Et je repasserai sur la totalité à la fin pour venir étoffer le tout. Car, comme tu dis ça serait dommage de gâcher un potentiel si vraiment il y en a un :)

Hors ligne John Lucas

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Re : Les disparus du Cap d'Arme
« Réponse #7 le: 15 août 2020 à 11:45:18 »
Promenons-nous dans les bois

 Léo et Nathan s'enfoncent dans les bois, la boule au ventre. L'obscurité et la légère brise jouent avec leur imagination, décuplée par l'alcool. Leur angoisse ne cesse de croître alors qu'Adam reste introuvable. Les deux jeunes font une pause au pied d'un chêne mort. Le plus costaud, toujours embrumé par ses excès de la soirée, a besoin de reprendre son souffle.

  « Oh, putain ! C'est quoi ça ?! s'écrit-il, paniqué, alors que des os craquent sous ses pieds.

  — Mais quel trouillard. Ça doit être les restes d'un animal que des chasseurs ont oublié d'emporter. »

  Un rire glauque résonne derrière des feuillages non loin. Leur sang se glace. Leur ami sort de sa cachette, content de sa petite blague et vient se saisir du crâne qui a, sans doute, appartenu à une biche.

  « Toujours aussi flippette, mon gros ! Venez les gars, j'ai trouvé un truc super bizarre. Il faut trop qu'on examine ça de plus près. »

  Le colosse, tout excité, les mène devant un arbre immense, situé à l'exact centre du parc. Un escalier en creuse le tronc pour descendre sous terre. Tout le monde paraît trouver cela normal et avoir étrangement oublié la raison de leur présence au milieu de ces bois.

  « Ouah, trop fort, s'extasie Léo. On descend ?

  — Je veux, mon neveu ! répond Adam.

  — Euh... moi je vous attends ici. Je ne me sens pas très bien, dit Nathan, déjà assis sur une grosse racine.

  — Dégonflé ! » reprennent les autres en chœur, tandis qu'ils commencent à descendre.

  Arrivés au bas des marches, un labyrinthe, éclairé par des torches, se présente à eux. Comme envoûtés par les lieux, les adolescents commencent leur exploration. Couloir après couloir, pièce après pièce, ils sont fascinés par les espèces de hiéroglyphes dessinés sur les murs. Soudain, un bruit effroyable se fait entendre. Une nuée de chauves-souris surgit, vole par-dessus leurs têtes et poursuit sa course effrénée en direction de la sortie. Dans la panique, Adam lâche le crâne qu'il tenait toujours dans les mains. Celui-ci vient s'exploser au sol libérant une flopée d'araignées dont le nombre ne pouvait physiquement pas tenir dans un si petit espace. Celles-ci se dirigent dans la même direction que les chiroptères.

  Dans un bref élan de lucidité, les caïds décident de rebrousser chemin. Le charme semble rompu. Mais il n'en est rien. Effectivement, quelques couloirs plus loin, celui opère à nouveau, et Adam pense apercevoir, du coin de l’œil, une chose bien étrange.

  « Eh. T'as vu ça mec ? Il y avait un gosse. Et on aurait dit qu'il n'avait pas de visage.

  — Tu délires. Allez viens, on s'arrache.

  — Non, attends. On vérifie juste ça et on y va. »

  Le gaillard ne laisse pas le temps à son acolyte de réagir et s'aventure dans la pièce voisine. Léo, pas rassuré de rester seul, le suit et découvre son pote pétrifié par un spectacle, que la grande carrure de celui-ci masque. Adam désigne alors la scène du doigt, et s'écarte pour laisser son ami constater que repose, allongé dans un coin, le cadavre d'Emma, dont les yeux encore ouverts traduisent l’effroi de ses derniers instants.

  À la vue du corps, ils retrouvent leurs esprits et se rappellent pourquoi ils se sont aventurés dans les bois.

