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Auteur Sujet: L'intérêt de la littérature  (Lu 2894 fois)

Hors ligne Cyr

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L'intérêt de la littérature
« le: 19 juillet 2017 à 19:20:18 »
Bonjour,
Cela fait parti des éternels questions que je me pose. Quel est l'intérêt de la littérature, pour moi, et pour les autres?

Peut-être ce sujet a-t-il déjà était traité par ailleurs ?
« Modifié: 19 juillet 2017 à 21:07:49 par Cyr »
"Il y a deux sortes de poètes : les bons, qui brûlent leurs poèmes à l'âge de dix-huit ans, et les mauvais, qui continuent à écrire de la poésie jusqu'à la fin de leurs jours." Umberto Eco

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Re : L'intérêt de la littérature
« Réponse #1 le: 19 juillet 2017 à 22:51:51 »
Désolé, vous n'êtes pas autorisé à afficher le contenu du spoiler.


Je peux comprendre ta question, certaines personnes ne voient pas forcément l'intérêt de travailler son écriture, de savoir manier la langue ou de déployer tous ses efforts sur des textes attirants.

Pour ne pas auto-centrer ma vision de la littérature, je me permets de proposer un poème de Baudelaire (ci-dessous) qui donne un certain regard sur ce sujet.

Désolé, vous n'êtes pas autorisé à afficher le contenu du spoiler.


Tu peux également te référer à Pourquoi écrire qui te permettra de retrouver la vision de pas mal de monde (à étudier sans hésitation).

Pour autant, je me permets de revenir sur l'angle de ta question qui dit : « Écrire, est-ce mettre un médicament dans de la confiture ? » où tu renvoies vers une écriture qui ferait passer une prescription (le médicament), qui lui donnerait quelque chose de stimulant (le plaisir). On peut effectivement employer l'écriture dans ce sens, de nombreuses agences publicitaires l'ont compris.

La langue peut convaincre, elle peut également persuader, voire tromper.

Quel intérêt à écrire ? Quelles perspectives ? D'abord il faut savoir que maîtriser les lettres permet à quelqu'un d'apparaître sous un jour ou sous un autre, d'aller là où d'autres ne pourront pas aller. Effectivement, avaler un médicament n'est pas très ragoûtant, mais il existe bien des vérités plus douloureuses encore. Le propre de la littérature, c'est qu'elle sait dire les choses par détours ou d'une façon très bien orientée. On sait qu'un écrit permet de prendre en compte des situations d'une telle gravité (tabous/secrets) qu'il peut assurer un dialogue et une réflexion là où cela paraîtrait à priori impossible.

Il est forcément utile de considérer cet aspect de l'activité littéraire.

Écrire, c'est donc assurer un espace d'échange et d'ouvertures (y compris d'un point de vue commercial...). On peut avoir recours à des auteurs expérimentés pour mettre en place une base sémantique qui soit à la fois constructive, efficace et pratique, cela concerne toute activité ayant recours au langage (commercial, politique, idéologique, scientifique, etc.).

Ça, c'est pour l'écriture en tant que moyen d'agir et de penser ; voire de transmettre un savoir interdit ou inaccessible. Ce serait une littérature qui régule les orientations sociales et les techniques d'expression orale et écrite.

Par extension, la littérature a une véritable capacité de transformation sur la culture et les traditions d'une société. Il suffit de rendre une situation compréhensible ou incompréhensible pour toucher adroitement l'opinion. On a parfois les moyens de tourner ses ennemis en dérision. Cela concerne directement les habitudes, les affections, la morale, les libertés, la légitimité ou encore la considération. Un puissant texte peut dégrader l'image d'un homme ou d'un organisme, d'un métier ou d'une science. Une fiction peut également valoriser une profession ou une attitude comme le courage ou l'amitié. Cela touche également l'intimité, le moral ou l'intellect. Un texte bien pensé peut rendre une aspiration stupide ou dérisoire, prestigieuse ou étrange, accessible ou obscure.

Maîtriser la littérature confère un rôle à l'auteur et à son environnement (édition, diffusion), l'auteur se porte responsable des propos tenus et engagements évoqués. Il est directement concerné par les sujets qu'il traite : la famille, les statuts, l'idéologie, la mémoire, les propriétés, etc. On juge une démarche d'écriture à sa continuité dans les principes développés par l'auteur et à la cohérence des différentes publications.

En réalité, c'est aujourd'hui la littérature qui définit ce qui est intéressant ou non ; car ce qui suscite l'intérêt se parle et se discute.

On entreprend une démarche littéraire lorsque l'on considère qu'elle est le meilleur moyen d'arriver à ses fins, d'assurer un résultat.

Ce qui en ressort est très large, d'où la multitude d'aspirations que peuvent avoir les auteurs (et les débats qui s'en suivent...), la littérature est en constante transformation, elle se fait une place dans le monde petit à petit.
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Nonsense

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Re : L'intérêt de la littérature
« Réponse #2 le: 20 juillet 2017 à 01:26:17 »
Je ferai une réponse plus courte, une réponse incomplète car je suis trop fatigué pour développer (et puis quand bien même, je n'ai pas LA réponse). Je pense que la littérature n'a pas qu'un seul intérêt et je serais assez sensible à l'idée de transformation évoquée par Alan Tréard.

