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Le Monde de L'Écriture » Coin écriture » Textes courts (Modérateur: Claudius) » [Défi de l'été] Analyn (avec Spes)

Auteur Sujet: [Défi de l'été] Analyn (avec Spes)  (Lu 1111 fois)

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[Défi de l'été] Analyn (avec Spes)
« le: 24 juillet 2015 à 08:51:54 »
Un an plus tard... Voici notre réponse au défi de l'été 2014 (écrire en duo) et au défi de l'été 2015 (rattraper un défi). Comme quoi, la procrastination vous permet de relever plus de défis.    :mrgreen:
Bonne lecture !


Analyn

Ina mourut à la fin de la saison des pluies, aussi calmement qu’elle avait vécu.
Un soir, elle les réunit tous autour de sa couchette. Ses yeux brillaient, et de minuscules gouttes de sueur perlaient à son front et sur sa lèvre supérieure. D'une voix faible mais ferme, elle leur donna ses instructions pour qu’ils s’occupent du buffle, des canaux d’irrigation, des stocks de riz. Jejomar regarda ses frères et soeurs - Arvin, qui carrait les épaules devant ses nouvelles responsabilités, Benjie et Michelle qui avaient arrêté de se chamailler ; Riza enfin, qui berçait le bébé dans ses bras fluets - et son coeur se serra devant leurs visages mi-graves, mi-étonnés. Ils avaient compris sans le savoir.
Le lendemain, Ina ne se leva pas. La fièvre la faisait trembler et gémir. Jejomar envoya les enfants dehors pour rester auprès d’elle. Il lui tint la main. Les cals sur ses doigts brûlants ne cessaient de lui rappeler à quel point elle avait été forte, et le souvenir de cette mère invincible lui serrait la gorge à l'en étouffer.
Elle garda longtemps les yeux tournés vers le ciel - peut-être priait-elle ? - mais, au dernier instant, elle posa son regard noir sur son fils aîné. A ce moment-là, il sembla à Jejomar que toute la brume qui recouvrait les yeux d’Ina s’en allait pour laisser place à une tristesse mélancolique. Il lui avait déjà vu ce regard-là : elle l'avait lorsque sans prévenir, elle arrêtait son travail et se perdait dans ses pensées. Jejomar se demandait alors qui était cette femme qu'il ne connaissait pas, lestée de souvenirs et de secrets inaccessibles.
Cet après-midi là, dans la hutte de bois qui lui servait de chambre, elle le sonda avec ces yeux impénétrables, puis décida de lui confier ses derniers mots.
— Tu ne restes pas avec tes frères et soeurs, Jejo, constata-t-elle dans un murmure. Te souviens-tu…
Une pause.
— Te souviens-tu d’Analyn ?
Il ouvrit la bouche pour parler, mais Ina ne lui en laissa pas le temps. Les mots se précipitèrent, tremblants.
— J’aurais dû l’élever comme ma propre fille, assena-t-elle. J’ai laissé cet homme l’emmener. Je devais m’occuper de vous. J’avais peur…
Elle prit une inspiration, puis reprit :
— Je ne sais pas ce qui lui est arrivé.
Une larme roula sur la vieille joue d’Ina.
— Jejo, ramène-la à la maison.
Ses paupières se fermèrent.

NB : Ina signifie “maman” en filipino.

*

           D’un geste lent, Crisanto s’essuya la main sur sa vieille chemise de batik bariolée. Malgré la pénombre du garage, la sueur ruisselait dans son dos, lui rappelant qu’il n’échapperait pas à la lourdeur moite de l’été philippin. Plus que deux boulons à replacer, et il en aurait fini avec la vieille jeepney américaine aux couleurs flamboyantes. On ne lui en laissa pas le temps.
— Cris ! appela un autre homme à la voix grave.
— Par ici, Sherwin, entre !
            Crisanto se redressa, une clef de trente à la main. Les deux hommes se saluèrent, puis Sherwin expliqua ce qui l’amenait.
— Aussi vrai que ta barbe de trois jours, Cris, ce type sillonne Baguio pour la trouver. Il procède comme un furet.
Une ombre passa sur le visage du mécano, qui grimaça :
— Suis-moi.
            Sans lâcher la clef plate, Crisanto conduisit Sherwin jusque dans le fond du garage, là où, derrière une toile tendue, patientaient deux fauteuils et une machine à café. La lumière du jour filtrait à travers le dernier des quatre carreaux de la fenêtre. Du contre-plaqué remplaçait les trois autres.
Crisanto peina à briser le silence. Finalement, il demanda :
— Il s’agit de la petite ?
            Sherwin hocha la tête, avant de lui raconter qu’il ne savait lui-même que peu de choses. Il donnait la vingtaine au furet, sans être trop sûr toutefois. Le type ne semblait pas très expérimenté ; il ne se cachait pas. Plutôt du genre à fourrer le nez partout sans faire gaffe, quitte à le mettre là où il ne valait mieux pas.
            Crisanto n’interrompit pas Sherwin une seule fois. Les yeux plissés, le front luisant de sueur, il semblait sonder son âme. Ses gros poings resserrés sur la clef à molette, il tremblait.
Parmi son entourage, Sherwin seul avait eu vent de l’existence de la gamine. Et, chaque matin au lever, Crisanto se demandait s’il resterait encore un ami longtemps.
            Finalement, Crisanto, toujours muet, en proie à une inquiétude et des doutes croissants, se redressa de toute sa hauteur. Il crut apercevoir un éclat de peur dans les yeux pâles de Sherwin. Rêvait-il ? Il cilla, fit mine de retourner à son travail. Sherwin ne le retint pas.
— Et wish ko lang, Cris, lâcha le visiteur en guise d’au revoir.