  « Merde, Nathan ! s'exclame Adam. Vite, sortons d'ici ! L'autre taré doit encore rôder dans les parages, et vu l'état du gros, il va se le faire aussi. »

  Il ne faut que quelques minutes pour que les deux ressortent du labyrinthe. Celui-ci est devenu une longue ligne droite, sans qu'ils ne s'en rendent compte. Léo est le premier à sortir à l'air libre à toutes jambes. Son pied se prend dans une racine et il se retient de justesse à une branche qui pend juste devant lui.

  « Putain ! hurle Adam, éreinté par l'effort.

  — Qu'est-ce qui te prends ? » demande le premier. Il n’a pas besoin d'attendre la réponse. Il constate de lui-même qu'il s'est, en réalité, rattrapé au corps de Nathan, pendu au vieil arbre et dont le regard est identique à celui de la jeune fille.

  « Mais, c'est quoi ce délire ?! reprend-il plus paniqué que jamais.

  — Viens, on va chercher le flingue de mon père et on va se le faire cet enfoiré. »

  Après avoir tourné en rond pendant ce qu'ils estiment être une éternité, ils finissent par déboucher sur une rue. Léo est le premier à débouler, terrorisé, sur la route pour arrêter la première voiture qui passe. Il gesticule comme un beau diable mais le conducteur, qui semble agité derrière son volant, ne le voit pas. Quand Adam débarque à son tour, c'est impuissant qu'il voit son pote, incapable de bouger, comme hypnotisé par les phares de la voiture, se faire percuter par le véhicule.

Hors ligne Goury

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Re : Les disparus du Cap d'Arme
« Réponse #8 le: 21 août 2020 à 16:42:53 »
moi j'aime bien le style....

La suite svp :)

Hors ligne John Lucas

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Re : Les disparus du Cap d'Arme
« Réponse #9 le: 22 août 2020 à 10:02:06 »
et bien la voici, la suite :)

À la maison

 Badaboum ! Enzo, qui dormait à poings fermés, se retrouve au sol, en sueur, le souffle court. Il sort d'un cauchemar si réaliste qu'il en a dégringolé de son lit. Il se redresse et essaie, tant bien que mal, de se calmer et se rassurer tandis qu'un son court et strident lui vrille les oreilles depuis sous sa couche. Après quelques secondes d’hésitation, d'un geste très lent, presque à la manière d'un ralenti dans un match de football à la TV, il penche la tête à la recherche de cet horrible bruit. En un bond en arrière, il se retrouve le dos plaqué au mur, les mains moites et tremblantes, la respiration à nouveau accélérée et le visage crispé par l'effroi. Le corps ensanglanté de Tom gît là, sous son lit, tel un pantin désarticulé et il peut désormais sentir l'odeur de charogne qui en émane. Il ferme les yeux, prend une grande inspiration avec l'espoir que tout ceci n'est qu'un mauvais rêve, mais son ami est toujours bel et bien mort, allongé devant lui lorsqu'il les rouvre.

  Une ombre attire alors son regard sur l'entrée de sa chambre. Un courant d'air glacial, venant du couloir, lui fouette les joues qui rosissent et un enfant apparaît dans l'encadrement de la porte. Il doit être âgé d'une dizaine d'années, tout au plus. Il est difficile de se faire une idée car ses cheveux bruns entourent un visage lisse, dépourvu d'yeux, nez et bouche. Enzo, figé, aussi bien par le froid que par la peur, entend résonner dans tête ces quelques mots en boucle : disparus, voleur et surtout phare qui fait écho au petit objet que tripote le gamin avant de s'éloigner et quitter le champ de vision du jeune homme.

  L'adolescent parvient à reprendre empire sur lui-même, se remet sur ses jambes encore flageolantes et s'aventure dans le couloir. L'enfant a disparu mais le froid est toujours présent et des basses résonnent au rez-de-chaussée. Il descend les escaliers à pas de loup et toujours sans bruit se hâte d'ouvrir la porte. En tout cas, était bien là son intention mais elle est verrouillée et les clés ne sont pas dans la serrure. Il n'a pas de temps à perdre à les chercher et décide de passer par la fenêtre. Il ouvre le volet et tire le double rideau pour constater deux choses : dehors, il neige alors que nous sommes en plein été, absurde, mais plus grave, des barreaux barrent son échappatoire.

