Le Monde de L'Écriture – Forum d'entraide littéraire

07 février 2025 à 21:02:01
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Le Monde de L'Écriture » Coin écriture » Textes courts (Modérateur: Claudius) » Endorphine

Auteur Sujet: Endorphine  (Lu 275 fois)

Hors ligne Delnatja

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Endorphine
« le: 02 février 2025 à 09:38:27 »
Bonjour. Au départ, il y a eu une envie subite de décrire un paysage de début de journée enneigé, sans savoir ce que je pourrais en faire. Et puis, les cités d'argent sont apparues…
Bonne lecture.

Endorphine

   Une neige légère tombe sans un bruit sur la campagne encore endormie. L'aube se lève doucement et l'horizon sans nuages se tinte d'un rouge flamboyant. Les premiers chants d'oiseaux apparaissent de-ci, de-là, donnant le départ d'une nouvelle journée. La forêt, encore sombre et inquiétante, retient sa noirceur avec entêtement et détermination, supposément dans le but de garder encore un peu ses secrets.
Bientôt, les nuages seront balayés par le vent de l'est et un ciel bleu profond laissera apparaître les cités d'argent.

   On me nomme Endorphine. Je ne connais pas mon vrai nom, ou bien, je l'ai oublié. Je suis la guérisseuse de ma palanquée. Je suis une croisée rouge et j'appartiens à la phalange des Universalis, de ceux qui se battent pour la survie de l'espèce. Je n'ai pas connu mon père et garde un souvenir confus de ma mère. Je la revois parfois en rêve, le jour où elle s'est fait attaquer par deux mécano-canis. Je n'ai dû ma survie qu'au fait d'avoir sauté dans une cuve à mazout. J'avais environ huit ans. J'ai mis longtemps à m'en remettre à cause des effluves et de l'intoxication cutanée qui a suivi. J'ai survécu et je dois avoir maintenant, à peu près vingt ans. Mais je me pose la question, au moins une fois par jour, de savoir si c'est pour un bien ou pour un mal. On m'a enseigné que je suis de la troisième génération, celle qui est à la croisée des chemins, celle qui survit ou qui disparait. Je suis petite, mais au fil du temps, cela devient la norme. J'ai perdu ma chevelure, il y a longtemps, et cela est aussi devenu la norme. La nature décide pour nous, comment nous sommes et ce que nous devenons.

   Le Griot de notre palanquée, un conteur hors pair, nous raconte souvent d'où nous venons et pourquoi nous en sommes rendus là. Il sait des secrets que peu de personnes connaissent. Il distille ses histoires avec parcimonie, mais toujours avec bienveillance. Il a instauré un jeu dans lequel, le demandeur doit poser la bonne question, afin de recevoir la bonne réponse. Cela nous oblige à garder l'esprit ouvert. Il paraît qu'il fut un temps, où nous étions dix milliards sur terre. Il paraît qu'il fut un temps où il faisait bon vivre et où le soleil ne brulait pas. Un temps où on pouvait voyager rapidement et en toute sécurité, d'un bout à l'autre de la planète, sans risquer d'être repéré et abattu par des drones autonomes. Un temps où vivre ne se résumait pas uniquement à survivre.

   Bien sûr, les mécano-canis sont depuis longtemps tombés hors d'usage ou bien ont été détruits par les survivants, mais les drones patrouillent toujours. Il en tombe un de temps en temps, un, de la série Mk6, remplacés depuis, par la série Mk7, les plus dangereux, car les moins sujets aux pannes. On les appelle les oiseaux de grand malheur, un sobriquet qui leur va comme un gant. La vie sous terre pourrait sembler rude, mais il n'en est rien. Au fil du temps, un réseau de galeries et de cellules de survie, de plus en plus confortable, s'est mis en place. Il existe désormais des villages souterrains sur plusieurs niveaux, pouvant atteindre cent mètres de profondeur. Je dois bien reconnaître que notre espèce à une capacité de résilience absolument incroyable, malgré le fait, qu'elle soit capable du meilleur comme du pire. Notre Griot appelle ce processus,l'effet Cyrulnik, du nom du neuropsychiatre français, et comme il le dit souvent, dommage qu'entre Sapiens et Neandertal, ce soit le plus sournois qui ait survécu.

