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Le Monde de L'Écriture » Coin écriture » Textes courts (Modérateur: Claudius) » La Course du Dragon (Contenu explicite)

Auteur Sujet: La Course du Dragon (Contenu explicite)  (Lu 10667 fois)

Hors ligne kokox

  • Grand Encrier Cosmique
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La Course du Dragon (Contenu explicite)
« le: 19 mars 2016 à 02:16:43 »
La course du dragon


   

     Allo ?… Est-ce que tu es là, Billy ?... Parle-moi, s'il te plaît !… Est-ce que tu m'entends ?... Non ?… Tu dois dormir encore !… Tu ne fais que dormir… C'est pas grave, je vais parler pour deux… Tu vois, je n'ai plus peur de te parler, maintenant… J'ai beaucoup réfléchi à nous deux… Ce serait trop con que l'on perde le contact, Billy… Ce serait trop con que tu n'essaies pas de me pardonner… Je vais beaucoup mieux maintenant, tu sais... Je fais des efforts chaque jour, je fais tout ce qu'il faut... Je ne tremble plus… Je ne titube plus… Je ne transpire plus... Je ne vole plus personne… Je ne fais plus de mal aux gens… Je les respecte… Et je respecte infiniment ce pourquoi je suis venue sur Terre… J'ai même trouvé un travail, tu sais... Je range des livres à la bibliothèque sur des étagères en bois vernis qui sentent bon l'encaustique... Les gens m'aiment bien là-bas, ils me le font sentir… Ils m'appellent Rebecca, ils ne m'appellent plus Reb ou Reby, tous ces surnoms dégueulasses… Si tu voyais mes mains aussi, elles sont redevenues magnifiques, Billy, plus de peaux rongées jusqu'au sang, j'ai remis du rouge sur mes ongles… J'ai un beau rubis à la place de chaque ongle, maintenant… De grands romanciers, de grands poètes, passent toute la journée dans ces mains redevenues magnifiques… J'en suis très fière… Avant, ils auraient craché sur ces mains, ils ne se seraient jamais laissés saisir par ces mains grotesques… Tu connais Walt Whitman, Billy ?... C'est tellement beau !… Quand je lis le grand Walt, je pleure comme une gosse, je ne peux pas m'empêcher de pleurer… Écoute ça, c'est de lui, c'est de Walt Withman : Je veux que désormais la vie soit un grand chant de joie ! Je veux danser, battre des mains, exulter et crier, sauter, bondir en l'air, me rouler par terre, surtout flotter, flotter ! Car je serai marin du monde partant pour tous les ports. Car je serai bateau. Avez-vous vu mes voiles, déployées au soleil et à l'air ? Navire vif, cales gonflées d'une précieuse cargaison de paroles et de joie. C'est pour toi que je lis Walt Whitman, Billy, c'est pour toi que je fais tout ça !… J'ai même commencé à raconter un peu ma vie dans un cahier, tu sais… Mais non, comment pourrais-tu le savoir… Attends, je vais t'en lire certains passages… Je ne sais pas si ça vaut quelque chose, mais ça me fait un bien fou d'écrire ça. Écoute bien, mon amour…
   
      «Je n'ai pas toujours été une illuminée, une paumée, un sac d'os sans foi ni loi. Il m'est arrivé aussi de passer de délicieux instants, d'apprécier les balades au bord d'un joli lac, la bonne nourriture libanaise, les spectacles de danse, et la peinture bien sûr. Je suis folle de peinture, je suis totalement accroc à la peinture. Je serais capable de donner quelques mois de ma vie pour être une petite heure à l'intérieur d'un tableau de maître, pour me faire minuscule dans un chef d’œuvre de Van Gogh, de Degas ou de Kess Van Dongen. Moi, je suis une peintre médiocre, je le sais et cela ne me blesse pas. Par contre, je crois bien avoir du génie dans les yeux pour comprendre et contempler les plus belles toiles du monde. Un jour, je peindrai le monde tel qu’il est vraiment et je le placerai dans la main d’un dieu mendiant. Vu qu’à l’échelle de l’Univers, c’est à peine un cent ce vieux monde !»...
    
     «Mais regardez-moi cette peau grêlée, ce sourire de guenon ! Naguère, on me disait belle, très belle même. On me désirait à chaque coin de rue. J’ensorcelais les hommes rien qu’en marchant, en m’allumant une cigarette. Dès qu’ils me voyaient, ils s’arrêtaient un instant de respirer. Je m’habillais passe-partout, je ne mettais pas de maquillage, j’étais loin de la petite allumeuse. Pourtant, quand les hommes me croisaient, je leur volais cinq secondes de leur vie, juste en étant insouciante et naturelle. Souvent, je me trouvais subjuguée d’avoir un tel pouvoir sur eux. Je leur offrais ma sensualité, ma fraîcheur, et en échange ils faisaient briller mon âme. Parfois, je pouvais les entendre bredouiller dans leur tête : c’est elle, c’est la femme de ma vie ! Au final, je n’ai été la femme de personne. La vie a coulé le long de l’Hudson River, et j’ai coulé aussi. J’ai coulé comme une pauvre pierre froide qu’un gamin jetterait dans l’eau par dépit. Mais qui le croirait ? J'ai eu 21 ans, bon Dieu. Dire que j'ai eu 21 ans et que je les ai perdus. Je me souviens de cet anniversaire dans un bar miteux de Little Italy. De charmants maffieux avaient été me chercher un gâteau de princesse dans la plus prestigieuse pâtisserie de New-York. Et vous savez quoi ? Ils m’avaient sorti des bougies en or, pas une imitation, en or vrai, étincelant. Ces bougies appartenaient à leur parrain mort récemment dans d’étranges circonstances. Une armoire à glace, bedonnante, adipeuse, avait fini par cracher le morceau au sujet de ces «étranges circonstances». Il avait simulé la forme d’un flingue avec ses doigts et il avait tiré à trois reprises contre sa tempe en faisant : tchoum, tchoum, tchoum, comme si le canon était muni d’un silencieux ! Les autres l’avaient aussitôt interrompu, en me disant : il rigole, c’est un comique, il prépare un stand-up pour Broadway ! Les mains de tous ces types ruisselaient de bagues m’as-tu-vu. Leurs yeux noirs de ritals posés sur moi brillaient à travers les nappes de fumée. Ils étaient tous à moitié ivres. Mais ils n’avaient rien de salaces. Ils étaient juste joyeux de fêter l’anniversaire d’une jolie poupée. Ils devaient probablement gagner leur vie au front de jeunes putains, ils auraient pu me dévêtir d’un claquement de doigt et me faire tourner sur leurs grosses cuisses en jouant au poker, mais ils m’avaient tous respectée. Ils ne m’avaient pas mis la moindre main au cul, aucun n’avait quémandé ma bouche pour ce joli cadeau offert. Ils m’avaient considéré non comme une fille, mais comme leur propre fille. Vingt et une bougies en or ! Rien que pour moi, Rebecca ! À la fin de cette soirée féerique, ils m’ont offert les bougies. Je les ai revendues et j’ai pu tenir quelques temps pour jouir de ma jeunesse. Avec une telle chance, je me voyais déjà léviter au-dessus d’Hollywood, ne rencontrer que des princes, des gens de la haute, raffinés, saturés de classe. Je ne sais pas qui a dit : «Qui vit d’illusions meurt de désillusion», mais il avait cent fois raison le type. Côté respect, j’avais déjà mangé tout mon pain blanc à 21 ans. C’est alors que je me suis mise à ressentir que quelque chose grinçait tout au fond de moi. De la rouille était là qui suintait dans mes entrailles, peut-être ramenée d’une vie antérieure. Le jour, j’arrivais à paraître, à faire comme si. Mais lorsque je dormais profondément, il arrivait que je sois prise soudain de terreurs nocturnes. Je me redressais d’un coup en nage, et je voyais devant mes yeux ouverts des monstres gigantesques. J’essayais de les repousser comme je pouvais en agitant mes bras frêles. Terrorisée, je criais à l’intérieur de moi des «non» insensés. Mais c’était peine perdue. Ils venaient me chercher d’outre-tombe. Ils avaient  faim de moi !»...
   
