Le Monde de L'Écriture – Forum d'entraide littéraire

18 avril 2024 à 11:43:34
Bienvenue, Invité. Merci de vous connecter ou de vous inscrire.


Le Monde de L'Écriture » Coin écriture » Textes courts (Modérateur: Claudius) » Déni

Auteur Sujet: Déni  (Lu 4018 fois)

Hors ligne Ocubrea

  • Modo
  • Calame Supersonique
  • Messages: 1 761
  • Corbeau au bec d'or
    • Pour plus d'informations
Déni
« le: 18 août 2018 à 19:39:19 »
Bonjour !

Bon après de (très) longues délibérations avec moi-même, et en ayant dû préalablement rassembler une bonne dose de courage : voici mon premier texte publié sur ce forum.

Il s'agit d'un texte autobiographique. J'en écris beaucoup, quand les choses que je vis au travail (je suis toubib, ça y est c'est dit) deviennent trop lourdes à porter, ou au contraire me font rire, ou me révoltent - ou un peu tout ça à la fois. Je me suis souvenue aujourd'hui de cet épisode-ci et je l'ai couché sur papier… Il est donc tout chaud sorti du four !

J'aimerais surtout avoir des retours sur : est-ce que des textes comme ça vous intéressent et, par extension, pourraient intéresser d'autres personnes ? Est-ce que les récits d'une soignante sont des choses que vous auriez envie de lire, ou bien est-ce que je continue de les écrire uniquement pour moi ? ;)

Voilà, bonne lecture !

Déni
7ème année de médecine – Février

     Je me souviens de cette femme. Je m’en souviens comme si c’était hier, bien que l'épisode soit vieux de plus d'un an. Je me souviens de son visage ridé, carré et pâle, de ses cheveux gris coupés courts, de ses yeux bleus surmontés d’absences de sourcils, de ses lèvres fines pincées presque en permanence. Je ne me souviens plus de son nom, mais qu’importe, je me souviens d’elle.
     Je revois surtout ses expressions. Son air à la fois scrutateur et réprobateur, mais contenant toujours une pointe d’espérance lorsque nous rentrions dans sa chambre. Sa façon d’entrouvrir la bouche, puis de souffler d’un coup, avant de nous répondre que « Non, Docteur, aujourd’hui ça ne va pas fort. Je n’arrive toujours pas à bouger le bras gauche, et j’ai même l’impression que c’est pire qu’avant. » Je me souviens de la manière qu’elle avait de nous regarder, à ce moment-là, ne voulant pas poser la question mais mourant d’envie qu’on y réponde. Je me souviens du silence blanc qui s’installait alors, un silence des possibles et des non-dits.
     Je me souviens du voile qui passait devant ses yeux, lorsqu’on lui demandait enfin : « Et vous, Madame, comment envisagez-vous la suite ? ». De son regard mort, quand elle nous répondait : « Je ne sais pas. »
     Je me souviens qu’ensuite, elle se tournait généralement vers moi, peut-être parce que j’étais moins impressionnante, petite jeune rondouillette que j’étais, que l’imposant médecin d’une cinquantaine d’années que je suivais. Peut-être que ça lui donnait du courage. Et c’est à moi qu’elle s’adressait, pour poser la question au Docteur : « Est-ce que vous pensez que ça va s’améliorer ? ».
     Et cette image, celle qui restera plus vivace que toutes les autres dans ma mémoire, cette image d’elle en train de détourner la tête vers la faible lumière ennuagée de la fenêtre, les lèvres pincées et ses absences de sourcils froncés… lorsque nous lui répondions que non.
     
