enseigner à éternuer
#des trompettes #dans le nez #de prose #atchoum
huhu j'ai un peu déliré de
n'importe quoi qui veut rien
dire du tout mais qmm un peu
...- ça me chatouille
- où ça ?
- ça commence entre les yeux, derrière, quand je respire, par le nez...
- comment respirez-vous ?
- normal, à l'aide de ma cage thoracique
- développez...
- bin ouais, j'ouvre les côtes, ça tire les poumons, ça les écarte, et l'air est aspiré... enfin, il me semble pas avoir de turbines ailleurs que ce moteur-là !
- hmm... mais pourquoi vous chatouille-ce le nez ?
- bin justement, je me dis que y'a un tuyau bouché
- ah ; développez...
- ça me chatouille un peu dans la nuque quand j'essaye d'éviter que ça me chatouille les sinus, vous voyez ?
- la nuque ?
- ouais, et si j'évite encore, cela se déplace à nouveau
- où donc ?
- de la nuque ? cela passe au crâne ou... ou alors dans la poitrine
- le crâne ou la poitrine ?
- cela dépend
- de quoi ?
- du puzzle depaule
- lequel est-ce ?
- celui qui dicte le spirogaphe du clepsydre que je suis...
- je vous demande pardon ?
- essayez de vous figurer un peu ; je respire et ça me chatouille le nez ; parfois il y a un sifflement, et c'est extrêmement désagréable car cela ne concerne qu'une narine ; il y a un débit encrassé, et cela fait ce bruit qui vient appuyer la fraise du caillot, et ça vibre, ça siffle, ça chatouille ; voilà
- bon et lorsque vous évitez que cela chatouille, cela chatouille ailleurs, c'est bien ça ?
- heu... oui
- oui ? mais ?
- mais... bin je sais pas, je crois que ce qui me gène c'est que c'est pas normal de siffler d'une narine ; je sens quelque part, comme à l'intérieur de moi ; comme si les nerfs servaient à quelque chose ; et je sens la tuyauterie ; en fait ce n'est pas un problème directement dû à la torsion du conduit ; non ; je crois que je me ratatine, et que du coup tout s'affaisse, tout ça parce que je manque d'énergie
- de l'énergie ? c'est pas très clinique comme langage, mais je comprends à peu près
- ah ?
- oui ; vous avez besoin peut-être d'une tisane renforçante
- oh
- mais pas que, et je n'ai pas fini
- ah
- oui ; est-ce que... petite question... est-ce que vous êtes sorti par grand froid récemment ?
- bien sûr ; je crois
- vous croyez ? ou vous êtes sûr ?
- je crois être sûr, pourquoi cela ?
- je me demande tout simplement... vous permettez ?
- je vous en prie
- étiez-vous couvert au moment des faits ?
- et bien j'avais le nécessaire vestimentaire
- le nécessaire à quoi ?
- à l'anti-ratatine
- que voulez-vous dire par là ?
- qu'il me fallait me sentir agressé par la réalité pour l'affronter, et que je commence à voir votre piste ; aurais-je pris tout simplement froid ?
- oui, je le pense
- voilà qui est ennuyeux ; que dois-je faire ?
- mais rien du tout, vous reposer en restant au chaud
- ah ; mais...
- je vais vous prescrire des antifroids
- cela existe ?
- non, mais cela devrait vous calmer
- ah vraiment, eh bien...
- oui, et de plus, je vous conseille une petite chose
- laquelle donc ?
- prenez soin de vous, et... oh
- oh ?
- oh, oui ; car, j'ai en mémoire instantanée, la réminiscence d'un remède ancestral, attendez-moi je reviens
- vous...
- oui ; nous allons essayer ceci, je vais vous agiter la plume sous le nez et vous devrez absolument penser à l'encre de vos veines et ne pas lâcher cette idée quoi qu'il en coûte, quoi qu'il advienne, surtout pas
- je... mais qu'allez-vous me faire d'autre que cette plume pour me chatouiller encore plus ?
- probablement une pratique tactile de restructuration de votre intériorité par placébo volontaire, je vous crois sensible à l'hypnothérapie ponctualisée
- si vous le dites
- oh ce n'est pas valeur de vérité absolue, c'est une intuition, tenez-vous prêt à résister
- ...