  Enzo n'a donc plus tellement de choix. Soit il trouve les clés, ses parents en laissent toujours un jeu dans la boite sur la cheminée, soit il tente de passer par derrière. Quoi qu'il en soit, il doit passer par la salle à manger, d'où provient ce qu'il parvient maintenant à identifier comme des chants funestes. Il ravale sa salive, prend son courage à deux mains, ouvre la porte et en franchit le seuil. Il sent la buée sortir de sa bouche à chaque expiration et il frissonne de plus en plus. La température ne cesse de baisser. Sa main glisse le long du mur à la recherche de l'interrupteur dont l'action reste sans effet, comme il l'aurait parié.

  Les yeux plissés, il avance à tâtons dans la pénombre. La pièce s'illumine alors, éclairée de dizaines de cierges tout autour de la table sur laquelle repose un beau cercueil en acajou blanc serti d'or. Curiosité malsaine, traumatisme de la situation, attirance invisible, pour quelque raison que ce soit, il s'avance et regarde à l'intérieur pour y découvrir son corps, livide et comme profondément endormi, dans le beau costume bleu marine que ses parents lui ont acheté pour passer ses entretiens de classe préparatoire, la semaine passée.

  Un gloussement d'enfant sort le jeune garçon, paralysé par la vision de lui-même dans ce cercueil, de sa torpeur. Oublié les clés dans la boite sur la cheminée, oublié la sortie par derrière, il se laisse entraîner, le regard vide, par les rires du gamin qu'il entraperçoit à travers l'ouverture de la porte donnant sur le hall d'entrée. Il se précipite à sa suite comme une abeille attirée par le sucre.

  Arrivé dans le couloir, l'enfant s'est à nouveau volatilisé. La déception se lit sur le visage de l'adolescent mais laisse très vite place au soulagement. La porte d'entrée est grande ouverte et le froid a laissé place à la chaleur étouffante des longues nuits d'été. Il attrape sa sacoche, accrochée au porte manteau, et dévale l'allée à toutes jambes jusque sa voiture. Il tourne la clé dans le démarreur et pousse un ouf de délivrance lorsqu'il entend le moteur vrombir. Sa bonne vieille polo ne l'avait pas lâché. Il remonte la légère pente menant au portail, lui aussi ouvert, et accélère une fois dans la rue. Il jette un coup d’œil dans son rétroviseur, un pincement au cœur de laisser sa maison vide sans surveillance mais que trop heureux de s'éloigner de ce cauchemar et il distingue un brouillard qui s'épaissit et progresse dans sa direction. Il appuie de plus belle sur la pédale d'accélérateur.

Hors ligne John Lucas

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Re : Les disparus du Cap d'Arme
« Réponse #10 le: 29 août 2020 à 18:51:15 »
Retrouvailles

 Enzo parcourt plusieurs kilomètres aussi vite que lui permet sa vieille voiture, prise de forts tremblements lorsqu'il dépasse les cent dix kilomètres à l'heure. Il ne l'a jamais poussée ainsi. Depuis trois mois qu'il a son permis, il a toujours pris soin de bien respecter les limitations de vitesse.

 Le jeune garçon retrouve son calme à mesure que la distance entre lui et ce cauchemar s'agrandit. Si bien qu'il s'autorise même à ralentir. Un détail sur le bord de la route attire alors son attention : il s'agit de la mini chapelle Sainte Thérèse, où sa mère, depuis leur arrivée, a pour habitude d'aller brûler un cierge à la date anniversaire de la disparition de son frère. Non, ce n'est pas possible, il roule depuis une dizaine de minutes à fond de train et celle-ci se trouve dans la rue voisine de la maison de ses parents. D'un coup d'œil rapide, il vérifie dans son rétroviseur. Il ne voit ni l'édifice religieux, ni, d'ailleurs, le brouillard inquiétant, qui a lui aussi disparu, à son grand soulagement. En revanche, assis sur un réhausseur oui-oui, comme celui de son frère lorsqu'ils étaient jeunes, l'enfant sans visage joue avec son petit phare. Le cœur de l'adolescent fait un bond dans sa poitrine et la peur resurgit. Par réflexe, il se retourne d'un geste précipité. La banquette arrière est vide. Serait-ce son imagination qui lui joue des tours à cause de la peur ?

