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Auteur Sujet: Contes et légendes de Noël  (Lu 396 fois)

Hors ligne Poesiesecrete

  • Buvard
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Contes et légendes de Noël
« le: 25 décembre 2022 à 22:31:43 »
Bonsoir,

J'ai écrit un texte retraçant un peu l'histoire de nos traditions de Noël sur un ton leger alors pour les plus aventureux d entre vous n hésitez pas à me laisser votre avis... p.s le texte est brut sans mise en forme; c est un peu rebutant et je m en excuse. joyeux Noël !
***

Ah ce sacro-saint esprit de Noël ! à la fois présent mais pas palpable, ici et ailleurs. Vivant dans tout ce qu’on a pu lire, dans tout ce qu’on a pu entendre sur la nativité, dans son lot de sornettes mille fois racontées aux enfants depuis une éternité. Tout cela ne serait-il pas vrai ? Les Dickens, Andersen, Tolkien et autres grands noms de nos romans de magie et d’aventures inspirés de folklores et de légendes de l’avent ne sont-ils pas devenus dans nos mémoires collectives les imposteurs de ces nuits de fêtes ? Balivernes et vin chaud, Noël ne serait-il pas devenu le plus grand complot en vigueur ? Comment est naît cette apologie pour un culte qui mélange le religieux et le barbare, d’où viennent ces codes et ces mythes que l’on aime tant ? Pourquoi ce paragraphe comporte-t-il autant de questions ? Et plus important encore il y a-t-il eu un avant et un après le grand chambardement que représente nos 25 décembre d’aujourd’hui ?

le programme est aussi riche et indigeste qu’une bonne crème au beurre ; alors en cette douce veillée de Noël si vuis êtes prêt à faire revivre les fantômes de Noël, que vous vous sentez suffisamment vaillants pour faire le voyage de l’histoire et de l’imaginaire ; remontons donc un peu le temps et abordons ensemble comment des premières légendes païennes en passant par nos précieux contes de Noël jusqu’à ces fameux téléfilms d’aujourd’hui, nos Noëls sont devenus si féeriques…

« Dies-Natalis »

Pour revoir les débuts de Noël, il faudrait certainement réouvrir quelques anciens parchemins et manuscrits d’autrefois. Ce fut un âge où l’on ne savait encore rien de notre monde, et pourtant guidé par les astres on écrivait déjà de belles histoires. Selon les dires, croyons-les ou non, c’est survenu d’une étable en Judée. Hélas si belle est histoire qu’elle est fausse, l’historiographie moderne nous prouve qu’il s’agit plus certainement d’une récupération d’anciennes fêtes saturnales* qui depuis l’antiquité marque pour Rome le jour le plus court de l’année. Les Romains avaient le goût pour la fête et le culte des dieux ; en décembre on fête Saturne, puis le culte de Mithra et le Sol Invictus la renaissance du soleil. Cette timide solennité des premières années était certainement plus prétexte à rassemblement social qu’une véritable profession de foi pour quelques divinités que ce soient (L'Église chrétienne ne fêtant pas même son messie durant les trois premiers siècles de son existence).

« Dura Lex Sed Lex » La loi est dur mais c’est la loi ; ils avaient on ne peut plus raison ces Romains puisqu’au quatrième siècle de notre ère, décréter de quelques rois occidentaux pas toujours très mages l’édit Thessalonique impose le christianisme de gré ou de force dans tout l’empire. Adieux les dieux, bonjour le latin et par cette époque tumultueuse on change autant de référentiel que de calendrier. Chaque 25 décembre de l’année (date choisie pour coller aux précédentes fêtes romaines) sera donc « le jour de naissance ». Voici que le culte était officiel, mais il faut bien reconnaître que l’évangélisme du christ et son miracle de résurrection avaient encore peu d’emprise sur les festivités. Noël s’il n’en porte que le nom est toujours bien plus populaire que religieux. La véritable fête, encore alors d’une ferveur timide se puise encore dans quelques relents de légendes locales et se présente simple, pieuse, sans fioriture ni liturgie particulière.

