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Auteur Sujet: Danse sous la lune [contenu explicite]  (Lu 1104 fois)

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  • Buvard
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Danse sous la lune [contenu explicite]
« le: 29 mai 2019 à 16:14:32 »
 Avertissement au lecteur : le texte qui suit porte la mention “contenu explicite” car il contient des éléments susceptibles de choquer la sensibilité des plus jeunes.

                                                                                                   Chapitre I

   C'était une nuit sans étoiles. Une pluie glaçante tombait sur le village tandis que des bourrasques de vents gelées s’engouffraient dans ses rues. Le hameau était isolé de tout. La région qui l'entourait était constituée de landes rocailleuses et de bosquets solitaires. Une route unique et boueuse scindait le bourg en deux.
    Il était près de minuit lorsque l'étranger arriva. Vêtu d'une cape noire ruisselante, un capuchon dissimulait son visage. Sa monture, un immense cheval noir pangaré, piétinait dans la boue alors que ses renâclements lâchaient d'épais nuages de vapeur dans l'atmosphère nocturne.
En entrant dans le village, le voyageur passa devant un étendard or et violet planté là. Le cheval avançait sur l'allée principale, où des bivouacs de fortune étaient installées sous la pluie. Des draperies couvraient des feux de camps, autour desquels de pauvres gens en guenilles étaient recroquevillés. Les vestiges de maisons dévorées par les flammes parsemaient encore le hameau. Devant chacune d'entre elles, des corps sans vie pendaient du haut des poternes, des édits cloués sur le torse. Le cavalier avançait sans détourner le regard. Un instant, il s'arrêta pour laisser traverser un vieux chien boiteux, décharné et infesté par les puces.
   Il fit finalement halte devant une auberge. La taverne n'était plus toute jeune : les briques qui composaient ses murs semblaient pouvoir se dérober à tout instant, et des plantes grimpantes avaient envahi une bonne partie de la façade. Le bois qui servait d'armature à la toiture semblait pourri, et le carreau d'une fenêtre était brisé. L'étranger passa le portillon de bois qui donnait sur une petite cour de terre battue devant la taverne.  Une caravane était stationnée sur la droite, tandis que de l'autre côté une vieille jument se désaltérait dans un abreuvoir, sous un parvis au toit de chaume. Le vagabond y attacha sa monture, puis entra dans l'auberge. À l'intérieur, une petite dizaine de personnes étaient installées. Des femmes, des enfants, et quelques vieillards. L'établissement était poussiéreux, un comptoir en chêne traversait un coté de la pièce, derrière lequel travaillait une femme grisonnante. Derrière elle, les étagères étaient presque vide, on n'y voyait plus que quelques bouteilles, des tonnelets, et quelques tranches de viandes séchées. Le voyageur parcourut la salle sans prêter attention aux regards tournés vers lui, et arriva au comptoir :
- Bonsoir, bienvenue à la Volière, dit-elle. Qu'est-ce que je vous sers ?
   Le vagabond ne répondit pas. Il sortit la main de sa poche, et posa une pièce d'argent sur le comptoir. La femme le regarda un bref instant, puis attrapa une chope. Peu après, l'étranger alla s’asseoir avec sa pinte dans un coin de la salle.
   
   Au même moment, une jeune femme ouvrait les yeux. Maria quitta son lit, et alluma une lanterne. Elle avançait courbée dans ce petit espace qui lui servait de maison. Elle s'installa à sa table, et à l'aide d'une serviette et d'une coupole d'eau parfumée, fît sa toilette. Elle brossa consciencieusement sa chevelure dorée, tout en mâchant une graine de cardamome. La jeune femme avait les épaules larges, la taille fine, et le ventre rebondi. À la lueur diaphane de la lanterne, ses yeux brillaient comme deux tourmalines. Une fois propre, elle passa une robe rouge de seconde main, attrapa un sac en toile posé dans un coin et sortit de la caravane. Elle se retrouva dans la cour devant l'auberge, et donna à manger à sa jument les quelques fruits trop mûrs qui se trouvaient dans le sac. Maria la caressa quelques minutes tout en lui parlant, puis se rendit à la taverne.
   En entrant, elle salua les clients. Les vieillards la reluquaient sans vergogne, et se laissaient aller à des commentaires grivois à son passage. Maria leur répondait par un sourire, et repoussait les mains aventureuses en feignant de petits rires amusés. Elle arriva au comptoir :
    -     Bonsoir Jehanne, comment vas-tu ? Demanda t elle.
Bonsoir Maria, Lui répondit l'aubergiste, on fait ce qu'on peut... Toujours en vie en tout cas ! Elle tentait de rire de sa condition, mais sa voix était marquée par un profond chagrin.
T'inquiètes pas, Hugues est un dur à cuire, je suis sûr qu'il te reviendra très bientôt...