     «Durant ces années-là, j'étudiais dans une école d'art, j'étais encore pleine d'espoir. Pour vivre, je travaillais dans une boutique de fringues, et je louais un petit studio avec une amie de promo à Hell's Kitchen, un quartier gangrené par la drogue et la prostitution. Le soir, je remplissais des dizaines d’esquisses sur des carnets. Je dessinais de mémoire tout ce qui m’avait ému dans la journée : les ormes de Central Park et leur majestueux tunnel de feuillages, les sans-abris, les saxophonistes de rue, les enfants capricieux se laissant choir dans le caniveau, les vieux distributeurs de tracts au sourire pathétique, les folles noires obèses dansant le fox-trot sous un parapluie rouge, les chiens borgnes avec une patte en moins. Mon crayon sublimait l’humanité. Je m’imaginais un peu démiurge. Juste avec mes dessins, je rêvais de pouvoir conquérir le monde pour le rendre meilleur. J'avais l'impression d'appartenir à une grande lignée, celles des légendes qui ont autrefois écumé les rues de New-York, comme Billie Holiday, Janis Joplin, Hendrix et Basquiat. J'avais l'impression de pouvoir m'identifier à eux et de les comprendre. Seulement voilà, cette rouille gluante m’empêchait d'achever tous mes portraits. Il manquait toujours un œil ou une bouche à mes enfants, un bras à mes petits vieux, la queue à mes chiens. Je ne croquais jamais aucun ciel, ni presque aucun décor. Tous mes personnages flottaient dans une sorte de néant, parce que je me sentais moi-même inachevée, brisée de l’intérieur. J’avais un don auquel je ne donnais pas grand-chose. J’étais une mystificatrice de la compassion. Je ne m’aimais pas assez pour pouvoir magnifier l’âme des autres»...
   
     «Remisant mes crayons, je me suis mise à dévorer la nuit, à sortir de plus en plus. Je me suis mise à chercher l’amour, désespérément. Je passais de lit en lit, de bras en bras, et personne n’arrivait à me montrer l’amour comme je me l’imaginais. Il y avait toujours une seconde d’hésitation dans les yeux de mon partenaire qui me faisait dire : non, il triche, il croit aimer, mais il ne sait pas encore aimer. D’expérience en expérience, j’appris rapidement que l’amour était volatile, qu’il n’était pas un tableau, qu’il n’avait pas de matière, qu’on ne pouvait l’accrocher nulle part pour l’admirer en silence. Je pouvais arrêter n'importe qui dans la rue, il ne savait me dire où était l’amour, il ne savait pas me dire quelle forme avait l’amour, ni son poids, ni sa couleur, ni son parfum. J’étais effrayée à l’idée de vivre comme cela en quête perpétuelle d'un sentiment fantôme, et pourtant je voulais vivre à tout prix, avoir un but. Mais quel but véritable peut-on atteindre quand on erre sans amour ? Au moment de mourir, se souvient-on de combien on avait de dollars en poche à vingt ans ? Non, on se souvient seulement de ceux qu’on a aimé et qui nous ont un tant soit peu aimé. On se souvient de l’amour et on se dit merde, je suis passé tant de fois à côté»...
   
     «J'ai débarqué à New-York en 2006, avec un visa de réfugiée. Je viens de Ribnita, un bled paumé de Moldavie. Mais qui connaît la Moldavie ? À l'école, je me prenais pas mal de remarques et d'insultes, parce que j'avais le teint foncé, à cause de mes origines gitanes et juives. Mon frère a presque été battu à mort par le père de sa petite amie quand il a découvert qu'il était juif. Juif, ce n'est pas une religion. C'est une damnation intellectuelle qu'on se transmet de père en fils, de mère en fille. Et le pire, c'est que ce châtiment nous rend très fier. Sur le dos de chaque juif s'accrochent des millions de morts, des tonnes de joie cynique et de somptueux dégoût. Ma chère famille se prenait la tête tout le temps. Chacun recrachait la faute de son exil sur les autres. Nous étions des juifs ratés, des juifs mutants sans défense, sans ambition, sans honneur. De pauvres juifs. Il en existe des milliers qui se cramponnent ainsi désespérément à la vie comme des tiques. Il ne faut pas croire, tous les juifs ne sont pas des descendants de Rockefeller. Pour oublier notre malédiction, la seule chose que je pouvais faire, c'était de persévérer dans mon art de pacotille. Alors, je me suis essayé malhonnêtement à la peinture. Je peignais sur carton les portraits de mes misérables parents et cela les rendait heureux. Mon père les encadrait avec des baguettes, posait un plexiglas dessus, et disait à ses amis plus pauvres que lui : c’est ma fille qui a fait ça, c’est une grande artiste, elle sera accrochée au Guggenheim dans moins de dix ans, je vous le dis. Et puis je peignais aussi mes amants nus. Comme je n’avais pas vraiment le sens inné des proportions, je les peignais de guingois, je leur faisais des membres énormes, des testicules grotesques, et ils adoraient ça. Par chance, j'ai réussi à intégrer l'école très célèbre de la Guardia, où j'ai appris l'art visuel, l'anatomie, la perspective, où j’ai appris surtout que je ne serais jamais une grande artiste. Les profs m’aimaient bien. Ils me disaient : c’est plutôt à chier, Rébecca. Mais comme tu y mets tout ton cœur, ça finira par payer un jour»...
   
     «Et mon Dieu, j'ai eu 22 ans. 22 années que je n'avais même pas vu défiler. Cet anniversaire là, je l’ai fêté toute seule dans ma piaule en fumant pétard sur pétard. Du jour au lendemain, c’en fut fini de Rebecca la radieuse, de Rebecca le rêve bleu. La rouille en moi commençait à s’étendre. Mon âme couinait, se craquelait, se demandait si elle existait vraiment. Je me sentais de plus en plus mal dans ma peau. Sans imagination, je copiais les tableaux de Pierre Soulages et sa peinture informelle. J’étalais d’épaisses couches de noir sur mes toiles, puis je balançais dessus de la cendre, de la poussière, de la bouffe en décomposition. Je leur donnais des titres pompeux, du style : «Nos souvenirs flottent dans une mare poisseuse», «Comment massacrer un edelweiss», «Fractale fruité de l’élégant dégoût». Côté cœur, je n’étais toujours pas parvenue à dégoter l’amoureux idyllique. Je ne tombais que sur des novices en volupté ou de gros baiseurs impénitents qui me claquaient le cul dans l’espoir d’activer mes orgasmes. C’était aussi la période où j’étais en conflit avec ma sexualité, parce que je venais de découvrir que j'aimais aussi bien les hommes que les femmes. Tel un nourrisson qui suce son pouce pour se bercer, je passais des heures entières à téter des sexes d'hommes et de femmes. Cela me transportait aux anges à chaque fois, et j’emmenais tout le monde avec moi dans mes cieux. Je devenais une experte en gorge profonde, en gobage de foutre. On disait : Rebecca, la pipeuse de prestige ! Je me croyais condamnée à pratiquer des fellations toute ma vie, sans aucun repos, pour perpétuer ce triste bonheur. Et puis une nuit, un jeune type très mature a osé me dire : tu me suces pas, tu me grignotes la queue, tu me fais mal. C'est quoi ton putain de problème,   
Reb ? La folie ? En fait, on m’avait toujours menti depuis le début. Je suçais comme une gourde, je n’avais aucun talent pour peindre, je cherchais désespérément l’amour mais je ne savais pas aimer. J’étais une petite prétentieuse idéaliste qui ne valait pas mieux qu’une cul-terreuse analphabète du Texas»... 
   
