Est-ce que vous aussi, vous avez parfois cette impression de foudroiement ?
Ce truc qui fait que vous êtes avec des potes, ou bien à la boulangerie, ou au travail devant le PC ou la machine rang 8 poste C ou devant votre huitième client de la journée, et que tout à coup, sans crier gare ni sans aucune raison, y'a tout dans votre cerveau qui se met à clignoter, en mode "putain ça serait cool à écrire, cette idée ?"
Cette impression dingue que c'est là, maintenant ; d'ailleurs si vous laissez passer l'idée, toute l'énergie de la foudre sera morte et ça ne vaudra plus rien ?
Des fois j'ai l'impression d'être perché pourtant régulièrement, je m'en veux ; je veux dire, je suis à l'apéro, ou que sais-je, tout à coup j'ai cette grande claque derrière la tête qui m'amène une tournure de phrase, un truc qui fonctionne, et je me dis "bah oui et après on pourrait y mettre ça, et puis il faudrait préciser que...", mais je me ravise et je me dis oui mais quand même, on est en soirée, faudrait que tu plaques tout, ou qu'au travail tu dises à ton équipe "ok les gars vos gueules démerdez vous j'ai un truc à écrire", sauf qu'on sait vous comme moi que c'est pas possible. Alors je me dis "bon, note l'idée, ce soir, tu la saignes", et le soir venu, l'idée n'a plus de lumière, il n'y a plus de foudre que celle que je m'administre en me reprochant d'avoir été aussi con de laisser filer cette énergie. Vous l'avez, ce truc dingue qui vous vient de l'extérieur, d'au-dessus, plutôt que de l'intérieur ?
je sais que le truc peut paraître mystique tant l'écriture tient de la réecriture, pourtant je sais que cette impression d'inspiration est absolument anarchique chez moi, et qu'elle vient toujours pile au moment où il ne faut pas ; ce truc qui fait que pendant deux mois je vais avoir envie de commencer milles idées par la même tournure de phrase (en ce moment c'est "X était un homme affable, c'est à dire qu'il..." ou bien "Si vous croisiez le regard de Bobby, vous n'en reviendriez pas, c'est à dire que ...), cette impression d'obéir à un truc qui me tombe sur la tête plutôt que de construire une histoire raisonnée à laquelle je maitrise tout. (Pendant un moment, tous mes textes tués dans l'oeur voulaient se titrer "L'homme qui" ; ou "La femme qui",... et ce durant un long moment sans que je ne puisse me convaincre de choisir autre chose tant cette tournure me paraissait inestimable.)
Vous l'avez, parfois ? Vous faites quoi, vous notez ? Vous arrêtez tout, insultez tout le monde et partez à vos écritoires ? Vous l'ignorez ? Vous avez tant architecturé vos plumes que vous n'en êtes plus victimes, mais maître.sses ?
Je suis bien curieux.
Parce que merde, moi, ça m'emmerde, cette foudre qui me tombe sur la tête sans que je sois capable de la canaliser pour mieux la retransmettre.