 Lorsqu'il reprend sa bonne position, il distingue sur la chaussée une forme, apparue pendant qu'il avait le dos tourné.

 « Aaahhh ! » hurle-t-il avec un mélange de peur et de surprise dans la voix.

 Il met un coup de volant brusque, mais il est trop tard, le choc est inévitable. Il gare la polo un peu plus loin sur le bas-côté et, d'un pas incertain, s'avance en direction du corps de ce qu'il espère être un animal.

 « Enzo ?! Qu'est-ce que t'as foutu ? l'interpelle un jeune homme à peine sorti du bois, agenouillé auprès de la masse étendue au sol.

 — Adam ? »

 Le garçon se fige, le teint blafard, les yeux rivés sur sa malheureuse victime.

 « Oh, non. Léo. Relève-toi steuplé. Je suis désolé, il y avait un gosse sans visage dans ma voiture et ce brouillard... »

 Enzo est très agité. Il sanglote et peine à s'exprimer de manière cohérente. Il observe, impuissant, Adam qui tente de réanimer leur camarade. Mais celui-ci reste sans réaction.

 « T'as dit quoi là ? intervient le grand gaillard. Un gosse sans visage ? J'en ai vu un aussi dans le sous-terrain sous l'arbre au milieu de ce bois.

 — Sérieux ? C'est quoi cette histoire de sous-terrain sous un arbre ? Il se passe des trucs vraiment trop chelous ici. »

 Adam cherche une énième fois le pouls de son ami qui gît à ses pieds. En vain. Dépité, il lève la tête. Ses yeux, embrumés de larmes de rage, s'écarquillent et sa bouche s'ouvre un peu. Il montre l'horizon du doigt à Enzo.

 — Mec ! Tu parlais d'un brouillard ? C'est ce truc qui arrive là-bas ?

 — Putain, ouais.

 — Vite, on se tire.

 — Et Léo ? On ne peut pas le laisser là.

 — On ne peut plus rien pour lui malheureusement. File tes clés, je vais conduire. »

 Le gringalet s'exécute et les deux anciens amis remontent dans la voiture à la hâte. Le colosse prend le volant et se met à rouler tel un pilote de formule un.

 « On va aller chez moi chercher le flingue de mon père. J'ai un compte à régler avec l'autre gothique qui s'est invité à ta soirée. Il a buté Emma et Nathan cet enfoiré. Je suis certain que c'est lui le responsable de toute cette folie.

 — Quoi ?! C'est quoi ce délire ?

 — On a trouvé ta cousine dans ce fameux sous-terrain alors qu'on poursuivait le gothique qui l'enlevait. Et Nathan, il était pendu à l'arbre quand on en est sorti ; il n'avait pas osé nous suivre à l'intérieur. Putain, fais chier !

 — Mais, c'est un cauchemar, je vais me réveiller, murmure Enzo.

 — Merde c'est quoi ça, encore ? »

 Un épais liquide rouge cramoisi s'écoule du haut du pare-brise. Adam actionne les essuie-glaces.

 « Eh merde ! Le lave-glace. », rage Enzo.

 En à peine quelques secondes la vitre devient opaque. Le conducteur est obligé de passer la tête par sa fenêtre pour voir la route. Le passager prend alors une décision qui peut sembler être de la pure folie. Il sort de la voiture, lancée à pleine vitesse, et grimpe sur le toit, muni d'un paquet de mouchoirs qu'il a trouvé dans la boîte à gants. Il essuie comme il le peut ce qu'il identifie comme du sang cependant que son camarade zigzague de plus en plus. Il en profite pour jeter un œil derrière eux et constater que le brouillard a de nouveau disparu. Un coup de volant manque de le déséquilibrer, mais il parvient à se retenir à l'antenne.