     Nous le lui avions déjà dit. Nous lui avions déjà expliqué plus d’une fois son état. Que la maladie évoluait et que nous ne pouvions plus rien pour elle, que c’était la raison pour laquelle elle n’avait plus ni piqures, ni examens, ni traitements. Nous parvenions tout juste à soulager ses douleurs -  et encore.
     Elle savait tout cela… mais sans vraiment le savoir. Donc nous ne lui disions plus, en tout cas plus de manière aussi directe – ça ne servait à rien.
     Les soins palliatifs, elle ne voulait pas en entendre parler. Alors, tous les jours, durant des semaines, nous sommes passés dans sa chambre pour prendre de ses nouvelles. Elles étaient chaque jour plus mauvaises, et nous ne faisions rien. Elle nous regardait avec une lueur accusatrice derrière son masque impavide, une petite lueur de confiance brisée qui me transperçait chaque jour plus le crâne. Elle attendait qu’on la traite : qu’on l’emmène en salle d’opération, qu’on lui fasse couler de la chimio, qu’on l’irradie. Parfois, je me disais qu’elle aurait préféré mourir de ses soins plutôt que de sa maladie. Et nous ne faisions quand même rien.
     Elle a tenu longtemps. Son état général n’était pas si mauvais, au début, sa pathologie était simplement incurable. Puis elle a commencé à décliner lentement, jour après jour. Un matin, tout s’est brutalement dégradé.
     Le soir même, elle est morte.


Edit : j'ai légèrement changé un ou deux passages suite aux commentaires reçus. Merci encore !
« Modifié: 23 août 2018 à 16:50:59 par Ocubrea »
"Il est plus facile de jouer au mikado avec des spaghettis crus qu'avec des spaghettis cuits.” - Philippe Geluck.

Hors ligne Le-Philosophe-de-Campagne

  • Tabellion
  • Messages: 38
Re : Déni
« Réponse #1 le: 19 août 2018 à 00:43:19 »
Tout d'abord : Continue.

Ensuite si tu le sens fait plus long avec les souvenirs plus récents peut-être.

Je dis ça parce qu'on sent l'humain derrière le docteur, une sensibilité qui semble toute naturel en rien exagérer et personnellement j'adore.

Citer
Je ne me souviens plus de son nom, mais qu’importe, je me souviens d’elle.

J'ai apprécier la description simple et méthodique qui précède et oui, je me suis dit ça fait très médecin puis cette phrase...sobre mais puissante. On est pas son nom, c'est pas de ça qu'il faut se souvenir et tu le prouve dans la suite.

Citer
Elle nous regardait avec une lueur accusatrice derrière son masque impavide, une lueur chaque jour plus accusatrice.

Je suis de ceux qui pensent que les regards sont un language à eux mêmes, et qu'il communique énormément. Ce passage m'a beaucoup parler, l'image de la lueur est parfaite, mais selon moi ce n'est pas elle qui devient plus accusatrice, elle devient plus intense, on finit par ne voir plus qu'elle...

Quelque chose du genre : une lueur qui chaque jour brillait plus fort

En contraste avec son état, m'aurai plus transporté

L'expression chaque jour revient deux fois dans le paragraphe, or plusieurs fois tu te permets de faire des répétitions et ça marche ! Pour moi ça colle à l'idée des visites journalières, la répéter une fois de plus aurait rien eu de dérangeant, ou insister sur l'évolution de sa rancoeur, j'ai une proposition mais je pense qu'elle est en décalage avec ton style épuré ( <-- très inspirant)

une lueur qui chaque jour brillait plus fort, jusqu'à éclairer aussi intensément qu'un phare.

Une image forte bien à toi, serai évidement meilleur, qui colle avec la suite

Citer
Elle attendait qu’on la traite : qu’on l’emmène en salle d’opération, qu’on lui fasse couler de la chimio, qu’on l’irradie. Parfois, je me disais qu’elle aurait préféré mourir de ses soins plutôt que de sa maladie. Et nous ne faisions quand même rien

Je pense que cette fameuse lueur a vraiment du te travailler, son déni qu'elle évacuait en vous le reprochant des yeux. C'est ce que j'ai ressenti en me recréant la scène, c'est mon interprétation. Mais si tu réussi à accentuer Ton ressenti je pense que ça pourrait apporter beaucoup.
  Qu'on puisse entrevoir la femme derrière la fonction. C'est comme ça que je réponds à ta question, oui il serai intéressant pour beaucoup de lire la sincérité de l'individu derrière le médecin. On l'oublie tous trop souvent, et j'espère qu'écrire t'aide à le garder en surface. Si tu continue, tu as déjà gagner un lecteur.


Merci à toi d'avoir eu le courage de te partager!

