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Auteur Sujet: l'ange de la fontaine  (Lu 470 fois)

Hors ligne BarthelemyL

  • Plumelette
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l'ange de la fontaine
« le: 20 octobre 2023 à 10:55:37 »
                  Je pense donc je suis disait l’autre rationaliste. Je pense donc je suis. Le néant, impossible de penser, étais-je à cet instant ? Les mouches à merde tournoyaient autour de mes plaies, prêtes à sucer la moindre goutte de sang que mon bandage de fortune laisserait filer. Le dos flanqué à l’arrière de cette foutue camionnette, je cherchais l’étoile du berger avant que les bosses me fassent hurler de douleur, saigner à nouveau de la cuisse, et que je reprenne la quête de l’astre. J’étais Prométhée, mon supplice en perpétuel renouvellement. C’est drôle comme tout le monde imagine la mort, les yeux et l’esprit comme ouverts vers ce vide noir en suspens. Mais la mort comme le vide ne se voient pas, ils sont sans se savoir être. Mes mains finirent par quitter mes plaies, je m’abandonnais entier. J’étais le chaos, je ne pensais plus, j’étais la mort.
“Oh ! Pitchoun tu m’claques pas dans les mains, hein !”
Des coups plein le visage, de rustres gifles. “Un peu d’courage mon p’tit gars, hein !” Je repensais à nouveau. J’étais, mais quoi au juste, un songe ? un cauchemar ?
  Le souvenir du paysan me revînt lorsqu’il me souleva de ses deux bras. “C’est qui pèse son p’sant d’or le jeune.” Il m’avait retrouvé à moitié mort au bord de la route, près de vignes, en face d’une écurie. Comme un vulgaire paquet, il m’avait chargé à l’arrière de sa camionnette avant de me faire boire de la gnole. L’air était doux, la lune roussâtre éclairait les chemins de terre battue, la voix paniquée et l’accent du sud de mon sauveur faisaient une belle berceuse, une nuit parfaite pour mourir.
  Ses mains d’ogre me lâchèrent abruptement sur une dalle de pierres fraîche mais inconfortable. Le paysan s’acharnait du poing sur une vieille porte en bois, putain hurlait-il avant de se signer, oh coquin de sort murmurait-il. Personne ne répondait. L’homme déjà paniqué le devînt davantage, je ne pouvais qu’entrouvrir mes yeux, pourtant je le voyais se liquéfier. Il s'agenouilla un instant près de là où j'étais étendu, je voulu alors le rassurer, lui dire que je ne lui en voulais pas, qu’il n’avait qu’à m’abandonner ici, au mieux à la mort, au pire aux Boches. Son œil lorgnait ma cuisse ouverte par deux fois, du calibre 7, pas un accident de chasse ça il s’en doutait. Le pauvre homme ne pouvait rien pour moi. Ma seule chance eût été de tomber sur des partisans, mais les maquisards du coin je ne les connaissais pas. Je fuyais depuis plusieurs jours, je devais me trouver entre Toulon et les Alpes. Le glas sonnait ici, en Provence. Moi qui n'avais pas eu le courage de me rendre à Londres, maintenant que je l’eu trouvé, je ne pouvais me rendre en Afrique. Je voulais le lui dire au paysan, lui dire que s’il croisait un jour le Général, qu’il le salue de ma part, moi qui en avait tant rêvé.
”Reste là minot, bouge pas, le jour se lève. Avant qu’les coqs s’mettent à chanter c’est qu’il s’ra revenu l’curé. C’est un bon curé l’père Philippe, il va bien t’soigner lui… aller, hein tu bouges pas minot… j’peux rien faire de plus moi… pardonne moi…”
Ses excuses n’en finissaient pas, elles se noyaient dans ses pleurs coupables, sa voix disparut dans la nuit muette, puis rien. A nouveau le chaos, il aurait mieux fallu que je cane à l’arrière de la camionnette, plus à l’aise entre les outils rouillés que sur ces pierres.

