Le tout, c’est de le trouver. C’est ce que je me murmure en fouillant les décombres. Les décombres de la maison, du puits, puis de tout le reste. Cela m’amuse de croire que le ciel est tombé en morceau sur nos parterres ; je me dis que c’est mieux que d’être terrifié comme mon père. Terrifié, cela veut dire « ramené à la terre », c’est pour ça que papa ne veut pas avoir affaire avec le ciel. Mais moi je les ai entendues, les étoiles ! Elles m’ont dit qu’il fallait que j’aille trouver un bâton magique. Le même bâton qui a mis le feu aux incendies, celui qui a fait tomber la grêle.
Grêle, ça vient de grêlé : c’est quand le ciel s’abîme et s’écharpe. À l’origine, on s’abimait sans chapeau. Mais… mon père me dit tout le temps qu’à sortir sans couvre-chef, je finirai par attraper la faucheuse. Alors, maintenant que c’est le ciel qui s’écharpe, c’est un peu comme si on était tout le temps dehors ; avec la maison par terre, il m’a bien fallu trouver quelque chose.
Je n’ai pas trouvé que des chapeaux, ceci dit, il y a plein de choses, sur le sol strié de débris, bris et vis de verre ou de vieilles hélices. J’en ai marre, mon ventilateur tout rouillé s’est brisé. Il m’empêchait de faire de mauvais rêves dans la nuit. C’est arrivé hier soir. Un grand bruit suivi d’un petit : « boom ». En réalité, cela avait plus fait
SkchplraaarrrrckssBrrrannnkpkpkprrrBAM !
BAM !!
Bam.
Il y avait du plâtre plein ma couverture. Après, le plafond a continué à tomber sans bruit ; peut-être que l’air s’était rassasié. Je n’ai plus entendu que les étoiles, murmurer. Je me murmure à moi-même, j’ai la voix cassée. Papa ne me parle plus. Mais je sais ce qu’il m’aurait sûrement dit : il m’aurait regardé, et d’un air tout à fait sérieux il aurait plaisanté,
Je voudrais que tu ne sois jamais né.
Je me suis souvent demandé si la mort permettait de s’effacer de l’existence. L’air mange les sons et les approche de mes oreilles. C’est peut-être pour ça que cette nuit du ciel blanc et noir, l’air s’était changé en pierre. En mélasse profonde. Le bâton magique, enfoui, en l’air ; peut-être, sous terre. Y a-t-il de l’air sous terre ? Pourquoi la mort serait-elle le début d’autre chose ? La fin peut être vue comme un début ; c’est le début de la fin ! Souvent, on se trompe et c’est la fin du début. Et il n’y a pas de suite.
J’ai retrouvé le bâton de dynamite.
Tout brûlé. Adieu les étoiles :
Je m’en vais.