Salut Kokox,
après une absence de plusieurs années sur le forum, j'y retourne histoire de voir si ça ne m'aiderait pas à remettre la plume à l'étrier. Comme le veulent les bonnes manières en cours dans ce genre d'assemblées, je me suis mis à musarder en quête de textes à lire et à commenter. Et PAF je tombe sur "La révérence".
Pour une reprise de contact, je suis largement servi !
PAF pour signifier la claque que j'ai prise à la lecture de ton texte, mais PAF est un peu trop agressif, il ne rend pas honneur à la délicatesse de cette histoire, de ses personnages, et de ton écriture.
Je n'ai pas lu les commentaires, je vais donc certainement redonder, mais tant pis.
Je pourrais éventuellement pinailler, il y a deux ou trois images (au début notamment) qui m'ont semblé un peu outrée, comme si tu avais poussé le bouchon de l'image poétique un peu trop loin (mais à la réflexion, je ne connaissais pas encore bien la donzelle, et ces images sont peut-être celles qui conviennent à une jeune fille de 14 ans, simple, amoureuse et innocente ... il me faudrait une deuxième lecture, mais pas tout de suite, que le plaisir ne se transforme pas en travail).
C'est vraiment très bien écrit ! Dans une belle langue, rythmée comme il faut pour emmener le lecteur sans à coups tout au long de cette fable (qui doit bien faire ses 60000 caractères non ?). Chapeau, c'est pas donné à tout le monde de réussir ce tour de force.
La construction aussi est très bien foutue, la prise de conscience, petit à petit des particularités d'Anastasie. Les quelques détails, noms de lieux, ambiances, qui brossent en filigrane une ambiance Yiddish. Du coup ça donne une piste d'interprétation pour le second couplet de la chanson qu'Anastasie invente pour la coccinelle : un couplet sombre, une ambiance qui fait penser à des juifs d'europe de l'est ... juste une ombre derrière l'horizon, mais c'est déjà là, sans qu'on s'en doute. D'ailleurs j'ai interrompu ma lecture peu de temps après, juste pour faire un tour chez monsieur Gogeule, lui demander des détails sur Pitchi poï, je voulais une confirmation de mes inférences géographiques ... c'est là que j'ai appris la signification de ce terme. L'horizon était vraiment bouché !
Et pourtant ça continue, toujours délicat, toujours poétique, à croire que ces sombres pressentiments ne sont que le fruit de ma parano.
Quand l'histoire arrive au village évacué, le doute n'est plus permis, on s'attend à tomber dans l'horreur, et on y tombe, sans surprise. Et pourtant, par la grâce d'Anastasie et de ton écriture c'est bien l'horreur mais c'est tout autre chose aussi. On garde le même sourire au seuil de la chambre à gaz que celui qu'on avait quand on lisait la rencontre avec le meunier par exemple. C'est parfaitement réalisé et c'est très déstabilisant : je me suis presque senti un peu honteux de ne pas éprouver ce qu'il est convenu d'éprouver quand il est question des chambres à gaz : de l'horreur et du rejet, à l'exclusion de toute autre considération. Et ben là c'est pas le cas.
Je suis très impressionné par cette fin, par ce qu'elle a provoqué comme émotions en moi, et je suis très impressionné de commencer un nouveau séjour dans ce forum en compagnie de personnes qui peuvent écrire cette fin (et tout ce qui y conduit).
Bon, en deux mots : j'ai aimé.