           La frontière du rêve et de la réalité n’était plus qu’une vulgaire barrière de sable, les vagues  l’éffilochèrent à vau-l’eau. Parfois j’étais nu, d’autres fois ivre, je courais sur une route de feu, je nageais face à la tempête, parfois j’avais perdu ma jambe, dans la réalité suivante elle était comme neuve, je fuyais les Boches, je voyais ma mère, souvent je me battais, souvent je perdais avant de me réveiller. Tous ces mondes se succédaient à une vitesse folle. La blanche lueur du jour me fit revenir à moi, à ma réalité, où ma cuisse débordait de sang noir à moitié coagulé. Le souffle saccadé, je sentais mon front tout emperlé, et la sueur descendre jusque dans mes yeux.
“Reste allongé” me susurra une voix mielleuse. Délicatement, de douces mains portèrent à mes lèvres un bol en argile. “C’est l’eau de la fontaine, bois la sans crainte”. Je m'exécutais sans comprendre où j’étais, sans savoir qui me parlait. L’eau était fraîche mais saumâtre, même pour un homme qui revenait de la mort.  Il m’en fallut trois bols pour commencer à retrouver un semblant de lucidité. Avachi sur la dalle en pierres, je me relevais contre l’entrée de ce qui semblait être une modeste église de. Je ne pu apercevoir qu’une fontaine, à quelques pas de l'église, le village était vide, pas un chat, pas un brin d’air, pas un mioche et pas de vieillards curieux. Seule cette demoiselle que j’entrevoyais de dos, accoudée à la fontaine, elle portait une courte jupe lie-de-vin. Dans son poignet, un bol en argile, ce devait être elle la voix mielleuse. Lorsque le bol fut rempli, elle se retourna en ma direction, prête à rebattre la terre qu’elle avait déjà battu trois fois pour moi en quelques instants. Surprise de me voir éveillé, elle s'arrêta à mi-chemin pour me toiser de ses mirifiques yeux clairs. Dans ma souffrance, je trouvai la force de lui sourire ingénument, ce qui lui arracha un léger rictus. Elle s’approcha pour me tendre à nouveau le bol en argile.
- L’eau de notre village a quelques vertues sal…
- Êtes-vous un ange ? la coupais-je.
La question la fit sourire pleinement cette fois-ci. Très vite son visage se rembrunit à la vue de ma blessure. “Il va falloir refaire votre bandage”. La fatigue et la douleur me gagnèrent à nouveau et je retombais sur la dalle inconfortable. A nouveau le chaos, je ne voyais plus rien, je sentais seulement ses doigts fureter à l'intérieur de ma blessure. J’hurlais devant la maison du Christ mais il ne semblait m’entendre ni me prendre en pitié. D’autres voix intervenaient, je distinguais des cris et même des bruits de moteur. Quelqu’un me portait mais ce n’était plus le paysan, non, il y avait quatres bras, peut-être six. On m’allongea dans un lit. Enfin la paix pensais-je. Bien naïve conclusion. Un liquide de feu s’immisçait dans la première plaie, je brûlais de mon corps entier, je criais, je pleurais, je voulais éteindre le feu sur ma cuisse mais tant de bras me retenaient plaqué sur le matelas, le cœur lourd d’une telle impuissance. Le brasier consumait la moindre parcelle de peau jusqu’au genou. Puis ce fut le tour de la deuxième plaie. Je devinais à l’odeur qu’on m’y versait du whisky bon marché. La douleur avait gagné, je ne me débattais plus, je me contentais de pleurer, pleurer encore, en mordant mon poing lui aussi ruisselant de larmes salées. Les larmes séchèrent quelque peu, et je m’endormi en balançant ma nuque à même le matelas, sans coussin.