*

Jejomar ne quitta pas tout de suite la maison. D’abord, il fallut s’occuper des obsèques d’Ina ; et puis quelqu’un devait être là pour les enfants, pour sécher leurs larmes et répondre tant bien que mal à leurs questions.
Deux semaines s’écoulèrent ainsi, avant que Jejomar se décide à partir. Finalement, il confia la famille à Arvin. Le voisin accepta de surveiller de loin que tout allait bien.
“Tout n’ira pas bien”, se dit Jejomar en passant devant la nipa, la petite hutte carrée où sa mère avait vécu. La partie avant était fermée par une épaisse tenture noire. L’arrière servait à stocker le riz. “Mais s’ils travaillent dur, ils s’en sortiront.”
Le jeune homme s’efforça donc de ne plus penser au visage de Riza, qui l’avait regardé de ses yeux graves tandis qu’il sortait en silence de la nipa des enfants, où tous ses frères et soeurs dormaient encore.
La lune brillait encore lorsqu’il emprunta le chemin escarpé qui descendait de leur ferme vers le village. Seule une pâle lumière grise éclairait le paysage. Dans la pénombre, Jejomar distinguait les grappes de maisons installées au fond de la vallée, là où deux torrents se rejoignaient après avoir dévalé les flancs abrupts de la cordillère. La plupart des habitants avaient troqué leurs toits de chaume pour des plaques de tôle ondulée, plus efficaces contre les pluies qui s’abattaient toute l’année sur la province de la Nueva Vizcaya.
Tout autour des maisons, comme des marches de géants taillées à l’assaut de la montagne, s’élevaient les terrasses inondées des rizières, d’un marron terne piqueté de vert. Au-dessus, la forêt reprenait ses droits, toute en arbres verdoyants, en lianes et en fougères. A l’horizon, son sommet d’herbe rase effleuré par les premiers rayons de l’aurore, le mont Pulag surplombait l’ensemble.
Baguio se trouvait de l’autre côté, à quelques dizaines de kilomètres seulement à vol d’oiseau, mais traverser la Cordillère s’avérait long et périlleux. Une route unique, ambitieuse, osait l’escalade, pour relier Baguio à la Nueva Vizcaya par le lac Ambuklao. Cependant, par peur de basculer dans le vide ou de se trouver bloqués face à une coulée de boue, peu de bus s’y risquaient.
Jejomar descendit donc à pied jusqu’à Bayombong, puis en bus jusqu’à San Jose, beaucoup plus au sud. La première partie du trajet s’avéra longue et éprouvante : le ciel clair de l’aube laissa vite place à des nuages épais et, en quelques minutes, Jejomar se retrouva trempé jusqu’aux os par une lourde pluie de fin de saison. Il arriva en ville mouillé et déjà las du voyage.
Comme il préférait économiser les six-cent pesos que lui auraient coûté un de ces gros bus climatisés qui sillonnent le pays au service des touristes, il atterrit dans une vieille carcasse aux sièges de cuir défoncés. Au moins, il était au sec.
Les heures à venir s’annonçaient longues et ennuyeuses. Jejomar n’avait pas beaucoup d’options pour s’occuper l’esprit, si ce n’est regarder par la fenêtre crasseuse les méandres de la rivière Magat et la route sinueuse qui défilaient sur le côté. Il essaya bien de lutter contre le désoeuvrement en passant en revue plusieurs fois l’organisation du voyage, mais cela ne suffit pas. Il commençait à se sentir inquiet.
Après tout, il n’avait jamais vu cette Analyn.
Son prénom était pour lui vieux de dix ans, mêlé à un amas gris et confus de souvenirs désagréables - le départ de son père, le typhon, la faim. Jejomar évitait la plupart du temps de se remémorer cette période.
Arvin n’était encore qu’un nourrisson à cette époque, et le petit Jejo ne connaissait pas beaucoup d’autres enfants de son âge. Il jouait donc dans la cour entre les nipas, probablement à dessiner sur la terre ou à inventer des systèmes d’irrigation révolutionnaires avec des feuilles et des morceaux de bois.
Il n’entendit pas l’étranger approcher. Il se souvenait encore parfaitement de son ombre, énorme et noire, qui apparut soudain sur le sol et l’engloutit. Les traits de l’homme restaient en revanche flous dans sa mémoire. Trapu, le crâne rasé, il se pencha au-dessus de Jejo, et celui-ci vit alors ses mains. Oui, il se souvenait surtout de ses mains, aussi larges que les cuisses sur lesquelles elles s’appuyaient, de ses veines gonflées sous la peau brune, maculée d’huile noire. L’homme le détailla pendant une éternité, comme s’il cherchait, dans les traits de son visage, à reconnaître quelqu’un d’autre. Puis, d’une voix rauque, qui faisait encore frissonner Jejomar, il lâcha :
— Tu lui ressembles. Comme tous ceux d’ici.
Son regard voilé lui donnait l’air d’un mort. Comme Jejo ne disait rien, trop intimidé, l’autre ajouta :
— Il m’en manque une. On m’a dit que je la trouverais ici sous le nom d’Analyn. Ça te parle ?
Jejo bafouilla, sa pierre à dessin encore serrée dans sa main droite. L’homme, sourcils froncés, se pencha encore davantage sur lui, comme pour le saisir aux épaules. Jejo recula instinctivement.
Puis, son père arriva - il descendait des champs. Après une poignée de mots, l’homme le suivit dans la nipa. Bientôt, Ina les rejoignit. Jejo entendit ses parents s’entretenir avec l’homme à voix basse, puis hausser le ton. La dispute dura longtemps, et Jejo reprit ses dessins.
Finalement, l’étranger sortit seul de la nipa, et le regarda encore, une veine gonflée sur la tempe.
— Ton prénom, gamin ?
— Jejo.
— Jejo Rivera, alors, laissa-t-il abruptement tomber.
Sa tête s’enfonça dans ses épaules.
— Oublie cette histoire, gamin. Oublie-moi, oublie tout. Et évite Baguio : on risquerait de se recroiser.
Jejo hocha la tête sans être bien sûr de comprendre ce que lui demandait l’inconnu. L’homme disparut par le chemin qui mène au village, et l’on n’entendit plus jamais parler de lui, ni d’Analyn.
Ce soir-là, les parents restèrent silencieux. Ina avait les yeux rouges. Après le repas, elle accompagna Jejo dans la nipa des enfants. Là, elle s’agenouilla pour se placer à sa hauteur et posa la main sur son épaule.
— L’homme de cet après-midi t’a demandé si tu connaissais Analyn, n’est-ce pas ?
Le garçon hocha la tête. Penser à l’homme aux larges mains lui serrait la gorge.
— C’est une petite de la vallée, comme toi, expliqua Ina. Elle a disparu, et des personnes qui lui veulent du mal la recherchent. Si quelqu’un te demande où elle est, tu devras leur dire qu’elle a disparu et que personne ne sait où elle se trouve. Ne parle jamais de l’homme de cet après-midi. C’est compris ?
Jejo hocha à nouveau la tête. Il sentait les larmes lui monter aux yeux. Ina lui caressa la joue et quitta la nipa.

