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Auteur Sujet: La fête du bureau [ contenu sexuel explicite ]  (Lu 2047 fois)

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La fête du bureau [ contenu sexuel explicite ]
« le: 26 janvier 2020 à 16:27:55 »
Bonjour à tous,

voici un petit texte. Je sens qu'il n'est pas abouti, malgré le temps passé à le travailler. J'ai pourtant du mal à le ranger dans un coin de mon pc et passer outre. J'ai bien envie de le retravailler. Donc si vous avez des commentaires n'hésitez pas ! J'encaisse plutôt bien les critiques, donc ne retenez pas vos coups.


La fête du bureau


Monique
— Je voudrais voir le directeur, s’il-vous-plait.
Un jeune homme souriant se tenait devant moi. Il s'appuyait avec nonchalance d'une main à mon bureau, l'autre enfilée dans la poche de son jeans… Si l'on pouvait appeler ça un jean! Les trous occupaient plus de surface que le tissu ! Je ne l'avais pas entendu arriver et tout laissait penser qu'il n'avait pas pris la peine de sonner.
—  Vous avez rendez-vous ? 
— Je ne pense pas que ce soit nécessaire, répondit-il en se penchant un peu plus vers moi, ses yeux noirs plongés dans les miens. Son sourire s'élargit plus encore, découvrant des dents très blanches. Carnassier. « Je suis sûr qu'il saura trouver un moment pour moi, malgré son emploi du temps chargé. » Et moi, ça m'étonnerait fort qu'Hervé reçoive un voyou de ce genre.
—  Je vais voir ce que je peux faire pour vous, Monsieur… ?

Hervé
—  Denys Ambroise ?... Jamais entendu parler ! Faites-le donc entrer, puisque vous avez été si quiche de lui dire que j'étais libre !
Monique sortit avec son air pincé que je détestais tant. Je la flanquerais bien à la porte, mais elle fait son taf. Je ne sais pas comment elle fait avec son air de vieille fille gourde pour ramener autant de contrats, celle-là ! Un vrai mystère ! Je vais devoir me la coltiner jusqu'au bout. Ce n'est pas faute de recevoir des tas de CV de jeunes commerciales drôlement mieux roulées. Mais rien à faire. Pas de budget.
Elle revint suivie d'un drôle de type aux cheveux longs et un sourire mielleux à attraper des mouches avec. Le gars se laissa tomber sans-façon dans le siège en face de moi.
—  Asseyez-vous, je vous prie, fis-je. 
Ces mecs-là, je connais, et il vaut mieux les cadrer tout de suite, leur montrer qui commande.
—  Vous êtes ? dis-je en faisant mine de lire un document sur mon bureau. Le gars eut un petit sourire ironique, allongea le bras vers le bureau et saisit MON presse-papier.
 — Denys Ambroise, nouveau responsable des Ressources Humaines du groupe Omega-Zeta, dont la Chronos fait partie. Je fais le tour des boites du groupe, histoire de rencontrer tous les employés personnellement. Je resterai ici toute la semaine.
Il avait fait tomber ces mots d'un trait,  sans lâcher des yeux le bibelot qu'il retournait dans tous les sens d'un air ravi, comme s'il était déjà chez lui. Gonflé le gamin ! Pour qui se prenait-il avec sa chemise ouverte, le torse à l'air, épilé comme une gonzesse !
—  Amusant ce gadget en forme de bouteille de Guinness. Il faudra que j'en trouve un ! dit-il en le reposant finalement sur mon bureau. Il lorgna l'étagère des whiskies derrière moi, ceux que j'offre aux clients à la signature d'un contrat, dans les petits verres en cristal, pour les faire sentir importants. Tu peux toujours courir, mon gars.
—  Vous prendrez bien un café ?
Touché. Il grimaça et répondit:
— Je n'en bois jamais d'habitude, mais pourquoi pas, puisque vous me l'offrez si aimablement.
Je composai le numéro de la stagiaire.
— Julie, deux cafés ! Rapidos cette fois, je les veux bien chauds.
Je me retournai vers Denys, savourant ma petite vengeance.
—  J'espère qu'elle ne mettra pas deux plombes à arriver. Le café tiède du distributeur est vraiment dégueulasse !

Julie
Mais qu'est-ce que je fais ici ? Je me le demande un peu plus chaque jour. Et dire que j'étais si contente d'avoir décroché une place dans cette multinationale, sure d'avoir enfin laissé derrière moi les années de vexations de l'école. Et je me retrouve dans cette succursale commerciale minable.
 « C'est une occasion en or pour toi, tu vas apprendre énormément », m'avait-dit le professeur d'économie. Et j'apprends en effet : à faire des photocopies, à supporter sans ciller une collègue grincheuse et les réflexions du chef sur mes kilos de trop. Voilà, je suis parmi des adultes, et dans le monde du travail de surcroîts. Et tout est exactement comme au lycée. Sauf qu'en plus il faut que je serve le café. Cette fois-ci, j'aurai au moins reçu un merci. Pas de la part de Bouillon, évidemment.
Thomas arriva en trombe, manquant de renverser mon plateau.
— Désolée Julie, je ne t'ai pas fait mal au moins? Bouillon est dans les parages ?
— Dans son bureau avec un visiteur. Monique n'a pas réussi à le refouler.
— Étonnant de sa part.
Il hocha la tête, incrédule, puis reprit:
—  Il n'a pas remarqué mon retard ?
— Je ne crois pas. Il venait de rentrer de la pause déjeuner.
Thomas poussa un soupir de soulagement.
—  J'étais avec Léa chez le fleuriste et je n'ai pas vu le temps passer.
— Ça avance, ces préparatifs ?
Nouveau soupir.
—  Tu n'as pas idée de la complexité d'organiser un petit mariage simple. C'est comme si le moindre détail prenait une importance cosmique, et que le choix d'une nappe blanche ou crème pouvait déterminer la réussite ou non de cette journée. Parfois, je me demande si nous n'aurions pas mieux fait de rester fiancés toute la vie.
J'aime bien Thomas. À dire la vérité, c'est le seul qui rende mes journées supportables. Il a toujours un mot d'encouragement et ne me traite jamais avec hauteur. Sa fiancée a l'air d'un vrai dragon. Dommage, il ne mérite pas ça.
—  Il en a pour longtemps à ton avis ? reprit-il.
— Aucune idée.
— Tu as vu le visiteur ? Il est comment ? Un gros client potentiel ?
C'est le plus bel homme que j'ai jamais vu et quand sa main a frôlé la mienne en prenant la tasse de café, un frisson m'a parcourue toute entière.
—  Non, je ne crois pas. On dirait plutôt une Rockstar ! Tu sais, jeune, les cheveux longs, chemise noire et santiags léopard.

Monique
Dans mon sac à main le téléphone se mit à vibrer. Je tressaillis. Dernièrement il n'annonçait jamais rien de bon ! Je fus tentée de l'éteindre sans regarder d'où provenait l'appel : après tout j'étais au travail. L'engin continuait de s'agiter et c'est avec résignation que je répondis.
—  Madame Foulque ? Monsieur Jardin, directeur des Blés Dorés à l'appareil.
Ça commençait mal.
— Madame Thérèse est sortie de l'enceinte de l'établissement aujourd'hui mais elle n'a pas réussi à retrouver le chemin. C'est un passant qui l'a trouvée à presque trois kilomètres de là. Elle errait sans but, les genoux en sang. Elle est sans doute tombée dans un talus. Son état s'est beaucoup aggravé ces derniers temps.
Il marqua un temps d'arrêt avant de continuer d'une voix désolé : « Je crains que nous ne puissions plus la garder dans notre établissement. »
— Mais vous ne pouvez pas nous la renvoyer dans cet état ! Comment voulez-vous que j'en prenne soin, si vous-même n'y parvenez pas !
J'avais presque crié. Je sus à sa voix qu'il avait perçu mon affolement lorsqu'il me répondit :
— C'est tout à fait hors de question, rassurez-vous ! Mais vous conviendrez avec moi qu'elle n'est plus assez autonome pour vivre dans nos mini-appartements. Elle a besoin, pour sa sécurité, d'une structure spécialisée. Je peux vous conseiller quelques très bonnes maisons de retraites avec un suivi médical très performant. Je vous suggère également d'entamer rapidement une procédure de mise sous tutelle. Elle n'est plus en état de gérer ses comptes.  Sa voix était calme et ferme mais manquait de chaleur. Une voix professionnelle, habituée à gérer des patients difficiles et peu raisonnables.
J'ai bafouillé quelques remerciements avant de raccrocher. Je savais qu'il avait parfaitement raison et que je n'avais que trop tardé à prendre en main la situation. Il me fallait affronter la réalité, aussi bouleversante qu'elle fût : Maman était en train de disparaître dans les brumes de l'Alzheimer.