   Maria ressentie alors une étrange sensation en elle, une étincelle de désir grandissante, qui se changerait vite en un véritable brasier. Elle se retourna, et aperçut l'étranger dans le coin de la pièce. Il fumait sa pipe, libérant des volutes de fumée bleuâtre autour de lui. Maria le fixait. Quelque chose en lui l'attirait irrésistiblement, bien qu'elle ne voyait pas ce qui se cachait sous sa capuche. Une odeur enivrante s'empara d'elle, et son excitation monta en flèche. L'homme but une rasade, et reposa sa chope vide devant lui. Malgré les ombres qui le dissimulaient, elle sentit son regard peser sur elle, accentuant ses pulsions... Elle fourra la main dans sa poche, et en sortit quelques pièces de cuivre qu'elle posa sur le comptoir.
   - Jehanne, du vin s'il te plaît, la tavernière déboucha une bouteille et lui tendit avec un verre. J'en voudrai un deuxième.
   La tenancière regarda Maria avec surprise, puis s’exécuta. La jeune femme prit le tout, et se dirigea vers le vagabond. Une fois arrivé à sa table, elle lui demanda :
   - Je peux m’asseoir ? L'étranger hocha de la tête. Maria posa le vin et les verres sur la table, et prit place. Je m'appelle Maria, et toi ? Le voyageur garda le silence. Tu es du genre timide? s'amusa t-elle. Avec moi ce n'est pas nécessaire tu sais... Je crois que j'aimerai bien passer un peu de temps avec toi. Elle sentit tous ses sens en ébullition, quelque chose grondait en elle, une envie irrépressible. La jeune femme passa la main sous la table et la posa sur la cuisse de l'étranger. J'ai une caravane, là dehors, dans la cour. On pourrait prendre le vin et s'y installer confortablement. Qu'est-ce que tu en dis ?
   Le vagabond posa sa main sur celle de la jeune fille, et de nouveau, hocha la tête. Cette dernière sourit, et cette fois-ci, son sourire était honnête. Elle garda la main de l'étranger dans la sienne, et prit la bouteille, laissant les verres sur la table. Sous les regards déconcertés de la salle, ils sortirent de l'auberge, et se retrouvèrent rapidement dans la caravane. À l'intérieur, il n'y avait qu'un lit, quelques étagères suspendues, une chaise et une petite table clouée au sol. Le voyageur s'installa sur la chaise, tandis que Maria le dévorait des yeux. Il prit la bouteille, et en avala la moitié d'une traite, ce qui fit rire son hôte :
   - Tu as vraiment besoin de te détendre, on dirait ! se moqua t elle. Le vagabond mit la main dans sa bourse, et posa une petite pile de pièces sur la table. Non non ! s'exclama-t-elle, pour toi, c'est gratuit.
   Elle se leva, prit la bouteille des mains du voyageur, souleva sa robe jusqu'aux cuisses et s'installa sur ses genoux, face à lui. Doucement, elle ôta la capuche qui gardait le visage de l'étranger dans l'ombre, et plongea son regard d'ébène dans le sien. Il avait des yeux d'acier, qui luisaient comme une lame argentée devant les lueurs de la lanterne. Une épaisse chevelure noire descendait sur ses épaules, et de longues mèches lui tombaient devant les yeux. Il sentait l'humidité, la terre, et la ferraille. Il avait le nez long, légèrement tordu. Mais ce qui frappait lorsqu'on le voyait, c'était ses cicatrices. L'une d'entre elle, la plus longue, partait de l'extrémité de l'arcade et descendait jusqu'en dessous de la joue. L'autre, de loin la plus repoussante, commençait juste sous de la narine et se terminait sur le côté du menton, coupant ses lèvres en deux. La blessure avait visiblement mal cicatrisé, la plaie ne s'était jamais totalement refermée et laissait un jour à travers lequel on voyait une petite partie de sa mâchoire. Maria le regardait sans sourciller. L'étranger quant à lui, l'observait dans ses moindres détails. Il contemplait ses formes, sa chevelure impeccable, l'odeur du parfum et de la cardamome, sa poitrine à travers la tunique... Sans sourire, il avait l'air conquis. Il passa sa main à travers la tignasse dorée, redescendit en lui caressant le dos, puis souleva d'avantage sa robe. Elle ne portait rien de plus. Maria gardait son sourire, et déboucla la ceinture du voyageur. Alors que les mains de l'étranger glissaient sous les tissus pourpres, elle se pencha en avant et l'embrassa. Elle avait les lèvres froides, et lui, brûlantes. Il laissa tomber sa cape sur le sol et ôta sa chemise tandis que Maria faisait glisser sa robe de ses épaules et découvrait ses seins nus. Elle caressa le torse de l'étranger. Il était marqué par de nombreuses cicatrices, certaines avait dû être infligée par une lame, tandis que d'autres étaient des stigmates laissés par des flammes dévorantes.  Dans son dos, des symboles mystiques étaient gravés dans sa chair, le long de sa colonne vertébrale. Une plaie, juste à côté du nombril, n'était pas encore cicatrisée : l'estafilade était suturée, mais du sang à peine séché restait sur le pourtour de la blessure. Soudain, le voyageur se leva de sa chaise, souleva Maria par les cuisses, et l'allongea sur sa couche. Tandis qu'il l'observait, des pensées étranges semblaient passer dans son regard, comme un tourbillon d'émotions contraires et chaotiques. Dans la minute qui suivit, leurs vêtements jonchèrent le sol et leurs corps s'entremêlèrent... Ils s'offrirent l'un à l'autre sans aucune pudeur, sans aucun doute, et sans aucunes paroles. Ils étaient tous les deux l'un contre l'autre, à demi couché, leurs cœurs battant la chamade au rythme de leurs corps qui s'entrechoquaient. Le voyageur embrassait la poitrine de Maria, et remontait petit à petit le long de son torse.