     «L’année de mes 23 ans, les toubibs ont enfin trouvé ce qui ne tournait pas rond chez moi. On m'a diagnostiqué un trouble bipolaire. Up and down ! Phase d’exaltation maniaque suivie d’une phase de dépression profonde. Cela faisait plusieurs mois déjà que je perdais les pédales. Je pouvais passer d'une période de création surpuissante à un découragement d'une noirceur sans fond. Pour me remettre les idées en place, on m’a prescrit du lithium en comprimés. C'est à partir de cet instant où j'ai commencé à vaciller. Comme j’étais une bonne à rien, j’étais mûre pour plonger. Je pouvais dorénavant tout me permettre, les moindres conneries, les moindres frasques. Je me suis tout permis. Quand j'ai essayé la cocaïne un soir, lors d'une fête de musicos underground, j'étais époustouflée. Je me suis demandée comment j'avais pu vivre sans elle pendant tout ce temps»...
   
     «Un soir, à l'inauguration d'un squat, j'ai eu le bonheur/malheur de rencontrer Melchior, un ami de mon frère. Ce fut le coup de foudre instantané. Il avait dix ans de plus que moi. C'était un black beau comme un dieu, des yeux gris-bleu, un sourire enjôleur de félin, des mains divines dont les longs doigts savaient me catapulter au paradis. C'était un ancien mannequin qui avait tout de l'allure du brave type. Un mec à la cool, comme on dit. Après quelques jours de romance passionnée où il me traita comme une déesse, il me lâcha sur l’oreiller qu'il consommait de l'héroïne depuis un bon moment. Au début, j'ai essayé de l'aider à vaincre son addiction, mais j'ai fini par me défoncer avec lui. Melchior me répétait en boucle que je devais essayer l'héroïne et arrêter de gaspiller mon fric en achetant de la cocaïne. Il tenait à parfaire mon éducation de fille paumée. Il m’expliquait en long en large que la coke m'avait permis de travailler sur moi-même, mais que j'avais besoin de commencer à me parfaire avec l'héro. Il n’a pas eu grand mal à me convaincre. Il baisait une femme hyper sexuée, mais lorsqu’il me parlait il savait qu’il s’adressait à une enfant d’à peine six ans. Pendant six mois, on a consommé des speedballs tous les jours. C'était extrêmement intense. On se réveillait le matin avec la nausée et le besoin pressant d'être défoncé à nouveau. Pendant la journée, on dépouillait les magasins et les pharmacies. Je simulais une crise d’épilepsie, et lui ramassait tout ce qu’il pouvait dans le dos des vendeurs. Je volais aussi de l'argent à mes parents, à mon frère, à mes amis ou je vendais des trucs pour me faire un peu de blé. Melchior vivait chez sa mère, elle-même ancienne junkie, et vendait pas mal d'héroïne. À nous deux, on pouvait se taper six pochons d'héroïne et six pochons de cocaïne dans la même journée. L'héroïne, c'est comme la lampe magique d'Aladin, elle te fait croire que tes rêves peuvent devenir réalité, que tu as le contrôle sur ta vie. Et puis, il te faut des années pour te rendre compte que la lampe est vide. Que le génie qui traîne à l'intérieur ce n'est que toi-même et toute la noirceur pourrie que tu te coltines au cul depuis des générations»...
   
     «Je me shootais toujours au même endroit, au point d'avoir un abcès sur ma veine et de ne plus pouvoir la sentir. Je commençais à avoir des hallucinations auditives. Parfois, il m'arrivait de discuter avec quelqu'un, avant de me rendre compte que j'étais seule depuis le début de la conversation»...

   Un peu comme avec toi maintenant, mon Billy, tu vois !… Allo ?… Tu n’es toujours pas là ?… Mais où es-tu bon Dieu ?… Parle-moi à la fin… C’est insupportable… Ton silence me fait mal… Si tu ne veux plus de moi, dis-le… Je comprendrais… Je fais quoi ? Je continue ?… De toute façon, je suis presque à la fin… Tant pis si je parle aux murs, cela me fait un bien fou de croire que tu m'écoutes...

    «Je me shootais tellement qu’à certains moments j'étais persuadée de pouvoir marcher sur les toits de mon immeuble sans craindre de mourir. Je n'étais plus qu'une machine à fabriquer des vertiges, mais je ne tombais jamais. Car j'étais aussi devenue une vraie machine à fabriquer des miracles, le miracle de tenir debout juste ce qu'il faut pour pouvoir me défoncer encore, encore et encore»...
   
     «Melchior était la pire saloperie humaine de New-York. J'ai compris ça un peu plus tard. Il m'a délibérément rendue accroc à l'héro pour avoir quelqu'un avec qui partager toute la drogue et le fric qui allait avec. Peu à peu, j'ai découvert que d'autres femmes venaient régulièrement dans son appartement. Il faisait exactement la même chose avec elles. Je me suis rendue compte que je n'étais pour lui qu'une usine à trous comme toutes les autres. Je n'étais qu'une des nombreuses pauvres déglinguées avec qui il se défonçait et couchait occasionnellement. Après qu'il ait essayé de me faire subir un gang bang en échange de drogues gratuites, j'ai commencé à faire preuve de vigilance. Mais j'ai fait l'erreur de rester avec lui, d'adorer jusqu’à la folie celui qui cherchait à me tuer à petit feu»...
   
     «Quand on devient une grande consommatrice d'héro, la violence sexuelle est un danger constant. Je recevais des propositions indécentes toutes les semaines, de la part de dealers ou de parfaits inconnus. Je m'étais imposée une règle à laquelle je ne devais jamais déroger : ne jamais écarter les cuisses pour de la dope. J'aurais préféré me suicider plutôt que d'en arriver là. Mais il n'empêche que j'ai subi des violences sexuelles, à plusieurs reprises. Plus d'une fois, je me suis retrouvée souillée sans trop savoir par qui. J'ai eu la chance d'en être sortie à peu près saine et sauve, avec juste ce petit ruisseau de sperme qui s'écoule encore de temps à autre dans un coin de ma mémoire»...
   
     «Quand on se défonce, la mort est tout autour de vous, dans les cliniques, dans les centres de désintoxication, dans les services hospitaliers et dans la rue. Vous entendez toujours parler de la mort de quelqu'un. C'est une overdose, le VIH, ou un décès tout aussi abrupt. Des mecs se faisaient poignarder au moment d'acheter de la dope, des nanas donnant le sein finissaient brûlées vives après s'être endormies avec une cigarette allumée. Nous étions les damnés terrestres de l’Enfer de Dante Alighieri. Chaque nouvelle connaissance était un démon déguisé, une harpie déguisée ou un mort en sursis»...
   