   Entre deux guérisons, il m'arrive fréquemment de remonter et de contempler les cités d'argent. D'après notre Griot, il en existe douze, mais uniquement cinq d'entre elles nous sont visibles. Toujours selon lui, il s'agit de citées usines, dans lesquelles sont confectionnés tous les produits manufacturés qui risqueraient, par leur processus de fabrication, de polluer encore davantage la planète. Il paraît que les ouvriers qui travaillent là-haut, ont tous un implant dans la tête pour que les Survivalistes puissent les contrôler. Je n'y crois pas, ce serait beaucoup trop atroce et je ne vois pas comment ils feraient. Je pense que c'est juste pour nous faire peur, afin que nous restions vigilants. Je n'ai jamais vu de Survivaliste et ne me suis jamais approchée à moins de dix kilomètres d'une de leur cité-dôme. Je suppose qu'ils sont restés identiques à ce que notre espèce était avant la nouvelle ère. Quoi qu'il en soit, ce sont désormais nos ennemis les plus redoutables, car ils ont gardé leur technologie, alors que nous, nous n'avons que notre foi en l'avenir pour nous protéger des aléas quotidiens.
« Modifié: 04 février 2025 à 09:02:59 par Delnatja »
Michèle

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Re : Endorphine
« Réponse #1 le: 02 février 2025 à 10:10:14 »
Salut Mimi. Avant que je n'oublie
Citer
où elle s'est fait
À mon avis où elle s'est faite  Sinon, c'est de la même veine scriptive, aussi inspirée en plus innovante dans les détails, que ta SF habituelle. Donc moi pas fan SF mais moi ai bien aimé quand même.  ;)
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Re : Endorphine
« Réponse #2 le: 02 février 2025 à 10:23:00 »
Bonjour Delnatja,

Citer
Bientôt, les nuages seront balayés
plus haut la narratrice parle d'un horizon sans nuages

Citer
ou bien, je l'ai oublié
j'ôterais la virgule ici

Citer
de ceux qui se battent pour la survie de l'espèce
en quelque sorte, les Survivalistes visent aussi la survie, non ? Je ne comprends pas bien la distinction entre les deux, à part que les deux factions sont ennemies.

Citer
maintenant, à peu près vingt ans
pareil pour la virgule ici

Citer
celle qui est à la croisée des chemins, celle qui survit ou qui disparait.
comment elle le sait ? Comment une génération sait-elle qu'elle se situe à la croisée des chemins ? N'est-ce pas une connaissance qui s'obtient à posteriori ?

Citer
La nature décide pour nous, comment nous sommes et ce que nous devenons.
j'aime bien ça

Citer
La vie sous terre pourrait sembler rude, mais il n'en est rien. Au fil du temps, un réseau de galeries et de cellules de survie, de plus en plus confortable, s'est mis en place. Il existe désormais des villages souterrains sur plusieurs niveaux, pouvant atteindre cent mètres de profondeur.
je trouve que cette phrase, qui évoque une certaine idée de confort et de vie sociale, contraste avec la phrase plus haut où elle dit que vivre se résume à survivre.

Citer
Notre Griot appelle ce processus, l'effet Lamarck, du nom du naturaliste français qui a travaillé sur ce phénomène au XVIIIe siècle
intéressant que Griot attribue à Lamarck des travaux sur la résilience des espèces. Est-ce qu'ainsi, tu veux montrer qu'à trasvers le temps, l'histoire est ré-interprétée différemment ?

Voilà. Encore quelques virgules par-ci par-là qui brise le rythme et que tu pourrais peut-être enlever. Autrement, ça se lit bien, crée des images intéressantes. Je me demande si ça s'insère dans d'autres de tes textes, si c'est un nouveau départ, ou juste un texte qui se veut indépendant et court ?

A+



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Re : Endorphine
« Réponse #3 le: 02 février 2025 à 14:08:56 »
Bonjour Jojo et bienvenue. Moi, te remercie pour ton commentaire. Moi, contente que toi être de retour. Le participe passé de faire, suivi d'un verbe à l'infinitif est invariable. En tout cas, c'est ce que me dit mon correcteur.

Bonjour derrierelemiroir, merci pour ton commentaire.
"Bientôt, les nuages seront balayés". Pour qu'il neige, il faut des nuages, même si l'horizon est dégagé.
"ou bien, je l'ai oublié". La virgule est là pour souligner une hésitation.
Survivaliste est le nom donné par les survivants hors des villes-dôme.
"maintenant, à peu près vingt ans". Pareil que plus haut.
"celle qui est à la croisée des chemins, celle qui survit ou qui disparait." C'est la génération qui cumule toutes les "tares" et qui pourrait s'éteindre. Elle le sait parce qu'on lui a dit, qu'elle n'est pas sûre de survivre et que l'avenir est un luxe. Je pourrais d'ailleurs développer un peu.
"La vie sous terre pourrait sembler rude, mais il n'en est rien." Le confort est une affaire de point de vue, il est certain que cette notion n'est pas du tout la même pour les survivants extérieurs que pour les survivalistes.
"tu veux montrer qu'à travers le temps, l'histoire est ré-interprétée différemment ?" Dans la mesure où Lamarck a effectivement travaillé sur ce sujet, je ne comprends pas ta question.

