La Tirade d'Edmond Rouston
Quoi, petit ? Ah mais, non ! Quel médiocre épithète !
Alors que le latin permet des mots d’esthète.
Un moqueur vertement doit voir rouge, parbleu :
Agressif : « Par mon paf, si j’avais ce cheveu,
Pour repousser plus dru, moi j’oserais la tonte ! »
Amical : « Mais mon cher, qui demande à la honte
De se gonfler d’orgueil sous le pagne flapi ? »
Descriptif : « C’est un clou !... c’est un brin !... C’est un pli !...
Que dis-je, c’est un pli ?... C’est point d’une virgule ! »
Curieux : « De quoi sert cette chair minuscule ?
D’étalon pour lombric, de grain pour charançon ? »
Gracieux : « Aimez-vous tant et tant le poisson,
Que pour bien l’appâter autour de vos spartiates,
Vous vous fîtes greffer ce bloche entre les pattes ? »
Truculent : « Lorsque la purée vous balancez,
La vapeur de l’effort vous sort-elle du nez
Sans qu’une vulve crie - c’est pour quand cette bruine ? - »
Prévenant : « Gardez-vous, paré de cette ruine,
De conquérir la Gaule, on vous croirait jaloux ! »
Tendre : « Eclipse de bout, carence de bijoux,
On balance entre l’ange et le plat d’une pelle ! »
Pédant : « L’unique outil, monsieur, qu’Ovide appelle
Annus Horribilis Bonus Micropenis
Fut l’honneur d’un pygmée amoindri du pubis ! »
Cavalier : « Avec ses élégants doigts de fille,
Se peut-il l’enfiler dans le chas d’une aiguille ? »
Emphatique : « O Gracile ! O Robinet menu !
Pour t’honorer entier, suffit l’orée du cul ! »
Dramatique : « De son vivant, il fut fossile ! »
Admiratif : « Comme une griffe : rétractile ! »
Lyrique : « Est-ce un croquis raté de Cupidon ? »
Naïf : « Ce pâle anchois est-il fils de triton ? ”
Respectueux : « N’ayez crainte du ridicule,
Le monde en son berceau ne fut que particule ! »
Campagnard : « Hé crénom ! C’est-y un zob ? Nanain !
C’est nibergue, peau de bite et balai de crin ! »
Militaire : « À l’assaut, sous-dard, et en colonne ! »
Pratique : « Vous pouvez, ma foi, mieux que personne,
Vous mouiller le persil sans y mettre la main ! »
Enfin, parodiant Priape en bon romain :
“Voilà ce poireau mou qui du cul de son maître
A détruit l’harmonie ! Son gland rougit, le traître !”
Foin de dédain ! Voilà, ce que tu m'aurais dit
Si entre tes deux seins, tu avais de l'esprit.
Mais d'esprit, mais de cœur, lamentable godiche,
Tu n'en as ni le tiers ni le quart d'un pois-chiche.
Pour clore cette tirade, apprends que ce discours
N'était qu'un pied de nez enrhumé par l'amour,
Pour louer le transi et le triste invalide,
Dont le bas-ventre est plein, est si plein d'un grand vide.
Et que j'encenserai contre vents et marées
Ces humbles de biroute éconduits et frustrés
Qui vont au paradis en baisant leur linceul,
Sans monter très très haut, peut-être, mais tout seul !