Thomas
Une main se posa sur mon épaule. Je me retournai et aperçus Denys.
— Thomas, est-ce que je peux te demander un service ?
Il avait toujours l'air déplacé dans les couloirs étriqués du bureau, comme s'il occupait tout l'espace. Non qu'il fût très grand, mais il émanait une vitalité disproportionnée par rapport à tout ce qui l'entourait. Dès le premier jour il avait tutoyé tout le monde, même Bouillon, sans sembler remarquer ses regards torves. Monique avait toujours un peu l'air outré devant ses mises extravagantes, mais dans l'ensemble, nous nous étions tous habitués rapidement à le voir faire irruption dans les bureaux en chantonnant.
— Bien sûr Denys. En quoi puis-je t'être utile ?
— J'aurais besoin d'un coup de main pour arranger la salle, vendredi, avant la soirée. Tu es libre après le bureau ? Ça ne sera pas long et nous aurons même le temps de prendre un apéro avant que les autres n'arrivent.
La fameuse soirée de Denys. Il en parlait depuis trois jours avec les yeux brillants comme un enfant. Honnêtement, je ne voyais pas comment une soirée au bureau aurait pu améliorer le climat entre nous quatre, et je voyais dans les regards de mes collègues qu'ils partageaient mon avis. Mais personne n'avait eu la force de s'opposer à l'enthousiasme débordant de Denys.
Léa avait violemment protesté quand je lui avais annoncé que je serais pris vendredi.  « À un mois du mariage et avec tout ce qui reste à faire ! Tu as perdu la tête ! »
Je lui avais alors promis de passer retirer les alliances et payer le catering avant d'aller à la soirée.
— Alors, tu marches ? demanda-il en me tendant le poing. Ce jour-là, il portait avec un naturel déconcertant une hideuse chemise imprimée de feuilles de lierre. On sentait qu'il n'avait jamais subi aucune contrainte dans la vie, et surtout pas celle du regard des autres. J'enviai sa liberté et son aplomb. Je n'hésitai qu'un instant avant de lui répondre. Joailler ou bière entre mecs, c'était tout vu.
— Tu peux compter sur moi, répondis-je en en cognant mon poing contre le sien.
Léa allait me tuer, ou pire, me le faire payer toute la vie.


Hervé
Je n'en peux plus de le voir branler dans les couloirs. Ce mec ne fait rien de la journée. Responsable des Ressources Humaines … Une bonne gâche, ouais. Ça discutaille avec les employés et ça organise des "party".
 « Tu comprends, Hervé, les sessions de team building sont fondamentales pour souder une équipe » qu'il m'a dit.
 — J'ai mes méthodes. Un bon coup de pied au cul, oui !
—  Moi aussi et tu seras surpris du résultat.
— Bon courage ! Je te parie que tu ne tireras rien de ces trois mollassons. Je veux dire… Au niveau commercial, ils ne sont vraiment pas des tueurs.
 — Qu'est-ce qu'on parie ?
— Je ne sais pas, moi ! Ce que tu veux ! Cent balles ? Une bouteille de champagne ? Mon presse-papier ?
— D'accord pour le champagne, mais que ce soit du bon, qu'il a répondu avec un sourire à trente-deux dents.

Julie
Bip Bip Bip… Il me fallut quelques secondes pour comprendre d'où provenait le son. L'alarme continuait de sonner, me vrillant le crâne. À tâtons je cherchai du bout des doigts le téléphone et l'éteignis. J'étais nue dans mon lit…et seule… évidemment. Je suivis des yeux la ligne que mes vêtements traçaient au sol de la porte d'entrée à mon lit. Ils ne me mèneraient pas plus à mon Prince Charmant que les miettes de pain du Petit Poucet à sa chaumière. Le Prince Charmant. Chevaleresque, fort, sage, juste… et barbant. Hier, j'en rêvais. Plus aujourd'hui. La perfection était décidément surestimée. Sur ma table de nuit était posée une assiette dans laquelle trônait une belle grappe de raisin rouge. Un petit mot l'accompagnait.
Merci pour cette grisante nuit d'ivresse et de plaisirs. A tout à l'heure.
Lorsque Denys m'avait invitée à dîner avec lui, la veille au soir, j'avais tout bonnement cru qu'il plaisantait. Je revenais des archives où Hervé m'avait envoyée classer la pile de documents en vrac qui devait trainer sur son bureau depuis des mois. J'avais perdu la cognition du temps dans la cave, et le bureau était vide lorsque j'étais remontée du sous-sol. Denys avait surgi de je-ne-sais-où les bras chargés de chaises et m'avait presque renversée. Prise au dépourvue, j'avais balbutié des excuses incohérentes, mais il n'avait rien voulu entendre.
— S'il-te-plait, Julie. Juste un petit resto tout simple. Je ne connais personne en ville et honnêtement j'apprécierais vraiment un peu de compagnie, après une semaine de repas en solitaire. Si cela te coûte tant, tu peux le considérer comme un rendez-vous de travail. Je suis sûr qu'Hervé sera ravi de recevoir ma note de frais et de te payer des heures sup pour diner avec moi », avait-t-il conclu avec l'expression de quelqu'un qui vient de jouer un bon tour.
Denys avait sans doute choisi le restaurant le plus élégant de la ville et je me sentis déplacée comme jamais avec mon jeans et mon vieux pullover informe. Denys marchait avec insouciance à mes côtés, parfaitement à l'aise dans son pantalon treillis. Le serveur fronça légèrement les sourcils en nous voyant arriver, mais sa professionnalité reprit le dessus immédiatement et il nous conduisit à notre table.
 —  Que désires-tu boire ?
— De… de l'eau… je pense. Pétillante. Ou bien… une bière peut-être ? ajoutai-je précipitamment devant sa mine déconfite.
— Quel dommage ! Monsieur, vous avez entendu ? Une bière pour mademoiselle et une bouteille de Côtes-de-nuits. Veuillez apporter deux verres s'il-vous-plait.
Je piquai un fard. Il devait vraiment penser que j'étais une enfant. Il sembla le deviner et se fendit en un sourire irrésistible.
— Excuse-moi de t'avoir forcée la main. Ce restaurant a une cave à vin exceptionnelle et je n'ai pas su résister à l'envie de te faire goûter une bonne bouteille… Surtout aux frais d'Hervé. C'est un véritable nectar, mais je n'insisterai plus. Je promets de ne rien te faire boire, manger ou faire faire contre ton gré.
Il avait mis la main sur son cœur et je ne pus m'empêcher de rire devant son air solennel.
— Bien. Maintenant que la glace est rompue, peux-tu m'expliquer comment une jeune fille intelligente a bien pu finir dans un trou comme la Chronos ?
J'ouvris la bouche pour répondre lorsqu'une merveilleuse créature se jeta à son cou.
—  Dionichou ! Quelle surprise !
— Épargne-moi la mise en scène, veux-tu ? dit-il avec humeur en se dégageant des bras qui l'enlaçaient. Qui t'envoie cette fois-ci ?
Elle eut un rire charmant et repoussa de la main une mèche qui lui était tombée dans les yeux. Elle était belle à couper le souffle dans sa robe de soirée rouge.
— Mais personne ! Tu me manquais ! Tout est si …  - sa bouche dessina une moue parfaite  -  … mortellement assommant quand tu n'es pas là ! Hephy est plus sombre que jamais, Ari est en mission quelque part en Afrique ou en Asie et les autres passent leur temps à se chamailler.
Elle ondula vers lui et roucoula :
— Viens avec moi, ce soir ! On fêtera ton retour à ta manière… ou à la mienne. Qu'en dis-tu ?  Sa poitrine se soulevait, haletante. Elle avança ses lèvres vers lui comme pour l'embrasser et s'arrêta à quelques centimètres du visage de Denis. Il ne compléta pas le geste et sourit d'un air narquois.
— Désolée de te décevoir, Dita, mais j'ai d'autres projets en tête.
Elle recula et leva le menton en signe de défi. Denys continua, sans paraitre remarquer le regard noir de son amie.
— Puisque tu as eu la gentillesse de te déplacer, je ne gâcherai pas ce voyage. J'ai un service à te demander.
Il lui susurra quelques mots si doucement que je ne pus en comprendre le sens. La jeune femme ouvrit de grands yeux.
—  C'est tout ? Tu ne veux pas non plus la lune ? Tu mesures les risques que tu me demandes de prendre ? S'il s'en rend compte, je serais grillée… littéralement !
— N'en parlons plus alors, coupa court Denys. Je pensais qu'un peu d'action t'amuserait. Mais si tu ne te sens pas de taille, aucun problème. Bon retour chez toi et à la prochaine.
Il fit un geste de la main pour m'indiquer :
— Quant à moi, comme tu peux le voir, je suis en charmante compagnie. Et avec ta permission, j'aimerais finir une soirée qui avait plutôt bien commencé avant ton interruption.
La superbe femme le foudroya du regard.
— Espèce de…de…
Outrée, elle se détourna de lui et c'est alors qu'elle s'aperçut de ma présence. Elle me fixa avec stupéfaction, comme si je venais d'apparaitre. Je souhaitai ardemment me dissoudre à l'instant. J'étais l'intruse. Je me levai d'un bond.
— Je… Je vais y aller. Merci Denys pour la soirée… mais…
— Non, ne partez pas, m'interrompit-elle. Denys a été parfaitement clair. Ses traits se détendirent et une fossette se creusa dans sa joue lorsqu'elle reprit en riant : « Hephy sera bien étonné de me voir rentrer si tôt. Pas de crise de jalousie ni de menaces ce soir ! Quel ennui ! » Elle fit le tour de la table, s'approcha de moi et me prit par la taille.
— Mais pas pour vous ! La nuit est jeune, et vous aussi ! Elle me dominait de toute sa taille et sa voix caressante me fit immédiatement oublier l'étrangeté de la situation. Elle déposa un baiser brûlant sur ma joue avant de chuchoter : « Vous avez ma bénédiction. » Elle se détacha de moi comme à regret et sortit sans un regard pour Denys, tandis que tous les hommes du restaurant se retournaient sur son passage.
Le rire de Denys éclata comme un torrent et brisa l'enchantement.
—  Un sacré numéro, n'est-ce pas ?
Je pris alors conscience de ma position : j'étais debout, droite comme un piquet, et je fixais la porte où la belle inconnue avait disparu. Autour de moi les serveurs avaient recommencé à circuler autour des tables, les fourchettes et les verres tintaient et quelques clients me dévisageaient d'un air goguenard. J'aurais dû rougir, bafouiller, baisser la tête et chercher à disparaître. Je ne fis rien de tout cela. Denys le magnifique avait repoussé une déesse pour moi. Les lois de l'univers s'étaient renversées et tout devenait possible. Un sentiment de profonde liberté m'envahit. Ce soir je pouvais être tout ce que je voulais et agir comme bon me semblait. La laine grattait ma peau et j'avais chaud. J'enlevai mon pullover d'un geste fluide, sans me soucier du débardeur qui me boudinait et me rassit.
—  C'est une de tes petites amies ?  demandai-je.
— Disons plutôt une très vieille copine parfois un peu envahissante. Tu l'as vue : elle adore être au centre de l'attention. Elle sait ce qu'elle veut et comment l'obtenir.
— Toujours ?
— Presque. Mais au final, c'est toujours elle qui gagne.
Denys allongea la main vers la bouteille et remplit son verre à ras-bord. Il ne sembla pas surpris lorsque je lui tendis le mien. Ses yeux brillèrent tandis que le Bourgogne emplissait mon verre.

