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Auteur Sujet: Sérotonine (Michel Houellebecq)  (Lu 5064 fois)

Hors ligne Champdefaye

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Sérotonine (Michel Houellebecq)
« le: 16 février 2019 à 20:37:46 »
Critique aisée n°151

Sérotonine
Michel Houellebecq – 2019
Flammarion – 347 pages – 22€

C’est une banalité de dire que Michel Houellebecq est un homme désespéré. De plus, comme il le dirait lui-même, c’est une banalité qui est probablement vraie. S'il en était besoin, son dernier livre, Sérotonine, en serait la preuve définitive : la lente dégringolade, acceptée et même voulue, programmée depuis la première page jusqu'à la trois-cent-quarante-septième, par un homme, la quarantaine, pourvu d'un bon emploi, d'un bon salaire, de temps libre, en somme d'une existence plutôt facile. Qu'arrive-t-il donc à cet homme presque comblé ? Eh bien, il lui arrive qu'il n'a plus de désirs et pas seulement sexuels : il n'a plus envie de rien, il s'affaisse sur lui-même, il meurt littéralement de chagrin lui dira un médecin étonné à la lecture des résultats de ses analyses.  Son métier de technocrate de l'agriculture, qu'il exerçait autrefois sinon avec passion du moins avec intérêt et honnêteté, le désespère depuis qu'il a compris que quoi qu'il fasse, des pans entiers de l'agriculture française sont inéluctablement condamnés. La liaison qu'il vit à contrecœur avec une jeune japonaise snob et surdouée du porno, il ne demande qu'à la terminer, au besoin en faisant passer la dame par la fenêtre. Son seul désir est de rester enfermer dans une chambre d'hôtel Mercure du XIIIème arrondissement ou dans un studio de l'avenue d'Ivry à fumer et boire du calvados, non pas vraiment mettre fin à ses jours, mais se détruire petit à petit.
Ce désespoir, le narrateur pourrait, c'est la mode, le reprocher à sa famille, ses amis, ses femmes, ou à la société. Mais non, trop facile, c'est Houellebecq : "Contrairement à Rousseau, je ne pouvais pas non plus dire que j'avais été "proscrit de la société des hommes par un accord unanime" ; les hommes ne s'étaient nullement ligués contre moi ; il y avait eu simplement qu'il n'y avait rien eu, que mon adhérence au monde, d'entrée de jeu limitée, était peu à peu devenue nulle, jusqu'à ce plus rien ne puisse interrompre le glissement."
Mais son dernier livre, c'est aussi, encore davantage que les précédents, la description acide et souvent désopilante — pendant ma lecture, j'ai souri un nombre de fois que je n'ai pas pu compter et, croyez-moi, j'ai véritablement éclaté de rire deux ou trois fois, y compris une dans l'autobus 27 — de la société de ce début de millénaire, le millénaire de trop comme dit le narrateur.
La nonchalance définitive et provocante avec laquelle il écrabouille Niort, "une des villes les plus laides qu'il m'ait été donné de voir ", ridiculise le quartier parisien de la Butte aux Cailles, "un monde de crêperies militantes et de bars alternatifs entrecoupés de magasins bio-équitables", se demande comment un Hollandais pourrait être xénophobe, "il y a déjà contradiction dans les termes, la Hollande n’est pas un pays c’est tout au plus une entreprise", abomine Paris tout entier "cette ville infestée de bourgeois écoresponsables", est jubilatoire, dans la manière que l'on connait et que l'on aime, sans quoi on ne serait pas un lecteur de Houellebecq.
Mais ce bouquin désespéré n'est pas qu'un pur sanglot. Ce n'est pas non plus qu'une critique libérée de notre société ridicule de transparence sociétale et obsédée de correction politique. J'y ai aussi trouvé la relation poignante de deux amours qu'a connu le narrateur. Les scènes de bonheur y sont contagieuses et les scènes de séparation à la fois banales et terribles. Vous y verrez aussi une très belle et très tragique histoire d'amitié.
Quand, à quelques lignes de la fin, le narrateur dit : "J'aurais pu rendre une femme heureuse. Enfin, deux ; j'ai dit lesquelles. Tout était clair, extrêmement clair, dès le début ; mais nous n'en avons pas tenu compte. Avons-nous cédé à des illusions de liberté individuelle, de vie ouverte, d'infini des possibles ? Cela se peut, ces idées étaient dans l'esprit du temps ; nous ne les avons pas formalisées, nous n'en avions pas le goût ; nous nous sommes contentés de nous y conformer, de nous laisser détruire par elles ; et puis, très longuement, d'en souffrir.", moi, ça m'émeut. Aux larmes. C'est bête, hein ?