Les Saturnales : Prémices mythologiques de Noël.

« À tous mystères trop grands, l’homme se tourne irrémédiablement vers les étoiles »

C’est certainement par cette maxime que le peuple romain nous raconte en des temps anciens l’histoire d’un dieu qui apporta paix et prospérité ; une histoire qui raconte à peu près cela…

Il y a très longtemps, un dieu nommé Saturne fut chassé de la voûte céleste par quelques divinités plus puissantes que lui. À cette infamie le puissant n’aurait eu d’autre solution que de se réfugier sur la terre. Errant une faux à la main et une cape sur le visage, on le vit à travers la région du Latium (en Italie centrale). L’histoire raconte également qu’afin d’ourdir sa terrible vengeance, il aurait réuni plus de mille hommes dans les montagnes du mont Apennin prêt à en découdre. Fort de ses hommes, la divinité les aurait gouvernés avec justesse et bonté en instaurant des lois fortes dans une société équitable ; mais au moment où il fallait se battre le temps avait apaisé toutes velléités martiales, si bien que Saturne était devenu bien trop sage pour vouloir faire le moindre mal à son peuple. La suite de l’histoire sera faite durant une antiquité parmi les temples, les offrandes, et les prières envers le brillant civilisateur que restera Saturne.

Cette théogonie en plus de poser moult questions marque la naissance des Saturnales. Arrivée plus ou moins entre le 17 et le 23 décembre, elle offre une période de fêtes et de prospérité pour tout un empire. À l’image des exploits de ce dieu, on rompt tous les codes d’une société hiérarchique ; les puissants deviennent les justes, et les justes des puissants ce qui entraîne bien souvent la libération des esclaves (enfin… provisoirement). Dans une espèce de charivari avant l’heure, banquets et festins sont dressés, des jeux y sont organisés, allant même jusqu’à gracier les condamnés. À ces bonnes œuvres on fête également le début de l’hiver et le sommeil de la nature en décorant gaiement sa domus avec gui, houx et plante verte. Plus loin que cela, la tradition veut également que l’on s’offre les premiers cadeaux qui sont souvent des petites figurines pour porter chance et fortune à ce nouveau cycle.

Marquant la première sacralisation entre mythologie et folklore populaire, quelques-unes de ces habitudes n’ont pas changé et se retrouvent encore dans nos coutumes modernes. Aujourd’hui des Saturnales, il ne reste que les ruines des temples dédiés, et le souvenir d’une période de fête particulière. Cet embryon de Noël gravé dans le marbre romain n’est resté qu’une légende pour les tribuns de l’époque, mais une légende que bientôt d’autres reprendront à leur compte…

 

« Par-delà la lime… »

La géopolitique de l’antiquité n’est certainement pas une science exacte. Les cartes évoluent en redéfinissant jour après jour leurs contours. Les peuples se réunissent et se divisent bien décider à étendre leurs territoires par le fer en annihilant toutes oppressions voisines. Hiatus dans la suite de notre histoire puisqu’il faut avancer pratiquement deux siècles dans le temps pour que la puissante Rome vacille de quelques invasions amenant les barbares germains à franchir la lime, cette frontière naturelle le long du Rhin.

La Yule ce proto-Noël nordique se trouve alors en contact direct avec les festivités romaines de décembre. Les routes sont nombreuses et les eusses et coutumes s’exportent bien dans cette partie du monde. Si le brassage de cultures ne fait pas autant polémique que de nos jours, on peut alors voir s’enrichir les festivités de l’avent, période qui précède le jour de naissance comme moment des préparatifs. Il faut bien comprendre que la Yule pour ces peuples nordiques est surtout le culte de la faune et de la flore en sommeil qui favorisée par un équinoxe de lune encourage leurs renaissances. Cette mythologie du nord, érigée d’anciens druides locaux, exprime les forces de la nature et les pouvoirs telluriques. Dans ces débuts par un protocole d’une rigueur bien germanique on brûle une bûche, on installe des bougies et on se prépare à la fête. Des rituels empreints d’autres cultures, diverses croyances populaires et quelques amalgames plus tard, c’est toute l’Europe qui fête Noël. Ce syncrétisme verra la fin de l’Empire romain d’occident, la stabilisation de l’ère chrétienne et nous mènera jusqu’aux heures sombres du moyen âge…

