Le Monde de L'Écriture – Forum d'entraide littéraire

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Auteur Sujet: Présentation (longue) d'un p'tit nouveau  (Lu 1486 fois)

Hors ligne Bruno

  • Plumelette
  • Messages: 8
Présentation (longue) d'un p'tit nouveau
« le: 24 octobre 2019 à 03:49:08 »
Bonjour à tous,

      J'ai 44 ans et suis venu très, très, mais alors très tardivement à la littérature. Rien de m'y prédisposait. Ce dont je rêvais depuis tout petit, c'était de faire une carrière scientifique, plus précisément, faire de la recherche en physique. Mais la vie vous réserve parfois de mauvais tours et, pour des raisons un peu longues à exposer maintenant, je suis tombé malade et j'ai quasiment décroché : j'ai suivi mes études secondaires par correspondance et obtenu mon baccalauréat. Par la suite, je ne suis parvenu à valider qu'un Deug de mathématiques, toujours par correspondance. Le reste du temps, j'étais fourré chez quantité de psys à essayer telle thérapie, tel traitement, sans que soit jamais posé un diagnostic clair. C'était, et c'est toujours une vie derrière la vie, comme une vie dans les coulisses sans jamais pouvoir entrer en scène.

    Ce qui caractérise ma personnalité c'est qu'elle est composée d'éléments qui n'ont pas évolué au même rythme ce qui la rend totalement dysfonctionnelle dans la société. Sur le plan de la pensée logique, je me suis développé à peu près comme tout le monde, mais d'un point de vue affectif, je suis resté "gelé" à 13 ans (au plus) : j'ai un fonctionnement émotionnel très immature. Je suis notamment dans l'incapacité de faire face au moindre conflit : il y a certes la crainte mais également autre chose de plus effrayant : c'est que, pour se défendre lors d'une attaque, il faut parler au nom de soi : il faut qu'il y ait, à la base de son discours un Moi solide, qui est un peu comme la roche mère de la personnalité, et sur lequel, d'ailleurs, on s'appuie durant toute son existence ; or, moi, je le découvre de plus en plus, je n'ai pas de Moi : je ressens fortement l'absence d'une identité fondatrice au nom de laquelle je pourrais parler aux autres, au nom de laquelle il me serait possible de me sentir légitime, et, finalement, au nom de laquelle je pourrais prétendre à posséder, comme les autres, une dignité.

   Mon problème est réellement existentiel et, c'est là, que j'ai découvert le lien qu'il avait avec la littérature, avec les mots. Je n'ai jamais pu travailler (je perçois une modeste allocation pour vivre), n'ai jamais pu nouer une relation amicale avec quiconque, et, en guise de famille, je n'ai connu qu'une version soft de celle du petit Grégory. Toutes ces choses qui me mettent à part, je les vis comme une honte, et, parfois, comme le résultat d'une faute que j'aurais commise (mais laquelle ? et à quel âge ? et, au fond, que me reprocherait-on ?). Le fait est que, dans mes rapports avec les autres, cette béance en moi provoque un sentiment de malaise qui induit, soit l'indifférence (détournons-vite de cet individu), soit l'agressivité, la méchanceté bête ou la cruauté du rire. Je me suis souvent entendu dire, sur des forum peu recommandables des choses telles que "suicide-toi, tu rendras service à tout le monde" ou bien "parasite, tu vis avec mes impôts", etc. Et je me sentais, à chaque fois, illégitime à vivre, je prenais volontiers le parti des agresseurs, me disant que, d'un point de vue rationnel, ils avaient tout à fait raison : je ne sers à rien, ne produit rien, je suis un lest fort coûteux accroché à la société. Et cette question de la cruauté envers les plus faibles m'a obsédé, et continue à le faire, depuis de nombreuses années. Où s'origine le rire cruel, pourquoi la faiblesse est-elle perçue comme une faute morale, presque comme une délinquance qu'il faut sanctionner d'une façon brutale ou bien, du côté du grotesque, prête-elle à un rire barbare et tout autant destructeur ? Dans des ouvrages d'éthologie, j'ai pu lire, par exemple, que la plus part des animaux avaient des comportement au mieux agressifs, au pire destructeurs envers les plus faibles de leurs progénitures. C'est ainsi un comportement qui est profondément inscrit dans la nature du vivant et, peut-être, même dans la nature tout entière avec son principe d'économie où chaque système tend à évoluer vers son état d'énergie minimale ?