   Il arriva au niveau de son cou, et en un instant, ouvrit la bouche en grand et planta sa mâchoire dans la glotte de la jeune femme.
    À son contact, une fumée noire et nauséabonde s'extirpa de la blessure ruisselante.  Maria ne pouvait hurler, alors qu'un bruit sourd s'échappait de sa bouche. L'homme continua d'enfoncer ses dents et de creuser la plaie. Il y mettait toute sa force, mais la peau et la chair de la jeune femme semblaient lui résister. Alors qu'un sang froid, presque gelé inondait la bouche de l'étranger, les ongles de Maria s’allongèrent et devinrent des griffes. Son visage gracieux se déforma, et prit des allures monstrueuses. Ses pupilles se dilataient encore et encore, si bien que ses yeux devinrent des miroirs d'un noir abyssale. Sa mâchoire doubla de taille, allongeant son menton, et ses dents se changèrent en de véritables crocs. Elle commença à se débattre, à porter de grands coups de griffes dans le dos de son agresseur, lui arrachant des lambeaux écarlates qui vinrent souiller les draps déjà mouillés par les sueurs charnelles. Elle paniquait. L'homme qui la tenait entre ses dents serrait davantage à chaque attaque alors que la fumée noire envahissait la pièce. Il se servait de son cou comme on se sert d'un bâton entre les dents lorsque l'on doit affronter la douleur. Le supplice dura plusieurs minutes, et finalement, Maria finit par abandonner. Ses forces la quittèrent, ses attaques devinrent moins violentes, moins rapides, sa vue s’obscurcit. Alors qu'elle sentait son dernier souffle arriver, quelques larmes perlèrent au coin de ses yeux de ténèbres. Enfin, le voyageur réussit à totalement refermer la mâchoire sur le cou de Maria. Celle-ci, inerte, bascula avec lui sur le lit. En quelques instants, les griffes redevinrent des ongles, les crocs, des dents. Ses yeux noirs se rétractèrent, la jeune femme reprit son apparence innocente, le visage frappé par l'effroi. Ils étaient tous deux nus dans le sang, la sueur, et les larmes...

   Le voyageur reprenait connaissance. Il ouvrit les yeux pour observer tout autour de lui, mais rien. Partout, les ténèbres s'étendaient. L'air sentait la terre mouillée et l'urine, et un froid humide  gelait les plaies de son dos lacérés. Il tenta bien de bouger, mais ses mains étaient entravés par des chaînes cliquetantes suspendues au plafond. Il resta donc là, nu, à patienter. Il ne savait ni où il était, ni si quelqu'un allait venir. Il ferma les yeux, et se concentra. Son pouls ralentie, et ses sens s’exacerbèrent...
   En tendant l'oreille, il arrivait à entendre des respirations saccadés, souffreteuses, qui provenaient d'une autre salle non loin de sa geôle. Au dessus de lui, il sentait des vibrations dans le plafond. Des gens marchaient. Une toux grasse lui venait également du fond du couloir, à l'extérieur de la cellule. Puis, des odeurs nauséabondes apparurent : celles de l'urine et de la terre mouillée se firent plus forte, et furent bientôt accompagnées par celles de déjections, de sang, et par le parfum caractéristique de la fourrure mouillée de quelques rats. Les minutes passèrent, encore et encore, jusqu'à devenir des heures...
   Enfin, un bruit extirpa le prisonnier de sa torpeur glacée. Au loin, il entendit le bruit régulier des bottes frappant le pavé. Deux ou trois hommes approchaient. Une faible lueur apparu alors, et avec elle se firent entendre les tintements d'un trousseau de clefs et les cliquètements des cottes de mailles. La lueur s'intensifiant, elle commença à dessiner les contours d'une porte à lucarne barrée de fer à deux mètres du prisonnier. Finalement, un visage rond apparu de l'autre coté des barreaux. Le geôlier devait avoir une quarantaine d'hiver, chauve, une barbe peu entretenue, il avait le regard noir :
     -  Eh ! T'es réveillé salopard ?! Beugla-t-il à travers les barreaux. Derrière lui, deux hommes casqués se contorsionnaient pour regarder à l'intérieur de la cellule. Le vagabond sentait sur eux l'odeur acre de la sueur et des effluves d'alcool de genévrier.
     - Réponds quand on te cause ! Lança l'un des hommes à l'arrière. Le vagabond releva légèrement la tête, sa tignasse lui tombant sur les yeux, et plongea son regard d'acier dans celui de ses geôliers.
     - J'aime pas sa gueule, rajouta le dernier homme, on devrait l'crever tout de suite, vite fait bien fait !
     - Si seulement ! Allez, au boulot les gars !
