Il faisait nuit, je me sentais mal, comme vidée de toute émotion positive, en tenant dans mes mains un livre pour lequel je n’avais d’intérêt que parce qu’il s’agissait d’une sorte de cadeau, l’envie de lire me déserta, l’écriture serait peut-être plus appropriée ?
Je me levais pour aller chercher mon ordinateur sur mon bureau et le ramener sur mon lit, la souris éteinte, trop loin de la wifi pour regarder quoi que ce soit et mon profil Skype cherchant désespérément à s’actualiser, je commençais à taper. Mon téléphone à mon côté vibrait pour déverser sans relâche un flot de platitudes inintéressante et pourtant si souvent réconfortante.
Les insectes à l’extérieur stridulaient comme ils le pouvaient ou projetait une lumière jaune-vert dans l’espoir qu’une femelle et non un prédateur ne les remarquent. Au loin des chiens aboient pour avertir de bruits qu'eux seuls entendent, je devine des étoiles qui me sont invisibles et brillent au dessus de ma tête.
Tout ce bruit me détend autant qu’il m’agace. Je voudrais me retrouver seule avec moi-même, mon clavier et mes idées sombres, pouvoir me dire que je suis mieux ici qu’ailleurs.
Comme souvent une insomnie me tient éveillée, les mots se coulent d’eux-mêmes sur l’écran, comme s’ils étaient une évidence, j’allais pourtant bientôt me retrouver seule, larmes aux yeux, les doigts sur le clavier, l’espoir détruisant bien plus qu’il ne permet de construire, se libérer d’une obsession qui entrave nos pensées, tellement présente qu’on se prend parfois à voguer dans une réalité dans lequel tout est faisable, tout nous convient, une réalité plus douce que la vie menée, une vie conduite du bout des doigts ne menant que là où nous avons le courage de l’amener.
Durant cette nuit je pensais à bien des choses, l’amour, la mort, l’espoir, la trahison, le bonheur, bien des choses qui font parfois souffrir mais qui sont si souvent indispensable. La nuit entourait tout, même mon écran ne produisait, à ma demande, plus assez de lumière pour éclairer mon clavier et pourtant, pourtant ! Rien n’arrête celui qui n’a plus rien à dire tout comme rien n’arrête l’amoureux ou l’affamé.
Cette nuit fait partie de ces nuit où des souvenirs oubliés remontent à la surface, c’est leur jour de chance, ils sortent du placard, se dépoussièrent et replongeront bientôt dans les méandres d’un fleuve sans fin triant l’utile du superflu, qu’ai-je fait le mois dernier ? Je ne le sais plus, c’est l’anniversaire de l’ami d’une amie, m’en souviendrais-je pour l’année suivante ? Sûrement pas
Tout me semblait vide, douloureux et informe comme si je vivais dans une boule de coton ou de brume m’empêchant de voir clair tout autour de moi.
J'étais perdue dans ma vie comme dans mes pensées, mon ordinateur ronfle doucement sur mes genoux, bercé par le bruit des touches du clavier. Dans la solitude plus rien ne compte, le silence est pesant mais le bruit assourdit. Quelque chose me tiens éveillée, peut-être ai-je à accomplir cette nuit ? Et bien non, comme chaque fois je me sens spectatrice de ma propre vie, je suis vide de sentiments et de souvenirs. Je n'ai plus d'envies, je n'ai plus d'espoir, je ne vis que pour écouter ceux qui en ont besoin mais pour qui je ne peux rien faire.
Peut-être est-ce là ma plus grande souffrance, la voir souffrir et ne rien y pouvoir.
Des voix semblent chuchoter loin dans le noir qui m'entoure, des sifflements suraigus qui n'existent pas me transpercent le crâne. Ma tête, las de se chercher querelle, tente de se convaincre que je ne suis pas seule, que je ne suis pas vide, que je vais bien. Tout me rassure et m'effraie, les questions tourbillonnent dans ce qu'il me reste de clairvoyance.
Une seule pourtant ressort de plus en plus "qu'est-ce que je dois faire ?"
Pour le moment, essayer de dormir malgré tout sans doute.