- ...
- ...
- c'est bien ce que je pensais
- en clair ?
- vous ne savez pas...
- je ne sais pas quoi ?
- nous allons essayer un complément
- mais dites-moi
- je vais d'abord vérifier
- mais...
- attention les yeux, ceci est une lampe au sodium
- mais pourquoi ? aïe ! nan mais pas si près !
- oups, pardon, mais restez là, haussez légèrement le menton...
- vous êtes photographe maintenant ?
- scénariste d'un jour factice, seulement, pardonnez mon humour mais...
- mais ?
- mais je vais vous demander de rester à nouveau maître de vous durant la plume, tout en dirigeant bien vos vaisseaux sanguins vers la chaleur et la lumière de la lampe
- c'est absurde, on y voit parfaitement clair
- j'ai juste besoin de dilater un peu le système d'irrigation de votre corps afin de révéler ma théorie, ce ne sera pas long
- mais quelle théorie ?
- chut, maintenant, admettez la plume et taisez-vous
- ...
- ...
- ...
- la lumière ne traduit pas encore de certitude, vous semblez souffrir d'un mal vraiment complexe mais qui se confirmera peut-être avec le test suivant
- vous vous foutez de moi, je suis très sérieux avec ces chatouillis, ils m'envahissent l'existence je ne peux plus penser, soignez-moi, je vous prie
- ne vous méprenez pas, je suis sur la bonne piste ; alors, pas d'inquiétude, cette poudre noire n'est pas toxique ni dangereuse, mais vous risquez de la trouver désagréable
- j'ai l'habitude avec les soins, merci
- oui...
- que dois-je faire ?
- respirer
- cette poudre noire ?
- rien de plus simple...
- ah... ah... ah...
- vous sentez ?
- heu...
- bon, alors dernier petit test et je vous enverrai peut-être aller voir un spécialiste plus compétent que moi en la matière
- j'ai pris froid et cela nécessite de se résoudre en brassant toute la planète ? non, franchement, je veux bien être crédule en tant que j'ai jamais pris froid, mais ne me prenez pas pour un con pour antant, s'il-vous-plait donnez moi, je sais pas, en ces circonstances, un pansement de chatouille ? un cachet à diffusion nasale ? je sais pas vraiment, ce doit pas être compliqué de soigner du froid, vu ce que les gens s'en plaignent, non ? vous avez vraiment besoin d'un spécialiste pour moi ?
- c'est un froid étrange je pense ; tout ceci n'est pas anodin ; vous n'avez jamais pris froid ? jamais jamais ?
- bin... j'ai pas vraiment essayé, désolé
- heu oui, bon, passons, alors le dernier test, ce...
- ...sera ?
- oubliez ; on ne va pas en faire tout un plat
- vous m'envoyez chez le spécialiste du froid ?
- oui un peu, enfin disons que d'une ordonnance j'ordonne à un ORL de vous ausculter les capteurs
- ah ; et...
- et de ce spray en bouteille, je vous autorise à vous soigner les sinus en les aspergeant d'humidité iodée ; vous pourriez ne pas sentir de bénéfice immédiatement, cependant je vous assure qu'avant le prochain froid que vous attraperez, cela aura déjà modifié votre rapport somatique à cette maladie ; vous allez vous adapter, et je crois qu'à terme, selon mon pronostic, vous vous retrouverez à nouveau en pleine possession de votre attention, celle-ci ne sera plus un problème lorsque vous ne sifflerez plus ni ne chatouillerez de l'intérieur
- ah ; bon ; j'imaginais bien un truc du genre oui
- oui
- bon
- bon ? et maintenant le spécialiste
- qui est ce monsieur à l'intrigante discipline ?
- voici son adresse, présentez-vous avec cette feuille de soin il saura quoi faire
- mais il y est inscrit un charabia arachnéen ; que veut-ce donc dire ?
- ne vous préoccupez pas
- c'est ma santé
- hippocrate me contient, je suis désolé de ce silence malencontreux, mais je me dois de garder le secret médical
- c'est honnête mais un peu gênant
- tout-de-même, oui
- on peut dire que ça jette un froid
- vous le dites, bon, heu... alors je vous prescris également de la rééducation
- de la rééducation ? mais pourquoi faire ?
