Les pierres du chemin patientaient dans un silence immuable. La chaleur grillait la végétation. Les couleurs se voulaient vives et chatoyantes. Comme une fresque qui ne connaissait pas l'écoulement du temps. C'est un village en ruine, perché sur une colline, à jamais étouffé par un été éternel. Un cadre champêtre, des murs écroulés, un soleil éblouissant et une silhouette sur le point de s'éffondrer.
Le dernier habitant s'apprétait à périr. Il traversa les chemins des collines qu'il avait traversés des milliers de fois. Il regarda cette nature qu'il l'avait vu naitre et qui le verrait mourir. L'homme avait toujours été aimé par les siens, il était discret, silencieux et travailleur. Il était un garçon du village. Il allait mourir comme tel.
Etait-ce triste ? L'homme regardait les murailles de son village. Il ne voyait que la beauté de celles-ci. Ce qu'il y avait derrière n'existait pas. Ces murailles étaient les limites de son village, mais aussi celles de son esprit, de sa joie, de ses peines, de son amour.
L'homme sourit. Il a été très heureux. Il a cultivé son bonheur. Dans ces quelques chemins de pierre. Par son esprit limité, il a été facile pour lui, de faire le tour de son âme. Il a exploré l'intégralité de ses quelques émotions. Et dans la finité de son être, il semble avoir atteint une infinité que d'autres n'obtiendront jamais tant leur âme, si grande soit-elle, est diffcile à parcourir.
C'est une leçon du bonheur. D'une subjectivité malaisante. Le seul voyage existant est spirituel. Nos chemins de pierre sont en nous. Et tandis qu'il refait le tour de son village une dernière fois, il a traversé et vu des mondes entiers. Il ne s'agit pas de tout voir, il s'agit de se voir. Il s'agit de saisir ce qui est et a toujours été saisisable.
L'homme se meurt, allongé sur une pierre du chemin. Le visage reconnaissant. Le corps épuisé. Par ce long chemin.