Le Monde de L'Écriture

Sous le soleil des topics => Discussions => La salle de ciné => Discussion démarrée par: Champdefaye le 20 août 2019 à 07:40:19

Titre: Il était une fois à Hollywood (Quentin Tarentino)
Posté par: Champdefaye le 20 août 2019 à 07:40:19
Critique aisée n°167

Il était une fois à Hollywood
Quentin Tarentino – 2019
Leonardo di Caprio, Brad Pitt, Al Pacino, Bruce Dern, Ken Russell

(https://monde-ecriture.com/forum/proxy.php?request=http%3A%2F%2Fwww.leblogdescoutheillas.com%2Fwp-content%2Fuploads%2F2019%2F08%2Fdownload-1-150x150.jpg&hash=531dee45f2027a9f666367284d7c9e6b5991a8d1)

Beaucoup de bruit pour rien.
Non, je ne suis pas juste, pas pour rien. Mais beaucoup de bruit pour pas grand-chose assurément. Pas aussi risible que Kill Bill, pas aussi caricatural que Inglorious bastards, pas aussi déplaisant que Django, pas aussi lamentable que les Huit salopards, voici "Il était une fois à Hollywood".
Pour une fois depuis plusieurs années, ce film de Tarentino ne m'a ni agacé, ni irrité. Il m'a simplement déçu. Déçu, parce que la bande annonce laissait prévoir plus d'humour que je n'en ai trouvé dans le film, parce que les acteurs de première grandeur qui apparaissent dans le film cabotinent à qui mieux mieux, parce que je m'étais laissé prendre à son incroyable campagne de promotion, destinée sans doute à compenser une sortie en salles au mois d'Aout, le mois des nanars... mais pas déçu à cause des critiques enthousiastes, ça non, car j'avais fait en sorte de ne rien lire ni entendre avant de me rendre à l'Escurial ce dimanche après-midi. En attendant que la séance ne commence — j'arrive toujours avant l'heure de la séance, car j'aime voir les bandes annonce et même les films publicitaires et les attractions, mais ça c'est fini depuis 1955 — je pensais que c'était dans cette même salle où, il y a soixante-dix ans, j'allais au balcon voir Erroll Flynn mater " La Révolte des dieux rouges".
Ça c'était la touche personnelle, celle que j'ajoute toujours pour montrer que je ne suis pas un robot.

Bon, le titre, d'abord.
On sait que, au risque de n'être que cela, Tarentino est un maître ès références. Alors, on peut se demander si le titre qu'il a choisi (voir plus haut) en est une aux films sacrilèges de Sergio Leone, "Il était une fois dans l'Ouest, la Révolution, en Amérique" ou aux incipits des contes de notre enfance, Il était une fois une princesse, un vilain petit canard, un pauvre cordonnier... La réponse pourrait être "les deux en général", car si l'histoire se révèlera finalement être une sorte de conte de fée, on y verra beaucoup de scènes tirées et encore davantage caricaturées — si cela était humainement possible — de westerns-spaghettis. Mais je dirai que non, le titre n'annonce pas un nouveau démarquage des films des autres. En effet, les scènes western ne sont pas des caricatures des films de Sergio Leone ou de Sergio Corbucci (Django 1, Django 2, Navajo Joe, Le grand Silence, Salut l'ami adieu le trésor, etc.…), mais ces mêmes scènes telles que les auraient tournées les deux Sergio, avec la différence que c'est le making off que l'on en voit.
Par contre, c'est bien dans un conte de fée que Tarentino veut nous entrainer, un conte sur fond d'acteur de série en déclin, de cascadeur en chômage, de guerre lointaine au Viêt-Nam, de couples glamour tels que Roman Polanski - Sharon Tate, et de cinglés à la Charles Manson. Vous savez que je ne vais pas vous raconter l'histoire, mais sachez quand même que cette élégance me gêne beaucoup pour développer ma critique et pour expliquer que le conte de fée, assez curieusement, apparait dans la violence extrême — comme d'habitude — de la scène finale. Je ne vous en dirai pas plus sur cet aspect.
Le film, quoique trop long (2heures 41), n'est pas ennuyeux, enfin pas vraiment. Mais c'est vrai qu'on passe un peu trop de temps à regarder Brad Pitt en cascadeur obscur et looser conduire le porte-avion blanc de son patron de Caprio entre Pacific Palisades et Hollywood. C'est vrai aussi que l'on passe beaucoup de temps à contempler sous tous ses aspects la gentillesse naïve et souriante de Sharon Tate, et le désespoir alcoolisé de de Caprio en acteur déclinant de série TV.
Mais, on aimera surement revoir ces longues voitures blanches décapotées qui tanguent sur Wilshire Boulevard, on se baignera à nouveau avec nostalgie dans cette lumière crépusculaire dorée et poussiéreuse des routes de Laurel Canyon, on reconnaîtra avec plaisir l'entrée du Regency Village Theater de Westwood, et on suivra voluptueusement les sinuosités de Cielo Drive dans le chuintement des pneus et la chaleur de la nuit. Nostalgie, quand tu nous tiens...
On verra deux ou trois scènes très réussies, comme le dialogue entre l'acteur déclinant ressassant sa dégringolade et l'enfant-actrice expliquant sa méthode de comédienne. Très réussie aussi la scène inquiétante où le cascadeur rend visite à ce qui s'avèrera être la bande hallucinée de Charles Manson. Dans le genre, et même si justement on n'aime pas le genre, on appréciera la scène du massacre final, pour des raisons psychologiques que je ne peux dévoiler ici, faute de dévoiler ce qui pourrait demeurer, mais pour certains seulement, une surprise.
Mais on regrettera l'énorme cabotinage, heureusement bref, d'Al Pacino, ainsi que ceux de Bruce Dern et de Kurt Russel, un peu moins accentués et un peu plus brefs.  Comment un réalisateur qui a révélé de brillants acteurs dans Reservoir Dogs ou ranimé des carrières fichues dans Pulp fiction ou Jackie Brown peut-il faire jouer comme ça des comédiens aussi expérimentés. Mystère. Mystère ou mystification ? De Caprio, capable de tout jouer, ne s'en sort pas trop mal et Brad Pitt colle assez bien dans son rôle de brave type serviable, looser et costaud.
Ne vous laissez pas prendre au chant des sirènes critiques professionnelles qui vous aguicheront avec leur évocation des références continuelles de Tarentino qui les épatent à chaque fois.
Les seules références que j'ai vues dans ce film sont celles dont je viens de parler et qui sont faites très directement et ouvertement aux westerns spaghettis. Les autres références que l'on pourra vous citer n'en sont pas, à moins que placer dans le cadre un écran de télévision montrant quelques images de la série Mannix (entre nous, quelle musique de générique !) ne soit considérée comme une référence. Moi j'appelle ça du décor.
Maintenant, moi, je dis ça, je dis rien. C'est vous qui voyez.