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Auteur Sujet: Le Laboratoire de la Phrase - 4 exercices  (Lu 5153 fois)

Hors ligne Alan Tréard

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Le Laboratoire de la Phrase - 4 exercices
« le: 18 avril 2016 à 14:56:32 »
Le Laboratoire de la Phrase


Bonjour !





Comment va votre inspiration ?

Alors, suite au post d'Aïsha sur la ponctuation, je me suis rendu compte qu'il y avait de grosses lacunes en matière de compréhension de la langue. C'est gênant, surtout sur un forum d'écriture. J'ai d'abord fait trois crises d'angoisse, une migraine affreuse, trois malaises, cinq hallucinations... bref ! Je me suis mis en tête d'ouvrir un sujet pour parler un peu de la phrase au cas où certains voudraient se remettre au niveau.

I Le point est porteur de sens.

Bien sûr, la langue étant très complexe, il peut m'arriver moi-même de faire une erreur dans ce que je dis ou dans ce que j'ai voulu dire ; n'hésitez pas à me corriger.

Parlons du point, cet ami de toujours dont les écrivains en herbe abusent ostensiblement.

Alors, Premier Exercice, nous allons retravailler ce paragraphe :

La ponctuation était vraiment importante. La ponctuation avait un rôle que l'on ne trouvait pas ailleurs. Elle pouvait transformer le sens d'une phrase d'une façon très importante. Ce sont les raisons pour lesquelles j'ai décidé de retravailler mes phrases. Je rêve de m'améliorer encore. Je ne veux pas qu'on me dise que ma ponctuation est mauvaise. Avec une meilleure ponctuation les gens aimeront beaucoup mon écriture. La ponctuation a le mérite d'être étudiée. Il est important d'être méticuleux.

Bon ! Ça commence mal : un paragraphe sans virgule avec rien d'autre pour donner du sens que des points, des points et encore des points... Croyez-moi, avec une telle ponctuation, vous n'êtes pas près d'être compris par vos lecteurs... Mais par où commencer ? Le mieux, dans un cas aussi catastrophique, est de revenir vers les fondamentaux. On ne peut pas employer un point sans transformer le sens de la phrase. Le point sert à distinguer une proposition d'une autre ; autrement dit, lorsqu'il y a un point, c'est qu'on va passer à autre chose. Lorsqu'il y a une continuité entre deux idées, on va utiliser une virgule, un point-virgule ou bien deux points. Ces trois signes de ponctuation servent à signifier une continuité entre les propositions qui montre qu'on ne pourrait pas les séparer sans en déranger le sens.

Attention : certains sauvages de la langue vous conseilleront « d'aérer les phrases » en remplaçant votre trop longue phrase à virgules par deux phrases séparées. Sortez votre plus grosse grimace, et renvoyez-les au pays des barbares !! Il ne faut jamais les écouter !

 :prout:

Pourquoi ? En quoi ont-ils toujours tort ? Tout simplement parce que la ponctuation permet d'expliquer ce que vous avez voulu dire. La ponctuation n'est pas un joli habillage insensé qu'on aère avec un petit coup de parfum ; au contraire, la ponctuation est solide, régulée et porteuse de sens. Si votre phrase est longue est pleine de virgules, c'est que, dans votre tête, la phrase était une seule et même chose. Dans un tel cas, vous devez employer les points-virgules pour distinguer les différentes propositions pour faciliter la lecture tout en préservant le lien entre les propositions.

Un point indique une rupture dans le sens, selon cette règle la fin d'une phrase montre qu'on ne pourra pas faire un lien direct avec la suivante. Le point-virgule, c'est similaire à une virgule, mais ça sert quand le nombre de virgules est trop important ou quand les phrases sont longues et que le sens se complexifie beaucoup (on utilise les points-virgules à la périphérie des différentes propositions). Revenons au paragraphe que nous voulons retravailler. Et commençons par enlever les points là où ils n'ont absolument pas lieu d'être :

La ponctuation était vraiment importante, la ponctuation avait un rôle que l'on ne trouvait pas ailleurs, elle pouvait transformer le sens d'une phrase d'une façon très importante, ce sont les raisons pour lesquelles j'ai décidé de retravailler mes phrases. Je rêve de m'améliorer encore, je ne veux pas qu'on me dise que ma ponctuation est mauvaise, avec une meilleure ponctuation les gens aimeront beaucoup mon écriture. La ponctuation a le mérite d'être étudiée, il est important d'être méticuleux.

Pour le moment, j'ai rétabli le lien entre les propositions en mettant des virgules, ce qui n'est pas incorrect (contrairement aux points que les sauvages de la langue vous conseilleront de mettre qui eux sont incorrects), mais on peut dire que mes phrases ne sont pas très fluides. Rien ne sert de s'affoler, remettre des points ne ferait que revenir en arrière, et le sens en serait à nouveau détourné. Se rendre compte que les phrases ne sont pas très fluides ne signifie pas qu'il faille remplacer les virgules par des points pour cacher ses lacunes ; les grands lecteurs sauront toujours identifier quelqu'un qui ne sait pas ponctuer correctement ses phrases, rien ne sert de vouloir se cacher.

Allons retravailler ces phrases, c'est l'objectif de notre leçon.

Dans ce nouveau paragraphe, j'ai lié les propositions qui faisaient sens entre elles par des virgules, je vais maintenant les retravailler afin d'affiner les phrases :

La ponctuation était vraiment importante, la ponctuation avait un rôle que l'on ne trouvait pas ailleurs, elle pouvait transformer le sens d'une phrase d'une façon très importante, ce sont les raisons pour lesquelles j'ai décidé de retravailler mes phrases.

Ici, les trois premières propositions étaient des arguments liés, et la quatrième proposition était une conclusion : c'est la raison pour laquelle il était utile de lier la phrase, de souligner la continuité en jeu. Supprimons d'abord les répétitions : le sujet est le même dans les trois premières propositions, le sujet est ici ─> La ponctuation. Étant le même sujet, et ayant précédemment enlevé la rupture entre ces trois propositions pour la remplacer par une virgule qui indique un lien, je peux aisément enlever les deux sujets suivants qui sont de toute façon les mêmes que le premier, soit :

La ponctuation était vraiment importante, avait un rôle que l'on ne trouvait pas ailleurs, pouvait transformer le sens d'une phrase d'une façon très importante, ce sont les raisons pour lesquelles j'ai décidé de retravailler mes phrases.