Ésotérisme, Occultisme & Saint-Nicolas… »

En ce temps, l’oraison d’un soir de fête se fait dorénavant par trois messes suivies de l’annonciation, et la période de l’avant par un jeûne. Sur ces Pater, la sécularisation a fait son œuvre et c’est une église omniprésente que l’on retrouve aux premiers siècles du Moyen-Âge ; une église qui a codifié Noël et qui par la même occasion a exclu toutes autres célébrations, quelles qu’elles soient. Étrange paradoxe que ces temps des cathédrales où l’on dresse encore église et prieuré dans toutes les bourgades des royaumes, mais où la crèche est déjà bien apparue sur ses parvis. Ce culte d’un Noël au dieu unique est encouragé par des rois comme Clovis qui décide de se faire sacrer la nuit de la nativité. En définitive les croyances ne sont pas libres dans une Europe médiévale où l’on brûle sorcières et hérétiques en place publique. Malgré toutes ces règles, quelques sursauts païens de l’antiquité résistent encore et toujours à la pa-papauté. En réaction le saint cierge ne pourra qu’associer les coutumes du passé en créant les fêtes des fous (Ancêtres de nos carnavals). Rebelote le temps d’un temps on inverse encore une fois les rôles, les mauvais sont bons et les bons sont mauvais ; drôle d’ironie, mais est-ce vraiment dieu qui sauvera nos âmes ou nos âmes pour sauver dieu ?

Dans notre parcours du temps nous sommes alors au douzième siècle, l’iconostase de la nativité s’enrichit un peu plus, faisant naître dans ses prêchés Saint-Nicolas (le bien nommé). Ce personnage de la culture nordique sera le descendant tout naturel du Père-Noël. En premier lieu évêque germain, Nicolas de Myhre a réellement vécu avant d’être ressuscité d’outre-tombe au cinquième siècle par un clergé en manque de modèles. C'est un protecteur qui apporte présents et cadeaux dans les souliers des enfants sages qu’il croise sur sa route ; un protecteur qui est hélas toujours suivi par ce vil père Fouettard qui à l’inverse dépose du charbon en guise de mauvais courroux.

Pour nous réchauffer de la rigueur de l’hiver je propose un peu de musique : ancienne tradition les cantiques sont des chants religieux qui dispensent paix et hosties ; avec ceci ajoutons les « noëls » qui eux restent un genre musical plus profane dédié aux commémorations en question. Brèves d’imaginations, ces dernières mêlent petites histoires et folklore local ; ces chants sont certainement les réels débuts du conte de Noël. Elles évoquent ci et là, aux barons comme aux paysans la préparation d’une veille de fête, les repas autour du feu, la réunion de famille et la fin des moissons de l’autonome.

« Quand j’entends chanter Noël… »

Avec ceci tu reprendras bien une petite lichette de latin peut-être : « Lux umbra dei » : la lumière est l’ombre de dieu. La doctrine manifeste du tout puissant verra son apologie révolue avec l’apparition des premiers scientifiques et leurs doutes cartésiens. Il sera également balayé par l’apparition de nouveaux territoires géographiques entraînant avec eux l’ouverture aux cultes. Ainsi le monde s’élargit, l’homme prend sa place, c’est le temps de l’œcuménisme (non, ce n’est pas un truc sexuel) et le retour à des fêtes plus humaines et moins chargées de bénédictions.