     «Et j'ai eu 24 ans, mon Dieu ! Qu’en ai-je fait ? Un tas de cendres, une abjection ! Je n'étais plus qu'un spectre livide qui errait dans la rue. Je n'avais ni passé ni futur. Je n'étais plus qu'une épave remplie de folle détresse et je ne savais même pas à qui en parler. J'ai été internée en hôpital psychiatrique après avoir essayé de me tuer à trois reprises. Une fois avec une tonne de lithium et du vin, une autre fois en me pendant à une tringle à rideaux, une autre fois en me nouant un sac plastique autour du cou. Il faut vraiment être au ras du sol pour tenter de s'étouffer avec un sac en plastique»...
   
     «J'ai essayé d'arrêter une bonne trentaine de fois, mais n'y arrivais pas. Je chutais, je remontais et je rechutais encore et toujours. Je suis allée à des séances de psychothérapie assez extrême, j'ai fait des cures de désintox, participé à des groupes de soutien, sans succès. Et puis, un beau jour, le miracle est arrivé. J'ai rencontré le docteur Perramus, un type extraordinaire qui lisait dans mon esprit comme dans un livre ouvert. Perramus était un être humain, un vrai, de ceux qui se dévouent sans compter pour les autres. Je n’y ai pas cru tout de suite tellement son empathie me semblait venir d’un autre monde. Il était galant, raffiné, intelligent, profondément à mon écoute. Il me disait «vous» et non «tu». Il m'a laissé entrevoir qu'enfouie sous ma peau de junkie il y avait une âme, une âme qui méritait peut-être d'aimer les autres et d'être aimée pour ce qu'elle   était : juste une âme douce et tendre !»...
   
     «Cela fait maintenant neuf mois que je suis clean grâce au docteur Perramus. J’ai repris du poids et j’ai repris des couleurs. J’ai l’air d’avoir dix ans de plus, mais je me sens beaucoup mieux dans ma peau. Le jour je travaille à la bibliothèque et le soir, sur les conseils de Perramus, je travaille avec des délinquants juvéniles. Je leur parle de l'abus de la drogue et j'en parle bien, et je crois qu'ils m'écoutent et m'apprécient. Je me suis remise aussi à peindre et parfois j'ai même des envies de femme enceinte, des envies brutales d'exposer, d'accrocher mon cœur sur les murs, de montrer ce que peut valoir une petite âme juive et moldave qui ne demandait rien d’autre que d’être un peu heureuse»...

   
   Je vais devoir faire un truc, Billy… Un dernier truc… Je te reparlerai un peu plus tard… J'espère que tu seras réveillé, mon amour… Je t'embrasse très fort… Je t’aime… À tout à l'heure…

   Mais merde, ne te juge pas, Rebecca !
   Billy ne le saura pas. Il ne te voit pas. Qui lui dira ? Combien déjà ?
   Treize !
   Tu es sûre ?
   Certaine ! Treize gouttes d'eau ! Et deux gouttes de jus de citron ! Ne tremble pas, Reb. Applique-toi !
   Je ne tremble pas.
   Si, un peu. On dirait que tu as peur ?
   Non. Je t'assure.
   
   J'aborde à présent la partie sensuelle, hypnotique du processus. Je m’émerveille comme une petite fille au pied de son premier manège. J’ai sept ans. Je suis bien.
   Je chauffe délicatement. Je filtre à la toupie.
   Je suis très excitée, mais je me contiens.
   T’assure toujours Reb !
   Merci frangine. C’est étonnant, ce soir je me sens en symbiose avec l'éther. D'oser parler à Billy m'a fait un bien fou. Ce soir, j'ai le cœur propre, les doigts souples, ce soir...
   Ce soir, tu es méticuleuse.
   Grâce à Perramus, j'ai beaucoup progressé. Il m’a donné une putain de seconde chance.
   Et c’est comme ça que tu honores Perramus, vile connasse ?
   Ce n'est rien ça. C'est juste un test de probité.
   Tu te mens. Comme toujours.
   Je te jure.
   Sur la tête de qui ? Tous tes amis sont morts.
   Mais Billy n’est pas mort. Je jure sur sa tête que c’est le dernier voyage.

   Je trouve ma bleue-veine sur le dessus de ma main.
   Nom de Dieu, qu'elle est belle !
   Allez, c'est parti. Plus un mot. Goûte l'instant à fond l’instant, Reby...

   Ô beauté, flamme orangée ! Comme ton nimbe est beau. On dirait une danseuse de flamenco qui danse au rebord d'une nuit tiède.

   Pas trop vite, injecte doucement. Ne pense pas à l'OD.
   Je n'y pense pas.
   Si, penses-y, mais juste ce qu'il faut. Voilà ! Stop ! Arrête-toi à la moitié, et attends quelques secondes pour voir si l'immaculée n'est pas trop forte.
   T'inquiète, j'ai toujours respecté les consignes de sécurité. J'ai jamais débordé, grâce à Dieu. C'est mon côté bonne élève, cahier soigné, marge impeccable, sans bavure. J'avais une amie comme ça, archi- concentrée, toujours première de la classe, parce qu'elle avait la flemme de sortir son Typex de sa trousse. Les paupières closes, par contre, c'est ma petite superstition. La prière ! Je me la fais toujours courte. Je ne crois pas en Dieu. Mais sait-on jamais. À ce prix-là, je suis quand même un peu perplexe. Que vas-tu m’offrir, ma belle ? Je ne m'attends à rien, pour ne pas être déçue.
   T’inquiète, ce sera le der des ders, je te le jure mon Billy.
   Comme il ne se passe pas grand chose, je taquine encore un peu la fusée. Je provoque le sablier. L'espace d'une seconde, j'émets quand même un regret. Je me dis que malgré mon début de vie ratée, je suis peut-être déjà trop bien pour espérer aller mieux.

   Quand soudain, sans crier gare… c'est l'onde de choc !

   Ô putain, la salope !
   T'en penses quoi ? Reb ?... Réponds, bordel !
   Oh putain !... Oh putain !... C'est beau... C'est dingue ce que c'est beau...
   
     D'abord au loin, une nuée, une cavalcade de chevaux blancs opalescents qui devient de plus en plus précise, me submerge bientôt de sa traîne parfilée d'or, de pourpre et de topaze. Elle semble surgir du fond d’une vaste forêt noire. La voici qui grandit, terrasse, flambe tout sur son passage. Atomise mes craintes ultimes.

   C'est le FLASH !

   La sensation est soudaine, aiguë, fracassante. Elle m'irradie de chaleur, fait d’inouïs va-et-vient de mes orteils jusqu’au milieu de mon crâne.

   BANG !... BANG !... BANG !...

   Big bang en plein front. Les galaxies commencent à tourner. Elles tournent, tournent et tournent à perdre haleine. Novas, Voie lactée, millions d’étoiles qui scintillent. La lune à ma gauche a la rondeur d’une drôle de mamelle sèche. C'est tellement beau. Je retrouve tous mes horizons. Je suis enfin chez moi.

   Oh, la putain de belle montée !
   
   Mais c’est quoi ? C’est quoi ce vieux produit, putain ? Je me croirais à Angkor Wat. Je survole la fantasmagorie des temples khmers, et j’entends cette voix de cristal : ton image dans la glace, c’est mon plus beau poème, mais fais vite il s’efface, c’est mon dernier je t’aime !
   Et maintenant, ça y est, je suis une libellule. Je  déploie voluptueusement mes ailes au-dessus du fleuve aux cinq couleurs, je butine le Cano Cristales irisé d’or, de mousses et d’algues arc-en-ciel.

   Ô le MERVEILLEUX et SUAVE FLASH !