Ensuite, comme nous pouvons le voir clairement, les deux premières virgules sont suivies d'un verbe, la phrase a pris une certaine tournure, un lecteur va donc tout naturellement s'attendre à un verbe au cours de sa lecture après la troisième virgule... et il risque bien d'être déçu !

 :(

Ainsi, pour éviter une mauvaise accroche sur la quatrième proposition, nous allons employer le point-virgule qui dit : « attention, il y a une continuité dans la phrase, mais cette continuité ressort de la structure du début de phrase. » Vous comprenez ?

La ponctuation était vraiment importante, avait un rôle que l'on ne trouvait pas ailleurs, pouvait transformer le sens d'une phrase d'une façon très importante ; ce sont les raisons pour lesquelles j'ai décidé de retravailler mes phrases.

Allons, seconde phrase !

Je rêve de m'améliorer encore, je ne veux pas qu'on me dise que ma ponctuation est mauvaise, avec une meilleure ponctuation les gens aimeront beaucoup mon écriture.

Ici, c'est un peu plus confus, la ponctuation jouera donc un rôle très important. S'il fallait expliquer le lien entre ces trois propositions, dans ma tête c'est clair, mais à la lecture, ça l'est moins.

Je rêve de m'améliorer encore ; je ne veux pas qu'on me dise que ma ponctuation est mauvaise ; avec une meilleure ponctuation les gens aimeront beaucoup mon écriture.

Ah ! Non, là, le point-virgule n'apporte absolument rien au sens, ça ne sera pas la meilleure solution !

Je rêve de m'améliorer encore... je ne veux pas qu'on me dise que ma ponctuation est mauvaise... avec une meilleure ponctuation les gens aimeront beaucoup mon écriture.

Un désastre, je ne sais même plus ce que veut dire ma phrase ! C'est l’apocalypse. Bon, face à cet obstacle, je prends la décision de faire appel à des conjonctions de coordination qui me permettront de remettre un peu de sens dans la phrase !!

Je rêve de m'améliorer encore et je ne veux pas qu'on me dise que ma ponctuation est mauvaise or avec une meilleure ponctuation les gens aimeront beaucoup mon écriture.

Bon, c'est mieux, mais la phrase est devenue un peu complexe à lire. Je vais donc partir à la recherche de nouvelles virgules qui auront une utilité essentielle : porter les éléments essentiels de la phrase :

Je rêve de m'améliorer encore, et je ne veux pas qu'on me dise que ma ponctuation est mauvaise ! or, avec une meilleure ponctuation, les gens aimeront beaucoup mon écriture.

La première virgule après encore, elle me permet de préciser que la conjonction et ne se réfère pas à encore (on aurait pu imaginer ─>je rêve de m'améliorer encore et encore [...]) mais qu'elle se réfère au sujet ; soit : je rêve et je ne veux pas devient ─>Je rêve de m'améliorer encore, et je ne veux pas qu'on me dise que ma ponctuation est mauvaise [...]

Ensuite le point d'exclamation permet de montrer mon insistance, comme si c'était un « bon argument pour retravailler ma ponctuation. » En forçant sur le trait, j'invite à comprendre que ces propositions qui ressemblent à des petites idées volatiles sont, en fait, de vrais arguments à mes yeux. Et enfin, les deux dernières virgules viennent distinguer le complément avec une meilleure ponctuation pour montrer que c'est une incise, et qu'il aurait dû naturellement être placé en fin de phrase ─>les gens aimeront beaucoup mon écriture avec une meilleure ponctuation ; j'ai donc placé le complément avec une meilleure ponctuation avant le sujet-verbe pour indiquer qu'il avait une valeur essentielle dans la phrase, qu'on ne pourrait s'en séparer sans détourner le sens.

Pfiou ! C'est sacrément complexe.

Allez hop ! Presque fini :

La ponctuation a le mérite d'être étudiée, il est important d'être méticuleux.

Ici, la phrase semble correcte. Ça fait plaisir ! Nous pouvons donc aller chercher des éléments en plus pour renforcer encore ce que nous avons voulu dire.

En conclusion, la ponctuation a le mérite d'être étudiée, et j'ai toujours cru qu'il était important d'être méticuleux, sincèrement.

Ce qui donne :

La ponctuation était vraiment importante, avait un rôle que l'on ne trouvait pas ailleurs, pouvait transformer le sens d'une phrase d'une façon très importante ; ce sont les raisons pour lesquelles j'ai décidé de retravailler mes phrases. Je rêve de m'améliorer encore, et je ne veux pas qu'on me dise que ma ponctuation est mauvaise ! or, avec une meilleure ponctuation, les gens aimeront beaucoup mon écriture. En conclusion, la ponctuation a le mérite d'être étudiée, et j'ai toujours cru qu'il était important d'être méticuleux, sincèrement.

Trois phrases... ça a le mérite d'être plus précis et plus distingué.

8)
« Modifié: 19 juillet 2017 à 16:07:12 par Alan Tréard »
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Re : Le Laboratoire de la Phrase
« Réponse #1 le: 18 avril 2016 à 16:27:15 »
Merci d'avoir fait ce que je n'avais la force de faire.

J'aimerais toutefois apporter ma petite critique chiante mais importante que le journalisme n'utilise pas, mais que nous, écrivains talentueux, utilions : le tiret long (cadratin, soit : ) et le tiret court (demi-cadratin, soit : ).

Soyons brefs, clairs, concis :
  • nous utilisons le tiret long uniquement pour les dialogues. Il se dote d'une espace après, mais jamais avant ;
  • nous utilisons le tiret court uniquement pour remplacer les virgules. Il se dote d'une espace avant, et après (parfois !).

Trois exemple en 3 dialogues différents :
— Je mange des tomates.
— Je mange des tomates – que je déteste –, mais j'aime les poireaux.
— Je mange des tomates – que je déteste.

Les dialogues peuvent s'écrire avec ou sans guillemets/tirets, peu importe, chacun peut utiliser son style.