*

— Analyn ?
Le marché battait son plein. L’homme était forcé de hausser le ton pour se faire entendre à travers le brouhaha.
— Oui, articula Jejomar. Elle vient de Nueva Vizcaya, mais elle habite à Baguio, maintenant.
A vrai dire, il n’en savait rien. Comme pour le reste, il improvisait.
— Et qu’est-ce tu lui veux, à cette fille ?
Plusieurs commerçants lui avaient conseillé de s’adresser au vieux marchand de fraises installé à l’angle. Apparemment, il savait tout et connaissait tout le monde. Jejomar s’aperçut vite que l’homme négocie ses secrets aussi bien que ses fruits.
— J’ai un message pour elle. Quelqu’un à qui je tiens beaucoup m’a demandé d’aller la voir.
C’était peut-être stupide, mais il ne disait jamais “ma mère”. Les gens n’avaient pas besoin d’entendre parler d’elle, ni de savoir qu’elle était morte. Jejomar, lui, n’avait pas besoin d’y penser.
— Et tu ne connais pas son nom de famille ?
Le jeune homme retint un soupir : la conversation tournait toujours de la même façon. Il répondrait encore une fois que non. Alors, le gars prendrait l’air de ne pas y toucher, et déciderait qu’il n’avait jamais entendu parler de cette Analyn. Les habitants de Baguio étaient accueillants, mais prudents.
— Non, je ne connais pas son nom. Elle vient de Nueva Vizcaya. Elle me ressemble peut-être un peu… hasarda-t-il.
Le vieux secoua la tête, buté. Un bref instant, Jejomar eut envie de le frapper. Il avait cru enfin tenir sa chance, et elle partait de nouveau en fumée.
L’autre fit mine de se retourner.
— Attendez ! Je cherche aussi un homme, hasarda-t-il. Il est… Il est chauve. Plutôt imposant. Les mains noires. Sûrement ouvrier, ou quelque chose comme ça…
Il se tut. Il avait brisé le secret. Quelque chose se serra dans son ventre. Des mains aussi larges que les cuisses sur lesquelles elles s’appuyaient, des veines gonflées sous la peau brune, maculée d’huile noire.
 L’homme le regardait à nouveau. Il le regardait vraiment, pour la première fois. Le pli de sa bouche et l’ombre dans son regard firent frissonner Jejomar.
— Toi, t’as pas l’air de savoir dans quoi tu t’es fourré...

*
 
Crisanto, en franchissant la porte du garage, plongeait dans la touffeur de la rue. A cette heure-là, les vendeurs de brochettes s’installaient sur les trottoirs, mais même l’odeur de grillé ne parvint pas à attirer son attention. Déterminé, Crisanto remonta l’avenue vers la colline et ses bicoques colorées. Avant d’arriver, il tourna à plusieurs reprises dans des ruelles, revint quelques fois sur ses pas.
Finalement, il tira de sa poche une clef, qui paraissait minuscule entre ses doigts épais.
Elle joua dans la serrure.
 
            Lorsque Crisanto ressortit dans la rue, une lune fauve luisait entre les nuages. Il se rendit dans un bar non loin, où, par le passé, il jouait beaucoup. Il s’était endetté d’ailleurs, à l’époque… Sans attendre, il but d’un trait son verre de rhum Tanduay. La nuit s’annonçait longue. Du moins, elle l’aurait été si Crisanto n’avait pas entendu des cris éclater dans la rue. Pesamment, il se redressa et descendit de sa chaise. A peine eut-il franchit le seuil du bar que ce qu’il entrevit le glaça d’effroi.
            La forme de sa maison se découpait en haut de la rue, bleu sombre sur fond noir, avec la cheminée de travers qu’il devait réparer. Sur le toit se tenait une silhouette, aux contours rendus flous par de longs voiles.
            L’esprit embrumé par l’alcool, la langue pâteuse, Crisanto beugla. Trop tard. La silhouette venait de disparaître par les toits.
Vacillant, il trottina jusque chez lui. Le tenancier le rappela, espérant obtenir son argent, avant de se raviser : il connaissait bien son homme, et le rattraperait plus tard.
Crisanto s’engouffra dans le salon saccagé. Du haut de ses dix-neuf ans, la gamine avait tout jeté au sol, y compris les cadres, et renversé les fauteuils. Crisanto parcourut les lieux, jusqu’au second étage, où béait la trappe du grenier. Par là, il distinguait les étoiles : Analyn avait crevé le toit, en déplaçant les tôles.
 Crisanto se laissa tomber à même le sol, où il vomit.

