[Zacharielle]

c'est parti 



édition 2014
Au MdE, nous avons décidé d'ouvrir un fil libre où tout le monde est invité à partager autour de la littérature, en 451 messages.
A part le flood, tout est permis, que ce soit sous forme de texte, jeu, photo ou vidéo. Soyez imaginatifs...
ET QUE CA SWINGUE, bordel !

Le #RaysDay est une fête de la littérature et de l'écriture qui a lieu de 22 août, jour de naissance de Ray Bradbury. Il s'agit de la première édition de cet événement.

[Kerena]

J'ai l'honneur et le plaisir d'ouvrir le sujet. 

A ce titre, je vous offre deux phrases du Grand Stephen King (amen), qui illustrent très bien le fait d'écrire :

Une image, d'abord :

Désolé, vous n'êtes pas autorisé à afficher le contenu du spoiler.

Et un passage du préface de Salem :

"[...]Certes, l'écrivain peut imposer sa volonté - mais c'est la dernière chose à faire ! Asservir une fiction au contrôle de l'auteur, c'est de la construction narrative. Mais si vous attachez votre ceinture et que vous laissez l'intrigue prendre les rênes, alors, et seulement alors, vous racontez une histoire. Et raconter une histoire est un processus aussi naturel que de respirer ; la construction narrative n'est, par analogie, ni plus ni moins qu'un poumon artificiel."

[Zacharielle]

J'avais envie de partager avec vous cette lettre de Saint-Ex., écrite la veille de sa disparition.
Elle m'a beaucoup touchée et j'espère qu'elle saura résonner quelque part en vous...

***

30 juillet 1944

Je viens de faire quelques vols sur P. 38. C’est une belle machine. J’aurais été heureux de disposer de ce cadeau-là pour mes vingt ans. Je constate avec mélancolie qu’aujourd’hui, à quarante trois ans, après quelques six mille cinq cents heures de vol sous tous les ciels du monde, je ne puis plus trouver grand plaisir à ce jeu-là. Ce n’est plus qu’un instrument de déplacement - ici de guerre. Si je me soumets à la vitesse et à l’altitude à mon âge patriarcal pour ce métier, c’est bien plus pour ne rien refuser des emmerdements de ma génération que dans l’espoir de retrouver les satisfactions d’autrefois.

Ceci est peut-être mélancolique, mais peut-être bien ne l’est-ce pas. C’est sans doute quand j’avais vingt ans que je me trompais. En Octobre 1940, de retour d’Afrique du Nord où le groupe 2 - 33 avait émigré, ma voiture étant remisée exsangue dans quelque garage poussiéreux, j’ai découvert la carriole et le cheval. Par elle l’herbe des chemins. Les moutons et les oliviers. Ces oliviers avaient un autre rôle que celui de battre la mesure derrière les vitres à 130 kms à l’heure. Ils se montraient dans leur rythme vrai qui est de lentement fabriquer des olives. Les moutons n’avaient pas pour fin exclusive de faire tomber la moyenne. Ils redevenaient vivants. Ils faisaient de vraies crottes et fabriquaient de la vraie laine. Et l’herbe aussi avait un sens puisqu’ils la broutaient.

Et je me suis senti revivre dans ce seul coin du monde où la poussière soit parfumée (je suis injuste, elle l’est en Grèce aussi comme en Provence). Et il m’a semblé que, toute ma vie, j’avais été un imbécile...

Tout cela pour vous expliquer que cette existence grégaire au coeur d’une base américaine, ces repas expédiés debout en dix minutes, ce va-et-vient entre les monoplaces de 2600 chevaux dans une bâtisse abstraite où nous sommes entassés à trois par chambre, ce terrible désert humain, en un mot, n’a rien qui me caresse le coeur. Ça aussi, comme les missions sans profit ou espoir de retour de Juin 1940, c’est une maladie à passer. Je suis « malade » pour un temps inconnu. Mais je ne me reconnais pas le droit de ne pas subir cette maladie. Voilà tout. Aujourd’hui, je suis profondément triste. Je suis triste pour ma génération qui est vide de toute substance humaine. Qui n’ayant connu que les bars, les mathématiques et les Bugatti comme forme de vie spirituelle, se trouve aujourd’hui plongé dans une action strictement grégaire qui n’a plus aucune couleur.

On ne sait pas le remarquer. Prenez le phénomène militaire d’il y a cent ans. Considérez combien il intégrait d’efforts pour qu’il fut répondu à la vie spirituelle, poétique ou simplement humaine de l’homme. Aujourd’hui nous sommes plus desséchés que des briques, nous sourions de ces niaiseries. Les costumes, les drapeaux, les chants, la musique, les victoires (il n’est pas de victoire aujourd’hui, il n’est que des phénomènes de digestion lente ou rapide) tout lyrisme sonne ridicule et les hommes refusent d’être réveillés à une vie spirituelle quelconque. Ils font honnêtement une sorte de travail à la chaîne. Comme dit la jeunesse américaine, « nous acceptons honnêtement ce job ingrat » et la propagande, dans le monde entier, se bat les flancs avec désespoir.

De la tragédie grecque, l’humanité, dans sa décadence, est tombée jusqu’au théâtre de Mr Louis Verneuil (on ne peut guère aller plus loin). Siècle de publicité, du système Bedeau, des régimes totalitaires et des armées sans clairons ni drapeaux, ni messes pour les morts. Je hais mon époque de toutes mes forces. L’homme y meurt de soif.

[...]