Hervé
La première chose que j'ai vu en arrivant au bureau ce matin c'est un cul. Un beau cul bien rebondi.
« Hem ! Hem ! »
La fille, à quatre pattes sous le bureau s'est redressée et une cascade de cheveux blonds s'est déversée sur son dos. Elle s'est retournée. Putain, c'était Julie ! Elle avait les cuisses serrées dans un pantalon noir et les nichons qui débordaient d'un chemisier échancré. Deux melons bien lisses et blancs, si gros que mes mains n'auraient pas suffi à les contenir. Du genre de ceux que j'aimerais bien admirer de haut.
— Vous tombez bien Monsieur Hervé, qu'elle m'a dit avec une bouche en cul de poule, barbouillée de rouge. Elle tenait dans ses mains une pelote de fils électriques dont un des câbles, en tension, disparaissait derrière la table. « Je n'ai pas pu brancher l'imprimante. Le fil est emmêlé et je n'arrive pas à le décoincer. Pouvez-vous m'aider s'il-vous-plait ? Tenez l'extrémité du fil et ne le lâchez surtout pas. Je vais tirer tout doucement de l'autre côté. »
Moi j'ai pris le fil sans broncher, comme un couillon. J'étais littéralement scié. Un peu comme dans ces films à la con où la petite moche retire ses lunettes, se tartine un peu la gueule de fard et se pointe en mini-jupe, et tous en restent comme deux ronds de flan.
Elle s'est penchée à nouveau sous le bureau, me présentant à nouveau ses fesses sans vergogne. Qu'est-ce qui lui était arrivée depuis la veille ? Merde, on ne passe pas en une nuit de gamine bourgeonnante à femme fatale ! Sauf si… Et tout à coup j'ai compris. Elle avait baisé. Et toute la nuit même. Et elle en voulait encore, la garce.
— C'est bon, vous pouvez lâcher le fil ! J'ai fini.
« Et moi je commence ». J'ai allongé la main vers ses rondeurs ; elle s'est relevée d'un bond et m'a regardé comme un ver répugnant. Puis s'est marré, m'a cligné de l'œil et a quitté la pièce. Elle se foutait de ma gueule en plus !
Là-dessus est arrivée cette conne de Monique pour me demander si elle pouvait sortir plus tôt ce soir pour « raisons familiales » et j'ai vu rouge.
— Mais bordel de merde, un employé normal c'est trop demander dans cette baraque ? Entre le nigaud qui s'aplatit devant sa meuf alors qu'il n'a même pas encore la corde au cou, la petiote qui racole comme sur un trottoir, le zozo qui prend l'apéro toute la journée, et la vieille qui a toujours un pet de travers, on se croirait à l'asile, ma parole ! j'ai gueulé.
Elle n'a rien répondu et a décampé sans demander son reste.

Monique
Je marchai vite, la tête droite, pour ne pas m'effondrer devant lui. Trois pas encore, le couloir de droite et puis le "cagibi", un ancien bureau qui servait de fourre-tout où entasser tout ce que personne ne prenait la peine de jeter. Je refermai la porte derrière moi, me laissai glisser à terre, entre une pile de reçus et un arbre de Noël en plastique, et éclatai en sanglots. Hervé avait toujours su frapper là où cela faisait mal. Oui j'étais vieille. Pas assez pour être à la retraite, mais trop pour avoir encore le choix des options. Ma vie était toute tracée, mais pas dans le bon sens. Une succession de défaites jusqu'à la grande débâcle finale.
La poignée de la porte s'abaissa et la dernière personne au monde que j'aurais voulu voir entra. Le petit jeune des Ressources Humaines. J'espérais qu'il aurait le tact de faire semblant de ne pas voir dans quel état je me trouvai, mais, apparemment, la délicatesse n'était pas son fort.
— Comment ça va, Monique ? J'ai tout entendu. Je m'efforçai d'étouffer mes sanglots. Il se mit à rire. « Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'Hervé à le sens de la synthèse. Le zozo qui prend l'apéro toute la journée… C'est fort non ? » Je ne répondis pas. Il s'assit à côté de moi, à même le sol, et me tendit un mouchoir en papier.
— Je ne t'ai jamais considérée comme vieille. Mais ce que je pense n'a pas beaucoup d'importance, n'est-ce pas ? Il avait l'air sincère. « Il ne t'arrive jamais de penser à la Terre ? Les scientifiques disent qu'elle a 4,5 milliards d'années et qu'elle sera absorbée par le soleil dans un peu plus de 7 milliards d'années. Ça donne le vertige de contempler des chiffres pareils, non ? »
Je m'essuyai les yeux et me mouchai.
« Les éphémères adultes vivent à peine un jour, parfois moins. Il ne te viendrait pourtant pas à l'idée de penser le soir en les regardant voler au ras de l'eau : Tiens, un vieillard ! » Je ne voyais que trop où il voulait arriver.
— Je devrais donc me réjouir parce que ma vie est très longue par rapport à celle de l'éphémère ? Ou bien déplorer le fait de n'être qu'un épiphénomène pour la Terre ?
—  Je ne sais  pas.
Il se gratta la tête. « Je n'ai jamais été un très bon philosophe. Mais… » Il semblait chercher ses mots. « Mais tout chercher à classer et codifier, utiliser des échelles de grandeurs pour mesurer des expériences n'est pas la bonne manière d'appréhender le temps. On finit par oublier de vivre. »
Si jeune et si ingénu ! Je levai les yeux au ciel. Que pouvait-il savoir de la vie, lui qui avait à peine franchi les barrières de l'enfance ?
— Même quand le présent est un échec total ?
— Pourquoi un échec ?
— Un boulot de merde, un chef odieux, deux fils adultes qui ne m'appellent que lorsqu'ils ont besoin d'argent, une mère malade, pas de compagnon… Dois-je continuer la liste ?
Il dut percevoir toute l'amertume dans ma voix et resta en silence quelques instants.
— Monique, je peux te poser une question ? J'acquiesçais.
— Si tu pouvais réaliser un rêve — là, maintenant — et tout changer dans ta vie, que ferais-tu ?
Je haussai à nouveau les épaules. À quoi bon fantasmer sur ce que la vie ne m'offrirait pas. Il valait mieux serrer les dents et apprendre à vivre sans horizons et sans faux espoirs. Il releva doucement mon menton de sa main, me forçant à croiser son regard.
— As-tu confiance en moi ?
— Oui… Je crois.
Je ne mentais pas. Je n'aurais pas su expliquer pourquoi j'avais l'impression, à ses côté d'être plus vivante. Je sentais obscurément qu'il était plus solide qu'il n'en avait l'air.
 — Bien. C'est tout ce dont j'ai besoin.
Il rayonnait, et se mit à fouiller dans ses poches. Il en sortit un cachet à peine plus gros qu'un grain de riz.
— Avale, ça t'aidera à te détendre. Tu te sentiras tout de suite mieux.
— Qu'est-ce que c'est ? Je ne prends jamais de médicaments. Uniquement de l'homéopathie.
 — Ne t'inquiète pas. C'est naturel.
— De la valériane ?
— Oui… dans le genre. Fais-le fondre sous la langue.
Il avait l'air si enthousiaste que je n'eus pas le courage de refuser.
— Maintenant détend-toi et pense à quand tu étais petite, à ce que tu aimais le plus au monde.
Je m'exécutai docilement, comme si j'avais tacitement accepté les règles de son jeu en prenant la pastille. J'eus du mal à focaliser l'image d'une fillette et puis d'un coup je me vis… dans ma chambre d'enfant, une palette de couleurs à la main, en train de peindre. La chambre commença à tourner autour de moi comme une toupie. J'eus un instant de panique. Que m'avait-il fait prendre ? Je ne distinguais plus les murs de ma chambre qui défilaient de plus en plus rapidement et fermai les yeux un instant pour reprendre l'équilibre. Lorsque je les rouvris, je me trouvais au cœur d'un ouragan, avec ma palette comme seule bouée de secours. Je m'y accrochai de toutes mes forces. La palette enfla. Je ne parvenais déjà plus à la tenir dans mes mains. Elle s'élargit encore jusqu'à devenir mon horizon. La chambre avait tout fait disparu à présent. Je marchais sur une surface blanche et lisse; des lacs jaunes et des prés rouges s'ouvrirent au loin et avancèrent vers moi. Terrifiée, je me mis à courir dans la direction opposée. Les taches me poursuivaient, gagnaient inexorablement du terrain. Je discernais des ombres mouvantes sur leur superficie. Je courus longtemps sans autre espoir que de rester debout et résister. À bout de souffle je finis par tomber à genoux. Le rouge n'était plus très loin maintenant. Ce n'était pas un pré, comme j'avais cru, mais un gouffre qui se déroulait vers moi lentement, comme s'il avait la certitude de m'atteindre tôt ou tard. Il était si proche à présent que trois pas auraient suffi pour l'atteindre. Il n'était plus question de fuir, mais je ne voulais pas céder. Je me relevai avec effort et le toisai comme un adversaire. Il n'approchait plus. Il attendait. Vu d'en haut, il paraissait sans fond, et palpitait comme un énorme cœur. Je n'allais pas me laisser avaler passivement. Je pris une profonde inspiration et, avec un grand cri, m'élançai dans l'abîme. Les couleurs explosèrent comme une symphonie autour de moi. Je les respirai à plein poumons et les sentis couler en moi comme une force vivifiante. J'étais toute puissante à présent et je me mis à rire.