La grosse biz!
FR

Hors ligne B.Didault

  • Prophète
  • Messages: 680
  • L'éternel néophyte
    • Bernard Didault
Re : Déni
« Réponse #2 le: 19 août 2018 à 07:52:54 »
Merci Ocubrea pour ce courage de partager d'intenses moments de ta vie.

Oui, c'est certain le texte aurait pu être plus long, mais celui-ci semble démontrer ces phases d'impuissance que nos médecins et chirurgiens ne peuvent manquer de subir.

Je sens ici comme une thérapie, une tentative de partager, si c'est possible, ce sentiment d'impuissance.
Personnellement, afin de l'atténuer (mais le peut-on vraiment ?), j'aurai créer un personnage qui aurait eu la gentillesse d'endosser ce possible trauma. C'est cette manière de thérapie qui m'a poussé à écrire. Au début j'ai partagé avec une feuille blanche. Et j'ai mis plusieurs décennies à partager avec autrui.

Si un vieux briscard de l'informatique tel que moi, "inculte" en littérature, peut se permettre un conseil, continue à partager, ton style est agréable et transmet de forts sentiments. Je suis loin d'être un adepte de la tristesse, mais l'humain qui transpire de ton texte fait du bien.

Merci Docteur pour ces soins inestimables !
Merci pour ce partage.
« Modifié: 19 août 2018 à 14:56:14 par B.Didault »
Bernard
- La poésie est un art, une belle aventure, la dentelle de l’écriture.
- La haine est le venin de l’amour,
  Le sarcasme est celui de l’humour.
Page Personnelle (Indiscrétions, Textes et Poésies)

Hors ligne Ocubrea

  • Modo
  • Calame Supersonique
  • Messages: 1 761
  • Corbeau au bec d'or
    • Pour plus d'informations
Re : Déni
« Réponse #3 le: 19 août 2018 à 13:38:23 »
Bonjour !

Ouah, tout d'abord, merci pour ces retours ! Je n'en attendais pas d'aussi positifs, pour être honnête… Ils comptent beaucoup à mes yeux.

Pour répondre à votre remarque commune, j'ai déjà écrit une vingtaine de textes de ce genre, certains plus longs que d'autres, dont je partagerai sûrement une partie, par-ci par-là… Je voulais commencer par un court, au cas où ça n'intéressait personne.
Et oui, pour vous répondre à tous les deux, ces textes sont une forme de thérapie, pour m'aider à évacuer des trop pleins… mais aussi une sorte d'ancre, pour garder mon humanité, lui trouver une place et la protéger dans un milieu qui a tendance à la malmener.

@ Le-Philosophe-de-Campagne :
Citer
Quelque chose du genre : une lueur qui chaque jour brillait plus fort.

En contraste avec son état, m'aurai plus transporté.

L'expression chaque jour revient deux fois dans le paragraphe, or plusieurs fois tu te permets de faire des répétitions et ça marche ! Pour moi ça colle à l'idée des visites journalières, la répéter une fois de plus aurait rien eu de dérangeant, ou insister sur l'évolution de sa rancoeur, j'ai une proposition mais je pense qu'elle est en décalage avec ton style épuré ( <-- très inspirant)

une lueur qui chaque jour brillait plus fort, jusqu'à éclairer aussi intensément qu'un phare.

Les répétitions me sont venues d'elles-mêmes en écrivant, mais c'est vrai que j'ai ensuite hésité à les garder, à briser la sacro-sainte règle de l'écriture… Mais ça me fait plaisir en lisant ton commentaires de voir qu'elles ont eu l'effet escompté, c'est exactement pour cela que je les ai laissées. Jai vécu cet épisode comme une longue répétition continue d'une même scène, chaque jour plus difficile.

J'ai dû un peu me débattre pour écrire ce paragraphe, je dois effectivement encore le travailler. Merci pour ta proposition, je la garde en tête ! J'aime particulièrement ton idée du contraste, elle me parle beaucoup. Cependant en y réfléchissant, je ne pense pas que son regard était plus accusateur chaque jour, au fond... je pense que j'avais surtout de plus en plus de mal à le supporter.

Citer
Mais si tu réussi à accentuer Ton ressenti je pense que ça pourrait apporter beaucoup. Qu'on puisse entrevoir la femme derrière la fonction.