Post-Scriptum : Dans son intervention au Masque et la Plume, Michel Crépu, rédacteur en chef de la N.R.F., a dit à propos de Sérotonine à peu près ce qui suit : "…Houellebecq sait qu’il est le patron. C’est lui qui dit l’esprit du temps, c’est lui qui l’écrit et c’est fait d’une façon absolument « nickel ». On a l’impression d’être assis à l’arrière d’une Rolls qui vous conduit sur la route du réalisme métaphysique tel que Houellebecq l’a inventé et imposé comme une espèce de référence herméneutique absolument incontournable pour comprendre son époque. C’est extrêmement impressionnant…"

« Modifié: 17 février 2019 à 05:15:54 par Champdefaye »

Hors ligne Champdefaye

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Re : Sérotonine (Michel Houellebecq)
« Réponse #1 le: 18 février 2019 à 14:42:27 »
Hé bé !
Moi, je ne connais de Michel Crépu que ses interventions, que j'apprécie beaucoup, au Masque et la Plume. Je ne sais pas ce qu'il a bien pu répandre comme calomnie sur Debord il y aurait maintenant près de trente ans. Je ne sais pas non plus ce que Debord aurait pensé de Houellebecq, probablement pas du bien.
Mais ce que je sais, c'est que beaucoup d'autres que moi trouvent que c'est un écrivain exceptionnel, probablement le plus grand aujourd'hui.
Ce soir là, Crépu, qui avouait ne pas être Houellebecquien de goût, n'était pas le seul à admirer M.H. Pour Patricia Martin , Sérotonine est "un livre magnifique", pour Arnaud Viviant "personne n'est allé aussi loin dans la représentation du réel. Seul Raspiengeas a émis quelques réserves, se demandant si tout cela faisait un roman.
On peut écouter cette séquence du Masque avec ce lien :

https://www.franceinter.fr/emissions/le-masque-et-la-plume/le-masque-et-la-plume-06-janvier-2019
« Modifié: 18 février 2019 à 14:44:26 par Champdefaye »

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Re : Sérotonine (Michel Houellebecq)
« Réponse #2 le: 19 février 2019 à 17:05:07 »
Mon cher Champdefaye, je vois que tu as déjà un élève, mes plus vivantes félicitations !

Je dois dire que je suis moi-même toujours très curieux de découvrir tes impressions de lecture, j'y trouve comme un regard qui me pose sur autre chose.

Je suis quelque part d'accord avec Versus sur le fait que le terme « esprit du temps » me semble évoquer une contradiction avec l'esprit de Houellebecq de parler souvent de ce qui fait le détail du moment, ce petit rien dont on s'amuse bêtement pour se souvenir combien on aime à se réfugier dans des petites choses du quotidien. Il y a dans cette pitrerie une forme d'humilité à laquelle nous ne savons même plus faire hommage. Versus montre que si l’œuvre de Houellebecq porte un certain nombre d'intérêts, elle n'a pourtant pas encore révélé toutes ses facettes à l'image de notre capacité à lire aujourd'hui sous un angle différent, sous une ouverture bien particulière.

Si je vais dans ton sens sur la très grande qualité de tes critiques, mon cher Champdefaye, je rejoins Versus sur l'évidence que la plus grande de leurs qualités est de savoir nous questionner le temps d'une lecture, quitte à en étudier le moindre détail.
Mon carnet de bord avec un projet de fantasy.