*

            Le lendemain, il pleuvait des cordes. Crisanto passa sa journée à arpenter la ville et ses lieux de débauche, dégoulinant, à la recherche d’Analyn. Le soir venu, enfin, il flaira une piste : un vieux marchand de rue avait rencontré son homme - le furet, comme l’appelait Sherwin.
    Crisanto serra les dents. La gamine choisissait bien son moment pour s’évaporer. Un type la cherchait, et s’il la trouvait… Les peurs de Crisanto se cristallisèrent sur la possibilité d’une rencontre entre Analyn et cet inconnu, lancé à ses trousses.
Qui qu’il put être, cette rencontre ne devait pas se produire.
— Alors, qui est-ce que vous cherchez, vous ? grinça le vieil homme en s’accoudant sur son étal.
            Crisanto et lui se trouvaient bien à l’abri contre le mur d’une grande baraque.
— Une jeune femme, à peine majeure. Elle a un tatouage d’oiseau sur la nuque, qu’elle recouvre de ses cheveux. Un grain de beauté sur le haut de la joue…
— A peine majeure, hein ? grinça l’autre, incrédule. Une prostituée, c’est ça ?
            Le vieux fronça ses sourcils gris sur des yeux que les horreurs de la vie avaient voilés. Crisanto secoua la tête.
— Vous ne voulez pas lui foutre la paix, à cette gamine, plutôt ?
            A ces mots, Crisanto sentit l’amertume le saisir. Il fit volte-face pour partir. L’autre le retint par le bras, d’un geste vif pour son âge. Sans se retourner, le mécano lâcha :
— J’essaie de la protéger.
            Le vieux haussa les épaules, le relâcha.
— Laissez-moi deviner. C’est une fille que vous avez récupérée, et qui est menacée par son type d’avant ? Votre amante ?
            Cette fois-ci, ç’en était trop pour Crisanto. Alors qu’il disparaissait au coin d’une boutique, il entendit l’autre lui crier :
— Si elle aime danser, essayez le quartier derrière le club Myles !
            Si elle aime danser… Crisanto n’avait pas envisagé d’aller chercher jusque dans les endroits les moins recommandables.
S’il y avait bien une chose au monde qu’Analyn aimait, c’était danser.

*

    Jejomar frissonna une nouvelle fois et se retint d’éternuer. Cela faisait bien une heure qu’il se trouvait sur le trottoir. Adossé à un coin de mur aussi sale que le reste de la rue, il s’efforçait d’observer tout en passant inaperçu. Le garage indiqué par le vieux était un bâtiment bas et décrépi, au toit de tôle et aux fenêtres condamnées. L’entrée principale, assez grande pour qu’une jeepney y passe, béait, noire et apparemment vide. Rien ne bougeait à l’intérieur. Jejomar avait d’abord pensé que l’endroit était abandonné, mais plusieurs personnes étaient venues et reparties en grommelant. De toute évidence, le propriétaire des lieux s’absentait sans prévenir.
    Comme les heures s’écoulaient et que personne ne semblait revenir, Jejomar rassembla son courage, tira sa capuche sur son visage, et traversa la rue. La pluie battante avait fait fuir les passants, et les véhicules circulaient trop vite pour lui accorder la moindre attention. Il inspira, et s’engouffra à l’intérieur.
    La pièce principale baignait dans l’obscurité. Jejomar distingua, aux murs, une multitude d’étagères recouvertes d’outils et de pièces de mécanique dont il ne connaissait ni le nom, ni la fonction. Le sol, une dalle de béton, était constellé de taches d’huile noire et de graisse luisante. Personne ne se trouvait ici, mais un client pouvait se présenter d’un instant à l’autre. Le coeur battant, le jeune homme chercha des yeux un bureau, une armoire, qui auraient pu receler les secrets du mécanicien. A la place, il avisa un filet de lumière dans un angle. Il s’approcha sans bruit. Un rideau épais remplaçait le mur à cet endroit. Il semblait donner sur une autre pièce. A moitié conscient de ce qu’il faisait, Jejomar tendit la main. Le tissu céda sans bruit. De l’autre côté, il découvrit le bureau qu’il cherchait. Des piles désordonnées de papiers recouvraient une planche posée sur deux tréteaux. Une machine à café ronronnait derrière deux fauteuils de cuir craquelé.
    Jejomar fit un pas en avant, et une lame se posa sur sa gorge.
— Pas un geste, le furet.

