[Gant Dor]

(un jour, en hiver, en Finlande)



dehors c'est dimanche
il neige à pas de chat
ombre blanche
la fenêtre est ouvrée de givre
les sapins dessinent le ciel en lettres de Chine
j'ai invité quelques mots prendre le thé
on bavarde
sans Char
sans protocole
un dé de ciel tombe dans la tasse
fait des archipels
les secondes se décrochent de l'éternité
une à une
comme des fruits mûrs
la nappe est usée aux coudes
je ramasse les miettes de gâteau pour les oiseaux
dehors le gel craque comme des phalanges

[Tigrani]

J'aime beaucoup et n'ai rien de constructif à dire.

[Alan Tréard]

Bonjour Gant Dor,


Ce poème transpire une apparente sérénité. Les mots donnent à voir des images émouvantes et des significations élégantes. Il se dégage de ce poème un petit morceau de vie, celui que tu as soigneusement choisi de nous présenter.

j'ai invité quelques mots prendre le thé

Généralement, on invite qqn à prendre quelque chose, je me suis demandé pourquoi tu n'avais pas ajouté la préposition.


Une lecture adoucissante, un grand merci.

[Dot Quote]

waw, toujours autant convaincu par tes titres
et là, c'est des titres qui se suivent en un truc
et c'est des images réelles par déconstruction
logique du langage qui évoquent ainsi sans signifier

du grand art je dirais

[Gant Dor]

Je vous remercie tous les trois Tigrani,  Dot Quote Alan Tréard. Je suis heureux que vous ayez ressenti quelque chose positif de ce poème.
 Je l'ai écrit il y a longtemps mais je l'aime bien parce qu'il traduit bien l'atmosphère qui m'entourait (j'ai habité 35 ans en Finlande)
l'ennui, le solitude et la beauté blanche.
J'y parle même de Char que j'essayais de lire à cette époque.... mais je suis resté complètement à côté.
Amitiés BN

[Dot Quote]

waaa tu parles tous les sames alors ! ^.^

[HELLIAN]

Voilà un poème que j'aurais aimé écrire pour son élégance, sa simplicité et sa justesse. Superbe premier vers qui d'emblée pose non seulement le décor mais distille un sentiment très subtile d'intériorité tout en vous positionnant comme étranger au monde  des autres. Intériorité sur le plan spatial mais extériorité pour ne pas dire  extranéité au plan existentiel. En suite se trouvent déclinées des images qui prennent place dans ce monde étrange en étroite relation avec l'ailleurs/dedans, comme s'allient dans un oxymore tout aussi réussi temps et éternité avec ces secondes qui tombent comme la neige... Et tout cela  avec un vocabulaire sans fioriture ni grandiloquence. Chapeau l'artiste!

[Luciole87]

Lu et relu avec un plaisir toujours aussi intense. Merci l'artiste.

[HELLIAN]

Mais mille tonnerres, lisez ce poème , c'est une perle !

[Dot Quote]

...et surtout, ne laissez que trace de doux pas coussinet !

[Marcel Dorcel]

Les références à Char ne me laissent jamais insensibles !
Tout autant que ce poème. Les références à l'epure sont d'une élégance rare. Une japonaiserie en français. Quelle excellence dans le choix des mots !
L'ivresse du flacon, la langue, cette immortelle. Merci beaucoup.+++

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[Cyr]

Une ambiance, des images très agréables à lire. J'ai particulièrement aimé celle-ci :
"un dé de ciel tombe dans la tasse
fait des archipels"

Le petit de la routine qui donne du gigantesque exotique et naturel.

Au plaisir,

[Angieblue]

J'aime beaucoup le rythme accidenté qui fait penser à celui d'un train qui roule, et les associations d'idées qui créent des images qui transportent dans un univers un peu surréaliste.
Bel imaginaire poétique! bravo!

J'ai juste buté sur cette phrase:
"j'ai invité quelques mots prendre le thé"
ça serait mieux de dire:
à prendre le thé