   Je m'étale sur le lit, bras en croix, à la vitesse d'un haricot qui pousse. Entre mes yeux, une hallucination sublime chasse l’autre. Je pense être maintenant blottie dans les entrailles veloutées de la déesse Isis. L’Égypte me tend ses bras de sable, ses secrets d'initiés. Je chevauche le Sphinx. Je marche sur le Nil. Je me téléporte sur la colline d’Ibshek, au Temple d’Abu Simbel, et je me fais l’amour seule sur le nez de Néfertari.
   Et voici que mon plafond s'éloigne en douceur. Que mes murs reculent. Soudain, cette impression fabuleuse que les loupiotes de ma vie s'éteignent l'une après l'autre, telles des photons qui basculent en dominos en travers de mon front.
   L'oppression dans mon thorax lentement se décrispe. Mes mâchoires se distendent. La lourdeur de mes membres s’estompent. Mes mains deviennent ouate. Toutes mes fibres exultent.
   Voilà, c’est fait. Le miel est en moi. Il s'écoule à l'infini.
   C’est prodigieux !
   La chasse au dragon a commencé. Elle devrait durer entre quatre à six heures, m'a dit Melchior.
   Ça a du goût ! Beaucoup de goût. Peut-être trop. Je ne me suis jamais envoyée un truc pareil. C'est dingue comme les prods actuels tabassent, mutent, se bonifient. Je ne sais pas qui remercier. Le paysan/chimiste ou mère Nature. Le monde change, le monde change tellement vite, c'est affolant comme il change. La Terre nourricière devient décomplexée, comme tous les salauds qui la foulent. Elle recrache dorénavant l'effroi comme le sublime. Cela aurait été vraiment con de rater un trip aussi puissant qui m'est tombé du ciel.
   Vertigineusement, mes pensées s'altèrent, s'ordonnent, se magnétisent, au gré d'un kaléidoscope anarchique qui semble enfanter tentacules sur tentacules.
   Et puis, tout au bout du rayonnement, la voici. À travers la splendeur de plantes gigantesques, je découvre l'hydre. Toute l'ampleur de sa vénusté se fond en moi. Ses yeux d'émeraude. Sa bouche noire qui irradie une clarté aveuglante.
   La PAIX enfin ! Ô seigneur, cette PAIX !
   La PAIX virevolte autour de moi, se dépose tendrement sur chacune de mes cellules, comme des milliers d'infimes flocons aimants.
   Goutte de pluie absorbée par l’Océan, je plonge dans la phase de quiétude totale que Melchior appelle le « plateau ». C'est la période de bien-être intense, de relaxation profonde. Je vagabonde comme un frais papillon à travers les bosquets roses de l'oubli. Mon existence à cet instant ne pèse absolument plus rien. Je ne suis plus qu'un rêve de balsa. Pourtant, je ressens ce trop-plein d'allégresse comme si j'avais le poids de l'Annapurna.
   Le voyage se poursuit. Mais, semblant repu de la voyageuse, il s’aggrave peu à peu. Je passe maintenant des millions d'âmes sous la douchette de mon code-barre. Ce sont les nouveaux-nés du jour. Les bébés africains sont accueillis sous un soleil ardent par un essaim de mouches, des vaches mortes, des mères faméliques. Les bébés blancs du Texas sont accueillis par des hordes de latino-américains en révolte. Tout brûle autour d’eux. Tout sent la haine raciale. Les uns et les autres ne savent pas encore ce qui les attend : calamités, misère, cataclysmes, deuils. Et j’en pleure ! J’en pleure à chaudes larmes. J’inonde la Terre entière de ma tristesse, et je me dis : pauvres âmes !
   C'est une vision du futur, Reb ?
   Non, c’est la crainte qui vient de se répandre. Elle était embusquée dans les sombres replis de mon délice. Trop tard ! Elle vient d'ouvrir une fenêtre dans mon poitrail et fait entrer d'un coup la froidure.
   Putain de maudit piège ! Je ne l'avais pas vu venir.
   Pas de panique, Reb. Tout est sous contrôle. Fais comme moi, respire profondément.
   Je respire profondément, fous-moi la paix.
   Oh, un ton plus bas, s’il te plaît. Écoute-moi !…    Écoute-moi…
   Je t’écoute.
   N'aie pas la frousse. La «Voix» ne te déglinguera pas cette fois-ci. Reste bien à l'écart, tapie dans l'ombre. Repais-toi jusqu’au bout du pollen de ce succulent sugar. Reb, tu m'entends ? Tu es loin, frangine.

   C’est l’instant terrible ! Atroce !
    L’heure où la princesse commence à ressentir le poison dans ses tripes, à chier dans sa crinoline.
   Je commence à me tordre.
   Je me tord en tous sens. Je vrille comme un long drap qu’on essore à la main.
   J’ai si mal, mon Dieu !
   NON !…
   Il ne faut pas que je me gerbe dessus.
   Il ne faut pas que je me gratte jusqu'au sang.
   NON !…
   Je ne veux pas que mon cœur saigne.
   Il ne faut pas. Il ne faut pas.

   Mais voici que, sans prévenir, les « demains » débarquent.
   Demain, demain, demain, demain, demain, demain, demain…
   Les demains me soûlent de demain.
   Demain, il ne faut pas que mon cœur saigne.
   Il ne faut pas.
   Que mon cœur saigne.
   Demain !
   La prévention me revient comme un mantra infernal. Les «demains» envoient valdinguer mon esprit d'une tempe à l'autre. Je commence à flipper sévère. Je flirte avec l'intolérable. Je dois me forcer à me retenir au vide.
   Pourquoi mon stylo d’écolière bave  t-il sur mon cahier, se répand t-il aux pourtours de ma table ? Merde, j’ai de l’encre partout sur les cuisses. Des spirales, des arabesques, des cheveux torsadés sortent de mes pages quadrillées, entourent de chiendent mon écriture puérile. Mes pensées se déglinguent. Je ne contrôle plus rien. J'ai une sauvage envie de me dessiner dessus, de me contorsionner comme un modèle épileptique et de me peindre des Titans, des cyclopes et des nymphes sur tout le corps, à la queue de vache. Je hurle sans un son que je veux faire de moi une œuvre d’art, même éphémère. Ce hurlement, c'est ma frousse de devenir folle ou invisible aux yeux du monde. Je veux garder une trace du déchet, rendre un dernier hommage à mon destin de poussière. Je veux perpétuer par delà les siècles mon insignifiance, afin qu'elle s'imprime dans le cœur des fossiles.
   Et pourtant, comme cette terreur au bord de la tombe est divine.
   Alors tout doucement je me laisse glisser dans l’épouvante dont je suis devenue l’enfant.
   Je jouis.
   Mais j’ai très mal.
   Ah mauvais, mauvais, mauvais !
   Les voici qui déboulent à leur tour, arrogants et altiers : les monstres !
   Je les connais tous par cœur ces PITOYABLES DÉBILES ! Leurs langues brûlantes, leurs caresses glaciales ne me terrorisent plus. Ce ne sont que de pauvres chimères qui s'ignorent : gobelins, pythons, furies,  pataugeant dans un conte à dormir debout.
   Je fais semblant d’acquiescer à leur sinistre terreur.
   Hello, les trous-du-cul !
   Entre deux rires moqueurs, je les provoque. Je danse au sommet de ma vie sur le fil de la mort. Je les toise droit dans les yeux, et je m'esclaffe : vous n’aurez pas ma peau, je vous encule tous jusqu’au dernier.
   Que j’ai mal, mon Dieu !
   Que j’ai mal !
   