 Sa tâche terminée avec succès, mais non sans mal, il reprend sa place dans la voiture et fait remarquer à Adam qu'ils ne sont plus poursuivis par cette brume flippante. Ce dernier ralentit et poursuit sa route en direction de la maison de son père.

Hors ligne John Lucas

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Re : Les disparus du Cap d'Arme
« Réponse #11 le: 05 septembre 2020 à 13:22:56 »
La quête du phare

 L'atmosphère est un peu plus légère dans la voiture. Les deux adolescents parviennent à retrouver un semblant de calme. Cependant, une chose chagrine encore Enzo.

 « Adam, ça fait combien de temps qu'on roule ?

 — J'en sais rien. Pourquoi ?

 — On est toujours sur la même route depuis tout à l'heure et on a croisé aucune intersection. Déjà tout à l'heure, j'ai roulé une dizaine de minutes à plus de 100 pour arriver là où je t'ai trouvé. C'est vraiment trop bizarre.

 — Mais, mais. On était, genre, à un kilomètre de chez toi. C'est impossible. D'ailleurs, qu'est-ce qu'il s'est passé là-bas pour que tu déboules comme ça, comme un fou ?

 — J'ai trouvé Tom sous mon lit. Il était... »

 Il ne réussit pas à finir sa phrase et se remémorer la scène lui provoque un haut-le-coeur. Il se reprend et continue :

 « Et après il y a eu ce gosse, de la musique morbide, un cercueil avec mon cadavre dedans. Enfin bref, l'horreur. Je n'ai pas trop envie d'en parler.

 — On se croirait dans un livre de Stephen King. »

 Un coup de frein brusque stoppe la voiture net et envoie la tête du frèle garçon, assis côté passager, heurter le tableau de bord.

 « Qu'est-ce tu fous ? demande Enzo, la main sur la bosse naissante sur son front.

 — Là, lui répond Adam. »

 Il désigne une habitation délabrée d'un signe de tête.

 « C'est ma maison. Mais on n'est pas dans la bonne rue et elle est en partie en ruine.

 — Tu délires, ce n'est pas chez toi.

 — Tu as déjà entendu parler d'une maison en ruine dans le coin ? Et tu connais beaucoup de personnes qui ont cet éléphant en marbre chez eux ?

 Les deux adolescents sortent de la voiture et s'avancent dans les décombres. Adam se charge d'aller récupérer l'arme de son père dans la chambre de celui-ci, à l'étage.

 « Attends-moi en bas, les escaliers n'ont pas l'air en super état, je ne voudrais pas qu'il t'arrive quelque chose à toi aussi, dit-il, plein de bienveillance, en souvenir de leur forte amitié passée.

 — Je ne sais pas si c'est une super idée de se séparer.

 — Je n'en ai pas pour longtemps. »

 Le colosse monte les marches quatre à quatre, et laisse son ami seul au milieu du capharnaüm. La TV, renversée et à l'écran brisé, s'allume. Enzo sursaute, se retourne. Il a du mal à discerner l'image pourtant fixe mais très flou. Il s'approche à petits pas et la sueur recommence à perler sur son front. Il se penche pour mieux voir et il reconnait enfin un phare. Son regard plonge dans la lumière et son esprit s'évade. Un cri perçant le sort de sa stupeur. On dirait la voix d'Adam mais cela provient de la cour à l'arrière de la maison. Le garçon se précipite dehors. Rien.

 « Putain, encore toi ? Je vais te faire la peau, enfoiré ! »

 Cette fois-ci, il en est certain, c'est bien Adam qui vient de vociférer ces paroles et un coup de feu lui confirme qu'il a trouvé l'arme et que ça vient du pont à côté de la maison. Il y court et grimpe les marches très abimées dans la précipitation, si bien qu'il trébuche plusieurs fois dans son ascension qu'il finit hors d'haleine.

 « Adam, t'es où ? appelle-t-il d'une voix emplie de tremblements.