Ici, je ne l'ai pas fait, pour trois raisons :
1) Ce texte n'est pas à propos de moi, mais à propos de cette patiente, et je voulais qu'elle reste au centre. Je préfère raconter des gens, des rencontres, des scènes, que me raconter moi. Les réécrire comme cela me permet de prendre de la distance par rapport à elles, de les revoir avec des yeux neufs.
2) Plus que de décrire mes propres sentiments, ici, j'ai essayé de mettre le lecteur dans la même situation que moi et de le laisser éprouver ses propres émotions face à celle-ci.
3) Même si je le voulais, je ne suis pas sûre que je le pourrais : analyser mes sentiments dans ce genre de situation est difficile, parce qu'il s'agit de moments où je me "coupe" volontairement d'eux. Non pas que je ne les ressente plus du tout, mais je m'en protège, ils ne me parviennent plus que de loin. C'est ce qu'on apprend à faire, en médecine. C'est peut-être pour ça aussi que je ressens le besoin de revisiter ces scènes via l'écriture, pour ne pas perdre ces sentiments, comme tu le dis, pour garder mon côté humain.

@ B.Didault :
Citer
Personnellement, afin de l'atténuer (mais le peut-on vraiment ?), j'aurai créer un personnage qui aurait eu la gentillesse d'endosser ce possible trauma. C'est cette manière de thérapie qui m'a pousser à écrire. Au début j'ai partagé avec une feuille blanche. Et j'ai mis plusieurs décennies à partager avec autrui.

C'est fou, le pouvoir thérapeutique de l'écriture ! J'espère que tu ne regrettes pas de les avoir partagés...
Merci pour ta suggestion, je la garderai en tête, j'essayerai de la tester pour un ou deux textes ! Mais pour le moment je crois que j'ai encore besoin d'écrire ces souvenirs bruts, "purs", sans les déformer ni prétendre qu'ils sont ceux d'une autre.

Je garde en tout cas de vos deux commentaires qu'il faudrait que je m'insère plus moi-même dans mes récits ! Je vais essayer de trouver une manière de le faire qui me corresponde.

Merci encore pour vos retours et vos encouragements !
« Modifié: 19 août 2018 à 13:40:16 par Ocubrea »
"Il est plus facile de jouer au mikado avec des spaghettis crus qu'avec des spaghettis cuits.” - Philippe Geluck.

Hors ligne D.B

  • Scribe
  • Messages: 65
Re : Déni
« Réponse #4 le: 19 août 2018 à 23:13:17 »
Bonsoir Ocubrea,

À vrai dire au vue des commentaires précédents je me demande ce que je pourrai ajouter haha

Le style est vraiment fluide, épuré. Le texte dégage vraiment quelque chose d'humain que j'apprécie énormément !

Je n'ai que seize ans et je ne connais rien de la vie et j'aime lire ce genre de texte. Le genre qui nous apprend ce que peut être la vie, la mort...

Et je connais bien ce sentiment de thérapie quand on écrit ! Et ce malgré mon jeune âge, et mes problèmes bien moins nombreux. Mais ça fait toujours du bien de voir quelqu'un a qui se confier ( même si ce n'est qu' une page blanche  ;)).

En tout cas j'espère pouvoir te relire, donc c'est bien volontiers que je t'encourage dans la suite de ton autobiographie ! Avec espoir de lire des moments plus joyeux ou du moins cocasses quelques fois haha

Amicalement,

D.B.

Petite on m'a dit que la Terre était ronde. Aujourd'hui je peux affirmer qu'elle est mourante...

Hors ligne Ocubrea

  • Modo
  • Calame Supersonique
  • Messages: 1 761
  • Corbeau au bec d'or
    • Pour plus d'informations
Re : Déni
« Réponse #5 le: 19 août 2018 à 23:43:30 »
Bonjour D.B,

(J'adore ton avatar, c'est toujours un bonheur de rencontrer une autre fan-tirant-sur-la-nerd d'Harry Potter hihi).

Merci infiniment pour ton retour, qui me touche beaucoup. Les commentaires constructifs par leur critique, c'est très bien, mais si il y a bien une chose constructive c'est d'insuffler l'envie de persévérer à quelqu'un, et c'est ce que toutes vos réponses jusqu'ici m'ont offert.