Thomas
Des nuages noirs s'amoncelaient sur la ligne d'horizon et un vent d'orage se mit à souffler avec force. Je n'étais pas fâché d'avoir terminé à temps. Je jetai un dernier coup d'œil satisfait aux cartons empilés dans l'enclos des poubelles avant de fermer la porte qui donnait sur la cour intérieure, et de retourner à la salle que Denys et moi avions préparée pour la fête durant les deux dernières heures.
— Tout est prêt. Il ne manque plus que les invité, dis-je en me détournant des deux tables nappées de blanc. Denys avait improvisé sur la plus grande des décorations sylvestres avec des branches de lierre qu'il avait coupées sur le mur de la cour et quelques pommes de pins de l'épicéa du jardin voisin dont les branches dépassaient du mur. La seconde table, selon toute évidence était destinée à devenir un support pour les assiettes et verres vides. Je me dirigeai vers Denys, affalé dans un grand fauteuil en acajou doré et velours rouge — une sorte de trône — qu'il avait déniché dans le réduit et installé en riant :
— Voici exactement l'accessoire dont j'avais besoin ! Votre cagibi est une inépuisable source d'émerveillement ! On y fait les rencontres les plus étonnantes !
Il avait ôté sa chemise, tout comme moi, pour travailler sans se salir et s'éventait négligemment  avec une serviette en papier, une jambe allongée par-dessus l'accoudoir. Il était longiligne, et ses muscles se dessinaient à peine sur son torse et son ventre. Il ne semblait pas particulièrement fatigué bien qu'il eut soulevé sans effort apparent des poids bien supérieurs à ce que sa silhouette présupposait. Il entrecroisa les doigts, étira les bras au-dessus de sa tête et fit craquer ses articulations avec affectation, les pectoraux ostensiblement contractés, sans me quitter des yeux. Un peu honteux d'avoir été surpris tandis que je l'observais, et mal à l'aise devant son air narquois, je saisis ma chemise et l'enfilai. J'avais transpiré et le contact du tissu amidonné sur ma peau me parut très désagréable. Il faisait lourd et humide, ce qui n'arrangeait rien. Une fois rhabillé, je me laissai tomber sur une chaise en soupirant :
— Je crois que je me suis fait avoir ! Je m'attendais à déplacer quelques chaises et installer deux ou trois coupelles de chips et cacahouètes, pas à déménager ! On peut dire également adieu à la bière au bar, ajoutai-je en jetant un coup d'œil à l'horloge au-dessus de la porte.
— Une bière au bar ? J'ai mieux que ça ! dit-il en se levant du fauteuil et en saisissant le magnum de Champagne qui trônait dans un seau à glace, en bout de table.
— Tu plaisantes ? C'est la bouteille du dessert ! On…On ne peut pas l'ouvrir maintenant, pas sans les autres !
— Et qui nous en empêche ? Nous l'avons bien mérité, ajouta-t-il en clignant de l'œil dans ma direction. Et d'un geste décidé, il fit sauter le bouchon et laissa mousser le liquide dans deux flûtes.
— Ton problème, reprit-il en me tendant un verre, ce sont les structures mentales et morales, derrière lesquelles tu te réfugies par paresse. Il se mit rire. « Le pire, c'est que tu penses ne pas avoir le choix. Je parie que tu te sens coupable de ne pas m'avoir empêché d'ouvrir la bouteille. »
Je ne répondis rien et avalai mon verre d'un trait.
— La révolte… C'est un bon début. Mais essaie de savourer le second verre, dit-il en me resservant, un demi-sourire aux lèvres.
J'eus envie de lui écraser mon poing dans la figure, et la violence de cet élan me surprit. Une lueur traversa les yeux de Denys, qui n'avait pas bougé d'un pouce et continuait à siroter son verre, et j'eus la sensation très désagréable qu'il lisait en moi. Nous bûmes en silence, face à face. Dehors, le vent sifflait et faisait cogner un battant du portail contre le mur d'enceinte, tandis que les premières gouttes s'écrasaient contre les vitres, comme si elles avaient été lancées horizontalement de toute la force d'une main invisible. La sonnerie de mon téléphone coupa net la tension et c'est avec soulagement que je traversai la pièce jusqu'au rebord de la fenêtre où je l'avais posé. Léa. Je soupirai et le regardai sonner sans me décider à décrocher. J'aurais pu réciter mot pour mot le sermon qui m'attendait. Lorsque le téléphone se tut enfin, je l'éteignis.
— Des problèmes ? demanda Denys.
— Non, juste ma fiancée qui voulait me passer un savon, pour avoir manqué certains rendez-vous qu'elle m'avait fixés.
— Ça commence bien !
— Quoi donc ?
— Le reste de ta vie… tu sais, jusqu'à ce que la mort vous sépare… etc.
— Qu'est-ce que tu en sais ? Il commençait à m'agacer sérieusement avec sa manie de tout tourner en dérision. « Léa n'est pas du tout comme tu l'imagines… Elle est juste… juste stressée par tous ces préparatifs. Lorsque le mariage sera passé, tout sera plus simple. »
— Trinquons alors à ton mariage et à une longue et heureuse vie de couple, dit-il en remplissant à nouveau nos flûtes. «… Si c'est le futur que tu veux. »
Du plus loin que je me souvienne Léa m'avait accompagné. Elle avait longtemps été ma meilleure amie, celle avec qui j'avais fait mes premières bêtises à l'école primaire, la confidente de mes déboires amoureux plus tard, et enfin ma colocataire à l'université. Il y a deux ans elle s'était présentée chez moi au beau milieu de la nuit, sa valise à la main, dévastée par la fin d'une relation, et je lui avais ouvert ma maison et mes bras. Elle s'était installée tout naturellement et lorsqu'elle m'avait rejoint dans mon lit quelques mois plus tard, je n'avais pu faire autrement que d'accepter l'évolution de notre relation. Ma vie sans elle était impensable. Léa voulait m'épouser, m'offrait son amour, une famille, une vie normale. De quoi Denys se mêlait-il donc, avec ses insinuations ? Un futur radieux m'attendait. Un bonheur lisse et sans faille. « Trop beau pour être vrai » ne pus-je m'empêcher de penser. Je portai la main à mon front. Je n'étais plus lucide et la tête me tournait. Je fis quelques pas en direction de la table.
— J'ai… J'ai trop bu. Il faut que je mange quelque chose.
Denys me saisit par le bras, me forçant à me retourner vers lui.
— Tu connais le dicton : "Ἐν οἴνῳ ἀλήθεια", ou comme vous dites ici : "In vino veritas".
Les évènements prenaient une tournure désagréable. J'essayai de me dégager, mais il me retint, posant ses deux mains à plat sur mes épaules.
— Laisse la vérité remonter à la surface.
— Je ne suis pas venu ici pour me prendre la tête, explosai-je, en saisissant ses poignets pour me libérer, mais il ne lâcha pas la prise.
— Au fond de toi, tu sais très bien qui tu es et ce que tu veux !
Son visage était tout près du mien.
— Admets-le.
Il desserra alors son étreinte et lâcha mes épaules. Je me sentis vaguement déçu, comme si j'eusse préféré continuer à lutter contre lui. J'attendis, les poings serrés, qu'il fît un mouvement. Denys ne bougea pas. Derrière lui, la pluie qui tombait à flot sur les fenêtres brouillait l'image de la rue. Je m'efforçais de ne penser à rien, de respirer, et de calmer mon cœur qui battait à tout rompre, mais ses mots avaient fait mouche. J'avais toujours trainé cette sensation d'étrangeté à moi-même. Je savais à présent que ma vie n'était qu'une imposture. J'eus envie de boire encore, de me soûler jusqu'à perdre connaissance.
— Je t'offre une ultime possibilité d'être libre. Ne la gâche pas, souffla-t-il doucement et je sentis son haleine chaude et sucrée caresser ma joue.
Quelque chose céda en moi. Instinctivement je pris sa tête entre mes mains et l'embrassai avec fureur. Je sentis les bras de Denys se nouer autour de ma taille et m'attirer avec force vers lui. Ses dents pénétrèrent dans mes lèvres et un gout métallique emplit ma bouche. Il lécha le sang qui coulait sur mon menton et murmura :
— Que la fête commence ! avant de m'étreindre à nouveau.