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Re : Sérotonine (Michel Houellebecq)
« Réponse #3 le: 21 février 2019 à 19:54:57 »
L'esprit du temps, celui de l'époque de l'écrivain, se marque par des détails, par une multitude de détails qui font ou feront comprendre au lecteur ce qu'est ou ce que fut l'esprit de ce temps.
On lira Houllebecq plus tard pour découvrir ce que fut la fin du XXème/début du XXIème siècle, comme on lit A la Recherche du Temps Perdu pour la fin du XIXème, Les Liaisons Dangereuses pour la fin du XVIII ou La Princesse de Clèves pour la fin du XVIIème, et ainsi de suite...
Les détails ne sont pas choses dont on s'amuse bêtement. Identifiés, rassemblés, présentés par des écrivains de talent, comme Houellebecq, Proust, Maupassant, etc..., ils marquent, et même parfois définissent une époque ou, plus précisément, une société dans une époque. La peinture réaliste et ironique de Houellebecq me fait penser irrésistiblement à celle que faisait Proust du monde dans lequel il vivait au tournant du XIXème siècle. Houellebecq, par cette multitude de détails qui paraissent à certains futiles ou innocents nous fait réaliser, s'il en était besoin, ce qu'est réellement notre époque, intellectuellement faite de faux semblants, de circonvolutions amphigouriques, de correction politique, de syntagmes figés, d'idées toutes faites et de transparence affichée. Si tu as lu Sérotonine, deux passages illustrent particulièrement bien le ridicule des poses de notre temps, c'est à dire l'esprit de notre temps. C'est :
1)La visite de la Butte aux Cailles, avec ses crêperies équitables et ses bars alternatifs
2)Le moment où le narrateur entend à la radio les notices nécrologiques de Laurent Baffie, qui se terminent toutes par "c'était une belle personne".
J'aurais aimé répondre à la phrase suivante, mais je ne l'ai pas comprise. Pourrais-tu m'éclairer ?
Citer
Versus montre que si l’œuvre de Houellebecq porte un certain nombre d'intérêts, elle n'a pourtant pas encore révélé toutes ses facettes à l'image de notre capacité à lire aujourd'hui sous un angle différent, sous une ouverture bien particulière.


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Re : Sérotonine (Michel Houellebecq)
« Réponse #4 le: 21 février 2019 à 21:29:27 »
Oui mon cher Champdefaye, je parle ici d'humilité et de science du détail.

Je crois qu'il faut savoir reconnaître l’œuvre de Houellebecq pour sa capacité à trouver un lieu de l'humilité dans l'indignation qu'il traduit par sa pensée. Cette humilité aujourd'hui tu ne l'assumes pas tout à fait, ce qui me questionne moi-même sur ta capacité à poser cette critique comme étant la continuité de l’œuvre de Houellebecq, peut-être à tort – je l'entends.

Celui-ci a bien évidemment quitté l’œuvre de Proust pour aller vers sa propre époque et je ne suis absolument pas convaincu par la comparaison entre les différents auteurs que tu cites, même si je la respecte humblement. Je crois qu'il faudrait chercher chez Houellebecq plutôt un Sartre ou un Nietzsche, et ne pas sombrer trop rapidement dans les références hâtives qui font signe d'autorité. Non, je crois bel et bien en la simplicité de Houellebecq, je dirais même : en sa fragilité.

Je crois que si ta critique est juste, elle laisse aujourd'hui entrevoir certains détails sur lesquels nous sommes en droit de nous questionner : c'est aussi ça, l'éducation.
« Modifié: 21 février 2019 à 21:34:23 par Alan Tréard »
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Re : Sérotonine (Michel Houellebecq)
« Réponse #5 le: 22 février 2019 à 11:26:55 »
Citer
Je crois que si ta critique est juste, elle laisse aujourd'hui entrevoir certains détails sur lesquels nous sommes en droit de nous questionner : c'est aussi ça, l'éducation.
?

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Re : Sérotonine (Michel Houellebecq)
« Réponse #6 le: 22 février 2019 à 11:40:03 »
Je ne doute pas un instant que je parviendrai à me faire comprendre, je garde la foi !!

Citer
Je crois que si ta critique est juste, elle laisse aujourd'hui entrevoir certains détails sur lesquels nous sommes en droit de nous questionner : c'est aussi ça, l'éducation.
?

Je pense que l’œuvre de Houellebecq est une œuvre dont on peut s'inspirer pour construire sa propre démarche de créativité, donc j'estime que tout ce que tu nous proposes dans ta critique permet pour nous de nous élever un instant vers cet auteur qui mérite de sincères considérations.

Tu postes sur le forum les moyens pour nous d'ouvrir la discussion sur ce livre, et je ne suis pas le seul à m'interroger sur le rôle de Houellebecq dans notre actualité, je ne doute pas que d'autres membres s'intéressent à la discussion sur ce livre. Puisque tu maîtrises bien l’œuvre de Houellebecq, c'est naturellement vers toi que nous nous tournons lorsque nous nous questionnons sur sa place dans les lettres.