Éloignons-nous alors de la savante renaissance pour nous égarer en plein cœur du dix-neuvième siècle. En ces jours, les festivités ont lieu sous la fée électricité et tous les ans en décembre s’érigent dans les foyers le sapin (seul arbre à ne pas perdre ses épines en hiver, pratique !). Il est alors couvert de bougies et de pommes de pin dans un premier temps avant qu’une légende, ou est-ce bien les pénuries de cire et les débuts du marketing nous offrent les boules de verre.

C’est également à ce moment-là que pour nous tout devient commun puisque dans les années 1820 des poètes américains inventent le véritable folklore de Noël pour les enfants. Ah ce bon Saint-Nicolas perdant sa mitre pour se muer en Saint-Père-Noël ; le vieux à adopter rennes, traîneau et mère Noël au passage. On connait tous la chanson : bien couvert avant de partir, celui-ci descend par la cheminée pour nous remplir les chaussettes de joujoux par milliers. Comme tu le vois c’est le temps de la féerie et de l’insouciance, le temps des messieurs à chapeaux et des dames en crinolines, le temps surtout de l’opulence et du mercantilisme primaire. Sous une ère d’avance technologique, de vision futuriste, et de foi en l’avenir, les Noëls deviennent plus radieux que jamais. Il faut bien voir dans les rues des villes modernes ces nouveaux grands magasins s’érigeant comme des cathédrales de fer et de verre. Véritable palais de la consommation en masse, ces années-là sont à la belle époque, au téléphone, et au gaz à tous les étages.

« De charbon et d’acier… »

Hélas ! Dans cette Nouvelle-Angleterre profondément victorienne, c’est aussi un temps de misère où certains enfants travaillent tout aussi durement que les adultes. Il faut bien comprendre le contexte d’alors, si l’époque et au progrès en masse, cette période est également en proie à de violents changements. Toute l’Europe s’industrialise, la course est lancée, charbon et usines sortent du ventre de la terre à une cadence folle, les révolutions sont violentes et se font dans le sang et la sueur. À ces sursauts de décadence, Noël n’est pas équitable pour tous, il se hiérarchise en marquant un peu plus de différences les classes sociales. Sur ces maux le conte de Noël fait alors son apparition comme un outil politique ; il n’est pas simplement représentatif, il est l’art d’enseigner la charité aux enfants. Il se veut tout autant éducatif que dénonciatif et présente des morales censées dénoncer les vices de la société et nous faire avancer.

Petite revue de contes.

Les contes, les contes, c’est bien beau tout cela, mais de quoique ça cause bien au juste ? Eh bien justement, qu’ils soient vieux ou anciens, féeriques ou bien tragiques, il y en a pour tous les goûts ; alors à quelques heures du grand passage, révisons un peu nos classiques et comptons les contes ensemble.

Casse-Noisette et le roi des souris

Ernst Theodor Amadeus Hoffmann-1816

« Il y a longtemps un roi et une reine eurent une fille, la princesse Pirlipat, qui était devenue très laide à cause d’un mauvais sort lancé par le roi des souris. »

L’histoire de Noël la plus connue depuis le dix-neuvième siècle débute ainsi et nous conte comment le jouet en bois de Marie va prendre vie aux douze coups de minuit pour combattre le roi des souris par un énigmatique périlleux périple dans lequel se mêleront magie et fantastique. La petite fille n’écoutant que sans courage en cette nuit de Noël devra faire affaire avec des personnages tous les plus abracadabrantesques les uns que les autres.

Voilà que depuis plus de deux cents ans le hardi casse-noisette d’Hoffman inspira cette douce nuit par son symbolisme déjà : l’image du Casse-Noisette trône toujours fièrement sur nos cheminées ; et puis plus certainement encore parce que c’est l’histoire de l’inconscience et de la féerie. L’œuvre mêle avec brio tout ce qu’amène à faire rêver un enfant, ouvrant les portes de l’évasion et de l’imaginaire. Au royaume des délices et à la beauté du cœur ce même monde merveilleux où tout est possible, si tant est que l’on y croie suffisamment fort. Les plus adultes d’entre nous percevront dans ce conte allemand écrit en pleine période du romantisme l’onirisme d’Hoffman qui subjugue de contemplations et nous offre un univers où la fantasmagorie prend tout son sens.