Les listes à puce, elles se pratiquent (normalement) ainsi :
  • sans majuscule ;
  • avec une espace après, puis un point-virgule ;
  • et ce, de manière systématique ;
  • jusqu'au point final.

Alors, suite au post de Aïsha sur la ponctuation

L'élision, parlons-en aussi ! Utilisons une apostrophe quand une voyelle se termine dans un mot et commence dans une autre.

De Aïsha. De = e = voyelle. Aïsha = a = voyelle.

Donc : suite au post d'Aïsha.

Merci !  :noange:
« Modifié: 18 avril 2016 à 16:48:44 par Aïsha »

Hors ligne Alan Tréard

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Re : Le Laboratoire de la Phrase
« Réponse #2 le: 18 avril 2016 à 17:09:50 »
Merci à toi, Aïsha, j'ai corrigé.

 :mafio:

Dis, connais-tu la manipulation à faire pour obtenir le demi-cadratin ? (alt+???)
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Re : Le Laboratoire de la Phrase
« Réponse #3 le: 18 avril 2016 à 17:15:52 »
Alt + 0150 = tiret demi-cadratin : –
Alt + 0151 = tiret cadratin : —

Ah, et aussi : ne confondez pas les tirets avec les traits d'union !

Hors ligne vinzWallbreaker

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Re : Le Laboratoire de la Phrase
« Réponse #4 le: 18 avril 2016 à 17:40:47 »
J'avoue ne pas me faire suer avec ça. Je met invariablement un tiret... Faut dire que c'est pas très pratique de faire ces manip' space pour obtenir un caractère...
Avec des Si on fait de la musique monotone...

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Re : Le Laboratoire de la Phrase
« Réponse #5 le: 18 avril 2016 à 17:56:49 »
Moi je ne mets pas les guillemets français sur le forum pour aller plus vite. Mais dans un roman, que ce soit les tirets ou les guillemets, c'est autre chose.

« La patience est la mère des vertus. » (Oui, j'ai copié-collé haha !)

Hors ligne vinzWallbreaker

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Re : Le Laboratoire de la Phrase
« Réponse #6 le: 18 avril 2016 à 18:00:14 »
Cela dit, il suffit de faire le premier après on fait copier/coller ou remplacer...
Je m'en occuperai à la fin...  ::)
Avec des Si on fait de la musique monotone...

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Re : Le Laboratoire de la Phrase
« Réponse #7 le: 18 avril 2016 à 18:03:59 »
C'est exactement ce que je fais sur Word, je copie-colle les tirets. Les guillemets français se mettent tout seuls, heureusement. :huhu:

Hors ligne Kerena

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Re : Re : Le Laboratoire de la Phrase
« Réponse #8 le: 18 avril 2016 à 18:17:45 »
C'est exactement ce que je fais sur Word, je copie-colle les tirets. Les guillemets français se mettent tout seuls, heureusement. :huhu:

Sinon, un membre du forum (je ne sais plus qui :-[) m'avait donné la technique d'utiliser la correction automatique pour enregistrer mon tiret semi-cadratin.

Exemple : vous rentrez, dans les paramètres de la correction automatique : -- pour que ça se corrige systématiquement en – (semi-cadratin)
ou alors, vous entrez --- pour que ça se change tout seul en — (cadratin)

C'est génial, c'est un gain de temps formidable o><o
Je crois qu'il y a dans le coeur des hommes une place créée pour l'émerveillement, une place endormie qui attend de s'épanouir ~ Les Aventuriers de la mer


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Re : Le Laboratoire de la Phrase
« Réponse #9 le: 18 avril 2016 à 18:53:05 »
Ah oui, il y a ça sur Word. Il y a tout dessus en fait, c'est une mine d'or, j'ai même configuré les marges et la présentation pour que mes récits soient comme des livres, c'est vraiment très pratique. Il faudrait que je trouve cette manière de faire ces raccourcis, mais en cherchant "raccourci Word remplacement" sur Google, ça doit se trouver.

Hors ligne Alan Tréard

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Re : Le Laboratoire de la Phrase
« Réponse #10 le: 18 avril 2016 à 19:28:26 »
Merci !
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Re : Le Laboratoire de la Phrase - 2nd exercice
« Réponse #11 le: 23 avril 2016 à 14:56:27 »
Alors,





Voici la suite.

J'ai pu repérer à plusieurs reprises des dialogues très complexes dans lesquels on arrivait rapidement à se perdre ; c'est notamment le cas lorsqu'il y a des questions qui sont posées par l'un des personnages, le fil de la narration prend rapidement une tournure aléatoire, ce qui peut être dérangeant. Continuons la leçon avec un dialogue, c'est important. Nous allons nous attacher cette fois-ci à comprendre l'utilisation du point d'interrogation pour une utilisation améliorée.

II Qu'attendre d'un point d'interrogation ?

Pour démarrer ce Deuxième Exercice, on va aller chercher dans ce qu'il y a de plus complexe à gérer en matière de dialogues : l'interrogatoire.

L'interrogatoire est d'abord une situation dans laquelle le lecteur va rapidement apprendre un grand nombre d'informations. C'est aussi typiquement le genre de dialogues dans lequel une question en amène rapidement une autre et oppose de nombreux obstacles.

Je vais essayer de multiplier les différentes valeurs de question et de réponse pour poser toutes les bonnes questions qu'un auteur doit se poser.