   Une clef tourna dans sa serrure, et les trois gaillards entrèrent dans la pièce. Le maton était accompagné par deux hommes d'arme. Ils portaient des matraques, étaient vêtus de cottes de mailles et portaient chacun une cervelière. L'un d'entre eux passa derrière l'étranger, et le baillonna. Ensuite, l'autre détacha les chaînes du plafond. Le vagabond tomba à genoux, les bras ballants, toujours entravés par les menottes. Le geôlier lui jeta au visage des guenilles puantes, infestées de parasites :
      - Enfile ça !
   Une fois habillé, le vagabond quitta la cellule avec son escorte. Ils traversèrent un étroit corridor flanqués des mêmes portes à lucarne, puis empruntèrent un escalier en colimaçon aux marches grossièrement taillées. Une fois à l'étage, ils passèrent une lourde porte en bois massif et débouchèrent dans un couloir. Le groupe passa devant une salle de garde déserte, et sortit du bâtiment. Ils étaient dans la cour d'enceinte d'un petit fortin de bois, sans doute la seule fortification du bourg. Le geôlier referma la porte derrière eux. Une douzaine de tentes or et violettes étaient installées dans la cour. Des soldats vêtues de couleurs similaires s'activaient ici et là ; certains s'exerçaient à l'épée, d'autres prenaient leurs repas ou nettoyaient leurs tentes tandis qu'ils échangeaient des paroles dans une langue étrange. Le prisonnier et son escorte traversèrent la cour sous le regard mauvais des guerriers, et grimpèrent un escalier jusqu'à un baraquement juché sur une butte à l'extrémité du fortin. Là, l'un des hommes d'arme frappa à la porte :
     - Caporal ! Caporal ! C'est Eigbert et Tristan ! On a vot'gars, le cannibale !
     - Faite le entrer ! Dit une voix à l'intérieur.
   Les deux gardes firent entrer le vagabond dans le baraquement. La pièce était grande. Des étagères pleines de parchemins et de documents couraient le long des murs. De grandes malles étaient posées les unes sur les autres dans un coin, et un long secrétaire trônait au centre de la pièce. Un homme était installé derrière son bureau. Il portait une cuirasse par dessus un gambison usé, et des écussons or et violet était accroché sur ses épaulières. Il avait le crâne et les joues rasés à blanc, et d'épais sourcils roux faisait ressortir ses yeux bleues. On poussa le prisonnier jusqu'au centre de la pièce, où il pût s’asseoir sur une chaise en face de l'officier :
      - Retire-lui son bâillon, dit-il avec un fort accent étranger.
      - Messire, vous êtes bien sûr ? Ce type a bouffé Maria !
      - Fais ce que je te dis bougre d'âne ! Et foutez moi le camp tout les deux... Ordonna-t-il.
         Les deux hommes s’exécutèrent. Rapidement, il n'y eût plus que le haut gradé et son prisonnier dans la salle. Le rouquin observait son hôte dans les moindres détails, comme s'il cherchait quelque chose sur lui. Le voyageur quant à lui, regardait le caporal d'un œil mauvais. L'officier prit une grande inspiration, puis souffla par le nez tout aussi longuement, les bras croisés, il s'enfonça dans son fauteuil :
      - Je m'appelle Alredo dé Mandlarte, Caporal dans la légion Sénille, dit-il d'une voix calme. Je suis également nouveau Grand
         Prévôt du bourg de Mulberg. L'ancien a offert une résistance digne devant nos soldats, et se balance désormais au bout d'une
         corde. Je suis donc responsable des bonnes gens de Mulberg désormais, et il m'appartient de préserver l'ordre et la sécurité
         chez les nouveaux sujets de son altesse impériale. Le caporal marqua une pause, observant son interlocuteur qui ne
         bronchait pas. Et vous, vous êtes ? Le vagabond gardait les lèvres closes. Vous ne voulez rien me dire ? Soit, je sais déjà
         quelques choses vous concernant...
   Le voyageur plissa légèrement les yeux, un bref instant, mais qui suffit à l'officier pour comprendre qu'il avait enfin piqué la curiosité de son détenu. Alredo esquissa un petit sourire du coin des lèvres avant de quitter son fauteuil. Il alla chercher l'une des malles, et vint la poser non sans efforts sur son secrétaire. Le caporal ouvrit le mystérieux coffre, et commença à déballer son contenu sous les yeux de son prisonnier :
     - J'ai déjà été surpris lorsque mes hommes m'ont rapporté qu'un fou s'était attaqué à une dame de plaisir, car je n'ai jamais été
        confronté jusqu'alors à un cannibale, même dans une contrée aussi sauvage que celle-ci..
   Alredo sortit un sac du coffre qu'il vida sur le bureau ; du papier, un encrier, une plume, une pierre à aiguiser, quelques vivres, un marteau, un médaillon à clapet, une bague, des réserves de balles et de poudres, un briquet, de la mèche, un fourquin pliable, une pipe et quelques babioles se répandirent sur la table... L'officier observait les réactions du voyageur, qui ne quittait pas ses affaires des yeux :
      - Mais ce qui m'a surpris encore davantage, c'est de voir un homme s'aventurer avec un tel arsenal aussi près de la ligne de
         front, continua-t-il.