L'adaptation par Alexandre Dumas inspira un peu plus tard un certain Tchaïkovski pour un ballet du Bolchoï des plus célèbres. Ces références ne sont pas réservées qu’au sixième art : on peut retrouver ses inspirations dans les œuvres d’Hugo, Balzac ou bien encore dans la littérature enfantine contemporaine classique telle les livres de Dahl et Carroll.

À Christmas Carol

Charles Dickens-1843

             L’avarice de cet homme n’égale que sa bêtise, pour sûr ! On se souvient tous de ce cupide Scrooge, qui déranger par un soir de réveillon de Noël, rencontre Marley son ancien associé mort il y a 7 ans auparavant ; oui il s’agit bien d’un fantôme et celui-ci n’aura de cesse de lui montrer la réelle vacuité de ses actes.

À partir de là le voyage démarre par une visite des esprits de Noël, un voyage dans les fêtes passées, présentes et futures du vieil homme. Scrooge apeuré d’un avenir sans souvenirs est mis face à face à des dilemmes le poussant à changer de personnalité et à devenir un homme bon. Le côté rédempteur de l’ouvrage met aussi un exergue la personnalité de tous, on ne naît pas mauvais, la vie, les épreuves font parfois que… 

« Fumisterie ! »

Dans un monde parsemé de chimères en ressort un joli conte à la morale progressiste qui reste intemporelle et offre la véritable référence du genre. L’ouvrage du père d’Oliver twist trouve son parallèle dans un Londres aussi crasseux qu’indigent. Si cette fable sociale se révèle comme la satire d’une Angleterre victorienne, il faut bien comprendre que la sortie du livre en 1843 en 5 couplets/chapitres est un véritable succès aussi bien critique que commercial.

L’auteur de 31 ans alors en prise avec ses créanciers s’inspire de sa vie, de ses soucis et dénonce dans l’épais brouillard de Noël la misère de l’âme humaine et le manque d’abnégation de certains.

Le sapin

Hans-Christian Andersen -1844

Dans une forêt, un sapin était pressé de grandir ; non sans attendre le conifère se voyait déjà comme un bel et grand arbre de Noël. Un beau jour le temps est venu, l’arbre fut coupé, habillé de bougies, de guirlandes et de sucreries puis placé dans une belle maison. Le soir de Noël, les enfants pillent si fort le sapin qu’il finira seul et flétri au grenier.

« — Sois heureux d’être avec nous, dirent l’air et la lumière du soleil. Réjouis-toi de ta fraîche et libre jeunesse. »

Nous sommes tout juste un an après le drame de la petite fille aux allumettes à l’instar de Grimm, Perrault, Andersen est un conteur qui naît. La morale nous confie le temps qui passe inéluctablement en emportant avec lui ces petits riens qu’il faut savoir apprécier aux bons moments et entraînant parfois quelques regrets.

La petite fille aux allumettes

Hans-Christian Andersen-1845

Une vendeuse ambulante égarée dans une ville du nord par un soir de réveillon de jour de l’an. La gamine n’a rien vendu pas même une de ces allumettes, pétrie de froid elle se réfugie entre deux maisons. Elle en craque une et découvre la chaleur d’une bonne flambée, elle en craque une autre pour se voir apparaître face à un sapin ; et enfin une dernière pour périr paisiblement près de sa défunte grand-mère.

« Elle frotta encore une allumette : une grande clarté se répandit et devant l’enfant, se tenait la vieille grand-mère. »

Voilà voilà quoi ! et un joyeux Noël ! Certainement moins conte de Noël qu’horrible fait divers Andersen raconte dans cette histoire l’indifférence générale face à la mort d’une petite fille. Mêlé à quelques hallucinations lourdes de sens et chargés de métaphores, le récit appelle à la bienveillance il supplique pour un peu de chaleur en des nuits sombres et froides comme celle de décembre.