Me concernant, j'avais bien perçu cette transformation dans le parcours de Houellebecq, je m'attendais à ce qu'il nous surprenne avec son Sérotonine, cela confirme mes précédentes attentes ; en revanche, je dois dire que je suis un peu outré que personne ne tolère ce regain d'inventivité de Houellebecq alors que c'est justement ce qu'on attend d'un auteur. Comment la critique peut-elle recevoir une œuvre de nouveauté avec un tel dédain ? Je trouve que l'accueil qui a été réservé à son livre n'est pas à la hauteur de ce qu'il signifie pour lui dans sa vie d'auteur, je crois bien que cette étape de sa vie s'inscrira dans l'histoire de son œuvre, même si je n'en aurai jamais la preuve, je pense qu'un jour ou l'autre le virage créatif qu'il a pris aujourd'hui sera reconnu à sa juste valeur.

C'est aussi grâce à tes critiques que je parviens à exprimer mon sentiment profond, c'est ça qui éduque ma perception de l'actualité littéraire.
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Re : Sérotonine (Michel Houellebecq)
« Réponse #7 le: 22 février 2019 à 12:32:40 »
Merci pour tes éclaircissements. C'est me donner un bien grand rôle dans la connaissance de Houellebecq, bien que je croie avoir beaucoup lu de lui, sauf la majeure partie de la poésie.
Très surpris de ton commentaire sur le dédain avec lequel la presse aurait accueilli Sérotonine, je suis allé voir un peu ce qu'il en était. Voici des extraits des principales critiques :


TELERAMA - Nathalie Crom
(...) Un messager de plus en plus poignant au fil des livres (...) Tandis aussi que s’approfondit et s’humanise le regard que porte sur lui l’écrivain, dont le cynisme provocant et sans limite, mêlé d’ironie rageuse, s’est comme arrondi, émoussé avec le temps, se muant insensiblement en une sorte d’empathie subrepticement tendre, une compassion évidente irriguée par une intense mélancolie. »

L'EXPRESS – Mariane Payot
(...)Ce qui importe, vraiment, c’est cette subtile alternance, voire cet alliage, de plaisanteries et de considérations graves,(...) Sans compter son art de la chute, ces petites phrases pleines d’esprit et souvent d’autodérision qui viennent ponctuer les chapitres. Il est là, le sel de ce roman, le tour de force de l’auteur. »

JDD – Bernard Pivot
(...) son oeuvre non pas la plus spectaculaire  ou la plus ambiguë mais la plus émouvante. Il y a de très belles pages sur l’amour et le bonheur liés qui apporteront espoir ou consolation.(...) Des pages très fortes impressionnent d’autant plus que nous vivons depuis plus d’un mois  dans la confrontation des oubliés de l’idéologie libérale avec la police.

LE MONDE – Jean Birnbaum
(...) Sérotonine est un roman philosophique, mais qui brocarde la littérature et la philosophie ; un livre qui vise un large succès public mais qui se paie le luxe d’une arrogante cuistrerie, jusqu’à multiplier les références à Arthur Schopenhauer, à Theodor Fontane ou à « ce vieil imbécile de Goethe »… En sorte qu’on pleure de rire à la lecture de ce grand roman, la plupart des effets comiques provenant de l’accrochage entre deux registres (...)

LA REPUBLIQUE DES LIVRES – Pierre Assouline
(...) Michel Houellebecq  ne dérangera rien ni personne avec son septième roman. Ni l’ordre des choses, ni les institutions, ni les puissants. On le dit lucide et certains de ses livres ont témoigné de son flair de sociologue amateur, mais que sa vision du monde est sinistre, que sa France est lugubre toute à sa décomposition morale,

L'OBS – Elisabeth Philippe
(…) Toute cette esthétique du « vieux mâle blanc» est datée, périmée, et ne donne plus rien de bon manifestement. «A quoi bon essayer de sauver un vieux mâle vaincu ?», s’interroge le narrateur. A quoi bon, en effet. »

Sans compter les critiques du Masque et la Plume que j'ai déjà cités car, à mon avis, ils comptent tout autant, malgré ce que deux d'entre eux auraient fait à Debord.
Si je récapitule :
Bonnes critiques : Télérama, L'Express, JDD, Le Monde, Michel Crépu, Arnaud Viviant, Patricia Martin
Critique mitigée : Raspiengeas
Mauvaises critiques : La République des Livres, l'Obs

Ça rassure, non ?