Hervé
J'avais autant envie de retourner au bureau que de me scier les couilles dans le sens de la longueur ! Un soir de match, qui plus est ! Ça pleuvait dru et je me suis imbibé comme un glaçon dans un scotch le temps de traverser la rue de ma voiture à la porte d'entrée.
Des rires fusaient du fond du couloir. Ils avaient plutôt intérêt à en profiter ce soir, parce que dès lundi, la musique allait changer. J'avais fait bonne figure à temps merdeux toute la semaine, mais une fois le gugusse parti, j'allais te les reprendre en main, les trois mousquetaires. Y'aurais plus de Hervé pour personne, mais du Monsieur Bouillon en veux-tu en voilà. Les bobards, les problèmes familiaux, les trémolos et les yeux larmoyants, c'était bien fini.
J'ai bien cru m'être planté d'adresse lorsque je suis entré dans la pièce, et pas seulement à cause de la déco, des bougies un peu partout et de l'odeur bizarre qui y flottait. J'ai cligné des yeux pour m'habituer à la pénombre et la première personne que j'ai aperçue est Monique, méconnaissable sans son habituel chignon, la tignasse au vent et toute nippée de voiles comme une gitane, qui tournoyait en ma direction. Elle s'est plantée devant moi comme une demeurée et m'a tendu des bras si dégueulasses qu'on aurait dit qu'elle avait récuré les chiottes avec. J'ai fait un pas en arrière et ai levé les yeux pour chercher de l'aide et c'est là que j'ai vu le mur du fond. Il était tout peinturluré - même couleur que les bras de Monique - d'une espèce de gribouillis comme ceux qu'on voit dans les musées d'art moderne et qui font causer les intellos. Putain, elle se croyait où ? Je ne sais pas ce qu'elle avait fumé, mais ça allait chier. J'ai ouvert la gueule pour brailler un coup et je l'ai refermée en apercevant les autres.
Thomas était presque à poil devant Denys, les yeux hagards et lui embrassait le torse, tandis que l'autre - pas fou, le mec - roulait une pelle à Julie.
Denys m'a aperçu, a repoussé doucement la belle et le bête et s'est avancé vers moi en souriant.
— Hervé, nous n'attendions plus que toi pour commencer !
— C'est quoi ce bordel ? C'est une blague ? Un truc de la télé ?
Je me suis retourné pour chercher dans les angles une caméra cachée, mais Denys a hoché la tête.
— Tu m'a l'air tendu, prends un peu de vin, ça te fera du bien.
Julie s'est approchée, une coupe énorme dans les mains et le corps moulé dans une longue tunique blanche dont le tissu était si fin que je pouvais voir à travers la pointe rose de ses mamelles. Elle a soulevé la coupe des deux mains jusqu'à hauteur de sa bouche, en a bu une gorgée et s'est léché lascivement les lèvres avant de me la tendre. Cinglés ! Ils étaient tous cinglés ici et j'aurais dû tourner les talons aussi sec et me barrer. Au lieu de ça, j'ai pris la coupe et je l'ai sifflée cul-sec. Denys riait et m'a pris le bras en me tirant au centre de la pièce.
— Tu vois que ce n'était pas si difficile !
Il s'est retourné vers Thomas qu'il a enlacé et embrassé à pleine bouche. Écœuré, je me suis détourné vers Monique qui, assise sur une sorte de trône, avait saisi une bouteille et se la vidait sur la tête. Je regardais le vin rouge couler sur son visage et son cou, détremper ses vêtements et former une flaque sombre au sol, lorsqu'une main m'a saisi au col.
Julie me tenait par la cravate d'une main ferme et m'attirait à elle. J'ai senti ses seins se presser contre mon torse. Une partouze ! Ce mec avait organisé une partouze au bureau ! Je devais admettre que c'était très fort! Putain il l'avait mérité sa bouteille, et comment ! La petite Julie, toujours collée contre moi, une main sur mon nœud de cravate et l'autre derrière son dos, avançait, me forçant à reculer jusqu'à butter contre une table vide. La gamine m'a fait signe de la tête de m'y installer et m'est grimpée dessus à califourchon. Deux belles cuisses blanches ont pointé de sa robe fendue. J'avais tiré le gros lot ! Je les ai empoignées. Cette fois, elle ne rigolait plus, la môme. Elle a dénoué ma cravate et a entrepris de déboutonner ma chemise, le tout d'une main, comme si elle avait fait ça toute sa vie. Lorsqu'elle s'est penchée sur moi, ses seins ont sauté hors du corsage, leurs mamelons raidis à quelques centimètres de mon visage. Je me laissais faire comme un pacha, cherchant à les attraper de mes lèvres. Tout à coup elle s'est redressée d'un coup de rein et, s'appuyant de la main gauche sur mon torse, m'a plaqué contre la table. J'ai tenté de la prendre à bras le corps pour la ramener vers moi. C'est alors qu'elle a levé le bras qu'elle tenait caché derrière son dos depuis le début. Une longue lame brillait dans sa main.
 
Dionysos
Le sang jaillit de la carotide et dessina un arc de cercle avant de retomber sur le sol en une ligne de gouttelettes sombres.
J'entendis un petit sifflement admiratif derrière moi.
—  Du travail bien propre ! Elle s'en est tirée comme une pro, ta bacchante !
Aphrodite se tenait derrière moi, les yeux fixés sur la gorge ouverte d'Hervé et les narines frémissantes. L'odeur du sang versé en mon honneur avait empli toute la salle et je vis aux yeux fiévreux d'Aphrodite qu'elle percevait toute la puissance du sacrifice. Il y a bien longtemps que je ne m'étais pas senti aussi vigoureux.
— C'est donc cela que tu manigançais ? ajouta-t-elle avec un sourire enjôleur.
— M'as-tu apporté ce que je t'avais demandé ? demandai-je.
Elle tendit ses deux mains vers moi et les ouvrit lentement, dévoilant le foudre ailé de Zeus.
— Tu n'as pas idée de ce que j'ai dû faire pour m'en emparer sans qu'il s'en aperçoive ! Que vas-tu en faire ?
— Réduire cet endroit en cendre.
— Et tes Ménades ? demanda Aphrodite en les indiquant du menton.
Julie riait, la gorge renversée, et sa tunique trempée de sang adhérait à ses jambes. Elle avait toujours le couteau en main qu'elle faisait tournoyer au-dessus de sa tête tandis que face à elle Thomas dansait une sorte de capoeira pour éviter les coups.
Monique, les avant-bras plongés dans la dépouille d'Hervé, ouverte à présent jusqu'au nombril, en arrachait le cœur. Elle s'approcha de moi les yeux plein d'adoration, brandissant l'organe comme un trophée et s'agenouilla devant moi, les mains jointes. Je pris le cœur encore chaud qu'elle m'offrait, lui caressai la joue et lui fit signe de se relever et de rejoindre les autres.
— Ils se sont offerts à moi de leur propre volonté et m'ont bien servi. Ils seront loin quand la foudre de Zeus tombera. Le bureau et les restes d'Hervé seront anéantis et leur police scientifique pourra toujours chercher des indices… ou une victime. J'aurai tout effacé, même le souvenir du sacrifice dans leurs mémoires… Mais je leur laisserai la gueule de bois !
— Disons surtout que tu te ramollis un peu ! me taquina Aphrodite. Mais je suis assez contente pour la petite. Elle a du potentiel et si tu ne te l'étais pas accaparée le premier, je l'aurais volontiers prise comme disciple. Je parie qu'elle s'en est bien tirée avec toi la nuit dernière.
— Je t'en dois une, Dita.
— Ne t'inquiète pas pour ça, j'ai bien l'intention de te faire payer… et très bientôt.
— Je ne demande pas mieux, dis-je en la prenant par la taille. À ta manière? À la mienne? Ou les deux ?
Elle se dégagea d'une secousse avec un petit rire.
— Oh Dionychou ! Tu es si mignon quand tu me regardes comme ça ! Et j'aurais adoré m'amuser un peu avec toi hier… Tu t'en souviens ? Mais…
Elle prit un air faussement désolé : « Ares est revenu du Moyen-Orient ce matin - les deux factions ont signé un accord de paix - et mon valeureux guerrier m'attend ce soir. Tu sais que les trêves ne durent jamais bien longtemps avec lui. Et toi…
Elle posa un charmant doigt sur ma poitrine. « Tu vas distraire Hephy. »
J'aurais dû m'y attendre : Aphrodite savait faire tourner à son avantage toutes les situations. Je me mis à rire. Une beuverie avec Héphaïstos ? Pourquoi pas ! Il était du genre coriace, et il n'y avait rien au monde que j'aimasse autant que de voir l'alcool couler à flot et mes compagnons de boisson succomber à la folie de l'ivresse.
« Modifié: 26 janvier 2020 à 18:37:11 par Samarcande »
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Hors ligne Colin