            La pièce était éclairée par une vieille lampe de chevet à moitié cassée, révélant tant bien que mal sous une lumière verdâtre, le papier peint défraîchi qui recouvrait ma cellule. Un lit étroit, un petit meuble de bois sur lequel se trouvait la maudite lampe ainsi qu’une tasse. Instinctivement, ma main vînt saisir celle-ci avant que ma gorge n’engloutisse d’un trait le liquide qu’elle contenait. “Pwarrghh!” Je recrachais aussitôt ce café froid et amer que je soupçonnais d’être coupé au vinaigre ménager.
- “ Maman !” je sursautais sur le matelas en découvrant un môme figé sur le seuil de la porte.
- “ Maman, reprit-il de sa voix aiguë, il est réveillé !”
De petits tonnerres successifs émanaient du couloir. De mon lit de bagnard, je ne pouvais qu’apercevoir les dernières marches d’un escalier. Encore ces coups, ces petits tonnerres qui résonnaient dans ma tête de plus en plus fort. La douleur avait déjà gagné la partie, fallait-il qu’elle partage son modeste butin avec la folie ? Le fracas se rapprocha davantage. Soudain, de scintillants talons noirs apparurent, sautillants de marches en marches pour dévaler cet escalier dans un lent brouhaha. De si fins mollets seraient la cause de tant de bruits ?
Plus la bruyante inconnue dévalait les marches, plus j’en voyais davantage sur elle. D’abord, je découvrais un galbe de jambes parfait, se dévoilait ensuite à mes yeux observateurs une courte robe d’un jaune fade, mais qui n’épousait que trop bien les formes de sa propriétaire. Enfin, elle passa la porte et je la vis entière. Je reconnu mon ange de la fontaine.