Imaginons que j'ai voulu écrire une scène d'interrogatoire, mais pas pour le cinéma ; autrement dit, il va falloir préciser qui parle et à quel moment tout en n'entravant pas le fil de la parole :

(attention, j'ai volontairement faussé les repères, le texte qui suit est volontairement mal écrit ; nous allons ensuite retravailler le dialogue ci-dessous et l'améliorer : )

L'inspecteur semblait vouloir en savoir plus sur son homme, que faisait un mystérieux inconnu sur la scène du crime une heure auparavant ?
« Asseyez-vous, vous avez été aperçu dans la rue Montgentil au carrefour du Potimarron un peu après 18h par un témoin qui se trouvait dans un magasin à côté de la scène du crime, qui êtes-vous ?
─ Vous essayez de me faire dire ce que je ne veux pas dire alors que ce serait dangereux pour moi car je suis innocent. »
L'inspecteur observa un instant son suspect, ses yeux étaient d'une couleur inhabituelle, le verre tranchait radicalement avec l'atmosphère bleuté de la pièce...
« Et que faisiez-vous ? demanda-t-il soudainement.
─ Votre question sera très facile à éviter, je me promenais alors, vous ne me croyez pas inspecteur ?
─ Très bien, vous avez l'air malin ; alors ? J'attends... Quel est votre nom ? demanda-t-il mystérieusement.
─ Je m'appelle Jean François... »
L'homme avait l'air de savoir ce qu'il faisait, ça ne faisait aucun doute. Ses yeux jetaient partout un regard intelligent et prêt à bondir sur la moindre erreur qu'il aurait pu faire... Allait-il céder aux dangers ?
« Allez-vous me dire ce que vous faisiez ?
─ J'ai toujours cru en l'innocence, me l'interdisez-vous ?
─ Écoutez, ajouta-t-il, être sur les lieux du crime n'est pas en soi une preuve suffisante pour vous faire inculper. Connaissiez-vous la victime ? »
L'homme regardait le mur comme pour se donner de l'assurance, il semblait ne pas être l'homme qu'il leur fallait.
« Que pensez-vous de moi ? demanda Jean François.
─ Vous vous promenez souvent, faites le tour du coin, vous auriez pu choisir la victime en fonction de ses habitudes, vous avez un revolver, vous avez un alibi ?
─ Ne me regardez pas comme ça, il avait continué. Avez-vous au moins des preuves ?
─ Nous avons des preuves, vous pouvez avouer, votre peine sera alors réduite. »
Il prit une longue respiration et ne voulait pas avoir l'air assuré.
« D'accord, je vais vous dire ce que je sais... »


Alors ! Ce dialogue est une catastrophe, nous avons du pain sur la planche...

 :'(

Il faut d'abord revenir à l'essentiel : quel est le but du dialogue ? quel est l'essentiel que nous allons transmettre au lecteur ? Vous devez toujours chercher ce qu'il y a de plus importants dans ce que vous avez voulu dire, les « jolis » effets de style ne doivent jamais entraver la continuité de ce que vous racontez, sous peine d'en déranger le sens. Je vais catégoriser les trois éléments essentiels que j'ai voulu apporter au lecteur et retravailler les phrases en fonction de ces éléments essentiels.
  • Jean François est un potentiel coupable.
  • L'inspecteur est obligé de faire pression sur le suspect pour obtenir les informations dont il a besoin.
  • Il manque encore des preuves pour faire inculper Jean François.

Ensuite, je vais revoir mon texte en distinguant ce qui est essentiel et ce qui ne l'est pas en mettant entre parenthèses les éléments secondaires :

L'inspecteur semblait vouloir en savoir plus sur son homme, que faisait un mystérieux inconnu sur la scène du crime une heure auparavant ?
« Asseyez-vous, vous avez été aperçu dans la rue Montgentil au carrefour du Potimarron un peu après 18h par un témoin qui se trouvait dans un magasin à côté de la scène du crime, qui êtes-vous ?
─ Vous essayez de me faire dire ce que je ne veux pas dire alors que ce serait dangereux pour moi car je suis innocent. »
(L'inspecteur observa un instant son suspect, ses yeux étaient d'une couleur inhabituelle, le verre tranchait radicalement avec l'atmosphère bleuté de la pièce...)
« Et que faisiez-vous ? demanda-t-il soudainement.
─ Votre question sera très facile à éviter, je me promenais alors, vous ne me croyez pas inspecteur ?
(Très bien, vous avez l'air malin ; alors ? J'attends... Quel est votre nom ? demanda-t-il mystérieusement.
─ Je m'appelle Jean François... »)

L'homme avait l'air de savoir ce qu'il faisait, ça ne faisait aucun doute. (Ses yeux jetaient partout un regard intelligent et prêt à bondir sur la moindre erreur qu'il aurait pu faire... Allait-il céder aux dangers ?
« Allez-vous me dire ce que vous faisiez ?
─ J'ai toujours cru en l'innocence, me l'interdisez-vous ?)

─ Écoutez, ajouta-t-il, être sur les lieux du crime n'est pas en soi une preuve suffisante pour vous faire inculper. Connaissiez-vous la victime ? »
(L'homme regardait le mur comme pour se donner de l'assurance, il semblait ne pas être l'homme qu'il leur fallait.
« Que pensez-vous de moi ? demanda Jean François.)

─ Vous vous promenez souvent, faites le tour du coin, vous auriez pu choisir la victime en fonction de ses habitudes, vous avez un revolver, vous avez un alibi ?
─ Ne me regardez pas comme ça, il avait continué. Avez-vous au moins des preuves ?
(Nous avons des preuves, vous pouvez avouer, votre peine sera alors réduite. »)
Il prit une longue respiration et ne voulait pas avoir l'air assuré.
« D'accord, je vais vous dire ce que je sais... »


Cette démarche me permet, dans un cas où je veux retravailler mon texte, de séparer ce qui a besoin d'être valorisé de ce qui a besoin d'être allégé ; c'est ce qui va accompagner la réécriture de chacune des phrases et donner de la force à cet interrogatoire.

Bon, les détails qui habillent l'interrogatoire ont été mis entre parenthèses et nous allons maintenant mettre en valeur les phrases qui contiennent des informations importantes afin d'améliorer la qualité du dialogue. Il faut redonner du sens à cette scène. Commençons !

L'inspecteur semblait vouloir en savoir plus sur son homme, que faisait un mystérieux inconnu sur la scène du crime une heure auparavant ?
« Asseyez-vous, vous avez été aperçu dans la rue Montgentil au carrefour du Potimarron un peu après 18h par un témoin qui se trouvait dans un magasin à côté de la scène du crime, qui êtes-vous ?
─ Vous essayez de me faire dire ce que je ne veux pas dire alors que ce serait dangereux pour moi car je suis innocent. »


Première phrase, très longue pour un seul point d'interrogation, nous allons donc essayer de mieux l'organiser. L'avantage avec une question presque mentale qui introduit les suivantes, c'est qu'elle oriente la lecture, mais ça doit être fait avec plus de simplicité. Ainsi, on pourrait s'imaginer que l'inspecteur a pensé ainsi : « que faisait ce suspect sur la scène du crime une heure auparavant ? » et on va mettre en valeur ce principe en utilisant les deux points qui évoquent ce lien entre la question et l'intention de l'inspecteur de comprendre :

L'inspecteur voulait en savoir plus sur le mystérieux inconnu : que faisait-il sur la scène du crime une heure auparavant ?