 — Humph ! Humph ! »

 Il s'avance vers la voie ferrée et est témoin d'une nouvelle scène cauchemardesque. Son camarade est ligoté aux rails et bâillonné. Au loin, il aperçoit une silhouette, le doigt pointé derrière lui. Il se retourne et un train surgit de nulle part et passe sur le corps de son pote. Il reste sans réaction tant le choc est rude pour lui.

 Après de longues et interminables minutes, il semble enfin réaliser et se laisse tomber sur les genoux, en sanglots. Après avoir pleuré toutes les larmes de son corps il se relève et retourne à la voiture. Que va-t-il faire maintenant ? Derrière son volant, il a le regard dans le vide, rempli de désespoir, en direction de l'horizon. Un clignement d'oeil et soudain c'est la révélation. Le phare du Cap d'Arme s'impose à lui à quelques kilomètres en ligne droite. C'est là où il doit se rendre.

 Enzo sort lentement de la voiture, son regard plongé dans la lumière au loin comme avec la TV plus tôt. Il n'est plus lui-même, ne ressent plus rien, ni peur, ni colère. Il ne s'arrêtera qu'une fois arrivé à destination. Il entame une longue marche et reste insensible aux changements anormaux de l'environnement autour de lui. La route se transforme d'abord en un immense champ de maïs qu'il est obligé de fouetter des bras pour poursuivre son chemin. Puis le champ devient une plage ensoleillée, sur laquelle joue un enfant avec un ballon dégonflé. Enfin un ponton prolonge la plage et mène à ce fameux phare, balayé par une pluie diluvienne.

 « Enfin, j'y suis », telles sont ses dernières paroles avant de s'évanouir sur le pas de la porte.

Hors ligne John Lucas

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Re : Les disparus du Cap d'Arme
« Réponse #12 le: 12 septembre 2020 à 17:23:33 »
La descente aux enfers

    Enzo ouvre les yeux avec grande peine. Pas encore habitué à la clarté, il cligne de manière excessive et rapide face à cette éblouissante lumière qui lui brûle l'iris. Il se protège de la main pour permettre à ses pupilles de se contracter. Quand sa vision devient plus nette, il distingue alors un vieux lampadaire rouillé qui n'éclaire pas tant que ça, en réalité.

    Le garçon se relève avec précaution, à l'aide de la grille sur laquelle il s'était semble-t-il endormi. Il ne comprend plus rien. Il y a deux minutes, il marchait sur un ponton et s'approchait d'un phare et le voici maintenant au beau milieu ... au beau milieu de quoi, en fait ? Il scrute les environs et n'y voit que pierres tombales, caveaux et cavurnes. Mais que fait-il dans ce cimetière ? Il n'a guère le temps d'y réfléchir, il doit vite sortir d'ici et partir loin, très loin de ce cauchemar.

    Le jeune homme arpente les allées en gravier, jonchées de vieilles fleurs fanées, d'un pas hésitant et tourne la tête dans tous les sens à la recherche d'une porte de sortie, en vain. Un ballon de plage, balayé par un coup de vent glacial qui le fait frissonner, vient mourir à ses pieds, tout dégonflé. Il se baisse pour l'examiner et le reconnait. Son frère avait le même lorsqu'ils étaient enfants, c'était même son préféré. Lorsqu'il se redresse, il sursaute à la vue du petit garçon à moitié caché derrière une tombe. Son teint devient alors plus pâle que jamais et tous ses membres se mettent à trembler.

    « Im... Impo... po... possible. » arrive-t-il à bredouiller.

    Il a devant lui Gabriel, son frère, disparu il y a 10 ans. Son visage est revenu. Il porte la même salopette verte et le même t-shirt blanc que lors de leur dernière sortie pendant laquelle le drame est survenu. Le temps semble n'avoir eu aucune emprise sur lui.

    « Ga... Gabi ? » demande-t-il.

    L'enfant, pour seule réponse, pointe son doigt en direction de quelque chose derrière Enzo. Celui-ci se retourne et voit une crypte dont le portail est grand ouvert, prête à l'accueillir. L'espèce de transe le reprend à nouveau et il s'y dirige le sourire aux lèvres, sous le regard amusé du petit garçon.