   Le rouquin sortie alors de la malle une arquebuse à rouet qu'il posa délicatement. L'arme faisait un peu plus d'un mètre. Elle était constituée de bois traité et d'acier, et son canon était fin et recouvert de runes étranges. Le chien était stylisé, et représentait une tête de dragon finement ouvragée. Mais là où l'arme était insolite, c'est qu'elle comportait une lame incurvée, comme celle d'une hache, juste sous l'extrémité de la gueule de l'arquebuse. La lame semblait extrêmement tranchante, tel un rasoir. Le caporal reprit :
      - C'est la première fois que je vois une arme pareille... Et je ne sais par quel miracle, elle semble parfaitement équilibrée.
   Dé Mandlarte commença à prendre un par un les objets qui inondaient le bureau. Même les plus insignifiants, il les observait avec minutie tout en feignant de ne pas s'intéresser aux réactions de son hôte. Enfin, il pris la la bague entre ses doigts :
      - Jolie bijou, dit-il, un anneau d'argent sertie d'une tourmaline. Peu commun... Cela me rappelle une vieille histoire. Je n'étais
         encore qu'un jouvenceau à cette époque, j'habitais une petite ville sur la frontière Ouest de l'Empire. Un hiver, des
        disparitions étranges ont commencées, puis, des corps sans vies furent repêchés dans la rivière, à intervalle régulière. Les
        gardes, les enquêteurs, les Porteflammes, tous tentèrent d'élucider ce mystère et de découvrir qui était responsable de toutes
        ces atrocités. Un jour, un homme arriva en ville. Un homme un peu comme vous, l'allure sinistre, le regard froid. Il se rendit
        auprès du bourgmestre et exigea une somme d'argent, en l'échange de quoi il se chargerait d'apporter la tête du tueur. Le
        bourgmestre, sous la pression populaire, accepta le marché de l'étranger. Alors, ce dernier revint un ou deux jours plus tard
        avec la tête d'une créature hideuse. Il expliqua ensuite qu'une "aberration" avait élu domicile au fond de l'un des puits
        principaux de la ville.
      - Un étrangleur... chuchota le prisonnier.
      - Ah ! Tu es donc doué de parole ! Je commençais à désespérer ! S'exclama Alredo avec enthousiasme. Je ne me souviens pas
        du nom de la créature, juste de son ignoble visage... Après avoir récupéré son dû, l'étranger est remonté sur son cheval, puis
        nous a quitté. J'étais haut comme trois pommes à l'époque, je me souviens de sa main alors qu'il passait devant moi. Il portait
        la même bague. Un anneau d'argent sertie d'une tourmaline... Plus tard, j'ai appris par mon père que cet homme n'était pas
        seul, qu'il faisait partie d'une organisation qui traquait les créatures maléfiques, et que cette bague était le symbole de cette
        guilde.
      - De notre Ordre, lâcha l'étranger. Il avait une voix rocailleuse, grave et noire comme les ombres d'une profonde caverne.
      - Pardon, de votre Ordre, repris le Caporal. Je ne sais pas exactement comment l'on prononce le nom de votre ordre dans votre
         langue.
      - Je suis Vengeur, et j'appartenais à l'Ordre de Dame Corneille.
      - Appartenais ? Demanda l'officier.
      - L'Ordre n'existe plus. Mais je continue mon activité, en... Indépendant. Expliqua l'étranger.
      - Je suppose qu'une vie passée sur les routes à chasser un tel gibier n'a pas dû être de tout repos...
      - Pourquoi ne-suis-je pas encore mort l'Athrien, que veux-tu de moi ? Le coupa le Vengeur.
      - Et bien ! Tu ne parles pas pendant tout un moment, mais voilà que maintenant que tu daignes ouvrir la bouche, c'est pour
         écourter la conversation ! En voilà des manières !
      - Tu m'accuses de cannibalisme, la peine encourue est un passage sur le billot. Je suis encore en vie, et je n'ai pas l'impression
         que les procès aient le vent en poupe par les temps qui courent. Alors dit-moi ce que tu souhaites et finissons-en.
      - Intéressant, remarqua Alredo. Que dirais-tu si je te donnais l'occasion de défendre ton acte ?
      - Que votre accusation est fausse, lâcha le Vengeur tandis qu'Alredo étouffait un ricanement. Et je peux vous prouver sur le
         champs, que je ne suis ni un cannibale, ni un assassin.
      - Par quel miracle ? Demanda le caporal, curieux. Les villageois t'ont retrouvé hier matin dans la caravane de la pauvre Maria.
         Maculé de sang, littéralement de la tête aux pieds et nu comme un vers. Tu avais encore des filets de chair au bord des lèvres,
         et la pauvre fille était raide morte, la gorge arrachée... De ma vie, je ne crois pas avoir entendu d'histoires aussi sordides !
      - Je serai un cannibale si ce que j'avais mordu était humain, et je serai un assassin si ce que j'avais tué l'était également. Ce
         n'était pas le cas, dit le Vengeur d'un ton abrupte.
      - Ah ? Et qu'était-ce alors ? Les gens du coin connaissent Maria depuis des années. Selon eux, elle passait sa vie dans sa
         roulotte, sur les chemins, passant de villes en hameaux pour y proposer ses services. "Toujours souriante, toujours douce et
         propre !" M'a-t-on rapporté...