Hors ligne Alan Tréard

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Re : Sérotonine (Michel Houellebecq)
« Réponse #8 le: 22 février 2019 à 12:40:45 »
Ah ! Je me sens apaisé par cette lecture, moi qui avais le sentiment que l'on divaguait...

Un grand merci !!

Je ne floode pas plus ce fil, je crois que j'ai eu tout l'espace d'y exprimer mon sentiment, et j'invite d'autres lecteurs à s'y exprimer s'ils souhaitent proposer une critique positive, mais aussi pourquoi pas une critique négative s'ils trouvent dans le livre quelque chose qui les mécontente. Cette discussion est une véritable bouffée d'air frais !
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Hors ligne Meilhac

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Re : Sérotonine (Michel Houellebecq)
« Réponse #9 le: 07 septembre 2019 à 17:49:29 »
Je l'ai lu l'autre jour (trouvé dans une boîte à livres)

Bah c'est du houellebecq, quoi

pas mal. facile à lire. easy reading, limite page turner (on s'attache un peu au personnage, y a un genre de suspense).

et puis le style houellebecquien. son côté un peu drôle - j'aime bien, l'humour de houellebecq. et son côté très bon sociologue.

et son côté pas très poète, par contre. j'ai, comme on dit, dévoré le livre : lu vite, avec un peu de plaisir, et avec de l'intérêt.

et j'ai relu quelques passages, et rapidement ça m'a ennuyé de relire, parce que bon c'est une langue sans poésie quoi. humour. justesse sociologique. une manière de prendre au sérieux certaines questions (plaisir versus bonheur, par exemple. j'aime beaucoup la manière dont houellebecq prend au sérieux la question du plaisir (sexe entre autres), je trouve ça assez juste. idem les questions relatives à la solitude, à l'ennui).

bon le mystère c'est : pourquoi, quand il parle de lui, houellebecq, lui si intelligent et bon critique et bon sociologue, prétend être un poète, alors que sa langue est un peu drôle, un peu efficace, mais pas élégante.

il y a de la beauté dans le monde. il n'y en a pas dans la langue de houellebecq. houellebecq n'essaie pas d'en mettre. est-ce que c'est parce qu'il n'en voit pas, de la beauté, dans le monde? ou est-ce que c'est parce qu'il sait/sent/pense que s'il cherche à être élégant il perdra en efficacité, en "lapidarité" ? ou est-ce qu'il trouve qu'il y a de la beauté dans sa langue ? je pense que c'est 60% la première réponse, et 40% la deuxième, sachant que si on part du principe que déployer une langue poétique ça élimine trop de lecteurs, peut-être qu'après on cherche moins la beauté dans ce qu'on regarde.

houellebecq aime jouer au mille bornes. donc il voit bien de la poésie dans certaines choses.

bref, bouquin sympa, vite lu, pas inintéressant, si vous n'avez jamais lu du  houellebecq, ça vaut le coup d'en lire un ou deux (celui-ci ou un autre, peu importe - sachant que ses deux premiers livres sont peut-être un peu plus puissants).

je l'aime bien moi comme gars. mais quand je lis ses livres, je ne me dis pas, miam. je me dis, décidément, il a de bonnes idées, décidément il est pas con, décidément il a un petit humour désenchanté qui a son petit charme. mais je ne me dis pas miam. et moi j'aime faire miam. mais bon, un petit houellebecq à l'occase, ça se lit.

mais je ne sais pas si ça enrichit beaucoup, quoi. ça distrait. et ça montre qu'il sait comment faire un roman. mais ça ne donne pas envie de relire le roman une fois qu'on l'a terminé, et on oublie vite aussi ce qu'on a lu vite et facilement et avec un peu d'intérêt. bref, bizarre ce houellebecq.

mais au moins, il y a un côté "sans prétention" dans le style qui est sympa. c'est à dire : les rares fois où il cherche un effet (un peu de drôlerie, un peu de mélancolie), ça marche, c'est pas sublime mais ça fonctionne un peu. et le reste du temps, il fait très simple. donc au moins c'est sans prétentions. et ça c'est une sacrée qualité, par rapport à d'autres auteurs où il y a + d'afféterie.

mais bref houellebecq ce qu'il y a de bien, c'est un chouïa d'humour (sens du comique de situation) et de justesse psychologique et d'observations sur la société ou la condition humaine. donc bon bah c'est déjà ça.

 


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