    Bref, il y avait cette situation, ce vécu brut (un peu comme le Réel de Lacan) de "l'idiot du village" qui se fait malmener par des brutes riantes (un peu, si vous avez lu crime et châtiments, comme dans le premier rêve de Raskolnikov, celui où, avec son père, il assiste à la mise à mort de la "pauvre rosse" par une bande d'ivrognes brutaux) et, d'un autre côté, l'impossibilité de mettre des mots sur ce vécu. Cette absence de mot fait naître une rage impuissante mais sans voix, c'est un cri silencieux de la chair, tous les muscles de la bouches, du visage et du coup sont tendus à exploser mais restent figés dans un silence effrayant. Parce qu'avoir accès aux mots c'est précisément ne plus vivre, de façon animale et souterraine, dans le silence de la chair mais s'éveiller à la lumière de la conscience : comprendre ce qui se passe, ne plus vivre dans un monde inintelligible (illisible) mais dans un monde où les choses font sens : c'est faire entrer en jeu la fonction symbolique qui permet de jouer avec les choses absentes, de les réarranger, d'anticiper de nouvelles combinaisons.

  J'ai souvent cherché la réponse dans divers livre de psychologie ou de sociologie mais sans succès. Maintenant, je crois comprendre pourquoi (bien qu'il y ait de bons psychologues et de bons sociologues) : c'est que, en tout cas dans l'approche moderne de ces disciplines, le psychologue ou le sociologue, lorsqu'il décrit un fait, se met en dehors de ce dernier, comme s'il décrivait un objet du monde physique. Il procède à une réification puis opère sur l'objet ainsi mis à disposition de son regard, censé neutre. Mais c'est un leurre : à partir du moment où on a affaire à des hommes et où on leur parle on est pris à part entière dans un système d'échange : on ne peut pas, dans le cadre d'un échange langagier, adopter une position d'observateur non participatif. Il n'y a pas, dans les mal nommées sciences humaines, d'oeil objectif, d'oeil aseptisé : le regard qu'on porte sur un autre est constamment conditionné par ses actions et ses paroles, c'est un regard qui pense en fonction de l'autre, dans lequel on se voit vu par l'autre (c'est très bien exposé dans l'Alcibiade de Platon) : une dynamique se crée, laquelle nous entraîne comme dans un cercle. Si les sciences de la nature ont toute légitimité pour objectiver ce qu'elles étudient (et elles ne peuvent pas faire autrement, d'ailleurs), il n'en est pas de même des "sciences" de l'homme qui, se faisant, en viennent à nier le sujet : l'homme ne peut pas être mis en équation.

   Ainsi, concernant mon problème, pratiquement aucun éclaircissement obtenu après mes lectures sociologiques ou psychologiques. Et, d'un seul coup, il y a un peu plus d'un an, un art que j'avais totalement ignoré : la littérature et, plus précisément, le roman. Enfin quelque chose qui faisait le lien entre les situations existentielles et leur élucidation, un art qui fournit des mots (la puissance du "mot précis" quand on le trouve !), des mots qu'il faut travailler, dont on doit étudier les sens possibles pour que, petit à petit, comme par une sorte de mise au point photographique, l'évidence libératrice surgisse, libératrice en ce sens que, lorsqu'on comprend, on peut enfin agir (qu'est-ce que l'aliénation si ce n'est l'impossibilité d'agir ?). C'est avec la lecture de trois romans bien connus de Philip Roth (J'ai épousé un communiste, Pastorale américaine et La tache), parallèlement à lecture des trois essais de Kundera (L'art du roman, Les testaments trahis et, surtout, Le rideau) que le "déclic" m'est venu : j'ai perçu que, pour moi aussi, comme Madame Bovary, tout se passait comme si un rideau était placé entre moi et le monde, que je vivais pétri de préjugés, de mythes et de pensées toute faites et que mon but serait à présent de déchirer le rideau. J'ai évalué, de façon toute théorique, la possibilité de ce projet à travers la lecture des trois romans de Roth que j'ai cités : Ira Reinghold prisonnier du rideau-miroir de l'amour inconditionnel des opprimés (en défendant les opprimés, ou en prétendant le faire, c'est le plus souvent l'image que nous avons de nous en train de les défendre que nous aimons, plus que les opprimés qui finalement ne sont qu'un accessoire au gouffre de notre vanité) ; Seymour Levov, l'homme qui vit hypnotisé par le rideau du mythe des bonnes vertus citoyennes : civilité, respect de l'autre, patriotisme, Amérique idéalisée, le forçant à porter, en toute circonstance et inconsciemment, le masque de la vertu et faisant taire son être propre, au point qu'on se demande si ce dernier a vraiment jamais existé pour lui, s'il y a vraiment quelqu'un derrière ce masque ; enfin Coleman Silk, l'homme de la trahison du père et du groupe qui, pour avoir voulu être pleinement lui-même, déraciné, se trouve prisonnier de son mensonge. 