Ce texte fait partie d'un ensemble de trois textes et me voilà encore repartie pour un nouveau départ. Malheureusement, cela fait beaucoup de départs et je ne suis pas sûr d'atteindre les arrivées. :'(

Belle journée à vous deux.
« Modifié: 02 février 2025 à 14:24:05 par Delnatja »
Michèle

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Re : Endorphine
« Réponse #4 le: 02 février 2025 à 16:43:15 »
Mais oui Mimi, tu as raison. C'est "faite" que mon correcteur a souligné en vert, j'm'as complètement gouré... Y faut que j'aille prendre l'air pour me sortir de ce "traquenard" dans lequel je baigne depuis un mois et qui commence à me polluer les neurones. Désolé.  :oxo:
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Re : Endorphine
« Réponse #5 le: 03 février 2025 à 11:53:03 »
Salut Delnatja,

Il ne me semble pas que Lamarck ait proposé une théorie sur la résilience des espèces. Certains aspects de sa théorie qui visait à expliquer la complexification graduelle des espèces et leur évolution à travers le temps pourraient s'aligner avec une certaine idée de résilience, mais le concept de résilience est bien plus complexe que cela. Il me semble que le but de Lamarck était avant tout de définir le concept d'organisme vivant, et de proposer un méchanisme qui mènerait à leur complexification et évolution.

Quand on le mentionne en biologie, c'est souvent pour illustrer sa théorie de l'évolution basée sur la transmission des charactères acquis, (mais évidemment, sont travail était bien plus complexe que ce simple aspect là).

Je me demandais donc pourquoi tu lies dans ton texte résilience et Lamarck. Mais peut-être que tu voulais parler plus généralement d'évolution ? Mais dans ce cas, je m'interroge de nouveau sur le choix que tu fais de citer Lamarck et non Darwin ? C'est pour cela que je parlais d'histoire ré-interprétée. Il me paraîtrait plus logique de parler de Darwin que de Lamarck.
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Re : Endorphine
« Réponse #6 le: 03 février 2025 à 13:08:50 »
Salut derrierelemiroir, merci pour tes interrogations.
Je n'ai pas réussi à retrouver l'article qui fait mention de Lamarck. Je crois me souvenir que même s'il a fait des recherches sur la résilience, il n'a jamais rien publié. Du coup, je vais être obligée de changer mon fusil d'épaule et revenir à Boris Cyrulnik, voir retirer la phrase honnie.
Si jamais j'ai un problème sur un point particulier dans le domaine scientifique, puis-je à l'avenir faire appel à toi ?
Belle journée.
Michèle

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Re : Endorphine
« Réponse #7 le: 04 février 2025 à 10:00:22 »
Bonjour Michèle
T’es revenue aux fondamentaux, la SF. Ca me fait penser à la série « Silo » ou les habitants vivent en vase clos dans un espèce de tour, en tentant d’instaurer une vie communautaire.
Sinon le texte se lit bien, je suis toujours impressionné par tes références techniques, c'est pas juste une histoire, il y a du solide derrière.
A+
Mic

Hors ligne derrierelemiroir

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Re : Endorphine
« Réponse #8 le: 04 février 2025 à 10:26:24 »
Salut Delnatja,

Il me semble, en effet, que Cyrulnik est plus approprié comme référence. L'effet Cyrulnik, ça crée une bonne impression aussi je trouve.

Citer
Si jamais j'ai un problème sur un point particulier dans le domaine scientifique, puis-je à l'avenir faire appel à toi ?
Bien sûr. Comme tout le monde, j'ai un domaine d'expertise assez précis et limité, mais je suis toujours disponible pour discuter de science :)
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Re : Endorphine
« Réponse #9 le: 04 février 2025 à 13:06:33 »
Bonjour Mic Ester, merci pour ton commentaire.
Je m'intéresse à la science et à chaque fois que je le peux, j'en profite pour me la péter un peu.  :)
Ceci dit, mes connaissances sont très modestes, mais j'aime bien extrapoler dans toutes les directions.

derrierelemiroir, merci, je n'y manquerais pas si j'ai un doute ou besoin d'une explication.

Belle journée à vous deux.
Michèle

Hors ligne Cendres

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Re : Endorphine
« Réponse #10 le: 04 février 2025 à 20:39:14 »
Merci pour le partage de ton texte qui est d'un genre fantastique.
Le début commence par une description de l'endroit et ensuite, tu nous présentes ton personnage, que je croyais au début que c'était un homme.

La fin de cette civilisation est proche et ton personnage s'en doute.

Hors ligne Delnatja

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Re : Endorphine
« Réponse #11 le: 05 février 2025 à 08:43:09 »
Bonjour Cendres, merci pour ton commentaire.
Belle journée.
Michèle

 


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