voilà quelque chose qui devait être fait depuis longtemps déjà mais je pense que l’heure est venue.
Je pense que je vais d’abord exposer le problème pour ensuite proposer une solution, et plus encore.
La vie est peut-être un fleuve ; long pour certains, tranquille pour d’autres, une constante reste.
Les gens ne se marient plus pour la vie avec la première personne qu’ils ont rencontré et courtisé. Ils s’attachent, et puis soit ils s’emprisonnent, soit il s’abandonnent.
Il y a une classe spécifique de gens avec qui on a partagé un
rêve d’amour, du béguin aux années de mariage, séparée des autres connaissances qu’on puisse avoir par un qualificatif à la hauteur de leur statut passé. Ils sont dans une seule catégorie, qui se sent un peu à l’étroit dans deux petites lettres pour recueillir autant de rêves et de déceptions, parfois d’espoirs, des litres de larmes, des blessures guéries ou pas, que ce soit un coffre-fort émotionnel ou juste une
personne qu’on a connue, on a probablement toutes et tous… des
ex (dans la suite, je vais essayer de ne pas marquer le genre grammatical du mot, mais étant mâle hétéro, mes ex sont des femmes)
Quel zoo, si l’on devait décrire et différentier entre tous ces gens ! Dans la discussion, en passant, ou bien en racontant sa vie, on dit "mon ex" comme s’il n’y avait qu’une seule personne qui répondait à cette étiquette, ou bien "une (de mes) ex" pour désigner, sans l’identifier, un membre de cette catégorie informe et profondément intime et personnelle.
Il faut trouver un moyen.
C’est pour ça que je veux introduire
un moyen systématique de discriminer certain‧e‧s "ex" des autres, tout en pouvant s’adapter à toutes les situations sentimentales et qui prend pour base
le temps. Cette technique suppose : qu’on n’a qu’une seule relation sentimentale à moment (mais pas forcément n’importe lequel), et que les relations sentimentales se suivent (pas grave donc, si elles se chevauchent, puisque l’une reste antérieure à l’autre).
Je vais réserver le terme d’ex
exclusivement à la dernière personne avec qui on a entretenu une relation sentimentale (ce n’est pas à moi de décider les critères de telle relation).
Mais, me direz-vous, que dire des autres, les "ex" d’avant "l’ex", ou peut-être, les
pré-ex ?
Autrement dit, au moins, de la
précédente ?
Ah, tu parles-tu de mon
ex-avant-mon-ex ?
ou encore, mon
avant-ex ?
Voilà donc une façon précise de désigner la personne avec qui on a eu une rupture de relation sentimentale, sans équivoque, avant que l’on ait rompu avec son ex. Le mot simple, versatile, basé sur "avant-hier" et donne un sentiment de passé et d’historique personnel. Plus loin encore que "
la personne que j’étais hier", mon
avant-ex a été témoin de cette phase de ma vie encore plus lointaine, mais pas inaccessible.
Maintenant, intéressons-nous (pour les gens qui ont encore un problème pour "le reste" s’il y en a deux ou plus) à la relation encore antérieure, encore plus ancienne, celle qu’on embrassait il y a trois ruptures amoureuses, si historique et si éloignée, que si elle n’était pas une fondatrice dynastique "ma première copine", on pourrait relier à une certaine filiation des ex ; et si on suit cette logique, il y a trois ruptures donc on était donc avec son
arrière-grand-ex.
L’ancienneté qui est portée par le terme, calqué sur "arrière-grand-père", donne le ton de la marque laissée par la relation, supposément léger, mais peut-être fondateur de la personne que l’on est au moment où on le dit. On change d’échelle, de l’échelle biographique à l’échelle généalogique.
Je suis conscient qu’il semble qu’on saute
"grand-ex" dans cette acception, mais au-delà de l’argument taquin que "avant-ex" fait ce job, je comprends que les grands-parents, à l’échelle biographique, ont une couleur dans nos souvenirs et nos personnalités trop puissantes pour que la tonalité émotionnelle soit équilibrée – à cette échelle généalogique, elle est plus neutre. En plus "grand" ça fait un peu trop "je pense encore à elle‧lui"
Celui ou celle qui a encore des problèmes avec ça, et qui a donc plus que trois ex, je n’ai d’autre solution que de proposer de les ordinaliser (ma première, ma deuxième, etc.) jusqu’à arriver à "arrière-grand-ex" ; soit de trouver un moyen de "rétrograder" certaines relations et de se retrouver avec moins d’ex.
Et puisque le temps avance, à chaque rupture amoureuse (ce qui me semble être une charnière acceptable sentimentalement), une ex prend place et les pré-ex se décalent d’un rang, sombrant dans les limbes de l’ancienneté biographique de la personne.
La vie est évidemment bien plus compliquée que ça et l’on peut considérer des situations telles que :
- Reprendre une relation amoureuse avec son ex : est-ce que le registre des ex est-il expurgé de son nom et tous les status dé-décalés ?
- Reprendre une relation amoureuse avec une pré-ex,
e.g son avant-ex : qui prend la place d’avant-ex ? Est-ce que l’avant-ex garde sa place d’avant-ex, puisqu’elle est effectivement la même personne ? Pire : si on rompt avec sa relation pour cela et que tout se décale, l’avant-ex devient-elle une arrière-grand-ex (puisqu’elle est effectivement trois ruptures plus tôt) tout en étant la relation actuelle ?
- Deux relations simultanées dont une englobe l’autre entièrement : rend difficile le caractère ordinal des relations. Par exemple, admettons pour plus de facilité, que les deux relations prennent fin à des moments différents, alors la première relation (celle qui a commencé en premier) sera l’ex, mais la seconde (qui aura fini pendant la première) deviendra l’avant-ex ?
Le caractère contre-intuitif de ces situations ne changent rien à la puissance de l’outil puisque les "ex" sont classées par ordre de rupture.
Évidemment, dans le premier cas, l’argument pourrait être tenu que la rupture n’a pas été "consommée" et qu’on peut faire comme si elle n’existait pas (là encore, ce n’est pas ma place de décider ce qui est une rupture ou pas)
Somme toute, c’est une question de préférence personnelle que de considérer sa relation actuelle comme étant (aussi) une ex, ou avant-ex, etc., mais il reste que la relation d’il y a un nombre donné de ruptures reste précisément définie.
Je pense que c’est un moyen à la fois agile et puissant de pouvoir désigner à un moment donné, spécifiquement les personnes avec qui on a partagé des sentiments, tout en véhiculant à la fois l’importance qu’elles ont eues mais aussi le côté historique de cette importance, en suivant un schème (peut-être hétéronormé et basique) de la succession biographique de relations amoureuses, si pas disjointes, au moins séparées dans le temps.