       - C'était une succube. Une sous-espèce de vampire, affirma le Vengeur d'un ton ferme. Je la traque depuis plusieurs semaines.
          Votre Maria passe de ville en hameaux depuis des années vous dites? Des disparitions correspondent étrangement au
          rythme de ses allez et venus. Avant de se présenter comme "Maria", votre succube se faisait appelé "Carola" dans le Comté
          de Roillotte, à cent cinquante kilomètre au nord d'ici. Lorsque la dernière guerre a éclatée et que les vôtres ont conquit le
          territoire il y a une dizaine d'années, elle a migré vers le sud pour arriver dans la région. Maintenant que nos deux nations
          sont de nouveau à couteaux tirées, et que vous avez pris la majeure partie de la province, elle s'apprêtait de nouveau à quitter
          la  contrée pour migrer vers un endroit où le gibier serait plus prolifique, afin de ne pas éveiller les soupçons. Heureusement
          pour vous, un réfugié Roillotin a croisé sa route il y a un peu plus d'un mois. Lorsqu'il s'est rendu compte qu'elle n'avait pas
          pris une ride après dix années et qu'elle avait changé de nom, il est allez prévenir le nouveau seigneur local, installé depuis
          peu par la grâce de vos supérieurs. Peu après, on fit appel à mes services et je partais sur ses traces.
       - Jolie histoire... Mais vos mots ne font pas office de preuve, rétorqua Alredo.
       - Non c'est vrai. Gardez donc cette bague pour le moment, Caporal, et posa là sur le corps de votre sainte catin pour en avoir le
          cœur net. En attendant, vous devez avoir mon gambison quelque part dans votre malle, non ?
       - Oui, oui... En effet, répondit l'officier, dit-il de moins en moins sûr de lui alors qu'il sortait le-dit gambison.
       - Regardez, il y a une double poche cachée, dans la doublure intérieure droite, Caporal.
   Alredo farfouilla dans la tunique de cuir rembourrée, et finit par trouver une poche habilement dissimulé dans les plis de la doublure... Il en extirpa une enveloppe contenant un bout de parchemin. Déboussolé, il déplia la lettre et lu à demi-voix :
       - Par ordre du Seigneur Pavatrio dé Lauglion... Le détenteur de la présente lettre... Mission officielle... Récompense de vingt
          lions d'or... Alredo termina de lire en silence, puis posa la missive sur son bureau, les yeux dans le vague. Qu'est ce que cela
          signifie ? Finit-il par lâcher.
      - Ça signifiât que vous m'devez vingt lions d'or, Caporal.

   Le soleil commençait à se coucher sur le bourg de Mulberg. Ses rayons pourpres passaient à travers les vitres de la pièce et la plongeaient dans une lueur tamisée. De grosses gouttes de buées descendaient le long des carreaux, natives des vapeurs d'un bain brûlant. Le Vengeur barbotait dans l'eau fumante tout en tirant sur sa bouffarde. Il était de retour à l'auberge de la Volière.
   On frappa à la porte, puis une serveuse entra dans la pièce avec un plateau. Toute tremblante, elle vint déposer sur une petite planche qui traversait la baignoire le repas de son hôte. Puis, elle fila promptement. Après avoir découvert que le Vengeur agissait sous l'autorité du Comte de Roillotin, le caporal Alredo avait libéré son prisonnier et lui avait offert une chambre à l'auberge du coin le temps qu'il se remette de ses blessures. Ils avaient convenu de tenir conseil lorsque le voyageur aurait suffisamment guéris. En attendant, l'ancien détenu profitait pleinement des faveurs qui lui était octroyées : il ne semblait pas se soucier de la disette que subissaient les habitants de Mulberg après le passage de l'armée Athrienne, et mangeait et buvait tout son soûl.
   Le lendemain, l'homme se leva tard dans la matinée, et quitta la Volière. Il partit à pied, et quitta le village une petite heure. Il revint, portant un long bagage enveloppé dans un linge. De retour à la taverne, il pris ses affaires et chargea son cheval. La roulotte de Maria était toujours dans la petite cour. Le Vengeur y entra quelques minutes, puis quitta la Volière sur sa monture.
   Peu après, il arriva au fortin. Deux soldats Athriens, vêtus d'or et de violet, lui ouvrirent les portes à contre-coeur. Il entra dans la grande cour, tandis que les guerriers l'observaient toujours avec dégoût et mépris. Le Vengeur mit pied à terre, sans se soucier du regard des combattants, et entra dans le baraquement du caporal après avoir frappé :
      - Sio nael perado, blid'vael ! S'exclama l'officier alors que le Vengeur entrait dans la pièce. Ah ! C'est vous ! Dit-il en relevant la
         tête de sa paperasse. Et bien, vous avez meilleure allure que la dernière fois !