*

    L’homme, les cheveux noirs, le regard étonnamment clair, frisait la cinquantaine. Peau banale, silhouette commune. Le genre de personne qui passe inaperçue, songea Jejomar avec amertume. Son assaillant l’avait guidé jusqu’à l’un des fauteuils, et s’était installé dans l’autre, sans cesser de le menacer de son couteau.
— Alors, le furet. Tu as finalement décidé de te jeter dans la gueule du loup ?
— Je m’appelle Jejomar, pas “le furet”, glapit l’intéressé.
L’autre sourit. C’était plutôt un rictus, en fait, dissymétrique, presque malsain. Il ne lui donna pas son nom.
— Content de le savoir, mon gars. Maintenant, j’aimerais que tu me dises ce que tu viens faire ici.
— Je suis venu voir le propriétaire, rétorqua Jejomar, paniqué. Et je sais que ce n’est pas vous. Qu’est-ce que vous faites ici ? Vous ne travaillez pas ici, puisque tous les clients qui sont venus sont repartis sans trouver personne.
L’homme claqua de la langue.
— Quel talent d’espion ! J’imagine que tu t’es cru discret, planté là sous la mousson pendant Dieu sait combien d’heures.
Sur ces mots, il perdit son sourire et se leva soudain. Il agita la pointe de son couteau juste devant le visage de Jejomar, qui recula dans le fond de son fauteuil. Le jeune homme avala sa salive avec difficulté sous le regard glacial de son vis-à-vis. Ce dernier reprit :
— Te donne pas la peine de répondre, Rivera. Je sais déjà qui tu es et ce que tu veux. Cris et moi, on se connaît depuis des années. C’est moi qui te demandes ce que tu fais ici, pas l’inverse.
Il marqua une pause, et raffermit sa prise sur le manche du couteau.
— Alors, pour la deuxième fois. Dis-moi pourquoi tu viens fourrer ton nez dans nos affaires.
Jejomar avait de plus en plus de mal à garder une façade assurée.
— Je cherche Analyn. Je sais que vous la connaissez. Dites-moi où elle est, si elle va bien. Qu’est-ce que vous lui avez fait ?
Voilà, il avait tenté la sincérité. Son intuition lui soufflait que ça ne marcherait pas.
— Je sais bien que tu cherches Analyn, ricana l’autre. Tu le cries sur tous les toits de la ville depuis une semaine. Mais ça ne me dit pas ce que tu lui veux.
Comme Jejomar hésitait sur sa réponse, se demandant ce que l’homme avait envie d’entendre, celui-ci se mit à tourner autour du fauteuil où son otage était toujours assis. Il fit passer la lame de sa main droite à sa main gauche, puis de gauche à droite. Recommença. De plus en plus vite.
— Je ne lui veux pas de mal, dit le jeune homme.
Le couteau passa à gauche.
— Je… Je suis venu la chercher parce que ma mère me l’a demandé.
A droite.
— Elle voulait que je la ramène à la maison.
L’homme s’arrêta.
— A la maison ? répéta-t-il. Mais quelle maison ? Elle est ici, sa maison, pas chez les parents qui l’ont… abandonnée.
— Ses parents ne sont plus là depuis longtemps. Le typhon Haiyan les a fait disparaître. C’est chez moi que ma mère voulait la ramener.
— Et de quoi est-ce qu’elle se mêle, cette femme ?
Jejomar serra les dents.
— Ma mère ne se mêle plus de rien, grinça-t-il. Elle est morte.
De nouveau, l’homme resta silencieux. Il ne regardait pas Jejomar, ne le menaçait même plus.
— Morte, hein… murmura-t-il. Et ton père ?
— Parti il y a dix ans. Je n’ai plus jamais entendu parler de lui.
— Alors chez toi, plus personne ne la connaît, Analyn ?
Jejomar secoua la tête. L’homme se laissa tomber dans le deuxième fauteuil. De sa main libre, il tira nerveusement sur un lambeau de cuir brun. Jejomar, lui, ne savait que dire face à ce changement de comportement.
— J’ai soutenu Cris depuis le début, reprit finalement l’homme. Tout ce qu’il voulait, c’était la protéger, cette gamine, et il a bien fait. Mais ces derniers temps, il a complètement déconné.
L’homme se racla la gorge, se passa la main sur le front.
— Il me tuera s’il découvre que j’ai fait ça, mais… Je vais t’aider, le furet. Je crois que ce serait pas une mauvaise chose que vous ayez une discussion, elle et toi.

*

Crisanto l’avait trouvée. Arrivé en plein spectacle, il avait pris une chaise au fond de la salle enfumée. Des serveuses dégoulinantes de sueur fusaient entre les tables, un plateau collant au bout de chaque main, comme un prolongement de leurs doigts. Elle lui cachaient la vue, parfois. Alors, il agitait la main dans le vide, comme pour chasser une mouche, mais elles ne lui prêtaient pas attention. Du moins, ne semblaient pas lui en prêter. Elles l’évitaient. Personne ne paraissait se préoccuper de Crisanto, et il demeurait seul à sa table tandis qu’à l’opposé, sur une estrade, un groupe de jeunes femmes dansait.
Au bout d’un moment, ces dernières se retirèrent derrière le rideau, laissant place à un duo. Analyn se sentait exténuée d’avoir tant dansé. Elle s’assit d’un coup sur un tas de costumes qui traînait dans un angle. Sa mentor l’encouragea d’un clin d’oeil : on avait vu pire, pour des débuts.
Alors que la jeune fille se dirigeait vers la salle d’eau, quelqu’un l’appela. Elle se retourna et reconnut Sherwin. A la vue de l’ami de son “père”, son visage se ferma.
— Tu fais les courses de Cris ? grogna-t-elle.
L’autre haussa les épaules. Il s’attendait à ce qu’elle soit sur la défensive.
— Au contraire Ana. Je viens te présenter quelqu’un.
    Sherwin désigna Jejomar, qui se tenait en retrait. Il le poussa un peu vers elle, la main sur son épaule. Analyn, crispée, ignora le nouveau venu qu’on lui présentait.
— Tu ne me demandes même pas pourquoi je suis partie de chez Cris ?
— Il t’a élevée, je comprends que tu aies besoin d’un peu d’air, laissa tomber Sherwin. C’est jamais facile à ton âge…
Analyn lui coupa la parole, furieuse.
— Tu ne sais pas, alors. Son projet de départ à Manille. Je ne voulais pas m’y rendre. Il m’a enfermée dans la maison.
— Je savais pour Manille, murmura Sherwin, qui réalisait à l’instant que Crisanto et la jeune femme avaient dû se disputer violemment.
Aucun des deux n’avait remarqué la surprise de Jejomar, qui demanda soudain :
— Pourquoi veut-il t’emmener à Manille ?
Rejoindre les masses de la capitale pouvait être une solution pour se faire oublier, mais la vie n’y était pas douce.
— Tu viens de là-bas, c’est ça ? supposa brusquement Analyn. Qu’est-ce que tu me veux ?
— Pas du tout ! Je viens de Bayombong, plus loin dans les montagnes. Je n’ai rien à voir avec ce Cris. Ma mère ne voulait pas que tu restes avec lui.
Sherwin haussa les épaules, tandis qu’un musicien le contournait en grognant. Il glissa :
— Bien sûr qu’elle se méfiait.
— Attends, coupa Analyn, je ne comprends pas. Qu’est-ce que ta mère à à faire avec moi ?
Elle semblait de plus en plus perdue et gagnait en agressivité. Jejomar s’efforça de rester calme.
— Tu es trop jeune pour t’en souvenir, mais tu as grandi dans notre village, toi aussi, avant d’être enlevée.
    — On ne va pas en parler ici, intervint Sherwin, soudain nerveux. Venez.
    Aucun des trois n’avait repéré Cris, qui se levait de sa chaise, à l’autre bout de la salle.