              Assise de l’autre côté de la table, ma timide sauveteuse n’osait soutenir mon regard plus que quelques instants. Divins instants. J’aurai tout lâché pour m’accrocher à ses yeux en amande, au diable la fortune, la foi, même De Gaulle. D’une voix douce et gênée, presque enfantine, Faustine m’avait demandé de lui conter mes malheurs. Les femmes d’une certaine délicatesse ont ce pouvoir, je leur déballe mon cœur entier sans y être pleinement convié. J’aurais pu me contenter d’un charlat évasif mais voilà que je lui racontais tout, mon arrestation par les Allemands, ma fuite, la fusillade, mon errance, tout.
  Elle marqua un blanc à la fin de mon récit, les yeux ne quittant plus sa cuillère dorénavant, la regardant tracer d’interminables cercles dans son café noir. C’est le silence qui me fit réaliser que, peut-être, avais-je commis une grosse erreur en déliant tant ma langue. Je ne pouvais me résoudre à l’incertitude :
- Vous en êtes ? lui demandais-je d’une voix presque inculpatrice.
- Pardonnez-moi ?
- Vous aussi, m’essayais-je alors timidement, vous êtes de la Résistance ?
Son regard quitta sa cuillère en inox pour venir se planter dans le mien. Mais sa bouche, elle, resta fermée.
  Quand les aiguilles indiquèrent dix-sept heures, elle enfila un tablier à carreaux, et s’en alla en cuisine. Elle m’avait abandonné dans ce grand salon, prenant soin de me laisser une cafetière pleine, le journal du jour et quelques cacahuètes. J’ouvris le journal par la fin pour atterrir sur la page des mots croisés. Les nouvelles me tuaient à petit feu, je m’étais promis de ne plus les lire tant que nous vivrions sous le joug de ces salauds en costume noir. Dans mon village, on se réunissait tous les jeudis soirs chez Maurice avec la radio. C’est ainsi que je ne ratais pas les événements importants, mais la presse quotidienne non, plus jamais. D’ailleurs, que pouvait-il bien devenir mon bon vieux Maurice ? Puisse-t-il s’en être tiré lui. Ca, je n’en doutais pas, il a toujours été le plus dégourdi, je ne savais pas encore démonter mon fusil qu’il avait déjà appris à fabriquer des bombes. Moi j’étais bloqué ici, lui devait sûrement déjà discuter stratégie avec les hommes du Général.
  Sur la grille non plus je ne parvenais pas à avancer. “Carpes ayant de la laitance” en sept lettres. Foutue poiscaille. Je jetais le journal sur la table basse en signe d’abandon, avant de me lever, non sans mal, du fauteuil. Près du feu était allongé mon unique compagnon du soir, un chien noir dont je ne parvenais à deviner la race. Il mordillait son os sans faire fi de moi. Faustine avait assez sèchement refusé mon aide plus tôt. Je l’entendais essayer d’apprendre une recette à ses enfants avec toute la pédagogie du monde, un estropié l’aurait plus gêné qu’autre chose dans ses aspirations instructives. Si jeune et déjà mère de deux beaux enfants, deux garçons, Emile âgé de cinq ans, et Jean-Augustin, de presque deux ans son cadet. Je n’osai perturber cette leçon en entrant dans la cuisine, malgré l’appel de ces enivrantes effluves. La cuisine et le salon étaient séparés par un petit couloir que je me décidais à arpenter. De là, j’entrevis Faustine aider son plus jeune garçon à couper des tomates en rondelles. Elle avait la beauté de sa patience. Des cheveux d’or, bouclés sur les pointes, flottaient sur ses fines épaules dénudées.
- Eh l’monsieur il a déjà faim, s’écriait Emile en me désignant du doigt.
Le salaud m’avait vu derrière la porte. Je l’ouvrit complètement, me découvrant aux deux autres. D’un geste timide, je saisis une assiette de tomates persillées.
- C’est que ça sent bon ce que tu nous as fait mon p’tit gars, constatais-je en passant l’autre main  dans les cheveux du gamin.
- T’as vu Maman, je cuisine bien, comme toi, hein ?
Faustine sourit à son fils en lui passant à son tour la main dans les cheveux.
- Maintenant mes petits cuisiniers, filez mettre la table, ordonna-t-elle.
Mais aucun des deux blonds ne quitta la pièce.
- Aller, zou ! Je vais couper les oignons, si vous restez là vous allez pleurer comme des bébés.
Emile s’enfuit vers le salon en criant. Son frère fit de même, sûrement plus pour imiter son aîné que par réelle crainte de la mise à exécution des menaces de sa mère.
- Dois-je m’enfuir aussi avant de pleurer à chaudes larmes?
- Ce ne seraient pas les premières de vos larmes que je verrai couler, une de plus ou de moins… rétorqua-t-elle, espiègle.
Cette fois-ci c’est elle qui cherchait mon regard et moi qui, honteux, fuyais. Je n’étais que le quart d’un soldat blessé, aurais-je même été un gladiateur, elle m’avait vu pleurer à en réclamer ma mère, peut-être même est-ce elle qui a changé mon vétuste caleçon, comment l’impressionner d’une quelconque façon à présent ?
  Ma mère me disait toujours : on juge une femme à sa cuisine et sa bibliohthèque. Soigneux d’appliquer son théorème sur Faustine, je fis le tour de son immense cuisine pour juger de la femme qu’elle était. Des grappes d’ail rose étaient suspendues aux poutres du plafond, dans le coin près du four, deux immenses corbeilles à fruits pleines de raisins, de figues et de nectarines mi-safrans mi-corails, présidaient fièrement. Des bouteilles d’huile d’olive se disputaient la place près de la plaque, accompagnées par de timides pousses de basilic. Presque toute la pièce était recouverte de carreaux bleus et verts clairs qui, malgré l’heure tardive, sauvegardaient la clarté du jour. D'une immense fenêtre s’échappaient les derniers rayons du soleil, je fis un pas sur ma gauche pour mieux les scruter. Magnifique, pensais-je en silence. Le jour tirait une révérence mordorée. La maison de Faustine se situait sur les hauteurs, de là on pouvait voir d’interminables rangées de vignes en contrebas, les collines d’en face pleine d’arbres différents, et sur la droite le petit village et sa modeste église, illuminé par ce crépuscule. Je poursuivais vers l’arrière de la cuisine, sur les murs des tableaux au fusain dépeignaient le village sous tous ses angles, de la fontaine aux vignes, des scènes de chasse aux scènes de vendange. Sous l’un d’eux, je pu lire l’inscription Callas. Plus loin encore, une croix du Christ d’un cuivre vieilli, surplombé deux photos d’une certaine taille. La première était celle d’un couple en tenue de mariage, Faustine y portait un voile en résille, elle souriait de toutes ses dents, comme jamais je ne l’avais vu faire encore. A sa droite, un homme très grand et robuste, rasé de près, le visage sérieux mais les yeux incapables de dissimuler sa vive émotion. Ce même homme était au centre de la seconde photo, le même visage sérieux et fermé, coiffé d’un béret noir et d’une tunique militaire.
Une main soudaine sur mon bras me fit sursauter.
- Lui, il en était, murmura Faustine.
- De quoi ? lui répondis-je, balourd.
- La résistance, il en était, avoua-t-elle avant de marquer un silence.
Elle retira sa main de mon bras pour venir caresser l’impassible soldat, du béret jusqu’aux lèvres.
- Il est mort en tentant de rejoindre Londres.
L’émotion la gagna, puis elle repartit vers ses oignons, versant une larme avant de couper la première lamelle.