   Maman, papa, et toi mon frère aimé, par pitié ne jugez pas le piteux phénomène que je suis devenue. J'ai encore en moi la passion de vivre, des fleurs de beauté à offrir, je vous le jure. Je ne serai plus qu’amour et pénitence. Un monstre de pénitence !
   C'est pour cela que demain, il ne faut pas que mon cœur saigne.

   Oh, tu es venu toi aussi ? Tu finis toujours par arriver. Aide-moi, je t’en supplie, aide-moi. Tu as toujours été si bon avec moi.
   Tu t’es foutue dans une sacrée merde, Rebecca chérie !
   Oui, j’ai été très vilaine. Je suis encore si petite, si petite. Je n’arrive pas à grandir.
   Écoute-moi, impératrice des idiotes !
   Oui, je t’écoute, mais agis vite, je sens la sidération qui me dévore le  cœur !
   Si tu veux t'en sortir, contente-toi de répéter après moi...
   Tout ce que tu voudras ! TOUT ! Je peux même te sucer la queue, les burnes et le cul !
   Je n’ai nul besoin de ta luxure, petite salope. Ta souffrance est mon unique jouissance. Répète ceci : Maintenant, je suis prête à prier le diable et sa verge rutilante. À m'enduire les veines de son sang méphitique. À m'empaler sans fin sur sa herse mutilante. Pathétique humaine, je me sens prête aux pires accès des paludiques !
   Putain, que ta voix est douce, Prince, brillante comme une aiguille !
   Ne me flatte pas, pauvre raclure. Je n’ai que faire de tes éloges. Répète, je te dis...
   Maintenant, je suis prête à prier le diable et sa verge rutilante. À m'enduire les veines de son sang méphitique. À m'empaler sans fin sur sa herse mutilante. Tragique humaine, je me sens prête aux pires accès des paludiques.
   Et encore ceci, répète : Partout, je chanterai les proverbes de Satan comme bon me chante. Je vanterai tous les baisers/brasiers qui me déchiquettent au-dedans. J’instruirai les médiocres du feu de Thanatos comme bon me hante. En récompense, je ne veux pas que mon cœur saigne, car je ruisselle de vie au-dedans.
   Oui, je comprends tout. Soigner le feu par le feu ! Tu m’aspires, Prince ! Tu m'aspires. Je suis si faible. Je suis une pourriture. J'étais si mal cachée, mon Dieu, si mal cachée !
   Maintenant, je vais me montrer à toi ! Je pue un peu, je te préviens. Je ne me suis pas lavé le fion depuis vingt apocalypses.

   Et soudain, là dans l'horreur nocturne, je l’aperçois.
   Lui, le Tentateur !
   Je le vois. Sa face est terrifiante. Polymorphe, cette fois il a recouvert les traits d’une vieillarde en décomposition. Sous ses oripeaux verdâtres, il porte les cinq attributs reconnaissables entre tous : les cornes, le bouc, les sabots, les pattes velues et l’odeur pestilentielle.
   IL PUE !
   Il déroule alors au creux de mon lit un parchemin maculé de déjections où sont inscrits ses horaires en fuseau. Au bout de sa queue fourchue enroulée autour d'un pal d'acier, là, dans un crachat de fumée, sa torride tocante m'apparaît au museau. Et il me hurle, crachant sur moi son haleine méphitique :
   Je te donne une heure pour recracher ta saloperie au bout de ta langue indocile. Passé cet élégant délai, je ferai de toi une corde effilochée de violoncelle, sur laquelle, pour l'éternité, je passerai l'archet, ou selon, mes couilles brûlantes ou ma faucille.
   Oui, je la recrache pour toujours. Je te le jure, Prince des Ténèbres !
   Es-tu certaine de vouloir signer cet affreux serment qui me fait la part belle ? N'est-ce pas moi qui ait inventé le saint malheur des accidentés de l’amour ? Es-tu certaine de vouloir humilier ton âme dans la lie des poubelles ? N'est-ce pas moi qui ait inventé le bonheur pour le foudroyer en retour ?
   Oui, je le veux, Prince. Car demain, je ne veux pas, il ne faut pas que mon cœur saigne !
   Jure le moi sur la tête de ce que tu as de plus cher au monde.
   Je le jure sur la tête de Billy !

   Alors le diable ne dit plus rien. Mais il rit à gorge déployée. D'un coup, son effroyable montre s'insinue au fond de mes yeux, et au-dedans je peux voir des couleurs de supplice qui n'existent pas encore sur la Terre.

   Et puis, ces couleurs s'estompent lentement. Très lentement. Alentour, les odeurs de pourriture s’évaporent l'une après l'autre.
   Peu à peu, le plafond se rapproche de moi et mes murs me reviennent.
   Je suis de nouveau dans la chambre. Moi, Rebecca. Dans la chambre silencieuse. Je suis indemne. Je suis revenue indemne dans ce supportable tombeau des vivants.
   Doucement, je reprends mes esprits.
   Et je me souviens de toi. Et je suis bien. Simplement bien.
   Il n'y a plus que toi qui compte, mon amour.
   Plus que toi.
   Demain, je verrai ta bonté sortir du paradis.
   Demain, j’irai récupérer mon âme au vestiaire et je sauverai la tienne. Je te porterai sur mon dos jusqu'au bout du monde. Et je marcherai pour toi sans répit, à travers les déserts, les lacs, les montagnes.
   - En attendant, est-ce que tu sens ma main qui caresse tendrement mon ventre ?... Réponds-moi, s'il te plaît !... Est-ce que tu entends ma voix ?... Allons, donne un petit coup de pied dans le ventre de maman, Billy !... Juste un petit coup de pied... Pour me dire que tu m'as tout pardonné !
   






« Modifié: 19 septembre 2020 à 03:58:27 par kokox »

Hors ligne Champdefaye

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Re : La Course du Dragon (Contenu explicite)
« Réponse #1 le: 20 mars 2016 à 09:05:04 »
Très difficile de commenter un texte comme celui-là.
D'habitude je commence par les détails : une ou deux fautes de frappe ou d'orthographe, deux répétitions, une ou deux maladresses à mon sens, une obscurité ...
Mais là, rien. Pas une faute, rien à se mettre sous la dent, rien pour s'échauffer. Il faut rentrer directement dans le texte.
Dire que malgré sa longueur, son foisonnement et sa densité, je l'ai lu d'une traite, sans difficulté, mais un peu dans le brouillard quand même. C'est d'ailleurs une partie de ce qui fait son intérêt. Qui est cette Rebecca, à qui parle-t-elle, qui est ce Billy à qui elle raconte sa rédemption avant de lui dire son histoire, tout d'abord presque sous la forme d'un journal, le journal d'une descente aux enfers, mais d'une descente terminée suivie de cette rédemption qu'elle raconte à Billy ?
Et puis cette brutale envie de femme enceinte (où le mot enceinte passe inaperçu, comme s'il faisait partie d'un cliché). Et c'est une nouvelle descente, décrite de façon délirante mais plus détaillée, plus précise, méticuleuse, presque technique, à faire peur aux innocents.
Puis le calme revient et on comprend qui est Billy, que cette Rosemary était enceinte de ce diable de Melchior. Et que Billy n'a pas pardonné.
Prenant, dramatique.
Beau texte.