*

    Sherwin, Analyn et Jejomar s’installèrent dans une arrière-salle, encore déserte à cette heure peu avancée de la soirée.
— Cris m’a adoptée, expliqua Analyn à Jejomar, pas enlevée.
    Sherwin la coupa.
— Il ne t’a pas exactement adoptée…
— Non, puisque je n’avais pas de papiers. Mais vous n’avez jamais voulu en parler. Et j’ai grandi cachée.
Sherwin se triturait l’oreille, le regard vide. Il avait pris sa décision. Il lâcha :
— En fait, Cris participait à un trafic de gamins.
Il y eut un silence.
— Il était dans la logistique, reprit Sherwin, mal à l’aise. Sur le terrain, des gars de son organisation achetaient les gosses, pour les revendre à des riches, parfois à l’étranger.
Une moue sombre étirait le visage d’Analyn. Ses craintes se confirmaient. Les questions qu’elle avait par le passé posées à Crisanto, sans succès, trouvaient aujourd’hui une réponse.
— La police philippine a démantelé le trafic avant que les bébés ne soient exportés, acheva Sherwin. Elle en a renvoyé certains dans leur famille, et d’autres ont été confiés à des orphelinats. Par chance, Cris n’a pas été pris.
    Analyn voulut protester, mais Sherwin la coupa.
— Par chance, oui. Il regrettait. Il voulait se racheter. D’autant plus que le trafic lui avait permis de rembourser ses dettes de jeux. Alors, il a pensé aux enfants qui étaient retournés dans leur famille. Est-ce que tu penses, toi, Jejomar, demanda-t-il brusquement, que le meilleur était de rendre ces enfants à leurs parents ? Leurs parents qui les avaient vendus une première fois ? Qui n’avaient même pas de quoi les nourrir ? Leurs parents, qui fondaient leurs espoirs de s’en sortir sur le projet de les vendre à nouveau ?
    Jejomar sentit les poils de sa nuque se hérisser, comme il pressentait la suite. Il sentait que beaucoup de choses n’allaient pas, mais il ne trouvait pas les mots pour répondre.
— Cris est retourné les chercher, poursuivit Sherwin. Du côté de Bayombong, il s’en trouvait quatre. Une fois repris, il a cherché à les placer. Pas facile de trouver des gens sérieux. Il n’en a placé que trois. Le dernier couple s’était rétracté au dernier moment, à cause des risques.
    Jejomar regardait les lèvres épaisses et craquelées de cet homme comme si c’était la dernière chose au monde. Les deux lèvres bougeaient l’une contre l’autre, se séparaient, se recollaient. La nausée le gagnait.
— Impossible de se débarrasser de la gamine, continua la voix rauque sortie d’entre les lèvres. Il l’a élevée.
— Je croyais…
    La voix d’Analyn s’étrangla dans un hoquet. Jejomar s’aperçut que la jeune fille pleurait.
— Je croyais qu’il m’avait recueillie ! s’écria-t-elle, les joues en feu.
— Il l’a fait.
— Et mes parents ? Ils sont à Bayombong, alors ?
— Sûrement des voisins de ceux de Jejo, confirma sobrement Sherwin. Sûrement que la mère de Jejo a vu faire, puis a décidé, peut-être un peu tard, d’intervenir.
Jejomar s’était demandé pourquoi sa mère ne lui avait pas donné plus d’indications. De toute évidence, la réponse était simple : elle n’avait aucune idée de l’endroit où pouvait se trouver Analyn.
Un silence s’abattit sur le groupe, avant qu’un vieil homme n’ouvre la porte pour les sommer de sortir. Le spectacle reprenait. Ils cherchaient la petite danseuse. Cette dernière leva un regard vide vers son patron, puis fixa Jejomar.
— Je veux y aller, laissa-t-elle tomber d’une voix blanche. Partons !
— Je t’y emmène, approuva vivement Jejomar, que la présence imposante de Sherwin éprouvait de plus en plus.
    Jejomar se leva d’un bond et tendit la main à Analyn, qui la saisit. C’est alors que Sherwin aperçut Crisanto dans l’encadrement de la porte. L’homme roulait des yeux fous, incapable de contenir sa fureur. Il se rua vers Analyn. Sherwin s’interposa, vif. Jejomar n’attendit pas davantage : il se précipita vers la sortie, entrainant Analyn à sa suite. Derrière eux, des bruits de coups étouffés se mêlaient aux insultes.
    Jejomar et Analyn passèrent derrière la scène à toute vitesse. Leurs semelles frappaient le bois, cassant le rythme des pas des danseurs. Un instant plus tard, il se retrouvaient dans la rue. La fraîcheur de la nuit les enveloppa. Analyn planta son regard dans celui de Jejomar et répéta, d’un ton sans appel :
    — Allons-y, partons.




(Haha, eh oui, ça se finit un peu en queue de poisson. Ça n'a pas été très facile d'improviser un scénario à quatre mains... mais c'était fun :))

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Re : [Défi de l'été] Analyn (avec Spes)
« Réponse #1 le: 24 août 2015 à 15:26:22 »
Hey, salut tout les deux!
Pas de commentaires, je remonte!