Un conte de Noël

Guy de Maupassant-1887

Lorsque Maupassant s’essaye au conte de Noël, c’est par une nouvelle aussi sordide qu’extraordinaire. L’histoire est simple, et nous décrit le quotidien du docteur Bon enfant médecin normand dont le savoir ne trouve pas de remède pour une patiente qui souffre d’un mal tout aussi étrange que mystérieux. À toute sa science, il faudra peut-être en plus un miracle de Noël pour désenvoûter la dame…

« Aucun bruit ne traversait plus la campagne immobile. Seuls les corbeaux, par bandes, décrivaient de longs festons dans le ciel, cherchant leur vie inutilement, s’abattant tous ensemble sur les champs livides et piquant la neige de leurs grands becs. »

L’auteur ni croyant ni agnostique distille dans son récit un profond mépris pour la religion, il dénonce dans ces lignes la bourgeoisie tranquille et la bêtise triomphante que Dieu impose à ces moments de fêtes.

Letters from Father Christmas

John Ronald Reuel Tolkien-1920

Pas vraiment un conte, mais certainement le plus beau cadeau qu’un papa écrivain puisse faire à ses enfants ; entre 1920 et 1938, le célèbre auteur du Seigneur des anneaux écrivit chaque année pour ses enfants des lettres du père Noël en provenance directe du pôle Nord (Timbre postal faisant foi).

Les lettres d’une qualité rare sont toutes illustrées et calligraphiées à la main ; elles sont également le fruit d’un travail d’imagination persistant. Présentant principalement deux personnages à savoir le père Noël et l’ours polaire, leurs nombreuses péripéties nous entraînent dans les espiègles bêtises de l’entourage du Père-Noël.

« Je suis terriblement désolé — j’ai confié ce pli à l’Ours Polaire pour qu’il le poste et il l’a complètement oublié ! On l’a retrouvé sur la table de l’entrée — aujourd’hui. Vous devez lui pardonner : il a travaillé très dur pour moi et est extrêmement fatigué. Nous avons été très occupés à Noël. Le vent souffle très fort ici. »

C'est la fable pleine de tendresse d’un père qui offre un peu d’insouciance à ses enfants. Une fable qui nous explique un peu l’envers du décor et la préparation de la tournée du Père-Noël sans retirer une once de magie. Elle évoque également des thèmes chers à l’auteur tels que l’enfance, l’aventure et le merveilleux.   

How the Grinch Stole Christmas!

Theodor Seuss Geisel-1957

Quelque part à Doudeville tout le monde est heureux à l’idée de bientôt fêter Noël, tout le monde ? Non, une vile créature verte, poilue et aux yeux jaunes, est bien décidée à ruiner les festivités. Monstre de la culture populaire américaine, le Grinch est plus que jamais le reflet de l’anti-consumérisme à l’état pur. Un véritable pamphlet nous est révélé dans le caractère d’un infâme personnage dont seul le caractère radieux de Noël pourra peut-être faire changer.

« Une idée méchamment bonne, diaboliquement délicieuse, qu’il apprête avec minutie. »

Avant sa farandole d’adaptation et de réécriture en tout genre, le fameux sourire du Grinch est naît en 1957 par la main du caricaturiste suisse Theodor Seuss. Ce brillant auteur est illustrateur est un habitué du livre pour enfants est applique naturellement ses thèmes du monstre fantaisiste à Noël pour dépeindre une société matérialiste d’après-guerre.

La petite fille des neiges (Snégourotchka)

Louis Leger-1982

 Celui-ci est un cas particulier entre le conte traditionnel et la légende slave ; la petite fille des neiges est l’histoire d’un couple trop âgé pour avoir un enfant qui décide de le faire en neige. Miracle de Noël comme par magie, la petite fille prend vie et on l’appela Snégourotchka. Plus tard, à la faveur de l’automne, la fillette voulant jouer avec ses amis saute au-dessus d’un feu et joie et… Plouf !