L'aspect qui m'intéresse le plus en littérature est la métabolisation du réel. Le réel (qui déjà en tant que concept absolu est largement à nuancer) passerait par le "foie" qui serait l'écrivain, lequel le métaboliserait en autre chose. Je dirais qu'un écrivain peut transmettre un message dont le caractère n'est pas purement informatif. Un certain regard finalement, qui pioche dans les millions  d'éléments qui composent la réalité pour en recomposer une image (terme encore une fois questionnable), peut-être du sens. Du sens à partir d'une sorte de chaos, je ne sais pas.

Bref, ceci n'est qu'une réponse très très subjective, qui ne se base QUE sur des réflexions personnelles instinctives, donc c'est à creuser et surtout à mettre avec d'autres réponses. De toute façon, il n'y a pas une seule réponse. La littérature existe au Moyen-Âge, son intérêt est -je crois- encore tout autre. Encore que.

Hors ligne Cyr

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Re : L'intérêt de la littérature
« Réponse #3 le: 22 juillet 2017 à 07:16:17 »
Merci Alan Tréard pour tous ces éléments.
Pour ce qui est du médicament dans la confiture, il s'agit d'une idée présentée dans un texte qui se voulait persuasif. Le médicament était une certaine vérité véhiculée par le fond du poème, la confiture la forme du poème.
Enfin, on pourrait vite s'enfermer dans son point de vue personnel sur le sujet (l'intérêt de la littérature) et passer à côté des approches que tu présentes qui sont pourtant plus communément admissibles.

Mais les points de vue subjectifs Nonsense qu'ils soient aboutis ou non, m'intéressent aussi.
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Re : L'intérêt de la littérature
« Réponse #4 le: 22 juillet 2017 à 18:17:54 »
En réalité, je t'ai esquissé là une vision très "matérialiste" de la chose, axant le terme intérêt dans le sens employé par Rousseau, l'intérêt aussi au sens où le politique l'entendrait.

Il faut concevoir que celles & ceux qui ne maîtrisent pas suffisamment la langue n'ont pas toujours conscience de ce qu'elle détermine au quotidien.

Il est normal, et même nécessaire, que chaque auteur puisse se faire un sentiment plus intime de ce que lui apporte la littérature ; notamment lorsqu'une auteure ou un auteur revendique une démarche de transformation de son environnement. On se doit de réécrire son identité, de participer à l'évolution de la littérature et de la place qu'elle a pris peu à peu.

Disons que c'est ma définition un peu barbare qu'on pourrait distribuer dans un dictionnaire à apprendre par cœur, mais qu'il ne faut pas pour autant méconsidérer la relation personnelle qu'une ou un auteur professionnel entretient avec son activité, ni même celle de gens plus discrets qui n'ont jamais fini de brandir la plume pour des raisons qui leur appartiennent.
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Hors ligne pehache

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Re : L'intérêt de la littérature
« Réponse #5 le: 28 juillet 2017 à 09:35:15 »
"En réalité, je t'ai esquissé là une vision très "matérialiste" de la chose, axant le terme intérêt dans le sens employé par Rousseau, l'intérêt aussi au sens où le politique l'entendrait."
Confus ou non explicité. Tu pourrais développer ?

Hors ligne Alan Tréard

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Re : L'intérêt de la littérature
« Réponse #6 le: 28 juillet 2017 à 17:47:15 »
Oui, bonjour pehache, c'est vrai que ça reste une question d'actualité. Cyr posait la question suivante : quel intérêt y a-t-il à apprendre à écrire ? à devenir écrivain ?

Le mot intérêt est sujet à interprétation.

Rousseau donnait un sens à intérêt en se référant à la société : l'homme en société, une société de la propriété privée, sert habituellement ses intérêts personnels contre les intérêts d'autrui. L'homme verrait en les autres une éventuelle menace pour ses propres acquis, se positionnant en individu défendant ses propriétés face à ses rencontres. Ce serait un homme tourné vers lui-même, à la recherche de son propre bien en servant ses intérêts personnels.

Cette question d'intérêt est au cœur de sa philosophie.

Rousseau préconise par ailleurs de servir un intérêt général (l'intérêt de tous) pour son propre bien (bien dans le sens immatériel ou métaphysique). Ici, c'est l'intérêt de l'ensemble constituant l'État qui doit devenir le moteur de l'individu, de l'identité morale. L'intérêt général, celui de tout homme (et femme, évidemment) non plus en tant qu'individualité, mais en tant que société.

C'est le contrat social.

Intérêt, ici, a une tendance intrinsèquement politique.

Bien sûr, je ne suis pas Rousseau, j'en délimite assez mal les bords, le mieux reste encore de se rendre capable de lire ses bouquins soi-même. Disons que je préfère insister sur l'orientation de ma pensée pour ne pas sembler la rendre incontournable et absolue.