   C'est ainsi que depuis relativement peu de temps, je m'efforce de trouver des réponses à mes questions à l'aide de la littérature. Je suis encore loin d'y arriver. Il me faut pour cela, non seulement plus de lectures mais aussi analyser la langue dans ses plus élémentaires composants : les sons et les mots, d'où l'étude de la linguistique et de la grammaire qui peuvent être extraordinairement compliquées.

   D'autre part, je commence également à comprendre qu'il me faut essayer d'écrire car, quand bien même ma lecture serait active, il me faut, moi aussi, parler. Et comme j'ai de plus en plus tendance à le penser : pour apprendre à écrire, il faut lire et pour apprendre à lire, il faut écrire.

   Et voilà comment je me retrouve sur ce forum. Mon objectif : relier entre eux les mots et le vécu au moyen de ce pont qu'est la littérature.

A bientôt à tous sur le forum,
Bruno
     
« Je me suis toujours efforcé d’aller dans l’âme des choses… »

Hors ligne Jonque

  • Troubadour
  • Messages: 384
Re : Présentation (longue) d'un p'tit nouveau
« Réponse #1 le: 24 octobre 2019 à 12:32:15 »
Bonjour Bruno :)

Voici quelques questions de bienvenue :
-Saxophone ?
-Thé au jasmin ou glace pistache ?
-Les réponses des deux questions précédentes mélangées, ça donne quoi ?
"Un chien géant, c'est comme un chien mais en plus grand"
Un chien géant - Ultravomit

Hors ligne Manu

  • Calame Supersonique
  • Messages: 1 535
Re : Présentation (longue) d'un p'tit nouveau
« Réponse #2 le: 24 octobre 2019 à 14:06:04 »
.
« Modifié: 11 juillet 2022 à 15:54:10 par Manu »

Hors ligne txuku

  • Palimpseste Astral
  • Messages: 2 544
    • BEOCIEN
Re : Présentation (longue) d'un p'tit nouveau
« Réponse #3 le: 24 octobre 2019 à 19:24:38 »
Bonsoir et bienvenue ! :)

J ai ete frappe  dans ta presentation par l accumulation d affirmations - d axiomes - qui me semble t il te ferme beaucoup de portes ??? :-[

Ces portes il faut les ouvrir une a une et peut etre te lancer dans des lectures plus optimistes ( quoique je n ai lu aucun des livres que tu cites !  ::) )
Je ne crains pas d etre paranoiaque

"Le traducteur kleptomane : bijoux, candelabres et objets de valeur disparaissaient du texte qu il traduisait. " Jean Baudrillard

Hors ligne Bruno

  • Plumelette
  • Messages: 8
Re : Re : Présentation (longue) d'un p'tit nouveau
« Réponse #4 le: 24 octobre 2019 à 21:48:33 »
Merci à tous pour votre accueil !

Non, je n'ai pas réellement écrit quoi que ce soit encore. J'ai bien quelques essais dans mes fichiers mais pas du tout satisfaisants à mes yeux : ce sont juste des projections brutes sans aucune maîtrise du langage et de la forme, bref c'est encore inculte et grossier (au sens de quelque chose qui déborde de partout comme si quelqu'un que vous ne connaissiez pas venait tout à coup vous parler sans but, en désordre et avec un vocabulaire très pauvre).

Pour l'instant, je me fixe des objectifs très modestes : par exemple faire le croquis d'un personnage : description de son allure, visage, ses vêtements, tous ces petits éléments apparemment insignifiants mais qui sont effectivement des sortes de panneaux qu'on brandirait au-dessus de sa tête et où serait écrit : je suis ceci ou cela, soit qu'on le revendique, soit (cas beaucoup plus intéressant) qu'on n'en ait même pas conscience, pensant en fait être un autre comme si le panneau portait, pour soi, une autre inscription que celle que lisent les autres. Quoi qu'il en soit, c'est assez difficile. J'aurais sans doute beaucoup recours au forum pour ces petits exercices.

Sinon, pour les questions de la Sphinge de Jonque :
Bonjour Bruno :)

Voici quelques questions de bienvenue :
-Saxophone ?
-Thé au jasmin ou glace pistache ?
-Les réponses des deux questions précédentes mélangées, ça donne quoi ?

Eh ben... Euh...  :-[

- Sax ou phone... ? Plutôt faune, j'aime bien la nature.
- le thé au jasmin de Suzanne est un peu fade, je choisis donc la pistache.
- M'enivrer de pistache au bruit d'une bacchanale d'écureuils se pourchassant sur les branches d'un sapin.




Allez, bonne soirée à tous et à bientôt,
B.


« Modifié: 24 octobre 2019 à 21:50:07 par Bruno »
« Je me suis toujours efforcé d’aller dans l’âme des choses… »

 


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