Je suis contente que tu y trouves quelque chose, une touche d'humain, un petit bout d'expérience qui ne sera peut-être pas tien mais qui t'aidera peut-être à éclairer ton vécu d'une autre lumière, qui sait ? (Ca y est, je deviens philosophe, il faut que je m'arrête tout de suite).

Si tu aimes ce genre de textes, j'en ai en réserve ! :D Et oui rassure-toi, j'en ai des cocasses aussi.

A une prochaine, j'espère avoir l'occasion de lire tes textes également ;)



PS : j'ai modifié le passage sur la lueur, je suis un peu plus satisfaite maintenant mais je le travaillerai peut-être encore...
« Modifié: 20 août 2018 à 00:01:00 par Ocubrea »
"Il est plus facile de jouer au mikado avec des spaghettis crus qu'avec des spaghettis cuits.” - Philippe Geluck.

Hors ligne D.B

  • Scribe
  • Messages: 65
Re : Re : Déni
« Réponse #6 le: 20 août 2018 à 00:20:19 »
Bonjour D.B,

(J'adore ton avatar, c'est toujours un bonheur de rencontrer une autre fan-tirant-sur-la-nerd d'Harry Potter hihi).

Merci infiniment pour ton retour, qui me touche beaucoup. Les commentaires constructifs par leur critique, c'est très bien, mais si il y a bien une chose constructive c'est d'insuffler l'envie de persévérer à quelqu'un, et c'est ce que toutes vos réponses jusqu'ici m'ont offert.

Je suis contente que tu y trouves quelque chose, une touche d'humain, un petit bout d'expérience qui ne sera peut-être pas tien mais qui t'aidera peut-être à éclairer ton vécu d'une autre lumière, qui sait ? (Ca y est, je deviens philosophe, il faut que je m'arrête tout de suite).

Si tu aimes ce genre de textes, j'en ai en réserve ! :D Et oui rassure-toi, j'en ai des cocasses aussi.

A une prochaine, j'espère avoir l'occasion de lire tes textes également ;)



PS : j'ai modifié le passage sur la lueur, je suis un peu plus satisfaite maintenant mais je le travaillerai peut-être encore...

Oh mon dieu ! Tu aimes aussi Harry Potter ? Haha je ne pensais pas en rencontrer ici un jour ! C'est la saga de mon enfance, je n'oublierai jamais ces leçons. Car oui on a beau critiquer, plusieurs messages sont transmis !  :D

Haha on est tous un peu philosophe dans l'âme, surtout le soir  ;). J'aime lire les expériences, le vécu des personnes. On ne nous apprend pas la "vrai " vie à l'école alors que je pense que cela nous serai profitable à l'avenir ! C'est donc avec désespoir que je me plonge à corps perdu dans la vie des autres  ;).

Heureusement que des histoires plus cocasses soient prévus pour la suite ! Je ne pourrai pas avoir la larme à l'oeil à chaque fois. :mrgreen:

J'espère également te retrouver dans certains de mes textes tels que "La voie des arts" ou encore "Les Larmes de Marie".

Au plaisir,

D.B.
Petite on m'a dit que la Terre était ronde. Aujourd'hui je peux affirmer qu'elle est mourante...

Hors ligne Zakaloc

  • Plumelette
  • Messages: 19
Re : Déni
« Réponse #7 le: 20 août 2018 à 17:34:42 »
Bonjour Ocubrea,

D'abord merci. Merci de nous avoir fait partager ce moment. On sent effectivement l'humanité derrière ton écriture et surtout la volonté féroce de la garder !

C'est un style direct, sans bavure, qui touche immédiatement. En tout cas c'est comme ça que je l'ai ressenti.

Ton métier pourra te donner (et te donne déjà) de nombreuses inspirations. Si elles sont toutes écrites comme ça je ne peux que t'encourager à continuer !

Je verrais bien un recueil avec des histoires de ce type, sans lien les unes avec les autres. Mais simplement des expériences de vie. Car dans ton travail tu es confrontée à la vraie peur et à des sentiments intenses.

Merci encore.

PS : cela ne m'empêche pas de bien aimer Harry Potter aussi hein !