- le kiné vous expliquera
- m'expliquera quoi ?
- ce pourquoi vous devez faire de la rééducation, maintenant je crois que j'ai résolu votre problème ; la complémentaire santé n'incluant pas toutes les charges qui vous incombent pour l'exceptionnel de l'occasion, vous me devez trente six euros
- ah c'est si cher la défaillance des originaux ?
- la dette de la société se paye d'elle-même, rassurez-vous
- je suis bien content de profiter d'un tel système, oui
- oui
- et pourtant je reste sur ma faim
- pourquoi donc ? je vous ai soigné, ou du moins ai-je lancé les pistes dorénavant immanquables, de votre guérison ; je vous l'assure, d'ici peu vous ne souffrirez plus de chatouilles, d'évitements, d'attention saturée ; vous pourrez respirer comme quand il fait chaud
- il fait chaud
- vous trouvez ?
- bin... c'est un piège ?
- je crois bien que oui, je n'avais pas noté ce détail dont je vous passe le détail : peut-être développez-vous une insensibilité au froid, ce qui est potentiellement plus grave que simplement prendre froid
- ah mais oui ! mais...
- non ! je me dois d'agir ! je vous inscris ici des chaussettes irlandaises, une couverture en aluminum renforcé, la bouillote spéciale infusion, ainsi qu'un radiateur Eudes & f., de la nourriture cuite encore en état thermal de cuisson, et... hum, il me faut une armada pour vous sauver je crois
- vous m'effrayez un peu
- ne vous tracassez pas j'ai la situation en main
- ah, vous me rassurez
- oui ; bon, alors, je vous recommande ces lunettes de soleil
- des lunettes de soleil ? vous m'avez aveuglé avec votre sodium, mais tout-de-même, je suis pas désensibilisé des yeux...
- alors prenez un appartement sur la côte d'azur, cela justifiera leur port
- ah d'accord, c'est sur ordonnance aussi ?
- oui ; et avec ceci vous aurez besoin d'une écharpe et d'un short de surf
- d'accord ; vous le notez bien à l'intention de la pharmacienne ? je veux dire... la posologie et tout, je vous fais confiance hein, ça commence à faire beaucoup pour moi je suis perdu dans votre bouquin de médocs
- j'ai la situation en main ; où en étions-nous ?
- le short...
- ah oui, et donc, avec tout ceci, de la biafine mais pas uniquement ; il vous faudra une corde quantique à quadrature circulaire ! ainsi que de l'huile essentielle de coude, en inhalation trois fois par jour tant que la météo reste en ce climat ; attendez seulement, car de surcroit je vous ajoute sans frais puisque ce traitement est totalement remboursé, un écran de télévision à rayons incidents ; la télécommande est souvent fournie, mais n'hésitez pas à la demander s'ils l'oublient, ce qui arrive parfois
- ah oui...
- oui ; bon, ai-je fait le tour ?
- j'espère, je crois que je n'aurais pas assez de bras pour tout porter votre prescription, et si je m'en sors indemne je ne suis même pas assuré de ne plus subir ces chatouilles ; je n'ai pas confiance en ces promesses ; quelle garantie puis-je avoir ?
- une garantie ? mais il n'y en a aucune auprès de la médecine ; je tente simplement, je tente
- vous tentez ?
- oui ; de vous améliorez les conditions de vie en bonne santé
- bon... et alors j'ai pris froid et il me faut aussi un thermostat somatique ?
- non non, ne vous inquiétez pas vous n'êtes pas handicapé ; en extrême urgence nous aurons recourt à cette technologie, mais pour l'instant je ne vous vois pas assez gravement atteint de froid
- bon... un piment scoré sur scoville ?
- si vous le souhaitez, cela donne chaud plus de quelques picôtements dans le nez... ce qui peut provoquer...
- des chatouilles ?
- heu... vous verrez bien, je ne peux rien vous garantir
- vous me prescririez des allumettes aussi ? je suis pour la médecine traditionnelle
- bien entendu
- bon, c'est tout ?
- je crois bien que je ne peux pas vraiment faire mieux
- alors, vais-je guérir ?
- vous me direz la prochaine fois si vous n'êtes pas mort
- bin ok, vas pour...