Bonjour,
J'aime beaucoup ton écriture. Vraiment.
Le premier paragraphe m'a tout de suite immergé (sans jeu de mots) dans cette cabine de douche. L'incohérence de la dissociation corps / esprit qu'a relevée Persona ne me dérange pas dans la mesure où, comme tu le dis, nous sommes dans un texte poétique et absurde, ce qui me plait. J'ai tout de suite adhéré. C'est plus lorsque la narratrice part dans des réflexions politiques que j'ai été surprise par le personnage (qui se définit elle-même comme superficielle) mais une fois de plus, cela ne m'a pas gênée. Je trouve qu'il y a un second degré amusant dans sa lucidité.
Ce jeu sur la matière qui se défait, se sépare, cela m'a beaucoup plu. Autant au niveau de l'écriture, qu'au niveau de l'idée elle-même. C'est poétique et amusant, c'est beau. (Et peu à peu, cela devient politique, ce qui est intéressant en soi mais j'y reviendrai.)
Comme Persona, j'ai relevé de très belles phrases et de belles sonorités, de bons jeux de mots, des mots inventés ("spasmophilia" ? génial !). Bref, bravo ! J'ai été très séduite.
Quelques bémols (si tu veux bien) :
- Certaines phrases m'ont paru un peu difficiles à comprendre. Tu as beaucoup de vocabulaire et des formulations soignées. Ce sont des qualités mais j'ai un peu buté parfois.
Exemples :
"Heureusement, ces acrobaties sont une pratique courante dans ce monde où la probité a d’obscures raisons que l’estomac ignore béarniaisement."
"c’est ma silicone incarnée qui s’aventurait au plus profond de ma chair pour découvrir de nouvelles régions aux plats exotiques"
Je n'ai pas compris ces phrases. Peut-être que le texte gagnerait en allégeant et en simplifiant certaines tournures ?
- Je suis plus mitigée sur le message politique, du moins sur sa formulation. En soi, le message est beau : l'excès de matérialisme qui conduit à une évaporation de la matière, la prise de conscience que cela provoque. Nous étions dans de la poésie humoristique, cela se charge peu à peu d'un sens métaphorique plus fort : ça me plait ! Mais il me semble que le premier paragraphe de ta dernière section est trop explicatif ("Quand nous sommes revenus...") comme un peu plus haut à partir de "Et moi, je n'échappais pas à cette transhumance de l'esprit". On perd la poésie et le rythme du récit, on retrouve moins ton style car tu expliques, tu argumentes. Et bien qu'on ne puisse qu'approuver les valeurs de ce monde utopiste, elles me paraissent un peu "simplistes". Désolée, ce n'est absolument pas un jugement de valeurs sur les opinions défendues. C'est que selon moi, quasiment jusqu'à la fin du texte, il y a beaucoup d'originalité, de singularité, de poésie, tu prends le temps de décrire tes images qui fonctionnent vraiment. Et tout à coup, on arrive sur un paragraphe "anti énarques et anti banquiers" qui nous fait brutalement retomber sur terre (comme les adultes de la nouvelle) dans un discours un peu consensuel. D'autant que l'accumulation des sujets abordés (la fin de la pauvreté, la fin du racisme, l'égalité, la démographie, l'écologie...) s'enchaîne et est expédiée un peu rapidement.
La transition avec le passage sur la direction à prendre à gauche était bien trouvée.
Je m'aperçois que j'ai plus développé ce qui m'a moins plu mais relis le haut de mon commentaire, j'ai adoré ce texte ! Bravo !