Suite et fin sur le site source

[Miromensil]

Je me demande s'il aurait été moins mélancolique à notre époque. C'est beau en tout cas 

[Baptiste]

C'est vrai que c'est une belle lettre. Mais, je suis franchement pas sur qu'il aurait été moins mélancolique de nos jours...

Petites citations que j'aime bien :

- Le talent est une question de quantité. Le talent, ce n'est pas d'écrire une page : c'est d'en écrire 300. Il n'est pas de roman qu'une intelligence ordinaire ne puisse concevoir, pas de phrase si belle qu'elle soit qu'un débutant ne puisse construire. Reste la plume à soulever, l'action de régler son papier, de patiemment l'emplir. Les forts n'hésitent pas. Ils s'attablent, ils sueront. Ils iront au bout. Ils épuiseront l'encre, ils useront le papier. Cela seul les différencie, les hommes de talent, des lâches qui ne commenceront jamais. En littérature, il n'y a que des bœufs. Les génies sont les plus gros, ceux qui peinent dix-huit heures par jour d'une manière infatigable. La gloire est un effort constant.
Jules Renard, Journal

- Ecrire, c'est aussi ne pas parler. C'est se taire. C'est hurler sans bruit.
Marguerite Duras

- On récompense des écrivains parfois pour leur œuvre. Pourquoi n'en punit-on jamais ?
Jules Romain

- Le verbe lire ne supporte pas l'impératif. Aversion qu'il partage avec quelques autres : le verbe « aimer »… le verbe « rêver »…
On peut toujours essayer, bien sûr. Allez-y : « Aime-moi ! » « Rêve ! » « Lis ! » « Lis ! Mais lis donc, bon sang, je t'ordonne de lire ! »
-Monte dans ta chambre et lis !
Résultat?
Néant.
Daniel Pennac, Comme un roman

- Le temps de lire est toujours du temps volé. (Tout comme le temps d'écrire, d'ailleurs, ou le temps d'aimer.)
Volé à quoi?
Disons, au devoir de vivre.
C'est sans doute la raison pour laquelle le métro - symbole rassis dudit devoir - se trouve être la plus grande bibliothèque du monde.
Le temps de lire, comme le temps d'aimer, dilate le temps de vivre.
Si l'on devait envisager l'amour du point de vue de notre emploi du temps, qui s'y risquerait? Qui a le temps d'être amoureux? A-t-on jamais vu, pourtant, un amoureux ne pas prendre le temps d'aimer?
je n'ai jamais eu le temps de lire, mais rien, jamais, n'a pu m'empêcher de finir un roman que j'aimais.
Daniel Pennac, Comme un roman



et une particulièrement adapté aujourd'hui

- Quand je pense à tous les livres qu'il me reste à lire, j'ai la certitude d'être encore heureux.
Jules Renard

[Loïc]

Pour cette première intervention sur le topic, ce sera seulement les chiffres de la rentrée littéraire (article des Décodeurs/Le Monde)

En résumé, 607 romans qu'il faudrait en moyenne 40 ans pour lire.
Rien qu'avec cette année, je serai tranquille pour un bout de temps !

[Zacharielle]

Impressionnant !

question à 0 point : d'où est tiré ce nuage de mots ?



réponse : de wordle.net ahahah
bon en vrai de Cyrano, bien sûr

[Anlor]

Pour les fan de tumblr, des lol cats mais sans les chats.

[Loïc]

Et c'est parti pour un cadavre exquis ! Parce que. Le principe pour celleux qui ne connaissent pas : je commence une histoire, chacun·e continue à son tour, en une ou deux phrases, en ne lisant que la participation précédente. (Et là je sens que je ne suis pas clair).

Allez, le début (que je mets en beige du coup) :
Il était une fois un chat au pouvoir et aux projets maléfiques.

[Anlor]

Son but ultime : devenir Maitre du monde ! (et avoir du rab de croquettes).

[Baptiste]

@Zach : J'ai trouvé avec le "préoccupâtes"... 

Cadavre exquis :

Il se résolut un jour, après de long mois de procrastination, à le mettre son plan en application.

[Miromensil]

Tout d'abord, il lui fallait des chips saveur poulpe. Ensuite...

[Elk]

@Zach : J'ai trouvé avec le "préoccupâtes"... 

Et le nez, qui est en bonne position !

La suite du cadavre :
Une bonne bière à l'oseille, et une serviette à carreaux. Rouges, les carreaux.

[Ambrena]

Cadavre Exquis :
Tous ces préparatifs étaient nécessaires à la réalisation de son Plan - avec un "P" majuscule, évidemment. C'était quelque chose d'important quand même.


Et des citations de G.R.R. Martin, puis de Robin Hobb, toutes récentes (LondonCON 2014) :

“I never finished any of my early stories. They were all beginnings, an endless number of beginnings.” – George R.R. Martin

“Reading. That was the sport I was good at.” – George R.R. Martin

“It’s different for every writer. It’s not a career for anyone who needs security. It’s a career for gamblers. It’s a career of ups and downs.” – George R.R. Martin

“I could have written a story about a well-adjusted family. Ned Stark comes down to King’s Landing and takes over and solves all their problems. Would that have been as exciting?” – George R.R. Martin

“I will sit there and say, don’t do that, don’t do that, you’re going to make this story three chapters longer, and of course he [Fitz] doesn’t listen.” – Robin Hobb


La dernière me fait beaucoup rire ! 

Désolé, vous n'êtes pas autorisé à afficher le contenu du spoiler.

[Kerena]

Suite cadavre :

Tellement important qu'il n'allait quand même pas oublier de prévenir sa voisine ! Eh, quoi ? Ce n''est pas parce qu'il partait que son chat devait mourir de faim !