Ensuite, une heure auparavant ne renvoyant vers rien de très précis il ne faut pas hésiter à être méticuleux :

L'inspecteur voulait en savoir plus sur le mystérieux inconnu : que faisait-il sur la scène du crime une heure avant que celui-ci ne soit commis ?

Ensuite, la seconde phrase est pire, elle demande trop de concentration au lecteur alors que nous indiquons des informations essentielles, il est donc préférable de reprendre toute la structure. Puisque je vais séparer la phrase en deux, le lien va être cassé : il est essentiel de réintroduire le sens de la phrase puisqu'elle va être coupée en deux ; je rappelle ici que lorsqu'on coupe une phrase en deux on casse le lien entre deux propositions, il faut donc réintroduire ce dont on parle (ici, vous avez été aperçus sera renvoyé dans la deuxième phrase vers vous a vu pour réintroduire ce dont je parle) :

« Asseyez-vous ! Vous avez été aperçus dans la rue Montgentil, au carrefour du Potimarron ; il était près de 18h. Un témoin qui se trouvait dans un magasin à côté de la scène du crime vous a vu ; qui êtes vous ? »

Ensuite, il ne faut pas hésiter à mettre les horaires en toutes lettres. Mettre les nombres en toutes lettres, c'est plus élégant, et donc, dans un roman, il faut s'habituer à le faire. Le « qui êtes-vous » paraît également détaché du reste, il ne faut pas hésiter à l'inscrire dans la continuité du dialogue. Souligner le lien entre les informations les plus importantes, c'est permettre au lecteur de se faire une bonne idée de ce qu'il trouvera dans le récit :

« Asseyez-vous ! Vous avez été aperçus dans la rue Montgentil, au carrefour du Potimarron ; il était près de dix-huit heures. Un témoin qui se trouvait dans un magasin à côté de la scène du crime vous a vu ; c'est la raison pour laquelle je veux savoir qui vous êtes ! »


La réponse n'apparaît pas. Jean François dit : « Vous essayez de me faire dire ce que je ne veux pas dire alors que ce serait dangereux pour moi car je suis innocent, » alors que ça ne semble pas vraiment avoir de rapport avec ce que dit l'inspecteur précédemment. Ça arrive souvent qu'un suspect refuse de répondre à une question, mais il ne faut pas hésiter à le préciser pour marquer l'absence de réponse :

─ Allez savoir... répondit l'homme. Vous essayez de me faire dire ce que je ne veux pas dire alors que ce serait dangereux pour moi car je suis innocent. »


Ensuite, on a un problème, l'argumentaire est placé ici avant d'introduire le thème de la conversation, sans compter que cette affirmation est soulignée par la conjonction car, ce qui rallonge le sens et le complexifie. Bref ! On est perdu. N'hésitons pas à donner plus de repères au lecteur en soulignant de quoi Jean François parle. Inversons la phrase pour faciliter la compréhension :

─ Allez savoir... répondit l'homme. Je suis innocent ! Vous essayez de me faire dire ce que je ne veux pas dire alors que ce serait dangereux pour moi. »


Bon, nous avons nos première informations, passons directement à la suite en préférant ce qui est essentiel :

« Et que faisiez-vous ? demanda-t-il soudainement.
─ Votre question sera très facile à éviter, je me promenais alors, vous ne me croyez pas inspecteur ?


Il vaut mieux préciser qui pose les questions pour faciliter le dialogue. Ce qui compte, c'est de repréciser qui parle au moment où il va poser une question importante ; c'est pour s'assurer que les lecteurs ne se mélangent pas les pinceaux ! Et par la même occasion, la façon avec laquelle il pose les questions se doit d'être utile. Pensons toujours aux mots que nous employons :« soudainement » n'a de sens que quand quelque chose est à un endroit et change immédiatement de position ; alors que, dans un dialogue, ce n'est pas très précis ni très évocateur...

« Et que faisiez-vous ? demanda l'inspecteur, agacé.


Idem pour la phrase suivante, on attend une réponse : le personnage répond en fait à la question alors qu'il dit par la même occasion qu'il va éviter la question... Il est essentiel d'apporter toujours une réponse directement après la question, ou de souligner pourquoi il ne répondra pas ; sans quoi la question prend une tournure confuse et surprenante, or je ne veux pas surprendre. Ça n'a pas de sens ! Inversons la phrase, pour d'abord indiquer la réponse, puis transposons l'autre proposition à la fin. Il faut revenir vers quelque chose de plus simple dans la construction de la phrase. Je vais réfléchir à ce que j'ai voulu dire, et je vais lui donner une valeur différente qui donne un sens nouveau au dialogue :

─ Je me promenais, dit-il comme pour contourner la question. Vous ne me croyez pas inspecteur ?

D'abord il manque une virgule à « vous ne me croyez pas inspecteur » sinon la phrase signifie qu'il est inspecteur mais que l'autre ne le croit pas qu'il est inspecteur... Une virgule en moins, et on croit que la question n'est pas ce qu'elle est !! Et ensuite, la structure narrative du dialogue voulant que l'inspecteur soit celui qui pose les questions, il vaut mieux éviter de casser cette structure pour faciliter la compréhension du texte. Dans un dialogue, faites toujours une distinction entre le niveau de langage des différents personnages : il faut que l'un parle d'une certaine façon et pose les questions d'une certaine façon, et que l'autre parle d'une autre façon et qu'il pose peu de questions :

─ Je me promenais, dit-il comme pour contourner la question. Vous n'allez pas me croire, inspecteur.

Ensuite :

L'homme avait l'air de savoir ce qu'il faisait, ça ne faisait aucun doute.