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Re : La fête du bureau [ contenu sexuel explicite ]
« Réponse #1 le: 26 janvier 2020 à 17:10:54 »
Salut,

Des dialogues soignés cisèlent une histoire au cœur d'une sainte trinité : Stephen King, soap opera et mythologie, rapprochant encore un peu plus, s'il le fallait, ces deux derniers sujets.

C'est réussi.

Hors ligne Samarcande

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Re : La fête du bureau [ contenu sexuel explicite ]
« Réponse #2 le: 27 janvier 2020 à 15:51:11 »
Merci Colin d'avoir tout lu! Je sais que c'est long pour un texte court.

Ton point de vue m'a un peu désarçonnée...

Désolé, vous n'êtes pas autorisé à afficher le contenu du spoiler.


Encore merci pour ton retour.

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Hors ligne kokox

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Re : La fête du bureau [ contenu sexuel explicite ]
« Réponse #3 le: 06 février 2020 à 20:32:13 »
Chère Samarcande,

Que voici un texte déjanté très plaisant à lire ! Les Bacchantes version trash PME, mâtinées d'une sorte de Ronde à la Schnitzler, il fallait y songer.  :) Putentrailles, serais-tu aussi frappée que moi lorsque tu laisses venir sur ton épaule le petit zoziau de l'inspiration ? :)

Tu as évidemment une certaine aisance à écrire, un sens du comique de situation pas piqué des hannetons. Bref, y a du boulot, tu sais mettre la main à la pâte, et n'as aucune pudeur à mettre tes mains dans le cambouis de l'inconnu. Somme toute, je pense que tu pourrais pousser plus loin encore le bouchon de ta folie et de ton exigence en matière de narration. Cette facilité que tu sembles posséder pour échafauder tes univers foutraques et décalés ne doit pas te faire sombrer dans une manière de complaisance, faute de temps peut-être ou par flemmardise. Selon moi, le sujet est très bon, la forme est bonne, mais j'ai senti de-ci de-là quelques relâchements au niveau de ta sévérité et de ta discipline. Pour finir, j'ai trouvé ta conclusion mythologique un peu hâtive. J'aurais souhaité, à l'instar d'un lecteur lambda, que tu sois un peu plus explicite lors de cette bascule laquelle, si elle est insolite et relativement ébouriffante, tombe un poil comme un cheveu dans la soupe. Pense pour cela à Jojo le couillon, le motard de la Creuse, qui tomberait par hasard sur ton texte, alors qu'il a plusieurs gorgeons à son actif et trois pétards dans le nez. Pense à écrire aussi pour lui, afin qu'il se paye une sacrée poilade autour de son feu de camp ! :)   

Bien à toi !
« Modifié: 06 février 2020 à 21:13:24 par kokox »

Hors ligne Samarcande

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Re : La fête du bureau [ contenu sexuel explicite ]
« Réponse #4 le: 08 février 2020 à 22:56:37 »
Merci Kokox pour la lecture,

Une part de moi est très satisfaite que tu trouves la fin ébouriffante tant j'avais peur que cela ne soit que trop banal ou prévisible, mais l'autre s'interroge sur le fait que cette fin tombe "comme un cheveu sur la soupe".
Il me semblait avoir semé mon texte de plein d'indices : le gars à la beauté androgyne et aux cheveux longs, son goût très prononcé pour le vin et ses débordements, ses attributs (peau de léopard, pommes de pins, lierre), son anticonformisme et bien sûr son pseudo (Denys Ambroise). Trop cryptique?

A quel moment selon toi est-ce que je perds mes lecteurs? Et toi, ou t'ai-je lassé ?

Tu parles de relâchement et de manque de discipline. J'ai conscience qu'il manque quelque chose effectivement à mon texte.
En le relisant, j'ai bien trouvé quelques répétitions, quelques phrases faciles... mais disons que les corriger ne suffira pas transformer mon texte en chef-d'oeuvre.

Je n'ai pas la prétention d'écrire un texte inoubliable, mais j'aimerais graisser les rouages de celui-ci, histoire de le faire tourner un peu plus rond.
Sauf que je ne m'y connais pas encore bien en mécanique.
Donc si tu as deux ou trois outils sous la main, si tu vois là où ça grince et que tu as envie de me le signaler, je t'en remercie.



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Hors ligne xavion

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Re : La fête du bureau [ contenu sexuel explicite ]
« Réponse #5 le: 28 février 2020 à 08:11:05 »
Salut Samarcande

Il est bien ce "petit texte". Pas vraiment petit mais vraiment bien.

Quelques remarques sur la forme (pas exhaustives -je l'ai lu pour le plaisir, sans prendre de notes-, et éminemment subjectives, comme il se doit de la part d'un sujet).
J'aime beaucoup les histoires "a point de vue", la description de la même réalité sous des angles différents. Et ton choix de focaliser la narration sur les différents personnages à tour de rôle m'a d’emblée accroché. En cours de lecture par contre, je dois t'avouer une petite déception : ces différentes voix ne se superposaient pas vraiment comme je l'avais espéré (elles décrivent des choses différentes plutôt que des visions différentes de la même chose). Mais cette déception ne regarde que moi : je t'imaginais engagée sur un chemin mais tu en avais choisi un autre. C'est toi l'auteur, il n'y a rien à dire.
Par contre je pense que tu pourrais travailler à mieux démarquer les styles des différents personnages, à jouer sur la syntaxe et le vocabulaire pour accentuer leurs différences. En l'état, même si on ne peut pas les confondre (leur prénom en gras et leurs préoccupations qui différent les uns des autres), ils m'ont fait l'impression d'avoir plus ou moins la même voix.
Je pense que cette impression d'indétermination a été amplifiée par des choix de conjugaison qui m'ont gênés dès le début (un peu moins au fil du texte, maintenant que j'y pense) : les personnages semblent parler, au moins "in petto", ça n'est pas un problème, au contraire, ça colle bien avec tes focalisations successives sur l'un ou l'autre. Mais du coup j'ai trouvé qu'il y avait des passé simple ou des imparfaits qui tombaient mal. On ne parle pas comme on écrit, surtout si on se parle à sois-même. Et ces "conjugaisons bizarres qui m'ont gênées" sont présentes chez tous les personnages (à la limite, elles pourraient persister chez l'un d'entre eux, pour lui donner une voix justement).
Ah, au passage il y a deux ou trois termes qui m'ont semblé incorrectement utilisés (mais j'ai beau me creuser la tête et repasser sur ton texte, je n'en vois plus qu'un ... c'est l'utilisation de "cognition" qui ne me semble pas très heureuse dans ce contexte).

Sur le fond, je suis entré dans ton texte, comme il se doit après avoir lu le titre et la mention "contenu sexuel explicite", en m'attendant à ce qu'il finisse (voir plus que finir) sur une partie de baisouille plus ou moins engagée. Du coup je me demande dans quelle mesure j'aurais lu le même texte s'il n'avait pas été précédé de cette mention. Je m'explique : cette représentation initiale de ton texte, m'a largement ouvert les yeux sur tout ce qui pouvait conduire à considérer tous les protagonistes comme de futurs partouzeurs, à imaginer comment leurs relations de travail allaient basculer, etc. Et du coup ça m'a peut être conduit à ne pas relever d'autres pistes (qui y sont pourtant, je m'en suis rendu compte rétrospectivement), relatives au panthéon grec.
Je me demande comment j'aurais découvert ton texte s'il s'était intitulé "Bacchanales au bureau" ou "Dyonisos bande encore".
Ceci dit la fin m'a très agréablement surpris, je ne l'ai pas vue arriver et pourtant elle s'est imposée tout naturellement (preuve peut-être que ces indices que je n'avais pas relevés consciemment avait quand-même bien rempli leur rôle).