À cette liste non exhaustive de Noël, il faudrait très certainement rajouter toutes ces histoires régionales jamais vraiment parues mais que l’on se transmet de famille en famille. Bride de légendes et de magie elles seules sont les véritables contes de Noël. A contrario il y en a un autre que j’ai omis volontairement de mettre, un qui pourtant est très connu et que l’on raconte dans toutes les églises de Bethléem à Rio de Janeiro. Démarrant d’une saga familiale, une table, une madeleine et un âne, mais de mon humble avis celui-ci il ne compte pas vraiment non, je préfère encore l’histoire pourrie du bonhomme des neiges qui fond.

 

« L’homme descend du songe… »

Petite nostalgie du moyen âge c’est véritablement à cette époque que les contes de Noël prennent leurs essors en abandonnant définitivement l’idée d’un enfant roi Noël. Si la période de Noël et son cortège de féerie siéent tout de même à ravir avec le monde de l’enfance ; les grands auteurs testent alors le genre pour nous offrir aux veilles de Noël des histoires courtes et intenses, à la fois imaginatives et enchanteresses.

Le conte de Noël est surtout un style de récit où se mêle un goût pour la théâtralité, une mise en scène flagrante ou tout a un sens. Employant des personnages caricaturaux aux bassesses flagrantes, il s’agit dans ces lignes plus de décrire que de conter. Puisqu’il est avant tout destiné au jeune lecteur, les situations sont presque toujours fantasques. À ce constat, ajoutons que le conte est profondément manichéen ; il tourne sur peu de personnages et mêle des intrigues simples et profondément intemporelles aujourd’hui. Ces œuvres de fêtes contribuent encore un peu plus à ancrer les traditions dans ce qui sera les adultes de demain.

Faisons une pause dans ce psaume bien long pour évoquer par un dernier encart des plus passionnant ce qui représente hélas le devenir peu ambitieux de nos contes modernes.

Hallmark : La fabrique à rêves du Père-Noël.

 N’as-tu jamais remarqué en zappant à la TV a cette période de l’année perdu entre l’énième diffusion du bêtisier de l’année, la vie de Johnny Hallyday, ou Notre-Dame qui brûle se trouve ces téléfilms de Noël aux titres aussi originaux qu’efficaces :

 « De l’espoir pour Noël », « On a perdu Noël », » Coup de foudre à Noël », « Le fils du père Noël » et j’en passe…. Il faut bien reconnaître que de début novembre à fin janvier c’est toujours pareil, telle une mauvaise série B, l’on revoit pulluler pléthore de navets racoleurs sur nos lucarnes haute définition.

Si je ne peux décrire précisément les histoires que l’on raconte dans ces films, les scénarii sont toujours plus ou moins de cet acabit. Il y a par exemple cet orphelin qui sans le savoir est bien la relève du père Noël, ou cette wedding-planeuse désespérément seule qui trouve l’amour le soir de Noël. Plus encore il y a des nains cachés dans le placard, ça se bat à coup de glace royale dans la cuisine familiale, Rodolphe toujours partant pour une balade et enfin s’échange ce premier baiser devant un beau sapin. Et nous pauvre relève du genre humain on se berce de cette ineptie dans un plaid pilou avec un chocolat chaud à la main en ne croyant aucunement à ces fausses villes idylliques remplies de draps blancs et de confettis, ni même à ce Pôle-Nord bien trop coloré pour être réel. Certes, tel le trop plein de foie gras que l’on fait chaque année tant de neiges artificielles, de miracles de Noël, de mielleux et de bons sentiments, ça frôle l’indigestion non ? Mais le coupable de ces métrages en perdition porte bien un nom : HALLMARK.

