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Auteur Sujet: Detroit (Kathryn Bigelow)  (Lu 1495 fois)

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Detroit (Kathryn Bigelow)
« le: 11 octobre 2017 à 21:12:34 »
Detroit 
Kathryn Bigelow - 2017
John Boyega, Will Poulter.


Le Huffington Post, par sa journaliste Jeanne Theoharis, a qualifié Detroit (prononcez Ditroïte) de film "le plus inconséquent et dangereux de l'année". Ce professeur en sciences po au Brooklyn College a trouvé que le scénario faisait la part trop belle aux individus, victimes et tortionnaires, au détriment de la communauté noire d'une part et de la police de Détroit d'autre part. En d'autres termes, elle aurait aimé que Kathryn Bigelow nous présente un cours d'histoire sur les émeutes raciales de 1967 à Detroit, qu'elle nous expose ce qui s'était passé avant, pour pouvoir expliquer le pendant et l'après. La journaliste aurait voulu un documentaire historique ou à la rigueur un film plus démonstratif, plus clairement engagé contre le racisme (50 ans après les évènements !). Voilà pourquoi le film est inconséquent. Mais pourquoi il est dangereux, l'article ne le dit pas. Elle nous apprend aussi, et c'est très intéressant, que la communauté noire de Chicago, réagissant au dénouement du véritable procès, avait organisé elle-même un procès "privé" pour rétablir les faits réels et prononcer des condamnations. C'eut d'ailleurs été un excellent sujet que le déroulement parallèle du procès légal et du procès populaire des mêmes évènements (je pense que je devrais déposer le concept). Mais ce n'était sans doute pas le but de Bigelow. Elle n'a pas voulu "expliquer", c’est-à-dire exposer les raisons de ce déchainement de violence, celui des émeutes d'abord, puis celui des policiers. Elle a voulu montrer, tout simplement. Les critiques du Monde, de Télérama et du Nouvel Obs sont positives. Convenues mais positives. Quant à celle de Libération, elle est incompréhensible, mauvaise, mais incompréhensible, sous un inévitable et pénible titre-calambour : "Détroit, un effroi à l'étroit". Mais dans quelle cour d'école vont-ils chercher tout ça ?

Vous savez maintenant, grosso modo, ce que pense de ce film l'essentiel de l'élite intellectuelle. A moi, maintenant : Le décor est rapidement planté ; les émeutes démarrent à la suite d'une banale descente de police dans un bar clandestin fréquenté par les noirs. Les choses tournent mal, et la ville est rapidement mise à feu et à sac. Dans ce contexte, quelques jeunes noirs et deux jeunes blanches en quête d'aventures font la fête dans un motel de la ville. La Garde Nationale passe à proximité et l'un des fêtards tire un coup de pistolet d'alarme en direction de la garde. Le motel est mitraillé puis envahi par quelques policiers, qui vont de livrer pendant de longues à des actes de torture physique et morale pour connaitre l'identité du tireur. Il y aura plusieurs morts, un procès et des acquittements.

Voilà pour l'histoire. Maintenant, le traitement : les scènes de rues en émeute sont vraiment réussies : violentes, désordonnées, enfumées, confuses. Le huis clos entre les policiers et les "suspects" est absolument terrifiant, de violence. Les policiers n'ont aucune excuse, il n'y a pas de fatalité, par d'évènement fortuit, pas de malentendu, pas de panique, rien, rien qui puisse expliquer leur déchainement, si ce n'est leur racisme et leur bêtise. Cette deuxième partie du film est très réussie, très tendue, très éprouvante. On en sort épuisé. La troisième partie du film, l'enquête et le procès, m'a parue bâclée.

Ce n'est pas uniquement à cause de cette dernière remarque que je ne suis pas totalement emballé par "Detroit". Ce doit être aussi parce que j'ai toujours tendance à faire des comparaisons avec des films plus anciens. Celui auquel on ne peut pas ne pas penser, c'est Mississippi Burning. Mississippi Burning, qui était tout aussi terrible dans sa présentation du racisme, racontait aussi des faits réels, survenus trois ans plus tôt. Mais Alan Parker avait donné à ses personnages principaux (Gene Hackman et Willem Dafoe) beaucoup plus de consistance que Kathryn Bigelowe n'a su le faire avec les siens. Et puis, le procès n'était pas bâclé.


 


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