    L'adolescent descend quelques marches dans un calme absolu, comme si tout autour de lui avait cessé de vivre puis les chants funestes qu'il avait entendus chez lui se mettent à résonner cependant qu'il franchit le seuil de la partie basse de la crypte. Là, une odeur nauséabonde lui donne la nausée et il est obligé de s'appuyer au mur pour vomir. Cela provient de la pièce voisine. Toujours sans expression, ni sentiment, il suit les effluves et pénètre dans la salle suivante. De nombreux cierges s'allument et dévoilent une rangée de cinq cercueils, debout contre le mur du fond. À l'intérieur, il reconnait, dans l'ordre, sa cousine Emma, Tom et les trois lascars, Nathan, Léo et Adam. Il se dirige vers le premier et le clos sans même s'émouvoir d'y enfermer, à jamais, sa propre cousine. Il murmure juste quelques mots d'une voix monotone :

    « Repose en paix, chaque chose à sa place. »

    Il reproduit à l'identique ce petit rituel avec ses autres camarades avant de suivre les bougies qui s'allument pour lui indiquer le chemin à emprunter. Il fait de plus en plus froid, il frissonne à nouveau et expire de la buée. Il marche maintenant dans un couloir sans fin. Il entend des murmures, des gémissements, des prières, encore les chants funestes. Mais plus rien n'a d'emprise sur lui. Les chandelles se font de plus en plus rares. Lorsque la pénombre se fait complète, il finit par arriver dans une nouvelle pièce, plongée dans le noir et simplement éclairé par un fin filet de lumière passant par un petit soupirail.

    « Bienvenu Enzo » dit une voix qui lui parait familière.

    De nombreux cierges s'allument. Il est à nouveau obligé de s'abriter les yeux d'une main pour s'habituer à cette clarté subite. Il reconnait alors le gothique qui s'est incrusté à sa soirée. Il est accoudé au cercueil qui était dans la cuisine un peu plus tôt. De l'autre côté se trouve l'enfant tout sourire. Le frêle adolescent repense à ce que Nathan allait dire avant de laisser tomber le cadre et cela est maintenant évident. Les deux se ressemblent beaucoup. Même couleur de cheveux, même yeux et surtout, même cicatrice au menton, résultat d'une chute de vélo. Mais tout cela était impossible. Il veut poser des questions, frapper l'adolescent en face de lui ou le prendre dans ses bras car il en est certain, c'est son frère. Les âges concordent. Ses idées s'embrouillent mais son état le paralyse et aucun son ne sort de sa bouche.

    « Tant de questions, et aucune réponse. »

    Enzo s'avance alors vers le cercueil, poussé par une force invisible et s'installe à l'intérieur. Le jeune et l'enfant, d'une même main, referme le couvercle sur un visage à présent vide de tout appendice et d'une même voix entonnent :

    « Comme tu l'as si bien dit à tes camarades, repose en paix et surtout, chaque chose à sa place. Adieu mon frère. »

    La musique se fait de plus en plus lointaine et de chaque côté du cercueil, les corps du gothique et du bambin s'estompent comme s'ils étaient alimentés par les chants. Bientôt Enzo est plongé dans une obscurité éternelle.

Hors ligne John Lucas

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Re : Les disparus du Cap d'Arme
« Réponse #13 le: 12 septembre 2020 à 17:24:26 »
Chaque chose à sa place

    Les premiers rayons de soleil éclairent la façade de la maison des parents d'Enzo et la rosée matinale se dépose en fines particules sur la pelouse du jardinet. Les effluves qui s'en dégagent laissent présager une belle journée ensoleillée. Tout est parfaitement calme et paisible. Seuls les gazouillis des oiseaux viennent perturber le silence.

    À l'intérieur, tout est en ordre. Aucune trace de soirée, ni même de quelque événement étrange. Il est déjà lundi et les parents, rentrés la veille au soir, déjeunent avant d'aller au travail.

    « Chéri, tu pourrais aller réveiller notre fils. J'aimerais qu'il déjeune avant d'aller chez Aurélia.