Spécificité tout américaine, ces nanars répétitifs que le père Noël lui-même n’assume pas sont soit des comédies romantiques bas de gamme, soit des longs métrages d’aventure aux climax bien prévisibles ; quand ce n’est pas hélas pour nous et notre bon goût un mauvais mélange des deux réuni. Produits en des temps record avec bien souvent des acteurs peu connus, les budgets dérisoires de ces productions engrangent rapidement une rentabilité certaine. Étrangement la plupart de ces fictions sont tournées à la chaîne aux périodes les plus chaudes de l’été en studio et dans le Middle West américain pour les plans extérieurs ; donc si jouer dans un téléfilm de Noël ne nécessite pas de talent d’acting particulier, il faut tout de même savoir porter le pull en été et cela ce n’est vraiment pas simple !

À l’origine fabricant de cartes de vœux, Hallmark est devenu peu à peu un géant hollywoodien en créant son média. Se développant sur le créneau des films à l’eau de rose, et inventant le genre à part entière du téléfilm de Noël. Ils s’imposent comme les spécialistes de la niaiserie des fêtes.

Aussi improbable que la chaîne du père Noël existe, à ce jour on recense (on déplore) pas moins de 351 téléfilms de Noël Hallmark au catalogue. Ils sont pour le studio une manne financière que l’on exporte à peu de frais dans un monde entier friand de la belle histoire.

Finalement que l’on regarde assidûment ou non, par plaisir ou par ennui, otage d’une intrigue en souffrance ou de la dépression d’un scénariste, pourquoi se faire tant de mal un soir de Noël ? la réponse est simple et ici point de miracle de Noël, ou même de facétieuses farces des lutins. On regarde ces films parce que c’est simple et idyllique, parce que c’est le moment de rêve et d’oubli qu’il nous faut pour accompagner cette période douce et enchanteresse. Cela fleure bon l’étoile des neiges et le sapin artificiel et sacralise un peu plus des moments que l’on aimerait impérissables.

Encore plus à Noël, les hommes sont des êtres grégaires qui ont besoin de se réunir et de rêver des mêmes choses. On accepte bien aisément cette incohérence de ton pourvu qu’elle soit belle et puis surtout parce qu’il n’y a rien d’autre à la TV pardi.

 

« Ho Ho Ho !!! Comme disait le Père-Noël… »

Que dire après ce bref exposé des faits, sans doute que l’histoire n’est qu’un perpétuel recommencement. De sages en savants, d’explorations en conquêtes ; par-delà les mers ou égaré dans le vide spatial ; les hommes les uns après les autres se sont inspirés, ont copié la technologie et les modes de vie pour forger rites et croyances de notre civilisation moderne.

Parce que l’on n’oublie jamais ses racines, ce soir dans la chaleur de nos foyers ou derrière les frontières d’une terre entière, pauvre ou riche, croyant ou athée, force est de constater que Noël reste bien universel, force est de constater que de partout lorsque vont résonner les douze coups de minuit on ne fêtera pas seulement une tradition païenne, la naissance d’un enfant, ou bien encore cette tradition populaire ; mais plus certainement la gloire d’une humanité et à l’héritage de quelques pères qui depuis une éternité n’ont cessé de croire en la magie de l’instant. Qu’on le dénonce ou qu’on l’adule vivre Noël ce soir c’est participer un peu à cette grande fresque humaine.

Une guerre en Ukraine et quelques vagues de Covid plus tard, la tendance veut un Noël écolo, responsable et plus modeste. Je crois que dans le fond nos festins de roi et nos montagnes de présents n’y changeront rien. Gargantua reste un personnage de conte et l’orgie rabelaisienne des temps modernes qui en découle ne gâche en rien l’esprit, il en améliore juste la forme.

Et demain alors ? Difficile à dire, qui peut prédire l’avenir, mais si par un curieux hasard on raconte encore à nos enfants les soirs du réveillon ces contes et légendes emplis chargés d’histoires et d’aventures, ils seront alors pour nous la promesse éternelle d’une longue attente et la joie d’être enfin réuni ensemble pléonasme !


« Modifié: 25 décembre 2022 à 22:38:14 par Poesiesecrete »

 


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