Hors ligne kokox

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Re : La Course du Dragon (Contenu explicite)
« Réponse #2 le: 20 mars 2016 à 13:05:29 »
Merci Champdefaye pour ton touchant commentaire.
Oui, un texte âpre, gris/noir/blanc, inspiré c'est certain par ce que tu sais de ma fille (qui n'est pas une droguée, je tiens à le préciser pour ceux qui liront ces lignes).
Je suis donc pour l'heure dans la transposition, je ne peux en parler autrement. C'est une maladie terrible qui aspire tout autour d'elle. Comment parler, comprendre cet état énigmatique de quasi possession ? La médecine bute encore. L'entourage subit tout de plein fouet. Heureusement que la littérature offre des manières de catharsis pour se délivrer parfois de ce mal ambiant, trop lourd à porter pour un seul homme.



Bien à toi !
« Modifié: 12 janvier 2018 à 14:10:40 par kokox »

Hors ligne Alan Tréard

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Re : La Course du Dragon (Contenu explicite)
« Réponse #3 le: 20 mars 2016 à 14:23:21 »
Bonjour kokox, je viens de lire ton texte et je l'ai trouvé très bien construit, c'est solide.

La narration fonctionne très bien, on est tiré jusqu'à la fin.

Tu parles d'un sujet que l'on connaît peu, tu décris la détresse d'une jeune femme avec sérieux et précision. C'est une vraie démarche d'auteur pleine de mérite. J'ai trouvé l'ensemble du texte fluide, si ce n'est la transition entre la partie en italique et la seconde partie qui m'a semblé peut-être un peu abrupte.

On a pitié pour cette jeune femme, on voudrait que ce ne soit qu'un cauchemar, un mauvais rêve.

Autre chose, je pense que tu aurais pu encore approfondir le profil psychologique des personnages, notamment celui du drogué ou du psychiatre, parce que tu présentes des personnalités fortes et qu'on a envie d'en savoir plus pendant la lecture. Je pense qu'il y a moyen d'accrocher encore notre lecture avec ces personnages secondaires, tu tiens une bonne piste selon moi.

Voici pour ma lecture, merci pour ce texte dans lequel j'ai trouvé, au-delà du sujet principal, une forme de grande question sur notre actualité et sur notre société dans ce qu'elle a de non-dits.
Mon carnet de bord avec un projet de fantasy.

Hors ligne kokox

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Re : La Course du Dragon (Contenu explicite)
« Réponse #4 le: 20 mars 2016 à 16:16:18 »
Merci bien mister Alan pour ton instructif et gentil commentaire.

Oui, tu as tout à fait raison la transition est abrupte entre les deux parties, mais élaborée à la fois intuitivement et, pourrais-je dire, sciemment.
J'ai pour habitude d'écrire d'instinct, en puisant au pollen de l'empathie avec mes personnages, sans préétablir de plan précis.
Il y a eu deux moutures sur ce texte. Dans la première, le protagoniste était un jeune homme et je tentais de décrire à la manière d'un entomologiste la routine, les sensations progressives de son shoot. Mais, au moment de sa "descente", je me suis retrouvé bloqué, sans chute véritable, et je suis parti alors sur un affreux compte-à-rebours déglingo-poétique (la tocante du diable) sans savoir réellement où cette chute aux enfers me mènerait. Bref, j'en étais glacé moi-même et à deux doigts de tout jeter à la poubelle.
Par je ne sais quelle inspiration (du moins en faisant mine de l'ignorer comme expliqué plus haut à Chamdefaye) j' ai alors switché ce jeune homme en jeune femme, et soudain tout s'est éclairé. La voix presque plaintive de petite fille de la mère et la voix plus rebelle, plus fiévreuse, plus clinique de la droguée ont commencé à tinter à mes oreilles. D'où cette disparité de ton quelque peu brutale, partant de ce principe que lors d'une même journée plusieurs voix peuvent très bien parler à l'intérieur de nous, la voix de notre fragile normalité et la voix plus désinhibée de nos excentricités, de notre folie douce ou aggravée.
Quant à approfondir le profil psychologique des personnages secondaires, j'entends bien ta remarque, mais je trouvais que j'étais déjà un peu long et qu'il était temps pour moi de lâcher prise avec cette nouvelle qui m'a malgré tout retourné un peu les tripes en l'écrivant.

Bien à toi !
« Modifié: 20 mars 2016 à 16:24:33 par kokox »

Hors ligne Kanimp

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Re : La Course du Dragon (Contenu explicite)
« Réponse #5 le: 05 avril 2016 à 22:41:09 »
Dans le cadre du défie MDE 2016 « Un texte en page 3 de sa section ».

Citer
Qui connaît la Moldavie, à part les Moldaves les plus instruits ?
Je connais la réponse. Les moldaves non instruits. Il te faut changer la phrase.

Je suis un peu désarçonner par ce texte.
Il commence par un long monologue qui se lit facilement et possède une grande dynamique. Mais je n’y suis pas plus réceptif que cela.

J’ai décroché dans la seconde partie. Il me semble qu’il y a des dialogues au milieu de phrases de descriptions. Ce qui m’a gêné, où l’absence d’aération ne m’a pas aidé.

Au final, je suis mitigé. Je ressens la puissance du texte et dans le même temps il me laisse de marbre.

Intéressé par Star Citizen. Utilisez le code STAR-6JJV-BSWP pour obtenir 5000 UEC.

Hors ligne kokox

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Re : La Course du Dragon (Contenu explicite)
« Réponse #6 le: 06 avril 2016 à 02:31:33 »
Salut Kanimp,

En général, je méfie toujours des gens qui emploient cette expression : "Ca me laisse de marbre".
Soit ils ont un problème de tension artérielle et peuvent claquer devant vous à tout instant. Soit, ce peut être atavique, mais ils sont nés avec le coeur froid !
Et puis, je préfère nettement les gens qui disent "Je n'ai pas aimé, voire, je me suis emmerdé à la lecture !".
Etre mitigé, ça fait bizarre, tu ne trouves pas ? Rien qu'à l'oreille ! C'est comme si tu te présentais devant moi et que je te disais : "Je suis mitigé, je crois bien que je n'aime que la moitié de tes yeux !". Ca ne te ferait pas un peu drôle d'entendre ça, au fond de tes pensées marmoréennes ?   ;)
Ne m'en veux pas plus que cela au final. Pour moi aussi, c'est atavique. Ma mère me disait toujours : "Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée, sinon ça fait des courants d'air !".

Bien à toi !
« Modifié: 06 avril 2016 à 02:36:47 par kokox »

Hors ligne extasy

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Re : La Course du Dragon (Contenu explicite)
« Réponse #7 le: 06 avril 2016 à 02:47:16 »
Bordel. Mais où as-tu appris à écrire comme ça ? Qu'est-ce que je pourrais bien laisser en commentaire après un tel texte ? Quelle maîtrise putain, quelle élégance, et combien il est facile de te lire !
J'ai peut-être eu quelques soupçons d'hésitation par-ci par-là vers la première partie, mais si infimes que je n'en garde plus de souvenir, surtout qu'à chaque paragraphe, sans qu'on s'y attende, boum, une formule grandiose fait oublier tout le reste !
Coup de cœur pour moi, pas un instant je ne me suis ennuyé ni senti le temps passer. Et quelle chute ! Billy ! Je n'ai aucune critique constructive à te faire, à part ces menus détails :

Citer
J'ai beaucoup réfléchis

réfléchi ?
Citer
c'est ma petite superstition.    La prière !
Pourquoi ces trois espaces en plus ?
Citer
Mais il rit, à gorge déployée.    Son effroyable montre s'insinue dans mes yeux
Idem.