   Le voyageur arborait une brigandine de cuir brune sur un gambison noir. Des spalières lui recouvraient les épaules, et laissaient place à ses bras nus. Il portait une paire de gants de cuir aux doigts non fermés, équipés de renforcements d'acier argenté juste au dessus des phalanges, tandis qu'un épais pantalon sombre lui tombait jusque sous les genoux, et formait un ourlet sur de solides bottes usées. Il tenait sous le bras une grande redingote noire :
      - Vous êtes déjà debout et prêt à repartir ? Demanda Alredo avec étonnement, vos blessures étaient profondes, Maître Vengeur.
      - J'allais quitter Mulberg, Caporal. Cependant, je me suis rappelé de notre dernière discussion, et il me semble que vous étiez à
         deux doigts de me parler d'un problème qui doit relever de mes compétences. J'aimerai connaître votre demande. S'il s'avère
         que Maria n'était pas la seule créature à détruire lors de mon passage ici, il se pourrait que je rallonge mon séjour parmi
         vous.  Le caporal observait son interlocuteur, en pleine réflexion.
       - Vous avez raison, finit-il par lâcher. J'ai bien une demande à vous soumettre, mais malheureusement je n'ai actuellement
         pas les fonds nécessaires pour vous engager... Après m'avoir soulagé des vingts lions d'or promis par Monsieur le Comte
         Pavatrio Dé Lauglion, mes caisses sont presque vides, avoua Alredo avec embarras.
       - Tout dépends de la difficulté de la tâche à accomplir, mais sachez que je me contenterai de peu cette fois, car j'ai de nouveau
          besoin d'une faveur Caporal, une faveur que vous seul ici pouvez m'obtenir, je le crains.
       - En voilà une aubaine, et quelle est-elle ? Demanda l'officier.
       - Parlez moi de votre affaire, et je vous dirais ensuite de quoi il en retourne, pas avant. Allez à l'essentiel, je vous prie. Alredo
         marqua une pause.
       - Soit ! Qu'il en soit ainsi... À une dizaine de lieux de Mulberg se trouve la propriété de Monsieur De Goue de Vilseroy, Comte
         de son état, encore un, et Maître marchand à la Guilde de l'Aile Écarlate.
       - Un Comte et un marchand ? Demanda le Vengeur.
       - En effet, Monsieur de Goue de Vilseroy a fait fortune dans le commerce. Son entreprise a ensuite été assimilé par l'Aile
         Écarlate, après quoi il avait les moyens nécessaire pour pouvoir s'acheter terres, domaines et même un titre de noblesse.
       - Continuez...
       - Donc, Monsieur de Goue de Vilseroy s'est montré particulièrement généreux depuis son arrivé dans la région, et est vite
          devenu un mécène respectable et aimé par les habitants de Mulberg. À mon arrivée, peu après avoir reçu l'ordre de me baser
          ici pour assurer la souveraineté impériale sur la contrée, j'ai fait envoyé des hommes auprès de ce Monsieur. Ils sont
          revenus, pour le moins déconcertés... Monsieur de Goue de Vilseroy n'a même pas daigné recevoir mes émissaires. J'ai tout
          de suite pensé que nous avions affaire à un patriote, comme l'ancien prévôt de Mulberg. J'étais à deux doigts de rassembler
          mes hommes et de mener une expédition punitive sur le domaine de ce Monsieur, mais un citoyen de Mulberg, soucieux du
          sort du Comte de Goue est venu me trouver. Selon lui, Monsieur le Comte ne serait en rien un ennemi de l'Empire, mais
          serait sous l'emprise d'un maléfice...
        - Un maléfice ? Cette histoire me paraît bien compliquée... Dit le Vengeur, impatient.
        - Oui, le Comte, veuf depuis des années, aurait vu feu sa dulcinée revenir frapper à sa porte, un beau matin. Ainsi, le Comte
           aurait congédié la plupart de ses domestiques, et aurait repris sa vie avec son aimée, se soustrayant par la même occasion à
           tous ses devoirs et ne recevant plus personne à son domaine.
         - Je suis dubitatif, cela m'a tout l'air d'une fable. Vous avez des témoins ?
         - J'ai pensé comme vous. Puis, j'ai fait venir certains des serviteurs que leur maître avait mis à la porte. Il rapporte tous le
            même discours: Il y a deux mois, au petit matin, la femme du Comte est entrée dans l'enceinte du domaine, est venu frappé
            à la porte de la demeure et a demandé à voir De Goue de Vilseroy. Selon eux, elle n'aurait pas prise une ride...
         - Comment est-elle morte ? As-t-on enterré son corps ou a-t-elle disparût ?
            De Goue lui aurait fait construire un mausolée sur son domaine. Les serviteurs étaient entre autre chargé de son entretien.
            Elle est sensée y être enterrée...
         - C'est de plus en plus étrange... Le Vengeur posa sa redingote sur un fauteuil devant le secrétaire, croisa les bras, s’assis et
            posa un index sur ses lèvres balafrées. Un fantôme ou un spectre serait incapable de se déplacer en plein jour... Fit
            remarquer le professionnel.
         - Sans doute... Enfin ! J'aimerai que vous vous rendiez au domaine de De Goue de Vilseroy, et que vous élucidiez ce mystère
            pour moi, afin de libérer le Comte de l'emprise de... Et bien de ce qui l'accable, quoi que ce soit.