                      Deux fois par jour, le matin et le soir avant la douche, la belle callassienne me changeait le bandage. Bien qu’à mes yeux les plaies semblaient quasiment cicatrisées, Faustine s’obstinait à les laver et les ceigner d’un pansement neuf. La vive prudence d’une mère. Ou peut-être la culpabilité d’une veuve qui souffrirait éternellement de n’avoir pu laver les mortelles blessures de son époux. Elle ne parlait jamais de lui, si bien que même ses enfants n’osaient prononcer trop fort le mot papa. Pourtant, nous avions de grandes discussions tous deux, nous parlions élevage, elle possédait presque autant de poules que moi, nous débattions littérature, c’était une femme étonnament instruite. Elle m’incendiait quand je lui vantais les mérites de la cuisine au beurre. Certains soirs, elle me décrivait les longs processus pour aboutir aux gouttes d’un rosé pur, déferlant sur les bords de nos verres, je ne daignais pas feigner l’érudition à ce sujet, ce qui ne m’empêcher pas d’écluser virilement. Nous parlâme même de Dieu, mais jamais il n’était question d’amour ou de son veuf.
  Curieusement, lorsqu’elle s’occupait de mes blessures, ces moments où nos corps étaient si rapprochés étaient aussi nos moments les plus froids. Ce soir-là, nous n’avions pas émis une seule parole l’un l’autre. Son deuil était trop frais, elle devait se sentir trop honteuse d'effleurer la peau d’un autre. Et pas n’importe quel homme, permettez-moi, je lui plaisais c’est une certitude. Elle venait tout juste de me refaire le pansement dans le salon quand on toqua à la porte. Trois grands coups, balancés en l’espace de trois secondes. Elle me porta un regard de fauve, avant de m’envoyer paître d’un geste de la main, comme l’on envoie un gosse au lit. Pris de court, je suis resté penaud, en la regardant m’adresser de vifs gestes méprisants.
- Mais va te cacher, me gronda-t-elle à voix basse.
- Où ça ?
On frappa à nouveau sur la vieille porte, par six fois cette fois-ci.
- Je sais pas idiot, file dans la cuisine, fit-elle en désignant du doigt la pièce éteinte.
  Je m’enfuis à pas de lièvre vers la cuisine. Depuis la porte entrebâillée de celle-ci, je pouvais entendre les discussions et même apercevoir l’entrée. Un homme de raison aurait prié que ça ne soit pas un Allemand, je priais de tout mon cœur que ça ne soit pas un amant trop en avance.
- Michou ! s’écria-t-elle en se serrant le cœur.
Le mien se crispa, et je le serrai de concert. Michou, c’était toujours mieux que Franz…
- Tu m’as fait une peur bleue, reprit-elle, mais que fais-tu ici si tard ?
Pas de réponse. Mon rival se faisait attendre, puisse-t-il ne pas se mettre à lui déclarer sa flamme dans un poème torride.
- Parle bon sang, finit-elle par s’impatienter.
- C’est… c’est l’père Philippe, répondit enfin une voix tremblante de peur.
- Quoi le père Philippe ? Il veut encore que j’assure la quête dimanche, dis lui que je le ferai avec plaisir, tu n’étais pas obligé de venir si tard pour cette broutille.
- Les Allemands… ils l’ont arreté… je… c’est d’ma faute, avoua-t-il en pleurant.
De ma cachette, je vis Faustine faire deux pas en arrière, le visage effaré. Je pouvais voir l’homme de dos, se rapprocher d’elle en tentant de lui prendre les mains. Il était petit mais très trapu, il portrait un chapeau noir enrubanné d’un marine sombre, et des bottes sûrement aussi vieilles que lui. Elle le repoussa, mais il insista et saisit une de ses mains. Toujours caché, je me tenais prêt à bondir sur ce vieux monsieur.
- Je t’en prie, supplia-t-il, écoute moi.
Faustine cessa de se débattre.
- C’était trois s’maines plus tôt, j’ai ramassé un homme dans mes vignes, blessé par balle dans les jambes ou au ventre… j’sais plus, c’est que c’était la nuit j’ai pas su quoi en faire du mioche… alors… alors je l’ai porté devant l’église et je l’ai laissé là. Je savais que l’père Philippe saurait quoi faire, lui. Et puis y’à deux trois jours, deux officiers allemands sont venus au domaine m’acheter des bricoles, ils m’ont posé des questions.
- Des “questions” ? interrogea Faustine, l'œil hagard.
- Oui, oui, des questions bizarres, “rien d’anormal dans l’village ?”, ou encore “tout l’monde va bien au village, pas de comportements étranges ?”.
- Des questions banales d’officiers allemands, en somme, fit-elle, déjà épuisée avant de connaître le dénouement.
- Non ! rétorqua-t-il, c’est qu’ils savaient quelque chose, et puis l’petit des deux,  ses yeux bleus… terrifiant.
- Que leur as-tu dit, Michou ?
- J’sais plus exactement, je leur ai dit pour le jeune qu’était blessé, je leur ai dit que j’l’avais laissé devant l’église avant l’aube et que l’père Philippe avait dû le soigner. Ils sont revenus aujourd’hui pour me dire que l’curé avait refusé de coopérer, aucune trace du blessé, ils pensent qu’il se cache dans une abbaye ou un monastère, p’t’être au Thoronet, ma foi.
Faustine baissa les yeux, mais son regard devint des plus noirs. De sa petite main, elle repoussa abruptement le vieux paysan.
- Comprends moi, on est qu’du bétail pour eux ! s’écria-t-il. Toi mieux qu’personne tu sais c’qu’il en coûte… Faut protéger sa famille.
- Sors de chez moi, répondit-elle seulement, sans daigner soutenir le regard.