Entre ce qui a l'air de savoir et ce qui ne fait aucun doute, il faut choisir...

L'homme savait ce qu'il faisait, ça ne faisait aucun doute.

Ensuite, la répétition de faisait peut gêner la lecture, il vaut mieux revoir la phrase. Quand on utilise deux fois le même verbe avec un sujet différent pour dire quelque chose de complètement différent, un lecteur peut se prendre les pieds dans le tapis ! >< Faites donc très attention à ne pas utiliser les mêmes verbes côte à côte lorsque vous parlez de choses différentes.

L'homme savait ce qu'il faisait, aucun doute là-dessus.

Puis :

─ Écoutez, ajouta-t-il, être sur les lieux du crime n'est pas en soi une preuve suffisante pour vous faire inculper. Connaissiez-vous la victime ? »

Puisque nous travaillons sur les phrases essentielles, il vaut mieux préciser qui parle afin d'appuyer les informations essentielles. L'avantage avec l'utilisation de l'impératif : « Écoutez ! » c'est qu'on prévient le lecteur que des informations importantes vont être révélées sur l'absence de preuves dans l'enquête. Ensuite, il ne faut pas hésiter à souligner le lien entre les différentes propositions afin de donner de la substance à l'histoire :

─ Écoutez, ajouta l'inspecteur, il est vrai qu'être sur les lieux du crime n'est pas en soi une preuve suffisante pour vous faire inculper, or c'est la raison de cet interrogatoire... Connaissiez-vous la victime ? »

Ensuite :

─ Vous vous promenez souvent, faites le tour du coin, vous auriez pu choisir la victime en fonction de ses habitudes, vous avez un revolver, vous avez un alibi ?
─ Ne me regardez pas comme ça, il avait continué. Avez-vous au moins des preuves ?


Alors, la première question, le genre d'erreur que font souvent les auteurs en herbe. Une question du type sujet-verbe-complément, sauf que le complément fait trois pages... avec de nouvelles propositions et des incises avant d'accéder enfin au point d'interrogation qui informe enfin le lecteur qu'il s'agit là d'une question. Lorsqu'on affirme quelque chose, on dit : « vous faites, » or lorsqu'on pose la question, on peut utiliser le même terme. Du coup le lecteur est obligé de lire toute la phrase (qui parfois est longue) avant de se rendre compte qu'il s'agit là d'une question... Dans la vie quotidienne, on fait ça tout le temps, dans un roman intriguant, on ne peut pas se le permettre. Ce que le lecteur est en train de lire change soudainement de sens ! Il vaut mieux donc : soit multiplier les points d'interrogation pour faciliter la compréhension, soit inverser le sujet-verbe pour identifier dès le début de la phrase qu'il s'agit d'une question :

─ Vous promenez-vous souvent, faites-vous le tour du coin ? Vous auriez pu choisir la victime en fonction de ses habitudes... Vous avez un revolver ? Vous avez un alibi ?

Ensuite le lien entre les questions doit couler de source ; ici, difficile de faire le lien entre le revolver et l'alibi, il vaut mieux casser la question pour ne pas fatiguer la lecture :

─ Vous promenez-vous souvent, faites-vous le tour du coin ? Vous auriez pu choisir la victime en fonction de ses habitudes... Je veux également savoir si vous avez un revolver et si vous avez un alibi.

Après ça, la réponse de Jean François paraît absurde... Il vaut donc mieux aller à fond vers cette absurdité pour montrer que Jean François est déstabilisé :

─ Ne me regardez pas comme ça, ne me regardez pas comme ça... répétait Jean François exagérément. Avez-vous au moins des preuves ?

Ensuite, la question de Jean François est cette fois-ci importante, elle doit donc être distinguée de la structure fondamentale du dialogue pour qu'un lecteur ne confonde pas les questions de l'un avec les questions de l'autre (c'est pour leur donner une manière différente de poser les questions, une autre façon de s'exprimer qui les sépare). Je vais employer une vieille ruse pour distinguer les questions de l'un avec les questions de l'autre : le fameux « est-ce que » !

─ Ne me regardez pas comme ça, ne me regardez pas comme ça... répétait-il exagérément. Est-ce que vous voulez me faire parler ou est-ce que vous avez au moins des preuves ?


Enfin :

Il prit une longue respiration et ne voulait pas avoir l'air assuré.
« D'accord, je vais vous dire ce que je sais... »


Le lien entre le fait de prendre une longue respiration et de ne pas vouloir avoir l'air assuré me semble confus, nous allons plutôt distinguer les deux propositions dans la phrase en réintroduisant le sujet. Quand on fait un lien entre deux propositions en les laissant dans la même phrase, soit ce lien est clair, soit il est confus ; dans le cas où le lien est flou, on réintroduit le sujet, pour mieux distinguer les deux propositions. Qui plus est, étant donné que ces informations me paraissent essentielles, je vais citer à nouveau le nom de Jean François pour marquer la phrase :

Jean François prit une longue respiration, il ne voulait pas avoir l'air assuré.


Voilà, voyons voir le résultat :

L'inspecteur voulait en savoir plus sur le mystérieux inconnu : que faisait-il sur la scène du crime une heure avant que celui-ci ne soit commis ?
« Asseyez-vous ! Vous avez été aperçus dans la rue Montgentil, au carrefour du Potimarron ; il était près de dix-huit heures. Un témoin qui se trouvait dans un magasin à côté de la scène du crime vous a vu ; c'est la raison pour laquelle je veux savoir qui vous êtes ! »
─ Allez savoir... répondit l'homme. Je suis innocent ! Vous essayez de me faire dire ce que je ne veux pas dire alors que ce serait dangereux pour moi. »
(L'inspecteur observa un instant son suspect, ses yeux étaient d'une couleur inhabituelle, le verre tranchait radicalement avec l'atmosphère bleuté de la pièce...)
« Et que faisiez-vous ? demanda l'inspecteur, agacé.
─ Je me promenais, dit-il comme pour contourner la question. Vous n'allez pas me croire, inspecteur.
(Très bien, vous avez l'air malin ; alors ? J'attends... Quel est votre nom ? demanda-t-il mystérieusement.
─ Je m'appelle Jean François... »)

L'homme savait ce qu'il faisait, aucun doute là-dessus. (Ses yeux jetaient partout un regard intelligent et prêt à bondir sur la moindre erreur qu'il aurait pu faire... Allait-il céder aux dangers ?
« Allez-vous me dire ce que vous faisiez ?
─ J'ai toujours cru en l'innocence, me l'interdisez-vous ?)