    — Pas de soucis, je m'en occupe. »

    Le père dépose son journal sur la table et se dirige vers les escaliers, sans oublier d'embrasser sa femme au passage. Plus les années passent, plus il la trouve jolie. Il monte, tout sourire, les grandes marches pour se rendre à l'étage et entre dans la chambre de son fils après avoir tapoter à la porte. Il lui caresse la joue avec beaucoup de tendresse et lui remet les cheveux en place. Il aime le réveiller de cette façon depuis son plus jeune âge.

    « Ma marmotte, il est l'heure de se lever.

    — Hum, encore un peu, p'pa.

    — Désolé fiston, pas aujourd'hui, ta mère et moi reprenons le travail aujourd'hui, tu dois aller chez ta tante. Allez, viens, maman t'a préparé tes céréales préférées.

    — Bon, d'accord. »

 Père et fils redescendent à la cuisine prendre le petit déjeuner pour l'un et finir son journal pour l'autre. Les nouvelles étaient bonnes. Tout allait pour le mieux à Porquerolles.

    « On est un peu en retard, s'inquiète la mère. Dépêche-toi de terminer et va vite te préparer, ajoute-t-elle à l'intention de son enfant, les yeux remplis d’affection pour lui.

    — Dac, m'man.

    — Et n'oublie pas de brosser tes dents.

    — Je sais... Je ne suis plus un bébé.

    — Il grandit tellement vite », soupire le père lorsque son fils n'est plus à portée de voix.

    Sa femme, amusée, l'enlace en guise de réponse. Ils sont si fiers de leur enfant, leur plus belle réussite.

    Il ne faut pas plus de dix minutes pour que tout le monde se réunisse dans l'entrée, prêt à affronter une nouvelle semaine. La famille sort de la maison et s'apprête à monter dans la voiture. L'enfant frissonne à la caresse d'un coup de vent frais et fait alors demi-tour, avant que son père n'ait fermé la porte.

    « Attend !

    — Qu'est-ce qui se passe Gabi ? demande son père, l'air confus.

    — J'ai oublié de dire au revoir à Enzo. »

    Le garçon se positionne devant la commode dans le hall et prend un cadre dans les mains. Dans celui-ci se trouve une photo d'un groupe d'enfants devant un phare. Ils sont cinq garçons et une fille. On y reconnait Enzo et sa cousine Emma mais aussi Adam, Nathan, Léo et Tom. En petit, en bas, il est noté : Phare de cap d'Arme - 2 juillet 2000. Un sourire malsain s'élargit alors sur les lèvres de l'enfant qui murmure :

    « Chaque chose à sa place, mon frère.

    — Tu as dit quelque chose ?

    — Non rien. Allez, on y va p'pa, on est déjà assez en retard. »

    L'enfant repose le cadre et referme lui-même la porte, de manière précipitée, avec un dernier regard de satisfaction sur la photo. Chaque chose est bel et bien à sa place.

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Re : Les disparus du Cap d'Arme - Terminé
« Réponse #14 le: 12 septembre 2020 à 20:02:13 »
Bon, j’ai rattrapé tous tes envois :)

Envoi : Promenons-nous dans les bois
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Tout le monde paraît trouver cela normal et avoir étrangement oublié la raison de leur présence au milieu de ces bois.
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Effectivement, quelques couloirs plus loin, celui opère à nouveau, et Adam pense apercevoir, du coin de l’œil, une chose bien étrange.
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Il gesticule comme un beau diable mais le conducteur, qui semble agité derrière son volant, ne le voit pas
C’est peut-être fait exprès (ça ne l’est souvent pas), mais tu as un narrateur omniscient, là. Un truc à garder à l’œil pour la réécriture, si tu décides de la faire.

Alors, pour le tout.
C’est résolument plus cinématographique que littéraire. Du coup, c’est visuel et entraînant, mais sans ressenti/émotions/sensations.

Bon, sinon.
Désolé, vous n'êtes pas autorisé à afficher le contenu du spoiler.

 


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