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Qui qu’il put être, cette rencontre ne devait pas se produire.
ki ki c'est k'il est?  :mrgreen:



Bon, je vais faire un commentaire global, j'ai plutôt bien aimé plein de trucs, mais mon impression c'est que je me suis senti un peu perdu
C'est peut être de ma faute, pas assez d'attention hein, mais trop de personnages pas assez developpés, les paragraphes en tant que jejo et cris, je me suis enmelé et souvent je devais voir en arrière pour savoir de qui et quoi on parlait vraiment
Je peux pas relever ces passages parce que prit dans leurs contextes ils semblent logiques, mais c'est l'impression générale que j'ai eu, et c'est peut etre le fait que ca a été écrit à deux, ou peut etre pas je ne sais pas comment vous avez procédé, mais la narration ne m'a pas semblé suivre l'ordre le plus fluide et logique qui soit
Et comment il connaissait le physique d'analyn alors qu'il ne l'a jamais vu?
La scène où il la retrouve dans le bar(?) manque peut etre de description pour poser plus l'ambiance

Voilà c'est pas mauvais et j'ai aimé le dépaysement, mais j'ai la sensation que les enjeux m'échappaient souvent, et en soit ca me dérangeait pas je pensais bien que tout se dénouerait, mais au final les  clarifications ont pas été 'à la hauteur' de mes phases d'errance en lisant. bref c'est très personnel comme retour et un ca serait bien d'avoir un autre avis...

Merci tout de même pour la lecture vous vous en êtes bien sorti  ^^
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Re : [Défi de l'été] Analyn (avec Spes)
« Réponse #2 le: 02 septembre 2015 à 12:39:13 »
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où tous ses frères et soeurs dormaient encore.
La lune brillait encore
répétition "encore"
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Il n’entendit pas l’étranger approcher. Il se souvenait encore parfaitement de son ombre, énorme et noire, qui apparut soudain sur le sol et l’engloutit. Les traits de l’homme restaient en revanche flous dans sa mémoire. Trapu, le crâne rasé, il se pencha au-dessus de Jejo, et celui-ci vit alors ses mains. Oui, il se souvenait surtout de ses mains, aussi larges que les cuisses sur lesquelles elles s’appuyaient, de ses veines gonflées sous la peau brune, maculée d’huile noire. L’homme le détailla pendant une éternité, comme s’il cherchait, dans les traits de son visage, à reconnaître quelqu’un d’autre.
je comprends pas l'alternance présent avec l'étranger / souvenirs
Et en fait j'ai compris en lisant la suite que à partir de "Il jouait donc dans la cour entre les nipas, probablement à dessiner sur la terre ou à inventer des systèmes d’irrigation révolutionnaires avec des feuilles et des morceaux de bois." jusqu'à "*" c'est un souvenir, mais c'était pas clair au début, j'étais perdue
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Jejomar s’aperçut vite que l’homme négocie ses secrets aussi bien que ses fruits.
négociait
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Elle lui cachaient la vue, parfois.
elles
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Analyn se sentait exténuée d’avoir tant dansé.
ça fait bizare d'avoir le point de vu d'Analyn alors que ça n'a jamais été le cas
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Elle se retourna et reconnut Sherwin.
mais juste avant c'était Crisanto qui l'avait trouvée ?
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Une moue sombre étirait le visage d’Analyn. Ses craintes se confirmaient. Les questions qu’elle avait par le passé posées à Crisanto, sans succès, trouvaient aujourd’hui une réponse.
inutile, les dialogues sont déjà très coupés, c'est un passage qui peut partir
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Il sentait que beaucoup de choses n’allaient pas
bof
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— Impossible de se débarrasser de la gamine, continua la voix rauque sortie d’entre les lèvres. Il l’a élevée.
ben, si, la mère de Jejomar l'avait adoptée  :???:



Je suis mitigée. D'un côté, toute la partie du texte où on cherche qui est Analyn, ce qui s'est passé, est très intrigante, j'avais très envie de lire la suite. De l'autre, la fin manque d'impact  :-[ Au niveau idée/explication je pense que c'est pas mauvais, mais il faudrait la réécrire (à partir de "Crisanto l’avait trouvée. Arrivé en plein spectacle, il avait pris une chaise au fond de la salle enfumée.") pour lui donner plus d'impact. Là ça me parait vraiment expédié, les personnages sonnent creux. Ils ne réagissent presque pas aux révélations ! ou trop rapidement (genre Analyn qui veut partir avec Jejo)

Pour le début du texte, j'ai parfois été un peu gênée par les alternances de personnages mais ça passe, et j'étais vraiment intriguée. Mais du coup avec la fin qui tombe à plat, je n'arrive pas à vraiment apprécier le texte, parce que tout mène à l'explication  :-[
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Re : [Défi de l'été] Analyn (avec Spes)
« Réponse #3 le: 10 janvier 2016 à 20:04:09 »
Yop !

avec un long retard, je lis enfin ce texte qui m'avait fait de l'oeil ^^

au fil du texte...
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Un soir, elle les réunit tous autour de sa couchette.
globalement je suis pas fan des pronoms censés renvoyé à qqch qui renvoient à rien  :-\ je trouve que l'effet mystérieux que ça devrait rendre ne marche pas. je capterais mieux un "son monde" je crois.

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A ce moment-là, il sembla à Jejomar que toute la brume qui recouvrait les yeux d’Ina s’en allait pour laisser place à une tristesse mélancolique. Il lui avait déjà vu ce regard-là :
ce "-là" me semble inutile et crée une redondance avec "ce moment-là"

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Une route unique, ambitieuse, osait l’escalade, pour relier Baguio à la Nueva Vizcaya par le lac Ambuklao.
je comprends pas ce que veut dire "une route ose l'escalade"  :\?