Pour finir ... cette expression qu'utilise Hervé "se scier les couilles dans le sens de la longueur", m'a scié (c'est le cas de le dire). D'une part je ne l'avais jamais entendue ou lue, d'autre part elle a raisonné chez moi d'une façon très (vraiment très) personnelle. C'est lié à une petite anecdote que voici :
Il y a un bon paquet d'années, j'avais un pote dont le père avait quelques chevaux. Un jour un poulain est né, un petit mâle, couillu comme il faut, qui a été baptisé Eros. Au bout de quelques mois, le propriétaire de ce petit Eros décide de le faire castrer. Je dis à mon pote de demander à son père de garder les testicules, il parait que c'est un mets de choix, il fronce un peu les sourcils mais j'insiste. Quelques semaines passent et un jour mon pote m'appelle pour venir manger chez lui. Je déboule, et il me demande de regarder dans le frigidaire. Je l'ouvre et découvre un frigidaire d'étudiant, c'est à dire complètement vide, à l'exception d'un assiette en céramique blanche sur laquelle reposaient deux grosse boules vaguement sanguinolentes. Et il me dit : "les voila tes roubignolles gros malin, maintenant tu me les cuisines". Je passe sur la recherche d'un mode opératoire (c'était avant Internet), et je me retrouve finalement face à une planche à découper, avec un couteau  très coupant dans une main et cette chose dans l'autre, cet alibofi que je devais transformer en aliment.
Le premier coup de couteau ! Mama mia !Dans le sens de la longueur justement, fermement appliqué parce qu'il y a une enveloppe assez résistante ... il était terrible ce premier coup de couteau, je l'ai appliqué en croisant les jambes. Et maintenant, 25 ans après, j'en ai encore des frissons en y repensant. Et j'ai dû faire ça deux fois ! (Après c'est de la cuisine et c'était très bon).
Bref, je me demande ou tu as pu aller chercher une image aussi percutante.




Hors ligne derrierelemiroir

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Re : La fête du bureau [ contenu sexuel explicite ]
« Réponse #6 le: 28 février 2020 à 17:42:02 »
Bonsoir Samarcande.

Alors j'ai tout lu d'une traite, sans relevé les détails, mais il n'y en avait pas tant. Comme l'histoire est découpée en petits morceaux de personnages, c'est facile à lire et ça en augmente l'intérêt. Au niveau de la forme, j'aurais eu une préférence pour une narration au présent plutôt qu'au passé simple, le passé simple ici crispait un peu ma lecture.

Comme quelqu'un d'autre l'a dit, je pense que tu pourrais t'amuser encore plus sur la manière dont tes personnages s'expriment, j'ai l'impression que pour le moment, seul Hervé a sa propre voix.

Par rapport au fond, bien que j'ai aimé la chute qui était surprenante et bien amenée, je n'ai pas accroché plus que ça. Au début, j'étais intéressée par les différents bouts de vie de ces personnages, mais j'ai eu l'impression que la résolution de leurs problèmes était trop simple (bon, après tout, c'est un dieu alors pourquoi pas), mais surtout, que je ne pouvais moi-même rien en retirer, sauf peut-être un peu d'amusement. Si ton but était d'amuser, j'aurais peut-être alors plus joué sur le ridicule de certains personnages, sur le grotesque de la dernière scène, j'aurais peut-être plus alimenté notre aversion pour Hervé pour qu'on puisse mieux apprécier sa fin stupide et tragique.

Voilà pour le moment :)

Merci du partage,

dlm
« Modifié: 28 février 2020 à 17:46:06 par derrierelemiroir »
"[...] alors le seul fait d'être au monde
  remplissait l'horizon jusqu'aux bords"
  Nicolas Bouvier

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Re : La fête du bureau [ contenu sexuel explicite ]
« Réponse #7 le: 05 mars 2020 à 22:37:49 »
Salut Xavion,

merci pour ta lecture. Contente que tu ais lu ce texte "pour le plaisir". Tous les retours sont bons à prendre. :D

Citer
les différentes voix ne se superposaient pas vraiment comme je l'avais espéré (elles décrivent des choses différentes plutôt que des visions différentes de la même chose).
Oui, je n'avais pas dans l'idée de raconter le même événement  de plusieurs points de vue, mais d'avancer dans le récit, une voix après l'autre. En revanche, je tenais à ce que Denys Ambroise se dessine peu à peu à travers les voix des personnages.

Citer
Par contre je pense que tu pourrais travailler à mieux démarquer les styles des différents personnages, à jouer sur la syntaxe et le vocabulaire pour accentuer leurs différences. En l'état, même si on ne peut pas les confondre (leur prénom en gras et leurs préoccupations qui différent les uns des autres), ils m'ont fait l'impression d'avoir plus ou moins la même voix.
Oui, tu as raison. Hervé est le seul qui se distingue.
Il faut que j'y retravaille, mais le risque de tomber dans la caricature est plutôt élevé (pour moi).

Citer
Mais du coup j'ai trouvé qu'il y avait des passé simple ou des imparfaits qui tombaient mal. On ne parle pas comme on écrit, surtout si on se parle à sois-même. Et ces "conjugaisons bizarres qui m'ont gênées" sont présentes chez tous les personnages (à la limite, elles pourraient persister chez l'un d'entre eux, pour lui donner une voix justement).
Oui c'est une idée. A la limite chez Monique, pour accentuer l'effet un peu guindé.

Citer
Sur le fond, je suis entré dans ton texte, comme il se doit après avoir lu le titre et la mention "contenu sexuel explicite", en m'attendant à ce qu'il finisse (voir plus que finir) sur une partie de baisouille plus ou moins engagée
J'applique les règles du forum en bonne écolière :P

Citer
Je me demande comment j'aurais découvert ton texte s'il s'était intitulé "Bacchanales au bureau" ou "Dyonisos bande encore".
Ça, c'est justement ce que voulais éviter pour préserver mon petit coup de théâtre. ^^
Mais ok, je te concède que le titre n'est pas terrible.

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Bref, je me demande ou tu as pu aller chercher une image aussi percutante.
;D Ah Ah Ah ! Chouette ton histoire ! Je te promets que je n'ai aucune expérience en la matière, ni en tant que victime ni en tant que bourreau. Mais il me semblait que ça "sonnait bien" dans la bouche d'Hervé et que ça pouvait rendre l'idée de son degré de contrariété.

Salut Derrierelemiroir
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Au niveau de la forme, j'aurais eu une préférence pour une narration au présent plutôt qu'au passé simple, le passé simple ici crispait un peu ma lecture.
A première vue tu n'es pas la seule ! Il faut que je me remette au boulot sur les temps du récit !

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Au début, j'étais intéressée par les différents bouts de vie de ces personnages, mais j'ai eu l'impression que la résolution de leurs problèmes était trop simple (bon, après tout, c'est un dieu alors pourquoi pas),
Un peu mi figue mi raisin, quoi...suffisamment présentés pour qu'on s'y attache mais pas suffisamment approfondis.
C'est un peu mon problème récurrent dans les nouvelles. J'en dis trop ou pas assez.

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Si ton but était d'amuser,
En fait j'avais surtout envie de parler de Dionysos parce que c'est une figure mythologique fascinante. J'avais envie de mettre en scène dans un contexte minable, avec des personnages tout à fait ordinaires mais qui rentrent dans le jeu, des bacchantes modernes, qu'il aide à se laisser aller, et qui dans l'abandon (aidés par l'alcool , les drogues, le sexe... C'est Dionysos quand même !) trouvent leur voie, se découvrent et s'acceptent.
Hervé, lui ne fait pas l'effort d'aller vers le divers et devient automatiquement une victime de son hybris.

Ouais, je sais c''était ambitieux ::)

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j'aurais peut-être plus alimenté notre aversion pour Hervé
Là il me semblait d'en avoir déjà fait presque trop. Il traite hyper mal sa meilleure commerciale, crée une ambiance de merde dans son bureau et moleste sa stagiaire.
Je voulais quand même pas en faire un assassin.

Merci pour vos retours.  :coeur:
Je trouve génial que mon texte ait eu autant de commentaires.

Je vais cogiter un peu sur vos remarques et voir si j'arrive à l'améliorer un peu.
Sait-on jamais, nos chemins pourraient se croiser ! (Amin Maalouf )

Hors ligne Xeraphia

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Re : La fête du bureau [ contenu sexuel explicite ]
« Réponse #8 le: 06 mars 2020 à 01:34:48 »
Salut Samarcande !

Je suis venue et repartie plusieurs fois depuis que tu as posté ce texte, parce que je ne savais pas quoi dire. Puis je me suis dit que dire qu’on ne sait pas quoi dire, c’est quand même dire quelque chose (Oui, j’ai des moments de profontitude intellectuelle comme ça).

