Je voudrais être loin de moi
Je suis trop près
Je me rapproche
Ces mots de lui sont les premiers qui me viennent à l'esprit. J'essayerai de me retenir d'aller sur wiki pour la suite de cet exposé succinct.
En vrac :
Né vers la fin du 19ème siècle à Narbonne, un peu plus vieux qu'Apollinaire, je crois. Au moins autant reconnu que ce dernier par les surréalistes. Breton a dit un truc genre : " Reverdy est le meilleur poète du moment il tue sa race et aussi le temps qui passe. "
Il est "monté" à Paris, comme on le faisait autrefois. Ses amis ont été Picasso et toute la clique.
Et pis il s'est "recassé" dans le sud, tout seul comme un grand, pour y vivre, y vibrer de sa vie de créateur, entre Nietzsche et Foi mais surtout avec sa Poésie.
Voilà comment je terminerai, aussi pauvrement que j'ai commencé, avec, presque au pif, un poème de lui, en prose :
Reflux
Quand le sourire éclatant des façades déchire le décor fragile du matin ; quand l'horizon est encore plein du sommeil qui s'attarde, les rêves murmurant dans les ruisseaux des haies ; quand la nuit rassemble ses haillons pendus aux basses branches, je sors, je me prépare, je suis plus pâle et plus tremblant que cette page où aucun mot du sort n'est encore inscrit. Toute la distance de vous à moi — de la vie qui tressaille à la surface de ma main au sourire mortel de l'amour sur sa fin — chancelle, déchirée. La distance parcourue d'une seule traite sans arrêt, dans les jours sans clarté et les nuits sans sommeil. Et, ce soir, je voudrais, d'un effort surhumain, secouer toute cette épaisseur de rouille — cette rouille affamée qui déforme mon coeur et me ronge les mains. Pourquoi rester si longtemps enseveli sous les décombres des jours et de la nuit, la poussière des ombres. Et pourquoi tant d'amour et pourquoi tant de haine. Un sang léger bouillonne à grandes vagues dans des vases de prix. Il court dans des fleuves du corps, donnant à la santé toutes les illusions de la victoire. Mais le voyageur exténué, ébloui, hypnotisé par les lueurs fascinantes des phares, dort debout, il ne résiste plus aux passes magnétiques de la mort. Ce soir je voudrais dépenser tout l'or de ma mémoire, déposer mes bagages trop lourds. Il n'y a plus devant mes yeux que le ciel nu, les murs de la prison qui enserraient ma tête, les pavés de la rue. Il faut remonter du plus bas de la mine, de la terre épaissie par l'humus du malheur, reprendre l'air dans les coins les plus obscurs de la poitrine, pousser vers les hauteurs — où la glace étincelle de tous les feux croisés de l'incendie — où la neige ruisselle, le caractère dur, dans les tempêtes sans tendresse de l'égoïsme et les décisions tranchantes de l'esprit.