         - Bien. Pourquoi venez vous en aide à ce Comte, Caporal ?
         - J'ai besoin d'une raison pour tendre la main à un gentilhomme ? Demanda Alredo avec un sourire.
         - Sérieusement, pourquoi ?
         - Et bien, les relations avec les habitants de Mulberg sont... Tendus, depuis notre arrivée.
         - Étonnant... Une idée du pourquoi peut-être ? Questionna le Vengeur, accusateur.
         - Je sais que le sang a coulé et que les flammes ont dévorés quelques demeures. Mais c'était un mal nécessaire pour apporter
            la lumière impériale. Tous ont eut le choix de déposer les armes. Les sages l'ont fait, les autres ont connus une fin abrupte.
            Maintenant que ces choses sont réglées, j'aimerais que nous allions de l'avant.
         - Il me paraît compliqué d'imaginer les gens d'ici passer à autre chose aussi vite que vous, Caporal.
           Et bien, le Comte de Goue de Vilseroy pourrait sans doute m'aider en ce sens. Il s'avère que De Goue est un mécène
           important pour les gens de Mulberg, et qu'il a par le passé fait preuve d'une grande générosité envers eux durant les
           épreuves difficiles.
         - Je commence à comprendre. Lever le maléfice hypothétique qui pèse sur le Comte vous assurerai son soutien auprès de la
            population, et vous permettrait de consolider votre autorité. C'est judicieux.
         -Vous avez l'esprit vif, Maigre Vengeur. Alors, acceptez-vous ma requête ?
         - Je l'accepte. Vous avez su piquer ma curiosité, Caporal. Mais j'ai certaines conditions à vous soumettre. Le Vengeur sortie
           de sa redingote une blague à tabac et son brûle-gueule habituel, puis se mit à tasser l'herbe à pipe dans le foyer. Je m'engage
           à libérer le Comte de ce qui l'accable, uniquement s'il s'agit bel et bien d'une cause surnaturelle. Il craqua une allumette, et
           mis le feu à sa bouffarde. Je ne vous demanderai pas d'argent pour ce contrat, mais mes gages seront d'une toute autre
           nature...
         - Je vous écoute. Répondit Alredo, attentif.
         - Je veux faire un prélèvement sur la succube.
         - Sur Maria ?
         - Oui, "Maria","Carola", peu importe. J'ai besoin d'emporter un morceau de sa chair.
         - Comment ça ? Pourquoi faire ? Alredo avait quelque peu blêmit.
         - J''ai besoin d'effectuer une analyse. Vous n'avez pas à connaître les détails, et sincèrement, vous ne le voulez pas, mais il
            s'avère que j'ai également une enquête à mener.
         - Et bien, c'est une demande peu orthodoxe, mais je suppose que vous savez ce que vous faites. Je... Je voulais vous
           demander d'ailleurs, pourquoi avoir tué Maria de cette façon ? Vous n'auriez pas pu lui tendre une embuscade, et user de
           votre arquebuse ? Alredo semblait vouloir satisfaire sa curiosité morbide.
         - Si vous voulez savoir, Caporal, je n'avais qu'une brève description de votre succube. Quand je l'ai vu entrer dans l'auberge,
            je devais m'assurer qu'elle était bien la créature que je recherchais, et pas une simple catin sur la route. J'avais pris soin               
           d'avaler une mixture qui donnait à mon sang une odeur plus qu'alléchante pour une succube, ainsi que de m'entailler
            légèrement au ventre. Sa faim a fait le reste.
         - Je... Je comprends mieux. Mais vous vous y prenez toujours comme ça ? Vous lui avez sauté à la gorge tout de même...
         - Je vois que ça vous travaille, Caporal. Il fouilla dans la poche de redingote, et posa sur la table un objet qui retentit avec un
            bruit sourd. C'était un dentier. Pas de ceux utilisé en médecine, celui-ci était très épais, massif, fondu dans un  métal
            argenté. Ses dents ne ressemblaient en rien à une dentition humaine : il n'était constitué que par de longues canines.
          - C'est ce que je crois ?
          - Du matériel pour le travail oui. J'aime l'ironie du sort. Votre spécimen ne s'attendait pas à recevoir une fin identique à celle
             de ses victimes. Le Vengeur parlait avec un ton terriblement calme, distant. Alredo quant à lui, était blanc comme un linge.
             Bon, maintenant que j'ai étanché votre soif de savoir Caporal, acceptez-vous mes conditions ? L'officier semblait
             complètement perdu. Caporal ? Répéta le Vengeur.
          - Heum..! Oui, oui, je les acceptes bien entendu. Dit-il en reprenant ses esprits.
Alors tout est réglé. Le Vengeur se leva, et  passa sa redingote. Je serai de retour d'ici quelques jours, tout au plus. En attendant, concervez le corps de la succube le mieux possible. Si vous avez du formol, un morceau sera parfait, de la chaire de préférence. Dans le cas contraire, trouver une cave fraiche et protégez la dépouille des parasites. À très bientôt Caporal.
A bientôt Maitre Vengeur, bredouilla Alredo, bouche bée.

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A l aube des temps, les chiens étaient des loups.

 


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