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Il n’entendit pas l’étranger approcher. Il se souvenait encore parfaitement de son ombre, énorme et noire, qui apparut soudain sur le sol et l’engloutit. Les traits de l’homme restaient en revanche flous dans sa mémoire. Trapu, le crâne rasé, il se pencha au-dessus de Jejo, et celui-ci vit alors ses mains. Oui, il se souvenait surtout de ses mains, aussi larges que les cuisses sur lesquelles elles s’appuyaient, de ses veines gonflées sous la peau brune, maculée d’huile noire. L’homme le détailla pendant une éternité, comme s’il cherchait, dans les traits de son visage, à reconnaître quelqu’un d’autre. Puis, d’une voix rauque, qui faisait encore frissonner Jejomar, il lâcha :
ce passage et la suite du flash back devraient avoir des plus-que parfait plutôt que des passés simples il me semble.

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Apparemment, il savait tout et connaissait tout le monde. Jejomar s’aperçut vite que l’homme négocie ses secrets aussi bien que ses fruits.

négociait ?

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Il se tut. Il avait brisé le secret. Quelque chose se serra dans son ventre. Des mains aussi larges que les cuisses sur lesquelles elles s’appuyaient, des veines gonflées sous la peau brune, maculée d’huile noire.
je en comprends pas à quoi la partie en gras se rapporte. ou elle fait partie du dialogue ? (auquel cas faut revenir à un tiret dialogue)

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Le jeune homme avala sa salive avec difficulté sous le regard glacial de son vis-à-vis.
je ne connaissais pas cette utilisation :\?

hop là, tout lu !
Bon alors je rejoins complétement ce que dit Kailiana.
J'étais très intriguée par l'histoire, je trouvais le rythme bon, la bascule entre les point de vue de persos dans les parties chouette. L'écriture est fluide et immersive, agréable. Bref, du tout bon, et puis hop la fin  :-\
expéditive, pas vraiment finie... (tout peut encore se retourner, et quel est vraiment l'intérêt de retourner là bas comme si elle s'enfuyait alors qu'en soit personne ne l'attend...)
c'est teeeeellement dommage :(
ya un gros gros potentiel, mais un vrai besoin (à mon sens hein) de complétement rescénariser la fin  :-\

merci pour ce chouette duo, même s'il a un goût d'inachevé !  ^^

Milla

Hors ligne Elk

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Re : [Défi de l'été] Analyn (avec Spes)
« Réponse #4 le: 13 janvier 2016 à 22:43:15 »
Salut Milla, et merci pour le passage ! (Merci beaucoup Ben.G et Kail' aussi d'avoir lu ce long pavé, Spes et moi on vous a répondu de vive voix et un peu rapidement il me semble :-[)

Je pense que vous avez tous les trois relevé le problème majeur de ce texte : on l’a écrit en se coordonnant mais sans avoir construit le scénario jusqu’au bout, et il s’est avéré que nos modes d’écriture ne collaient pas bien sur ce type d’exercice (et notre imagination du moment pas assez au rendez-vous, de toute évidence :mrgreen:).
Le texte a aussi traîné quelques mois, jusqu’à ce qu’on se dise que si on voulait le finir, il fallait le faire rapidement… mais visiblement ce n’était pas ce qu’il fallait au scénario ^^.

Cela dit, si la première partie t’a convaincue, c’est encourageant ! Ça me donne envie de me repencher dessus un de ces jours pour écrire une fin plus dramatique et plus « à la hauteur ».

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Une route unique, ambitieuse, osait l’escalade, pour relier Baguio à la Nueva Vizcaya par le lac Ambuklao.
je comprends pas ce que veut dire "une route ose l'escalade"  :\?
Ça doit être une invention de mon cru :mrgreen: c'était une personnification de la route qui a été construite sur un versant très raide mais... oui, c'est peut-être pas très clair  :-¬?

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Il n’entendit pas l’étranger approcher. Il se souvenait encore parfaitement de son ombre, énorme et noire, qui apparut soudain sur le sol et l’engloutit. Les traits de l’homme restaient en revanche flous dans sa mémoire. Trapu, le crâne rasé, il se pencha au-dessus de Jejo, et celui-ci vit alors ses mains. Oui, il se souvenait surtout de ses mains, aussi larges que les cuisses sur lesquelles elles s’appuyaient, de ses veines gonflées sous la peau brune, maculée d’huile noire. L’homme le détailla pendant une éternité, comme s’il cherchait, dans les traits de son visage, à reconnaître quelqu’un d’autre. Puis, d’une voix rauque, qui faisait encore frissonner Jejomar, il lâcha :
ce passage et la suite du flash back devraient avoir des plus-que parfait plutôt que des passés simples il me semble.
Yep, y a clairement un problème de concordance des temps ici, Kailiana l'a aussi relevé en plus.

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Il se tut. Il avait brisé le secret. Quelque chose se serra dans son ventre. Des mains aussi larges que les cuisses sur lesquelles elles s’appuyaient, des veines gonflées sous la peau brune, maculée d’huile noire.
je en comprends pas à quoi la partie en gras se rapporte. ou elle fait partie du dialogue ? (auquel cas faut revenir à un tiret dialogue)
Un problème d'italique qui n'est pas passé au moment du transfert sur le forum ! Ça renvoie à une description déjà faite au-dessus il me semble.

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Le jeune homme avala sa salive avec difficulté sous le regard glacial de son vis-à-vis.
je ne connaissais pas cette utilisation :\?
Ici par contre, je ne suis pas responsable de l'expression inconnue :noange:

Encore une fois, merci beaucoup :coeur:, et puis un jour on se retroussera les manches et on le reprendra, ce texte :).

 


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