─ Écoutez, ajouta l'inspecteur, il est vrai qu'être sur les lieux du crime n'est pas en soi une preuve suffisante pour vous faire inculper, mais c'est la raison de cet interrogatoire... Connaissiez-vous la victime ? »
(L'homme regardait le mur comme pour se donner de l'assurance, il semblait ne pas être l'homme qu'il leur fallait.
« Que pensez-vous de moi ? demanda Jean François.)

─ Vous promenez-vous souvent, faites-vous le tour du coin ? Vous auriez pu choisir la victime en fonction de ses habitudes... Je veux également savoir si vous avez un revolver et si vous avez un alibi.
─ Ne me regardez pas comme ça, ne me regardez pas comme ça... répétait Jean François exagérément. Est-ce que vous voulez me faire parler ou est-ce que vous avez au moins des preuves ?
(Nous avons des preuves, vous pouvez avouer, votre peine sera alors réduite. »)
Jean François prit une longue respiration, il ne voulait pas avoir l'air assuré.
« D'accord, je vais vous dire ce que je sais... »


Pour finir, nous allons retravailler toutes les phrases entre parenthèse selon une logique structurée, ce qui permettra d'éclaircir les éléments essentiels du dialogue. Quand on a défini l'essentiel du dialogue, les phrases moins importantes doivent être structurées de manière simple, pour renforcer l'essentiel du texte. Puisque nous nous trouvons face à un interrogatoire et qu'il y a beaucoup d'éléments à comprendre, nous allons transformer chacun des éléments secondaires pour renforcer le trait sur « ce que nous ne savons pas. » Définir une ligne de réécriture pendant l'amélioration d'un texte, c'est s'assurer la victoire d'être compris et lu dans les meilleures conditions. Ainsi, parler de « ce que nous ne savons pas » permet de faire un équilibre et de mettre en valeur « ce que nous savons déjà. » C'est tout le sens de ma démarche au moment où j'ai voulu raconter une scène d'interrogatoire.

L'inspecteur voulait en savoir plus sur le mystérieux inconnu : que faisait-il sur la scène du crime une heure avant que celui-ci ne soit commis ?
« Asseyez-vous ! Vous avez été aperçus dans la rue Montgentil, au carrefour du Potimarron ; il était près de dix-huit heures. Un témoin qui se trouvait dans un magasin à côté de la scène du crime vous a vu ; c'est la raison pour laquelle je veux savoir qui vous êtes ! »
─ Allez savoir... répondit l'homme. Je suis innocent ! Vous essayez de me faire dire ce que je ne veux pas dire alors que ce serait dangereux pour moi. »
(L'inspecteur observa un instant son suspect, ses yeux étaient d'une couleur inhabituelle, le verre tranchait radicalement avec l'atmosphère bleuté de la pièce...)

devient :
L'inspecteur n'avait aucun moyen d'identifier son suspect : seuls ses yeux d'une couleur inhabituelle auraient pu permettre à quelqu'un de le reconnaître, des yeux d'un vert suspect...
[Attention : la faute d'orthographe sur verre aurait égaré un lecteur, qui eût pu croire qu'il tenait un verre dans sa main ou autre... Certaines fautes d'orthographe sont catastrophiques pour le sens du texte !]
« Et que faisiez-vous ? demanda l'inspecteur, agacé.
─ Je me promenais, dit-il comme pour contourner la question. Vous n'allez pas me croire, inspecteur.
(Très bien, vous avez l'air malin ; alors ? J'attends... Quel est votre nom ? demanda-t-il mystérieusement.
─ Je m'appelle Jean François... »)

devient :
─ Faut-il vous croire sur parole ? Donnez-moi au moins votre nom.
─ Vous n'avez qu'à m'appeler Jean François !

[J'ajoute du mystère là où il n'y en a pas vraiment, comme pour sous-entendre que l'homme en question donnerait une fausse identité...]
L'homme savait ce qu'il faisait, aucun doute là-dessus. (Ses yeux jetaient partout un regard intelligent et prêt à bondir sur la moindre erreur qu'il aurait pu faire... Allait-il céder aux dangers ?
« Allez-vous me dire ce que vous faisiez ?
─ J'ai toujours cru en l'innocence, me l'interdisez-vous ?)

devient :
Le suspect avait un regard intelligent, à la recherche de la moindre erreur... Prenait-il trop de risques ?
« Qu'attendez-vous pour me dire ce que vous faisiez là-bas ?
─ Et si j'étais innocent ? Vous y avez pensé, à ça ?

[Je profite de l'aspect secondaire de ces détails pour ajouter du mystère sur tout ce que nous ne savons pas ; plus les phrases relèvent de nouvelles questions, plus le suspens grandit.]
─ Écoutez, ajouta l'inspecteur, il est vrai qu'être sur les lieux du crime n'est pas en soi une preuve suffisante pour vous faire inculper, mais c'est la raison de cet interrogatoire... Connaissiez-vous la victime ? »
(L'homme regardait le mur comme pour se donner de l'assurance, il semblait ne pas être l'homme qu'il leur fallait.
« Que pensez-vous de moi ? demanda Jean François.)

devient :
Au lieu de répondre, l'homme détournait le regard ; se pouvait-il qu'il soit innocent ?
« Que faut-il... que je vous dise !? bégaya le suspect.