On pourrait voir l'intérêt de la littérature autrement sans pour autant se tromper.

Cependant, quand j'entends intérêt ici, je m'adresse à ce contrat social, à cette orientation-là de l'intérêt.

On pourrait très bien orienter la question de l'intérêt d'un point de vue spirituel (la foi) ou financier (=l'intérêt c'est  d'avoir beaucoup plus d'argent) ; mais il s'agissait pour moi de l'évocation politique ou sociale du mot intérêt. Cela pouvait également donner un point de vue sur ce que pouvait être la littérature pour l'intérêt général, et en quoi elle se définissait dans un contexte social.

On est en droit de se poser la question de l'utilité d'un forum d'écriture, de son intérêt.

J'ai cru comprendre que Cyr utilisait le mot intérêt dans ce sens-là, raison pour laquelle je me suis orienté sur cette pente. Quelle place a l'écriture dans notre environnement quotidien ?
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Re : L'intérêt de la littérature
« Réponse #7 le: 28 juillet 2017 à 20:21:34 »
Réponse spontanément irréfléchie :

Je me faisais la réflexion suivante pas plus tard que y'a pas longtemps : les lecteurs, les libraires, les éditeurs et les auteurs partagent la même passion de la littérature ; pourtant chacun y cherche quelque chose de différent des autres.

Réduire la question à UN intérêt universel est une chose malaisée, mais je crois que comme pour tout art, la réponse peut se formuler ainsi : exprimer.

Alan, ne tomberais-tu pas dans le travers des mots utilisés ici ? L'intérêt, qu'il soit utilisé en politique ou qu'il reflète une dynamique 'capitaliste' de valeur et de rendement, est à mon avis un plan légèrement en dehors de la réalité de l'art qu'on peut appeler littérature... (et si je me trompe, tu m'en vois presque ravi... mais désabusé par rapport au discours environnant)

Cyr, tu as raison de spécifier que toi et les autres ont peut être des intérêts divergents...
Ceci dit je serais curieux de connaitre ton avis, puisque tu n'as pas répondu à ta propre question.

Enfin, ma vision : j'écris parce que j'aime ça, c'est un intérêt que je qualifierais bien de ludique si ce n'était qu'un jeu... mais c'est plus que ça !

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Re : L'intérêt de la littérature
« Réponse #8 le: 28 juillet 2017 à 20:42:27 »
Bien sûr, Dot Quote, nulle intention de faire croire à Cyr qu'elle comprendrait l'immensité de grandeur que représente la littérature en quelques mots. C'est bien la raison pour laquelle je précise l'orientation de ma réponse.

Moins encore la volonté de classifier la littérature comme une archive. On doit pouvoir échapper à un cadre statutaire pour savoir élever la conscience.

Je souhaitais cependant répondre à une question (souvent restée sans réponse) et permettre à quelqu'un d'extérieur à l'univers littéraire de se faire une idée de ce que représentent nos vies, nos activités.
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Re : L'intérêt de la littérature
« Réponse #9 le: 28 juillet 2017 à 20:47:52 »
Alan
heu...
bonne réponse...
no comment ^^

Ceci dit qu'on soit finaliste ou mécaniste, il y a bien au moins l'illusion d'un intérêt à la littérature.
Qui est effectivement flou d'une part, et d'autre part subjectif.
Mais.
On pourrait synthétiser une réponse globale satisfaisant tout le monde.
Ce que je ne suis pas sûr de savoir faire...

Cyr ta question me brouille le cerveau ^^
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Re : L'intérêt de la littérature
« Réponse #10 le: 28 juillet 2017 à 22:18:12 »
Rousseau est bien l'un des pères de la "gauche" et de ses valeurs individualistes et libérales.
Les dérives de l'art dit "moderne"( et l'histoire des arts depuis le XIXème  le montre) vont dans ce sens, le spectacle, le happening, la daube.

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Re : L'intérêt de la littérature
« Réponse #11 le: 24 novembre 2017 à 13:20:37 »
Parfois, je me demande si la première responsabilité d'une ou d'un auteur ne serait pas l'exploration...

Je veux dire, on a largement des comportements violents ou inquiétants qu'on a bien du mal à expliquer au quotidien. On a aussi des difficultés à créer des ponts entre les différentes cultures, les différentes croyances ou les codes des uns et des autres. L'auteur serait donc ici celui ou celle qui est originaire d'une identité commune, et qui part à la recherche de l'invisible, de l'inconnu, d'un ailleurs hors des connaissances.

C'est comme s'il pouvait exister un auteur chez les buveurs de café et un auteur chez les buveurs de thé, et que chacune ou chacun des deux auteurs se devait de franchir la frontière invisible entre les deux univers pour construire un dialogue commun.

Idem, comme entre les identités différentes, parfois contraires, l'auteur irait explorer l'autre, lui donner un sens nouveau, et peut-être en savoir plus sur la nature véritable de nos relations...
« Modifié: 24 novembre 2017 à 13:22:47 par Alan Tréard »
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