Hors ligne Le-Philosophe-de-Campagne

  • Tabellion
  • Messages: 38
Re : Déni
« Réponse #8 le: 20 août 2018 à 19:54:29 »
Je valide le passage transformé !
Comme promis une image à toi qui fait forte impressions.
Et effectivement la lueur n'augmentent pas, c'est la façon de la ressentir qui augmente ou diminue...

J'attends d'en voir plus pour construire l'avis que je te communiquerai sans fautes  ;)
FR

Hors ligne Ocubrea

  • Modo
  • Calame Supersonique
  • Messages: 1 761
  • Corbeau au bec d'or
    • Pour plus d'informations
Re : Déni
« Réponse #9 le: 20 août 2018 à 22:40:32 »
@ D.B
Je passerai y faire un tour dès que j'aurai un peu de temps !

@ Zakaloc
Merci ! :coeur: (Je crois que je dois être à la vingtième répétition de ce mot sur ce fil, mais c'est chaque fois pensé du fond du cœur).

Citer
Je verrais bien un recueil avec des histoires de ce type, sans lien les unes avec les autres. Mais simplement des expériences de vie.
C'est sur un projet exactement de ce genre-là que je travaille en ce moment :)

(Hihi comment ne pas aimer HP ? L'enfance de toute une génération…)

@ Le-Philosophe-de-Campagne
Merci d'être repassé par ici, et pour ton deuxième retour ! Je suis contente que tu approuves le changement :)
"Il est plus facile de jouer au mikado avec des spaghettis crus qu'avec des spaghettis cuits.” - Philippe Geluck.

Hors ligne BleuAcier

  • Scribe
  • Messages: 61
Re : Déni
« Réponse #10 le: 21 août 2018 à 19:12:21 »
Hello,

Ravi que tu aies osé même si ce texte est rudement mélancolique. Mais il m'interroge et j'aime retrouver cela dans un texte.

Hum je ne suis pas super fan de l'expression "ses yeux bleus surmontés d'absence de sourcils".

Et sur l'anaphore "je me souviens", je reste partagé. Certes, cela démontre à quel point elle t'a touchée, mais d'un autre côté pour moi, c'est comme si cela lui prenait un peu de sa présence. Je ne sais pas comment dire. Je trouve que sa description suffisait. Elle présentait déjà un personnage à la fois fort et marquant. Mais ce n'est que mon avis personnel de moi hein... :-[

Par exemple, ces phrases m'ont percuté :

Citer
Elle attendait qu’on la traite : qu’on l’emmène en salle d’opération, qu’on lui fasse couler de la chimio, qu’on l’irradie. Parfois, je me disais qu’elle aurait préféré mourir de ses soins plutôt que de sa maladie. Et nous ne faisions quand même rien.
Elle a tenu longtemps.
Ouais je m'interroge. Quelle est la frontière entre le déni et l'envie de lutter même si la cause semble perdue ? Et surtout tout ton récit semble la mettre "isolée" face à l'équipe médicale avec pour seule arme son regard. Honnêtement je me suis posé la question : pourquoi ne la laisse-t-on pas choisir ?

Du coup je suis plus dans le ressenti, mais c'est ce qui fait la beauté de ton texte. Jolie plume, mais cela se percevait déjà dans tes coms. J'espère te relire bientôt :).
« Modifié: 23 août 2018 à 11:09:28 par BleuAcier »

Hors ligne Ocubrea

  • Modo
  • Calame Supersonique
  • Messages: 1 761
  • Corbeau au bec d'or
    • Pour plus d'informations
Re : Déni
« Réponse #11 le: 21 août 2018 à 21:21:01 »
Hello BleuAcier ! :)
Merci beaucoup pour ton commentaire !

Alors commençons par la forme :
Citer
Hum je ne suis pas super fan de l'expression "ses yeux bleus surmontés d'absence de sourcils".
Oui, j'ai hésité à le laisser, je crois que je vais attendre de voir ce que d'autres en pensent avant de décider si je le garde ou pas. Mais j'avais envie de faire ressentir cette absence, parce qu'elle était étrange. En fait j'était sur le point d'écrire "ses yeux bleus surmontés de sourcils souvent froncés" puis je me suis souvenue qu'elle n'en avait pas et que ça m'interpelait, alors j'ai écrit ça. Je comprends qu'on n'aime pas, je suis dubitative aussi.