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Re : l'ange de la fontaine
« Réponse #1 le: 27 octobre 2023 à 12:15:12 »
Bonjour,

Les rubriques mi longs et longs sont peu fréquentées, elles demandent un investissement plus grand. Si tu souhaites avoir quelques retours, n'hésite pas à t'investir à ton tour.
Dans le cadre de l'entraide et du travail du texte :

de bons moments dans ce texte, mais pas mal d'erreurs, de bizarreries.
au fil du texte

Désolé, vous n'êtes pas autorisé à afficher le contenu du spoiler.


B
Tout a déjà été raconté, alors recommençons.

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blog d'écriture : https://terredegorve.blogspot.com/

Hors ligne BarthelemyL

  • Plumelette
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Re : l'ange de la fontaine
« Réponse #2 le: 30 octobre 2023 à 13:30:32 »
Bonjour Basic,

un grand merci pour ton retour. Oui, bien que je lise pas mal de textes présents sur le forum (notamment les tiens), je n'ai pas encore sauté le pas du retour... je sais pourtant qu'il n'y a rien de négatif à cela, bien au contraire,  je vais tâcher de m'y mettre !

Pour en revenir à mon texte, qu'est-ce qu'on peut se sentir bête en découvrant les fautes évidentes et au combien évitables, je te remercie de les avoir souligné.
Dans le style, peut-être trouves-tu qu'il y a parfois trop d'adjectifs ?
J'essaye d'appuyer avec des mots forts, sûrement j'en mets trop dans certains passages...

Les "bizarreries", ce sont à ton sens certains choix de mots, d'images où tout simplement la chronologie du texte?


Hors ligne Basic

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Re : l'ange de la fontaine
« Réponse #3 le: 30 octobre 2023 à 17:16:31 »
les bizarreries sont plutôt peut être, des choix de mots.
B
Tout a déjà été raconté, alors recommençons.

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Hors ligne Béatrice M

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Re : l'ange de la fontaine
« Réponse #4 le: 06 mars 2024 à 21:20:00 »
Bonsoir un beau texte BarthelemyL que j'ai aimé lire de bon moment bien contés
à suivre les corrections de Basic

 


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