[Quel mystère !]
─ Vous promenez-vous souvent, faites-vous le tour du coin ? Vous auriez pu choisir la victime en fonction de ses habitudes... Je veux également savoir si vous avez un revolver et si vous avez un alibi.
─ Ne me regardez pas comme ça, ne me regardez pas comme ça... répétait-il exagérément. Est-ce que vous voulez me faire parler ou est-ce que vous avez au moins des preuves ?
─ (Nous avons des preuves, vous pouvez avouer, votre peine sera alors réduite. »)

devient :
─ Si nous avons des preuves ? … Eh bien... Peut-être que si vous avouez... nous pourrons nous entendre...
[On ne sait vraiment presque rien, c'est mystérieux !]
Jean François prit une longue respiration, il ne voulait pas avoir l'air assuré.
« D'accord, je vais vous dire ce que je sais... »



Alors, voyons voir le résultat :


L'inspecteur voulait en savoir plus sur le mystérieux inconnu : que faisait-il sur la scène du crime une heure avant que celui-ci ne soit commis ?
« Asseyez-vous ! Vous avez été aperçus dans la rue Montgentil, au carrefour du Potimarron ; il était près de dix-huit heures. Un témoin qui se trouvait dans un magasin à côté de la scène du crime vous a vu ; c'est la raison pour laquelle je veux savoir qui vous êtes !
─ Allez savoir... répondit l'homme. Je suis innocent ! Vous essayez de me faire dire ce que je ne veux pas dire alors que ce serait dangereux pour moi. »
L'inspecteur n'avait aucun moyen d'identifier son suspect : seuls ses yeux d'une couleur inhabituelle auraient pu permettre à quelqu'un de le reconnaître, des yeux d'un vert suspect...
« Et que faisiez-vous ? demanda l'inspecteur, agacé.
─ Je me promenais, dit-il comme pour contourner la question. Vous n'allez pas me croire, inspecteur.
─ Faut-il vous croire sur parole ? Donnez-moi au moins votre nom.
─ Vous n'avez qu'à m'appeler Jean François ! »
L'homme savait ce qu'il faisait, aucun doute là-dessus. Le suspect avait un regard intelligent, à la recherche de la moindre erreur... Prenait-il trop de risques ?
« Qu'attendez-vous pour me dire ce que vous faisiez là-bas ?
─ Et si j'étais innocent ? Vous y avez pensé, à ça ?
─ Écoutez, ajouta l'inspecteur, il est vrai qu'être sur les lieux du crime n'est pas en soi une preuve suffisante pour vous faire inculper, mais c'est la raison de cet interrogatoire... Connaissiez-vous la victime ? »
Au lieu de répondre, l'homme détournait le regard ; se pouvait-il qu'il soit innocent ?
« Que faut-il... que je vous dise !? bégaya le suspect.
─ Vous promenez-vous souvent, faites-vous le tour du coin ? Vous auriez pu choisir la victime en fonction de ses habitudes... Je veux également savoir si vous avez un revolver et si vous avez un alibi.
─ Ne me regardez pas comme ça, ne me regardez pas comme ça... répétait Jean François exagérément. Est-ce que vous voulez me faire parler ou est-ce que vous avez au moins des preuves ?
─ Si nous avons des preuves ? … Eh bien... Peut-être que si vous avouez... nous pourrons nous entendre...
Jean François prit une longue respiration, il ne voulait pas avoir l'air assuré.
« D'accord, je vais vous dire ce que je sais... »


C'est déjà plus précis ; et surtout, les éléments secondaires ont été beaucoup mieux relayés au second plan (notamment les descriptifs de la couleur des yeux de Jean François...), ce qui permet de mieux comprendre les éléments essentiels du texte (qui joueront un grand rôle dans la suite de l'histoire.)

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« Modifié: 19 juillet 2017 à 15:46:04 par Alan Tréard »
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Re : Le Laboratoire de la Phrase - 2nd exercice
« Réponse #12 le: 24 avril 2016 à 13:41:16 »
J'ai tout lu (une partie hier, le reste ce matin), et c'est très bien écrit. J'espère que les membres vont porter attention à ce sujet de discussion qui est vraiment nécessaire, une vraie boite à outils pour ceux qui ont des difficultés à élaborer leur récit. Merci Alan Tréard pour ce que tu apportes, peu de gens le font, et je trouve ça bien que tu le fasses de ta propre plume.

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Re : Le Laboratoire de la Phrase - 2nd exercice
« Réponse #13 le: 24 avril 2016 à 15:13:36 »
Bonjour Aisha, je me suis dit que c'était une bonne chose de proposer de petits exercices pour ceux qui voudraient retravailler leur énonciation, dont les objectifs sont multiples, intégration professionnelle, expression personnelle dans la vie quotidienne, vie citoyenne, relations entre les organismes, voire théorie littéraire. Ce qui compte, c'est que n'importe qui puisse s'emparer de ces petits exercices pour trouver de nouvelles pistes pour s'améliorer, s'intégrer et s'épanouir.

C'est toute la force de l'écriture et des échanges entre nous.

Il n'est pas du tout dans mon intention de forcer les membres du forum à prendre connaissance de ce Laboratoire de la Phrase, car la plupart des activités sur le Monde de l'Écriture sont en libre accès et se font selon le bénévolat.

Du coup, l'essentiel, c'est que chacun puisse bénéficier d'un petit endroit de liberté dans lequel il puisse s'amuser de manière ludique ou travailler de façon un peu plus sérieuse, sans pour autant déranger les autres. C'est ce qui permet de découvrir toujours de nouvelles choses toujours plus inattendues !

Voilà, il y a un équilibre à trouver, or on fait ce qu'on peut pour que chacun le trouve. On a tous besoin les uns des autres, c'est la diversité.

Je suis en train de préparer un nouvel exercice.
Mon carnet de bord avec un projet de fantasy.

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Re : Le Laboratoire de la Phrase - 2nd exercice
« Réponse #14 le: 24 avril 2016 à 16:59:10 »
Oui, c'était en partie pour ça que j'étais venue sur ce forum, pour en apprendre davantage sur les bonnes pratiques à employer au moyen de tutoriaux/dictaticiels.

Il est bien sûr dommage que beaucoup ne voudront pas prendre connaissance des bons conseils et préféreront n'en faire qu'à leur tête, mais je pense que quand une main est tendue, il faut la saisir. On fait tous des erreurs, moi la première, et il faut accepter l'aide qu'une personne expérimentée peut nous apporter, ça ne coûte rien.

J'ai mis ton sujet dans ma signature pour que ce que tu aies écrit puisse avoir plus d'impact dans la communauté.

J'ai hâte de voir la suite. ;)

 


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