Citer
Et sur l'anaphore "je me souviens", je reste partagé.
Là aussi, je me suis posé la question. Je l'ai finalement gardé parce que ça collait avec l'ambiance que j'essayais de recréer, comme je l'ai dit précédemment, d'une longue répétition de visites, qui chaque jour semblaient juste un peu plus difficiles à supporter que la veille. De plus je me souviens des détails par touches, comme des coups de peinture sur un tableau plutôt que comme un film, et je voulais faire passer cela aussi. Mais ton commentaire me reste en tête, je le laisse mijoter.

Et pour ce qui est de tes interrogations : je suis très heureuses que tu les aies, c'est aussi une des raisons pour lesquelles j'ai écrit tout ça. Mes textes sont rarement uniquement drôles, ou uniquement tragiques, ou uniquement rageants… Ils sont souvent plusieurs choses à la fois, et il se cache généralement une ou deux questions derrière.

Citer
Ouais je m'interroge. Quelle est la frontière entre le déni et l'envie de lutter même si la cause semble perdue ? Et surtout tout ton récit semble la mettre "isolée" face à l'équipe médicale avec pour seule arme son regard. Honnêtement je me suis posé la question : pourquoi ne la laisse-t-on pas choisir ?
Ici en l'occurrence, on parle de déni parce qu'il n'y avait plus de chances de survie, du tout, quoi qu'on fasse. La cause ne "semble" pas perdue, elle l'est. Ni la chirurgie, ni la chimiothérapie, ni la radiothérapie n'auraient augmenté son espérance de vie, même d'une semaine… Au contraire. La chirurgie était tout simplement impossible, la radiothérapie aussi, et la chimiothérapie aurait eu des effets secondaires terribles et probablement précipité son décès. De plus, même sans cela, il faut aussi prendre en compte les coûts pour la société : des dizaines de milliers d'euros grand minimum (plus le coût énorme en temps et investissement pour toute l'équipe), pour chacune de ces interventions. Si tu prends tout ensemble, ça fait beaucoup de raisons.

Pour ce qui est de ta remarque sur le fait qu'elle était seule face au personnel soignant, tu as raison, et je suis contente que ça ait pu transparaître dans mon texte. C'est là toute la difficulté avec un déni, c'est qu'il est irrationnel et rend donc toute discussion si pas impossible, au moins extrêmement difficile. Il génère donc presque immanquablement une tension énorme. Et en plus, lorsqu'il s'agit d'un "déni protecteur" comme ici, les soignants rechignent à le casser. Parfois, il vaut mieux vivre quelques semaines en colère contre l'équipe soignante et dans l'espoir que ça ira peut-être un jour mieux que dans les affres d'un gouffre d'angoisse ingérable face à la mort que l'on voit se rapprocher chaque jour un peu plus. En général, les gens qui ont un déni dans ces situations l'ont parce qu'ils ne peuvent tout simplement pas supporter l'idée de la mort, et ce déni est donc "protecteur", en un sens.

Cela étant, la discussion reste ouverte ! ;)

Voilà, désolée pour le pâté, j'essayerai de me contenir la prochaine fois… Je crois que ce sont des sujets qui m'intéressent presque trop par rapport au but de ce forum  ^^

Merci encore pour ton retour !
« Modifié: 21 août 2018 à 21:24:23 par Ocubrea »
"Il est plus facile de jouer au mikado avec des spaghettis crus qu'avec des spaghettis cuits.” - Philippe Geluck.

Hors ligne Rémi

  • ex RémiDeLille
  • Modo
  • Trou Noir d'Encre
  • Messages: 10 135
Re : Déni
« Réponse #12 le: 23 août 2018 à 10:05:20 »
Salut,

Citer
cela remonte à il y a plus d'un an.
tu peux trouver mieux que un "cela" et un "il y a", perso je suis pas fan

Là encore (comme pour le Syndrôme), je n'ai rien à relever au niveau du détail.

Pour ce qui est de l'impression que le texte donne au lecteur, j'ai été délicatement touché (malgré la violence du thème) et pas vraiment secoué.