J’avais beaucoup aimé. J’avais trouvé les personnages bien campés et Denys un vrai petit délice. Le dernier passage d’Hervé amène un gros WTF, mais là c’est trop tard, on est à fond dedans, on continue à lire – et arrive la chute, on déconnecte complètement l’espace de quelques secondes – comment ça, Dionysos, ça sort d’où, ça, Dionysos – et puis tout tombe en place, tout clique, le puzzle s’assemble, et j’ai éclaté de rire « Elle nous a bien eus ».

Bref. J’ai trouvé ça très bien ficelé. Ma lecture date donc je n’ai pas plus de détails que ça en tête, désolée =/

PS pour ce que ça vaut : le registre du passé est passé (huhu) nickel pour moi, mais, en même temps, je ne suis pas fan des récits au présent en règle générale.

Voilà pour ma part ^^

Hors ligne derrierelemiroir

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Re : La fête du bureau [ contenu sexuel explicite ]
« Réponse #9 le: 06 mars 2020 à 07:53:06 »
Coucou Samarcande :)

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A première vue tu n'es pas la seule ! Il faut que je me remette au boulot sur les temps du récit !
seulement si tu trouves que le texte serait amélioré. J'ai suggéré ça parce que l'utilisation du passé simple jurait dans ma tête avec cette histoire assez moderne, mais en vrai, le passé simple n'a rien à voir avec la modernité (enfin, un peu si tu considères qu'il existe aussi des modes dans l'écriture). C'est pour ça que j'ai précisé ici que c'était ma préférence (parce que je suis une victime de la mode).

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Un peu mi figue mi raisin, quoi...suffisamment présentés pour qu'on s'y attache mais pas suffisamment approfondis.
C'est un peu mon problème récurrent dans les nouvelles. J'en dis trop ou pas assez.
après, vu que c'est un texte assez court, c'est aussi difficile d'approfondir tous les persos. Mais ce que je voulais dire ici, c'était surtout que Dionysos parvenait trop simplement à résoudre leurs problèmes (parce qu'à ce moment-là de ma lecture, je n'avais pas encore compris qui il était, du coup je me disais Wow il est omniscient le mec quand même, trop facile, mais en fait, il était vraiment omniscient).

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En fait j'avais surtout envie de parler de Dionysos parce que c'est une figure mythologique fascinante. J'avais envie de mettre en scène dans un contexte minable, avec des personnages tout à fait ordinaires mais qui rentrent dans le jeu, des bacchantes modernes, qu'il aide à se laisser aller, et qui dans l'abandon (aidés par l'alcool , les drogues, le sexe... C'est Dionysos quand même !) trouvent leur voie, se découvrent et s'acceptent.
Hervé, lui ne fait pas l'effort d'aller vers le divers et devient automatiquement une victime de son hybris.

Ouais, je sais c''était ambitieux ::)
ok ok, ben en y repensant avec cette info en tête, je trouve ça déjà beaucoup plus intéressant. Peut-être que ce qui m'a manqué, du coup, c'était un peu plus d'indices avant la chute, que Dionysos était spécial, mais genre, vraaaiment spécial. Parce que je ne m'attendais pas du tout à ce tournant dans ton histoire, et oui les surprises c'est cool, mais celles qui sont vraiment trop inattendues, elles éblouissent un peu et empêchent la compréhension. Enfin, je me suis plutôt dit "What the fuck ce plot twist" comme s'il tombait de nulle part, et je pense que j'aurais été plus fascinée si j'avais, dans une certaine mesure, pu le prévoir (pas exactement de cette manière, mais genre si j'avais pu prévoir que quelque chose se cachait sous les airs humains de ce mec).

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Là il me semblait d'en avoir déjà fait presque trop. Il traite hyper mal sa meilleure commerciale, crée une ambiance de merde dans son bureau et moleste sa stagiaire.
Je voulais quand même pas en faire un assassin.
oui t'as raison  :D
"[...] alors le seul fait d'être au monde
  remplissait l'horizon jusqu'aux bords"
  Nicolas Bouvier

Hors ligne PierreSigma

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Re : La fête du bureau [ contenu sexuel explicite ]
« Réponse #10 le: 06 mars 2020 à 10:45:09 »
Salut,

j'ai vraiment aimé ton texte, il est original, les personnages sont crédibles, et le passage de l'un à l'autre permet d’étoffer leur caractère ainsi que leur histoire personnelle. Le rythme est bon, au début on découvre, puis ça s'emballe bien comme il faut jusqu'à la fin surprenante.

Pour l'orthographe, je peux pas dire parce que je suis pas au niveau, par contre pour le reste, j'ai relevé quelques détails, mais ce ne sont que des détails :

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Ou bien déplorer le fait de n'être qu'un épiphénomène pour la Terre ?
Je trouve que, dans la bouche de Monique, le terme "épiphénomène" est un peu trop recherché

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Je m'exécutai docilement, comme si j'avais tacitement accepté les règles de son jeu en prenant la pastille. J'eus du mal à focaliser l'image d'une fillette et puis d'un coup je me vis… dans ma chambre d'enfant, une palette de couleurs à la main, en train de peindre. La chambre commença à tourner autour de moi comme une toupie. J'eus un instant de panique. Que m'avait-il fait prendre ? Je ne distinguais plus les murs de ma chambre qui défilaient de plus en plus rapidement et fermai les yeux un instant pour reprendre l'équilibre. Lorsque je les rouvris, je me trouvais au cœur d'un ouragan, avec ma palette comme seule bouée de secours. Je m'y accrochai de toutes mes forces. La palette enfla. Je ne parvenais déjà plus à la tenir dans mes mains. Elle s'élargit encore jusqu'à devenir mon horizon. La chambre avait tout fait disparu à présent. Je marchais sur une surface blanche et lisse; des lacs jaunes et des prés rouges s'ouvrirent au loin et avancèrent vers moi. Terrifiée, je me mis à courir dans la direction opposée. Les taches me poursuivaient, gagnaient inexorablement du terrain. Je discernais des ombres mouvantes sur leur superficie. Je courus longtemps sans autre espoir que de rester debout et résister. À bout de souffle je finis par tomber à genoux. Le rouge n'était plus très loin maintenant. Ce n'était pas un pré, comme j'avais cru, mais un gouffre qui se déroulait vers moi lentement, comme s'il avait la certitude de m'atteindre tôt ou tard. Il était si proche à présent que trois pas auraient suffi pour l'atteindre. Il n'était plus question de fuir, mais je ne voulais pas céder. Je me relevai avec effort et le toisai comme un adversaire. Il n'approchait plus. Il attendait. Vu d'en haut, il paraissait sans fond, et palpitait comme un énorme cœur. Je n'allais pas me laisser avaler passivement. Je pris une profonde inspiration et, avec un grand cri, m'élançai dans l'abîme. Les couleurs explosèrent comme une symphonie autour de moi. Je les respirai à plein poumons et les sentis couler en moi comme une force vivifiante. J'étais toute puissante à présent et je me mis à rire.
Il faudrait fragmenter tout cela en plusieurs paragraphes pour aérer le tout

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Il ne manque plus que les invité
Il faut un "s" à invités

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Denys avait improvisé sur la plus grande des décorations sylvestres avec des branches de lierre qu'il avait coupées sur le mur de la cour et quelques pommes de pins de l'épicéa du jardin voisin dont les branches dépassaient du mur.
Répétition de "mur"

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Il avait ôté sa chemise, tout comme moi, pour travailler sans se salir et s'éventait négligemment  avec une serviette en papier, une jambe allongée par-dessus l'accoudoir. Il était longiligne, et ses muscles se dessinaient à peine sur son torse et son ventre. Il ne semblait pas particulièrement fatigué bien qu'il eut soulevé sans effort apparent des poids bien supérieurs à ce que sa silhouette présupposait. Il entrecroisa les doigts, étira les bras au-dessus de sa tête et fit craquer ses articulations avec affectation, les pectoraux ostensiblement contractés, sans me quitter des yeux. Un peu honteux d'avoir été surpris tandis que je l'observais, et mal à l'aise devant son air narquois, je saisis ma chemise et l'enfilai. J'avais transpiré et le contact du tissu amidonné sur ma peau me parut très désagréable. Il faisait lourd et humide, ce qui n'arrangeait rien. Une fois rhabillé, je me laissai tomber sur une chaise en soupirant
J'aurais vu plusieurs paragraphes pour faire moins pavé.

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Et d'un geste décidé, il fit sauter le bouchon et laissa mousser le liquide dans deux flûtes.
Répétition de "et"

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J'ai bien cru m'être planté d'adresse lorsque je suis entré dans la pièce, et pas seulement à cause de la déco, des bougies un peu partout et de l'odeur bizarre qui y flottait
Répétition de "et", d'ailleurs, dans la suite de ce paragraphe il y a beaucoup de "et", même si ce n'est pas toujours des répétitions à proprement parler, ça alourdi le style.


Voilà, j'espère que ça te sera utile, a+  :)

 


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