Merci pour cette lecture !

Edit : je n'avais pas lu les commentaires. Pour ce que tu dis d'un peu plus personnel, je vous souhaite bon courage.
« Modifié: 06 avril 2016 à 04:08:16 par extasy »

Hors ligne JigoKu Kokoro

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Re : La Course du Dragon (Contenu explicite)
« Réponse #8 le: 06 avril 2016 à 15:27:58 »
Bon....

Le titre ne m'avait pas parlé mais après la lecture je le comprends bien mieux (riding the dragon, la première prise, celle qu'on cherche toujours à retrouver). Je suis venu lire ce texte après la publication au coup de coeur d'Extasy et je dois dire qu'il est magnifiquement... non horriblement dur mais beau mais laid.... ahhh bref j'ai adoré mais j'ai envie de pleurer  :s

Cette histoire, retranscite de l'intérieur est très forte avec une très belle dynamique, on y est, on le ressent, on se perd avec cette femme. On souffre, on se dégoute, on partage son trip et sa descente aux enfers. Arriver à la toute fin, alors qu'on a déjà bien souffert, on prend alors une énorme claque supplémentaire rajoutant à notre malaise.  :-\

Je te félicite pour ce texte empreint d'une telle intensité très bien écrit.  :)

On laisse souvent un morceau de soit dans tous ce que l'on écrit. Sans pour autant parlé de vécu où autre, on va parfois plongé dans nos sentiments les beaux ou les plus noirs pour donner une certaine véracité, un certain écho à nos histoires. J'imagine très bien comment tu a du ressortir de ta propre descente aux enfers. Bon courage à toi, j'ai fais récemment cette expérience de plongée en noirceur ;)
Ningen soto, bakemono naka....
"L'amour et la haine sont les deux faces d'une même pièce qu'il est bien trop aisé de retourner..." - JK

Hors ligne Tome Pie

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Re : La Course du Dragon (Contenu explicite)
« Réponse #9 le: 06 avril 2016 à 15:41:21 »
C'est vrai qu'il est sacrément bien écrit ton texte, le style est juste parfait à mon goût, ultra dynamique, y a rien à dire là dessus, ni sur le récit d'ailleurs, tout est prenant et l'univers de la drogue, c'est à coup sûr un univers qui me parle et qui prend systématiquement! et tout se déroule naturellement, nulle part où ça rame, c'est aussi propre qu'une aiguille stérilisée!

Hors ligne Scapula

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Re : La Course du Dragon (Contenu explicite)
« Réponse #10 le: 06 avril 2016 à 15:48:42 »
Bonjour kokox,

Je n'ai également aucune remarque à te faire sur la forme, ainsi je ne parlerai que de ton texte en lui-même.
L'écriture est méticuleuse, les mots sont forts, les métaphores bien employées. J'ai ressenti une empathie assez exceptionnelle envers Rebecca, du moins pour un texte court. Dès le début, le décor est posé, le ton est donné, et pourtant... Pourtant, au fil du texte, j'espère que les malheurs n'arrivent pas, ou pas trop, même si je sais que ta protagoniste n'y échappera pas. Avec ce discours plein de bonne volonté, j'ai quand même espéré qu'elle s'en sorte.

La deuxième partie du texte m'a vraiment saisie. Tu parlais de tableau ; voilà comment j'ai perçu la scène. Un tableau sombre et chaotique, avec des éclats de couleur vives qui agressent la rétine. Des couleurs vives, et violentes. J'ai trouvé ce passage si triste ! Tu alternes l'exultation, le remord, la terreur, le soulagement, la honte... Tout se mêle, tout se répond, et tout est clair. Je te félicite, il faut vraiment avoir du talent pour transmettre des émotions comme tu le fais.

J'ai également eu un gros coup de cœur pour la chute, je ne m'y attendais pas. La peine éprouvée pour Rebecca n'était qu'un avant-goût de celle qui m'a giflée lorsque j'ai découvert l'identité de Billy.

Je me pose juste une question par rapport à ta protagoniste : Est-ce son trouble bipolaire qui a contribué à cette chute, ou la prise des comprimés de lithium ? Ne connaissant ni ce trouble (enfin, disons à peine) ni le traitement, j'aimerais savoir ce que tu as imaginé.

Bonne continuation  :).
"Les grilles s'ouvraient sur mille rosiers rose pâle, sur de hautes falaises inclinées d'ormes, de frênes et de marronniers ensoleillés, et un ciel bleu, ô combien bleu". Jonathan Strange & Mr Norrell.

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Re : La Course du Dragon (Contenu explicite)
« Réponse #11 le: 06 avril 2016 à 18:31:21 »
Merci dans l'ordre à Extasy, Jigoku, Tome Pie et Scapula pour votre lecture et vos chaleureux commentaires.
Je ne désire pas faire pleurer dans vos chaumières, mais je traverse actuellement une période familiale des plus difficiles et "engloutissante", en raison de l'anorexie de ma fille, Nina, 18 ans (malade depuis 11 mois, hospitalisée depuis 6). La résultante de cette épreuve est que mes textes sont devenus depuis quelques temps nettement plus viscéraux, plus teintés de souffrance, de compassion, mais aussi de déchirante incompréhension.
Je n'ai pas pour habitude de m'épancher comme cela en public, mais puisque j'ai le coeur en plein dedans, il me devient de plus en plus pénible de faire celui qui ferait comme si de rien n'était.
Pour ceux que cette maladie intéresserait, (sans pour ma part aucune volonté de voyeurisme ni de mendier pitié), ils pourront s'ils le souhaitent lire "La Rose Eternelle", une transposition que j'ai faite au sujet de cette pathologie terrible, alors que je ne me sentais pas encore le courage de nommer les protagonistes par leur nom, que j'idéalisais encore un peu ce qui me touchait directement de plein fouet.
Mais ils pourront également lire le "Journal d'une Disparition" qui relate cette fois de manière beaucoup plus crue et frontale la "dépose" de ma fille, lors de son premier jour à l'hôpital psychiatrique Mutualiste de Montsouris.
Bref, loin de moi l'idée d'inonder MDE, de façon épisodique et mélodramatique, de mes tracasseries du moment (nous en vivons tous un jour ou l'autre, je ne suis pas dupe). Aussi, je m'arrêterais là, je le promets ! Car il est grand temps pour moi de retrouver un peu de sourire dans mes textes, même si ce sourire grince un peu, il est encore vrai, aux commissures.

Bien à vous tous !
« Modifié: 06 avril 2016 à 18:33:43 par kokox »

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Re : La Course du Dragon (Contenu explicite)
« Réponse #12 le: 06 avril 2016 à 22:40:20 »
Je souhaite souhaite tout le courage du monde kokox, à toi et à ta fille, et un bon rétablissement :calin:

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Re : La Course du Dragon (Contenu explicite)
« Réponse #13 le: 06 avril 2016 à 23:36:23 »
:calin: :meeting: Pour toi et ta fille Kokox  :meeting: :calin:
Ningen soto, bakemono naka....
"L'amour et la haine sont les deux faces d'une même pièce qu'il est bien trop aisé de retourner..." - JK

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Re : La Course du Dragon (Contenu explicite)
« Réponse #14 le: 07 avril 2016 à 06:23:47 »
Extasy, JigoKu, je n'écris absolument pas pour me faire plaindre (moi ce que je vis n'est rien en regard de ce qu'endure ma fille) mais sachez cependant que je suis très touché par vos attentions !

Bien à vous !
« Modifié: 07 avril 2016 à 06:38:06 par kokox »

 


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