Je ne sais pas si c'est voulu, mais la narration sans dialogue, sans scène réellement racontée (tu utilises l'imparfait en expliquant des "comportements habituels"), plus le fait que la narrarice est finalement quasi absente (peu de sentiments exprimés, de réactions visibles, d'actions concrètes mises en oeuvre...) fait que l'on n'entre pas complètement dans l'histoire. On regarde une histoire racontée.
Sur ce format, ça peut être très bien et perso j'ai apprécié.

A+

Rémi

Le paysage de mes jours semble se composer, comme les régions de montagne, de matériaux divers entassés pêle-mêle. J'y rencontre ma nature, déjà composite, formée en parties égales d'instinct et de culture. Çà et là, affleurent les granits de l'inévitable ; partout les éboulements du hasard. M.Your.

Hors ligne BleuAcier

  • Scribe
  • Messages: 61
Re : Déni
« Réponse #13 le: 23 août 2018 à 11:12:18 »
Hello again,

Citer
Voilà, désolée pour le pâté, j'essayerai de me contenir la prochaine fois…
Ben j'ai bien aimé ton "pâté" :P . Merci pour tes explications. Moi aussi je trouve le sujet hyper intéressant, et tu m'as bien éclairé sur certains points. Merci !

Hors ligne Ocubrea

  • Modo
  • Calame Supersonique
  • Messages: 1 761
  • Corbeau au bec d'or
    • Pour plus d'informations
Re : Déni
« Réponse #14 le: 23 août 2018 à 11:35:16 »
@ Rémi
Ici aussi, merci pour ton passage et tes commentaires !
Citer
tu peux trouver mieux que un "cela" et un "il y a", perso je suis pas fan
Tu as raison, je vais essayer de voir si je peux changer ça. A force de taper dans le simple et direct… ::)

Citer
Pour ce qui est de l'impression que le texte donne au lecteur, j'ai été délicatement touché (malgré la violence du thème) et pas vraiment secoué.

Je ne sais pas si c'est voulu, mais la narration sans dialogue, sans scène réellement racontée (tu utilises l'imparfait en expliquant des "comportements habituels"), plus le fait que la narratrice est finalement quasi absente (peu de sentiments exprimés, de réactions visibles, d'actions concrètes mises en oeuvre...) fait que l'on n'entre pas complètement dans l'histoire. On regarde une histoire racontée.
Mmmh tu n'es pas le premier à me dire cela. Il y a visiblement quelque chose qui manque, dans ce texte.
A vrai dire, ça se retourne un peu contre moi, parce que c'est un peu le sentiment que je voulais véhiculer en l'écrivant… Mais visiblement, ça chiffonne beaucoup de gens. L'idée n'était pas de secouer. J'ai moi-même été touchée par cette histoire, mais comme de loin, et je n'irais pas jusqu'à dire qu'elle m'a "secouée". Dans les entrevues avec cette patiente, je me sentais un peu comme un fantôme, sans consistance parce que sans marge de manœuvre. J'essayais aussi de transmettre ce côté "spectacteur uniquement" que nous avions en tant que personnel soignant : on l'observe, mais on n'agit pas. Je m'en souviens un peu comme d'un rêve, vivace, important sans trop que je sache pourquoi, et j'ai ressenti le besoin de l'écrire.

Bref, merci encore, je ne sais pas si je vais changer ce texte-ci parce que j'ai du mal à imagier comment faire sans complètement le réécrire, mais je garde précieusement ce commentaire en tête !

@ BleuAcier
Ouf ! De rien, je suis heureuse d'avoir pu éclairer certains points :)

Edit : j'ai modifié le fameux passage en : "Je m’en souviens comme si c’était hier, bien que l'épisode soit vieux de plus d'un an." J'espère que ça passe mieux comme ça.
« Modifié: 23 août 2018 à 11:42:01 par Ocubrea »
"Il est plus facile de jouer au mikado avec des spaghettis crus qu'avec des spaghettis cuits.” - Philippe Geluck.

 


Écrivez-nous :
Ou retrouvez-nous sur les réseaux sociaux :
Les textes postés sur le forum sont publiés sous licence Creative Commons BY-NC-ND. Merci de la respecter :)

SMF 2.0.19 | SMF © 2017, Simple Machines | Terms and Policies
Manuscript © Blocweb

Page générée en 0.021 secondes avec 18 requêtes.